Recherche, arts et pratiques numériques #28: Ecritures documentaires

10h-13h
Mercredi 11 décembre 2019
IMéRA – Maison des astronomes
2 place Le verrier
13004 Marseille

Comité d’organisation:
Cédric Parizot (IREMAM, CNRS/AMU), Jean Cristofol (ESAAix, PRISM AMU/CNRS), Jean-Paul Fourmentraux (Centre Norbert Elias, CNRS/AMU/EHESS), Anna Guillo (LESA, AMU/CNRS), Manoël Penicaud (IDEMEC, CNRS/AMU)
Recherche, art et pratiques numériques est un séminaire transdisciplinaire qui s’intéresse aux
perturbations productives que génèrent les collaborations entre les chercheurs en sciences humaines et les artistes dans le domaine du numérique. Il s’inscrit dans la suite des réflexions et des expérimentations que nous avons menées à l’IMéRA dans le programme antiAtlas des frontières depuis 2011 tout en élargissant notre questionnement au-delà de la seule question des frontières.
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Crime as art

David Redmon, résident à l’IMéRA,réalisateur, sociologue, criminologie et ethnographie de la vidéo à l’Ecole de Politique, sociologie et recherche sociales de l’université de Kent, Royaume Uni

Kim’s Video – formerly located at St. Marks Place in NYC – was known to have one of the most comprehensive video collections in the world. However, with the rise of digital streaming, Kim’s Video, as a business model, became obsolete. In September 2008, its owner Mr. Yongman Kim put an open call on the Internet offering to donate his entire collection of 55,000 VHS and DVDs. He received over 60 offers, and chose to send the collection to Salemi, Sicily. But why and how was the now-defunct video store Kim’s Video (NYC) sent to Sicily? What happened to the Kim’s Video collection after it arrived to Sicily? What is the state of the collection today – 11 years later?

Kim’s as a commodity chain raises questions about the redistribution of material media and ownership circulated and transferred under nebulous claims. Aside from the ongoing disappearance of material media (VHS, Cassette, DVD), the physicality of an archive such as Kim’s – and what it promotes – is a valuable and worthwhile cultural resource in an age of de-materialization and digitization. My talk concludes with a discussion of how criminal fantasy has been injected into documentary cinema as performance art to address the real.

Boris Petric, anthropologue, Centre Norbert Elias (EHESS, Aix Marseille Université, CNRS)

Boris Petric rendra compte de sa collaboration avec David Redmon au cours de sa résidence à l’IMéRA et à la Frabrique des écritures innovantes

Discutant: Frédéric Pouillaude, Esthétique et théorie de l’art moderne et contemporain Aix-Marseille Université – Département Arts – Secteur Arts plastiques et sciences de l’art Membre honoraire de l’Institut universitaire de France

Photo principale: David Redmon

A Crossing Industry, un jeu vidéo documentaire et artistique

Recherche ethnographique, création artistique et technologie vidéo-ludique

Intitulé A Crossing Industry, ce jeu porte sur le fonctionnement du régime de séparation israélien en Cisjordanie dans les années suivant la fin de la seconde Intifada (2007-2010). Son élaboration, toujours en cours, est effectuée par une équipe transdisciplinaire composée d’un anthropologue (Cédric Parizot), d’un artiste (Douglas Edric Stanley), d’un philosophe (Jean Cristofol) et de onze étudiants et anciens étudiants de l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence. Cette expérimentation essaie d’envisager comment la technologie vidéo ludique permet d’articuler une démarche documentaire dont l’objectif est de modéliser une analyse ethnographique, avec une démarche artistique animée par ses propres enjeux esthétiques et poétiques.

Les premières réflexions autour du contenu et de la forme du jeu ont commencé début 2013. Elles ont été menées au sein de l’École d’Art d’Aix-en-Provence. Nous avions pris l’habitude de nous retrouver chaque semaine dans l’Atelier Hypermédia de Douglas, dans lequel il expérimente avec ses étudiants la programmation dans leur pratique artistique.

En octobre 2013, le projet a adopté un langage graphique intégrant des objets 3D simplifiés (low-poly), un fond uni en nuances de gris — plutôt vide et sans sol visible —, et des couleurs primaires pour représenter les différents types de lieux (zones sous contrôle israélien, zones palestiniennes, etc.) et les différents statuts des personnes (Palestiniens, Palestiniens de citoyenneté israélienne, Juifs israéliens, soldats, garde-frontières, etc.). En distribuant ces objets sur une carte inspirée de celle que Cédric Parizot leur avais dessinée, l’équipe a pu élaborer la première ébauche de l’espace de navigation.

Cependant, cette première ébauche nous a fait prendre conscience de la dimension irréconciliable des écarts prévalant entre la proposition scientifique de Cédric et celles, artistiques, élaborées par Douglas et les étudiants. C’est à partir de là que nous avons pris conscience du fait que nous devions repenser nos positions respectives. Cédric ne pouvait plus se cantonner dans le rôle d’un passeur de savoir, tandis que les artistes tenteraient de l’objectiver à travers le codage du langage graphique, du texte et des règles d’interactions. Nous devions nous investir dans une réflexion plus profonde pour comprendre comment nous pourrions composer avec ces écarts.

