(Ré)habiliter le trouble: un cyborg anthropolojonglique

Prochaines représentations

Jeudi 28 mars 2024 à 19h30
Spectacle gratuit
A partir de 10 ans
Au CIAM, 4181 route de Galice, 13090 Aix-en-Provence
Sur réservation : https://bit.ly/3v7yKs1

Lundi 30 avril 2024
Hasard ludique
Paris

La rencontre

Juin 2021 Sylvain Pascal, jongleur du collectif Protocole, rencontre Cédric Parizot, anthropologue à l’Institut d’études et de recherche sur les mondes arabes et musulmans. A d’eux, ils s’embarquent pour une semaine dans le quartier de Rochebelle à Alès pour la 14ème errance du projet PERIPLE. Au terme d’une semaine de performances de jonglées, de rencontres avec les habitants et d’essais d’anthropologie urbaine, un cyborg anthropolojonglique monte sur scène.

Avril 2022, près d’un an après cette première expérimentation, l’anthropologue et le jongleur s’invitent à l’Atelier du Plateau (Paris). Bien plus que la mise en scène d’une communication entre espèces compagnes, ils présentent une forme de 20’ pour expérimenter d’autres corporéités pour mettre en œuvre leurs pratiques et éprouver les frontières de leurs disciplines. L’écriture au plateau et la restitution devant le public ouvrent un laboratoire où est mise à l’épreuve une hétérographie circassienne dont l’enjeu est à la fois de bouleverser les pratiques de création et de la recherche. Peu à peu une réflexion mise en acte décrypte la complexité des processus d’intercorporéité qui émergent entre le jongleur et le chercheur.

Photo: Collectif Protocole, 2021

Extraits:

“Je suis entré le 14 juin 2021, dans Rochebelle, un vieux quartier minier de la ville d’Alès. Les mines ayant été fermées, il est depuis quelques décennies en situation de grande précarité. Aux côtés des quelques habitants qui ne sont jamais partis et qui y restent profondément attachés,
sont venus s’installer différentes populations assez pauvres. C’est d’ailleurs un quartier particulièrement connu pour ses marchands de sommeil. J’y ai été invité par Sylvain Pascal, un jongleur du collectif Protocole et par le centre national de cirque de la Verrerie d’Alès pour y errer pendant une semaine.….Alors, vous allez me dire: “Qu’est-ce qu’un anthropologue peut donc aller faire de sérieux avec un jongleur, pendant une semaine, dans un quartier qu’il ne connaît même pas ?”

Photo: Collectif Protocole, 2021

“24 juin 2021, on s’engage dans une ruelle pourrie, ambiance film de mafia. Un groupe de dealer s’est approprié un coin de rue pour monter un point de vente. Des gueules cassées, des visages tatoués, des gamins déjà cramés, une enceinte qui crache de la musique et mon anthropologue pas très rassuré. Moi je fonce dans le tas en me disant que dans quelques minutes, ils vont nous offrir un thé”

“… une sorte de confusion: d’abord, entre nos corps, tu es devenu une partie de mon appareil sensoriel. À travers tes gestes, ton assurance, je suis entré en relation avec ces dealers. Ensuite, une confusion entre nos rôles, qui a agit et qui a été agi dans cette rencontre? Qui étaient les spectateurs, le public, les artistes, les agents et les objets de la recherche?”

Photo: Marie-Claire Abdelkader, 2024

« Sylvain s’était allongé sur le toit d’une des trois voitures calcinées qui trônaient devant l’église de Rochebelle. Il jonglait couché. Les conducteurs des voitures qui passaient derrière nous, souriaient. Un peu plus loin, un vieil homme jouait de la flute derrière la grille de sa maison. Curieux, nous sommes allés le voir.

Photo: Marie-Claire Abdelkader, 2024

« En somme, faire de l’anthropologie urbaine avec un jongleur, c’est un peu comme détourner une enquête ethnographique : ce n’est pas simplement privilégier la flânerie, ralentir et se rendre plus disponible au quartier, c’est aussi accepter d’autres formes de dérives, fondées davantage des fictions et des expériences. Par contre, je ne sais même pas si, ce soir, Sylvain et moi, nous nous comprenons vraiment l’un et l’autre.

Nous sommes un peu comme dans la relation entre deux espèces compagnes: vous savez cette relation qu’entretiennent les êtres humains et leurs animaux domestiques ou encore certains animaux comme ces oiseaux et ces hippopotames qui vivent en symbiose au bord des marigots.

