Nicolas Lambert – The migratory red mound

Nicolas Lambert
The migratory red mound
Cartographies, 2015
Voir le projet

En 25 ans, plus de 35 000 migrants ont perdu la vie en essayant d’atteindre l’Europe. Les cartes 1 à 4 racontent l’histoire de la géographie des morts et impliquent la responsabilité de l’Europe dans ces drames. De 1995 à 1999, le sud de l’Espagne apparait comme le point d’entrée favori des migrants dans l’Union Européenne. Progressivement sécurisée, les flux d’immigrations ont déviés vers le Sud en direction des îles Canaries et du Sénégal. Afin d’endiguer ces mouvements humains en direction de l’Europe, Frontex a mis au point en 2006 des opérations de contrôle loin des frontières européennes. Depuis 2010 avec les instabilités politiques grandissantes suite au printemps Arabe, à la guerre en Libye et en Syrie la majorité des drames sont recentrés sur la méditerranée orientale. Finalement, dès que l’Europe bouge ou renforce ces contrôles frontaliers, le voyage vers l’Europe devient de plus en plus dangereux pour les migrants.

La butte rouge migratoire (carte 5) propose une vision globale et métaphorique de cette tragédie. Cette carte ne fait pas apparaître la frontière européenne sous la forme d’une ligne, mais comme un champ de bataille. Un nouveau territoire prend forme, la hauteur de la butte illustre l’échelle de l’hécatombe. Avant de devenir une carte, la butte rouge est une chanson écrite par Gaston Montéhus (1872-1952). Cette chanson contre la guerre fait référence à la butte Bapaume qui a connu l’une des batailles les plus sanglantes de la première guerre mondiale. Ce chant révolutionnaire fait aussi référence aux évènements de la commune de Paris en 1871. Ainsi, cette butte rouge migratoire s’ancre dans une longue histoire du pacifisme : le refus de la première guerre mondiale et le rejet de la guerre invisible contre les migrants par l’Union européenne aujourd’hui.

Nicolas Lambert est cartographe au sein du réseau interdisciplinaire pour l’aménagement du territoire européen (CNRS). Impliqué dans le programme de recherche européen ESPON, ses travaux portent principalement sur la représentation graphique de l’information spatiale, activité dans laquelle il développe une dimension critique et radicale. Membre du réseau Migreurop et du comité français de cartographie, il a notamment participé à la réalisation de plusieurs ouvrages comme l’Atlas de l’Europe dans le monde (2008) ou l’Atlas des migrants en Europe (2009 et 2012). Il enseigne la cartographie à l’université Paris-Diderot.