Un documentaire artistique et critique

En septembre 2014, nous avons alors exploré de nouvelles pistes d’articulation, ainsi qu’un nouveau scénario. De son côté, Cédric s’est efforcé de s’approprier le langage graphique réalisé à partir de Unity et les logiciels d’écriture du scénario. Les réflexions suscitées par ces tentatives lui ont permis d’opérer un retour critique sur le caractère hégémonique qu’avaient pris certains régimes de visibilité, comme la cartographie, dans sa réflexion. Ces échanges ont également permis d’appréhender la nature contingente et intersubjective du processus de construction d’une argumentation à travers un jeu vidéo. Enfin, ils ont contribué à repenser les formes d’intervention que nous offrait A Crossing Industry. C’est en ce sens que ce jeu a joué pleinement son rôle de documentaire critique: non pas tant dans sa capacité de documenter une situation sur le terrain mais en nous conduisant à réfléchir à nos modes d’accès et de construction du réel.

Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley – A Crossing Industry 2014 from antiAtlas Journal on Vimeo.

Cette seconde ébauche devait pouvoir mettre en scène l’histoire d’un jeune Palestinien revenant vivre dans son village d’origine au lendemain de la seconde Intifada (2000-2004). Après quelques années d’absence à l’étranger, il découvre non seulement que celui-ci se trouve enclavé entre des colonies israéliennes et le mur de séparation, mais également que les restrictions de mouvement autour de celui-ci ont été drastiquement renforcées. Mais les Israéliens ne sont pas les seuls à règlementer les déplacements des personnes et des marchandises. Reprenant progressivement ses repères, il découvre toute une économie informelle de l’intermédiation et du passage impliquant des Palestiniens, des Israéliens, et parfois même des internationaux.

Pour plus d’éléments sur ces premières étapes du processus d’élaboration du jeu voir: Parizot, Cedric, Stanley, Douglas Edric, « Recherche, art et jeu vidéo, Ethnographie d’une exploration extra-disciplinaire », antiAtlas Journal, 01 | 2016, [En ligne], publié le 13 avril 2016

Un autre format d’écriture et d’enseignement

En 2016, compte tenu des écarts persistants entre les propositions graphiques et le scénario et de la difficulté de progresser, nous avons choisi de repartir à zéro. Cédric Parizot à alors changé de medium pour penser le cadre du scénario. De l’écrit, il est passé au dessin d’une dizaine de scènes. Sur cette base, l’histoire a été complètement repensée, de même que l’interface graphique. Ce nouveau projet implique dorénavant Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley et Robin Moretti.

Le nouveau scénario s’articule autour d’un jeune anthropologue français qui quitte une ville israélienne dans le désert du Néguev pour se rendre de l’autre côté du mur, dans un village palestinien. Il doit y rencontrer un dernier interloculteur pour finaliser son enquête sur les réseaux de passeurs qui facilitent le passage des ouvriers Palestiniens en Israël. Cependant, il ne rencontrera jamais cette personne. Faute d’informateur, il doit improviser et chercher de nouveau contacts auprès de ses proches et de ses relations. Ce faisant, il réalise qu’Israéliens et Palestiniens sont bien plus interconnectés que ne le laisse entendre le projet de séparation israélien.

Partant de cette histoire, l’objectif est de produire un documentaire ludique à partir d’une approche artistique et critique sur le fonctionnement du régime de séparation israélien imposé aux Palestiniens des Territoires occupés. L’enjeu est également d’expérimenter et de développer des pratiques inédites d’écriture qui associe recherche, art et technologie vidéo-ludique pour :
– construire et mettre en forme une connaissance issue d’une recherche
ethnographique
– créer des supports de formation à l’attention des jeunes artistes et des
jeunes chercheurs en sciences humaines
– développement de nouveaux outils d’écriture et de narration non-linéaire à
destination des chercheurs et des artistes indépendants.

Partenariat

Institut de recheche et d’études sur le monde arabe et musulmans (UMR7310, Aix Marseille Université, CNRS)
Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
Institut d’études avancées d’Aix Marseille Unuversité (IMéRA)
Ministère de la Culture

Antonio Augugliaro, Gabriele Del Grande, Khaled Soliman, Al Nassir – On the bride’s side

Antonio Augugliaro, Gabriele Del Grande, Khaled Soliman Al Nassiry
On the bride’s side
Documentaire
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A Milan, un poète Palestinien et un journaliste italien rencontrent cinq Palestiniens et Syriens entrés en Europe via l’île italienne de Lampedusa après avoir fui la guerre en Syrie.

Ils décident de les aider à terminer leur voyage vers la Suède, avec l’espoir de ne pas se faire arrêter en tant que passeurs, en simulant un mariage. Avec une amie palestinienne habillée en mariée et une douzaine d’amis italiens et syriens en tant qu’invités, ils traversent la moitié de l’Europe en un voyage de trois mille kilomètres en quatre jours.

Non seulement ce voyage sensible font rejaillir les histoires, espoirs et rêves des cinq Palestiniens et Syriens, mais aussi révèlent un côté inconnu de l’Europe, une Europe transnationale et irrévérente qui ridiculise les lois et restriction des la Foreteresse, en filmant directement ce qui se passe réellement sur la route de Milan à Stockholm du 14 au 18 novembre 2013.

Voir le projet sur Indiegogo

Lire l’article et interview des auteurs par Marco Mancuso sur Digicult