Photo: Marie-Claire Abdelkader, 2024

Représentations

Atelier du plateau, Paris, 1er et 2 Avril 2022
Pôle cirque de la Verrerie d’Alès, juin 2021
MMSH, Aix en Provence, 18 janvier 2024

Photos: Collectif Protocole, Alès, 2021

Workshop Streambox Drop

15-17 Février 2024
Lab Gamerz
Patio du bois de l’Aune
Aix-en-Provence

Bricoler, percher et écouter des micros ouverts

Ce workshop de 3 jours sera dédié à la réalisation, le placement et l’écoute d’un « microphone ouvert » temporaire. Il implique des étudiants de Master d’anthropologie d’Aix Marseille Université, de Toulouse Jean Jaurès et des étudiants de l’Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence.

Le workshop comporte trois volets

Photo: Cédric Parizot, 2024

1/ Jour 1 et 2: Assemblage de têtes binaurales autonomes, capable d’envoyer un stream pendant 48h.

Les 5 binômes d’étudiants se sont répartis en 3 groupes:
– un groupe avec Grégoire Lauvin : assemblage des micorphone (cables, soudures des jacks, soudures micros, montage des cables en Y)
Photo: Cédric Parizot, 2024

– un groupe avec Stéphane Cousot pour la configuration et de paramétrage des Streambox (Rasberry pi, cartes son, configuration du compte Locustream, test)
Photo: Cédric Parizot, 2024

– un groupe avec Peter Sinclair pour la fabrication des têtes binaurales à partir de tuyaux PVC, oreilles imprimés en 3D et support en bois découpés au lazer et fabrication de bonnettes anti-vent.
Photos: Cédric Parizot, 2024

2/ Choix de l’emplacement et pose des têtes binaurales dans l’espace urbain

L’après-midi du 16 février, les binômes ont été placer les streambox dans l’espace urbain d’Aix-en-Provence: l’une a été accrochée à un balcon d’un appartement près de la place de la Rotonde, la seconde a été placée dans les fourrés sur un chemin longeant le parc Jourdan, la troisième a été accroché en hauteur sur une grille sous un pont au centre ville.

A 500 m de la Rotonde

Dans les fourrés du parc Jourdan

Sous un pont (Photo: Marie Claire Abdel Kader, 2024)

D’autres emplacements ont été recherchés le matin du 17 février.

Dans un supermarché

Près d’un aérodrome

3/ Écouter, analyser et décrire le flux sonore de son microphone à distance, réfléchir à un mode d’écoute et un mode de notation etc.

Encadrement et partenariat

Les étudiants seront encadrés par Peter Sinclair (artiste et enseignant, Locus Sonus Vitae), Cédric Parizot (anthropologue) et Virginie Dubois (artiste, compositrice et chercheure), Grégoire Lauvin (artiste-chercheur, Lab Gamerz et Locus Sonus) et Stéphane Cousot (Locus Sonus) et François Parra (artiste et enseignant, Locus Sonus Vitae).

Il s’inscrit dans le partenariat entre Locus Sonus Vitae et l’Institut de recherche et d’étude sur les mondes arabes et musulmans dans le cadre du programme la Recherche par l’écoute (programme cadre CNRS/Ministère de la Culture).

Recherche, art et participation, le programme

Introduction

Le programme Recherche, art et participation (REAP) propose de mettre en œuvre au cours des deux années à venir (2024-2025) une série d’expériences à la croisée des sciences humaines et sociales, de l’art et de la science participative pour tester différents modes d’enquête et de diffusion des résultats de la recherche. Il est résolument interdisciplinaire : il réunit des anthropologues, des sociologues, des historiens, des politistes, des cinéastes, ainsi que des plasticiens, des artistes sonores et du spectacle vivant. Collaboratif et participatif, il intègre les citoyens dans les processus de recherche, de production et de circulation du savoir et de la création.

Cette démarche vise trois objectifs :
1) Réévaluer les capacités de nos dispositifs de recherche contemporains à saisir les changements de notre monde ;
2) Explorer d’autres positionnements des chercheurs et des artistes dans la société ;
3) Renouveler les modes de co-production, de partage et de circulation du savoir.

