Crossing Maps, cartographies transverses

Cette cartographie alternative se situe à la croisée des sciences humaines et de l’art. Elle est issue d’un atelier de cartographie expérimental et participatif, qui a engagé des voyageurs, des artistes et des chercheurs. La cartographie est abordée comme une technique créative de relevés d’expériences. Les cartes produites avec et par les voyageurs évoquent des souvenirs de parcours et d’épopées migratoires.

Débuté en 2013 à Grenoble, en France, ce projet a réuni deux chercheuses en géographie, trois artistes, et douze habitant·e·s grenoblois·e·s, en situation présente ou passée de demande d’asile. Alors que les administrations exigent des récits de vie « vérifiables » pour délivrer ou non le droit d’asile, le projet de recherche-création Cartographies traverses/Crossing Maps ne répond à aucune injonction de vérité, ni de référentialité.

Depuis le champ de l’art et depuis le champ de la science, nous avons travaillé à mettre en crise la notion de « vérité » narrative, utilisée par les administrations pour juger les récits migratoires des personnes demandant l’asile, en co-produisant des cartes d’expériences migratoires, ni vraies, ni fausses, autant référentielles qu’imaginaires. Nous avons donc invité des personnes en situation de demande d’asile à travailler à des formes d’expression, qui tentent de ne pas reconduire la violence générée par les interactions avec les administrations. Dans les dispositifs de mise en relation que nous avons proposés, nous n’avons posé aucune question. Plutôt que de proposer de « raconter leur histoire », nous avons invité les participant∙e∙s à dessiner des cartes à main levée, sur papier et sur tissu, à partir des thèmes du déplacement, du voyage, de la vie à Grenoble. Point de fond de carte référencé, ni vrai, ni faux. Principe d’Équivalence : bien fait = mal fait = pas fait (Filliou, 1968). Ce travail pose également les enjeux d’une co-production élaborée entre des personnes aux statuts très différents et inégaux (« artiste », « chercheuse », « demandeur∙se d’asile ») : nous relevons des asymétries, des impensés, des complémentarités, et des tentatives de subversion.

Pour plus d’éléments sur ce projet voir l’article de Mekdjian Sarah et Moreau Marie, « Redessiner l’expérience : Art, sciences et conditions migratoires », antiAtlas Journal, 01 | 2016, En ligne, publié le 13 avril 2016.