Enquêtes, séminaires et ateliers expérimentaux

Deux enquêtes seront mises en oeuvre sur des terrains distincts de la région Provence Alpes Côte d’Azur, où s’opèrent des grandes transformations de notre monde contemporain. La première enquête, coordonnée par Cédric Parizot, se déploie dans la vallée de la Roya. Elle cherche à saisir, par l’écoute, la création sonore et la cartographie alternative, les circulations et les reconfigurations des limites qui façonnent cette vallée.
La seconde enquête portée par Pascal Cesaro, à Marseille explore, à partir de l’archive audiovisuelle et de sa déconstruction par les personnes concernées, un métier méconnu du travail social : celui des aides aux mères et aux familles à domicile.
Au cœur de ces deux enquêtes l’accent sera mis sur la collaboration étroite avec les citoyens.

Le second axe du programme REAP articule un cycle de séminaires qui expérimente des moyens innovants de production et de présentation de la recherche (performances, installations, projections, etc.) et des ateliers expérimentaux (masterclass et workshops) qui offrent des formes inédites de formation (à la vidéo, au cirque, au théâtre, à la création sonore, etc.). Ces initiations sont à destination des collègues intéressés, et de leurs étudiant/es (Master, Doctorat), avec l’idée de favoriser une synergie entre les initiatives et expériences art-science existantes au sein de l’Institut SoMuM et de l’Université d’Aix Marseille.

Comité d’organisation

Emilie Balteau, sociologue et documentariste, PRISM, Aix-Marseille univ, CNRS
Pascal Cesaro, enseignant-chercheur en cinéma, PRISM, Aix-Marseille univ, CNRS
Cédric Parizot, anthropologue, chargé de recherche, IREMAM, CNRS, Aix Marseille Univ

Logo: Hélène Tilman

antiAtlas des épistémicides

Une proposition d’Anna Guilló pour le collectif de l’antiAtlas des frontières

antiAtlas des épistémicides est un projet artistique et scientifique collaboratif dont l’objectif est de réunir dans un ouvrage des notices et des articles synthétiques portant sur des épistémicides du passé ou du présent, quel que soit l’endroit de la planète concerné. Les articles seront accompagnés de la reproduction d’une œuvre sous forme de carte pensée expressément pour chaque exemple d’épistémicide donné.

La question étant aussi singulière qu’insondable, ce projet n’a pas de vocation encyclopédique et vise, au contraire, par les choix opérés, à établir un atlas non exhaustif et subjectif, assumé à la fois comme ouvrage scientifique et catalogue artistique.

La totalité des champs disciplinaires étant touchée par cette question, c’est à ce titre qu’antiAtlas des épistémicides ouvre son appel à contributions à une communauté d’auteurs sans distinction d’appartenance.

Contact : antiatlasdesepistemicides@gmail.com

Modalités de soumission et calendrier

Étape 1 :
Les propositions d’articles (3000 caractères environ, espaces non compris), idées, suggestions et intuitions seront envoyées pour le 30 avril 2022, pour un premier jet, puis au fur et à mesure du temps que chaque auteur voudra se donner jusqu’à ce que nous réunissions une cinquantaine de propositions.
Mail : antiatlasdesepistemicides@gmail.com

Étape 2 :
Lorsqu’une dizaine de propositions seront recueillies et cartographiées, une prémaquette du projet Atlas des épistémicides sera proposée à différents éditeurs (et partenaires pour le financement – labos, organismes publics etc.).

Étape 3 :
Une fois l’éditeur séduit et le budget trouvé (comprenant la rémunération des auteurs et des artistes), un appel à écriture des articles sera lancé.

L’article final pourra prendre la forme d’une notice ou préférablement d’un article plus détaillé qui ne dépassera cependant pas 15 000 signes. Il sera accompagné d’une carte réalisée en étroite collaboration avec l’auteur, selon la nature de son article.
Les propositions pourront également émaner d’un duo artiste/auteur sous couvert que l’œuvre proposée relève du large vocabulaire de la cartographie. Enfin, les contributions d’auteurs-cartographes-artistes sont également les bienvenues.
Les articles seront soumis à un comité de lecture qui, le cas échéant, proposera remarques et corrections. Les informations transmises seront rigoureuses et référencées par une bibliographie précise qui sera mise en commun en fin d’ouvrage.

Structure de l’ouvrage et premières pistes de recherche

I Introduction

1. Si les articles et images de l’ouvrage forment une constellation, cette dernière n’en est pas moins organisée selon différentes catégories et entrées thématiques, historiques, conceptuelles géographiques, etc. Par-delà le titre de l’ouvrage, il s’agira de distinguer les exemples qui relèvent des savoirs détruits, des savoirs confisqués et des savoirs occultés, tout en tenant compte du fait que ces catégories sont souvent poreuses.

2. Qu’est-ce qu’un atlas ?
3. Qu’est-ce qu’un épistémicide ?
4. Présentation des parties de l’ouvrage :
a) Savoirs détruits
b) Savoirs confisqués
c) Savoirs occultés
5. Esprit général et méthodologie du projet

Ce projet artistique trouve son origine dans une pratique du dessin cartographique élargi visant à répertorier graphiquement des pratiques invisibles. Le paradoxe un peu éculé de la représentation de l’invisible a très vite fait place à une nécessité de documenter scientifiquement ce projet et à l’ouvrir aux épistémicides ; c’est en cela qu’il se pense sous forme d’atlas. Après un long temps consacré aux lectures concernant cette question, le projet transversal s’est imposé puisque, même si le terme est issu du champ de la sociologie des émergences de Boaventura de Sousa Santos, il est, de fait, travaillé, dans le monde entier, par tous les champs disciplinaires (à tel point que cet ouvrage se passera même, peut-être, de les distinguer).

Le travail collectif s’est alors très simplement organisé autour d’un appel à contributions pour établir une première prévisualisation du projet de façon à ce que de ces articles à venir portant sur des savoirs détruits, confisqués et occultés, émerge non plus un savoir mais une forme de connaissance commune dont seul le résultat final finirait de nous donner la clé. Un projet comme une bouteille à la mer, en somme, à l’exact opposé de la forme des projets « clé en main » que le monde académique et culturel tente de nous imposer, nous confisquant notre temps de recherche et de création entre le moment où il faudrait « monter un dossier », puis, à peine ce dernier accepté, déjà penser à le « valoriser ». La méthode, ici, est autre et repose sur une dynamique régie par la curiosité et le plaisir de porter à la connaissance du public une autre façon de dessiner le monde.

C’est dans ce même esprit, que nous voudrions réaliser ce premier tome de l’antiAtlas des épistémicides comme un objet à partir duquel pourront émerger différentes formes : expositions, séminaires, rencontres, programmations etc. Ainsi, là où généralement les livres viennent restituer les expériences et parcours de recherche (publications de thèses, actes de colloque, catalogue d’exposition, etc.), celui-ci viendrait plutôt les provoquer puisque ses contenus, non figés, nécessiteront un prolongement dans le débat public et sans doute l’avènement d’autre tomes…

II Savoirs détruits (épistémicides)

Étymologiquement, un épistémicide est le meurtre d’une science entendue dans son sens propre de connaissance. On attribue ce terme au sociologue portugais Boaventura de Sousa Santos qui a publié en 2014 son ouvrage Epistemologies of the South. Justice against Epistemicide , traduit en français par Épistémologies du Sud. Mouvements citoyens et polémique sur les sciences , sous-titre dans lequel le terme « épistémicide » a disparu. Le terme se trouve depuis 1994 dans son œuvre, ainsi défini :

Le nouveau paradigme constitue une alternative à chacun de ces traits. En premier lieu, il n’y a pas une forme unique de connaissance valide. Il y a beaucoup de formes de connaissances, autant que les pratiques sociales qui les génèrent et les soutiennent. La science moderne s’appuie sur une pratique de division technique professionnelle et sociale du travail et sur le développement technologique infini des forces productives dont le capitalisme est aujourd’hui l’unique exemple. Les pratiques sociales alternatives génèrent des formes alternatives de connaissance. Ne pas reconnaître ces formes de connaissance, implique de délégitimer les pratiques sociales qui les appuient et, dans ce sens, de promouvoir l’exclusion sociale de ceux qui les promeuvent. Le génocide qui caractérise tant de fois l’expansion européenne fut également un épistémicide : on a éliminé des peuples étranges parce qu’ils avaient également des formes de connaissances étranges et l’on a éliminé ces formes de connaissances étranges parce qu’elle se fondaient sur des pratiques sociales et des peuples étranges. Mais l’épistémicide a été beaucoup plus étendu que le génocide parce qu’il a toujours prétendu subalterniser, subordonner, marginaliser ou illégaliser des pratiques et des groupes sociaux qui pourraient constituer une menace pour l’expansion capitaliste, ou durant une bonne partie de notre siècle pour l’expansion communiste (sur ce point aussi moderne que le capitalisme), et aussi parce que cela est arrivé aussi bien dans l’espace périphérique et extra- nord-américain du système monde que dans l’espace central européen et nord-américain, contre les travailleurs, les indigènes, les noirs, les femmes et les minorités en général (ethniques, religieuses, sexuelles).
Le nouveau paradigme considère l’épistémicide comme un des grands crimes contre l’humanité .

Cette première partie réunira des articles sur des pratiques et des savoirs définitivement détruits, perdus à tout jamais. On pourra par exemple penser au contexte des 4 grands épistémicides du XVIe siècle ainsi répertoriés par Ramón Grosfoguel :

1) La conquête d’Al Andalus et son génocide/épistémicide des juifs et musulmans.
(Incendie de la bibliothèque de Cordoue ainsi que celles de Séville et Grenade (1 million de livres détruits en tout)
2) La conquête de l’Amérique et l’extermination des Amérindiens
3) La mise en esclavage des Africains
4) Les femmes (sorcellerie)

Mais on ne résumera pas cette partie aux seuls effets de la colonisation au XVIe siècle. Elle s’ouvrira également sur tout épistémicide répertorié de la préhistoire à nos jours selon l’entrée thématique choisie par les auteurs. On pourra, par exemple, penser à la disparition des langues et, avec elles, des noms propres et communs, tout comme les toponymes. La question de la traduction au sens large du terme se pose également ici.
Ces destructions sont également liées à l’annulation des panthéons et cultes religieux de toutes sortes, les épistémicides sont également des spiriticides.
On pourra encore penser à toutes sortes de savoirs vernaculaires « remplacés » par d’autres jugés plus efficaces (la cartographie et, plus généralement, les pratique de l’orientation, en sont un bon exemple).
Enfin, la question de la destruction des œuvres d’art sera également abordée (voir l’exemple du cinéma khmer).
D’une manière générale, c’est l’ensemble des épistémicides à travers l’histoire et le monde qui est ici interrogée, bien au-delà de ce que l’on nomme les épistémologies du Sud.
(À compléter selon les bonnes idées de auteurs !)

III Savoirs confisqués

Les savoirs confisqués sont souvent associés aux savoirs détruits puisqu’ils sont le fait de l’action d’un dominant sur un dominé ce qui signifie, d’une certaine manière, de déposséder ce dernier d’un savoir lorsqu’il ne s’agit pas tout simplement de l’éliminer. C’est en cela que tout génocide implique aussi un épistémicide.
Mais un savoir confisqué n’est pas à proprement parler détruit sinon déplacé, réutilisé, interprété (même s’il peut parfois, aussi être détruit par omission ou manque de maîtrise).
À ce titre, l’histoire de la connaissance des plantes médicinales est particulièrement éloquente.
Voir, par exemple, Samir Boumédienne, La Colonisation du Savoir : Une histoire des plantes médicinales du « Nouveau Monde » (1492-1750).
Dans la droite lignée des questions liées à l’herboristerie, il y a également celle de la médecine et de ses pratiques et de diverses pensées qui s’opposent, entre prévention, guérison, soin etc.
Aujourd’hui, on peut également penser à la suprématie de l’industrie agroalimentaire soutenue par les gouvernements et qui empêche, par exemple, les paysans de resemer leurs propres récoltes ou encore interdit la culture de certains fruits et légumes, tout comme elle impose l’administration d’antibiotiques au bétail. (Voir le manifeste des 1052 éleveurs et éleveuses hors-la-loi). De ces différentes confiscations naissent des pratiques clandestines, hors-la-loi dont il pourrait être question dans la conclusion.
(À compléter selon les bonnes idées de auteurs !)

IV Savoirs occultés

Si les savoirs peuvent être détruits ou confisqués, ils sont également occultés (ce qui peut, à terme, les précipiter vers l’oubli donc vers leur destruction s’ils ne sont pas conservés).
Les manuels scolaires et, plus généralement, les pédagogies opérées dans les différents pays du monde sont éloquentes. Comme dans cet antiatlas, les manuels scolaires toutes disciplines confondues sont concernés entre pans de l’histoire non enseignés ou carrément niés, organes non représentés (voir l’exemple récent de la réhabilitation de la représentation du clitoris), auteurs censurés etc.
On pensera ici particulièrement aux femmes occultées, non mentionnées ou tout simplement dépossédées de leurs propres découvertes ou inventions dans l’histoire de l’art, des sciences, de la politique.
Plus généralement, on pensera à la censure qui, parfois, a donné lieu à la perte réelle de connaissances (car œuvres et documents occultés sont perdus in fine).
(À compléter selon les bonnes idées de auteurs !)

V Post-face en guise de conclusion ? Vers des savoir mutants.

Samir Boumediene conclut son ouvrage en montrant que certains savoirs sont des savoirs résistants (exemple des plantes abortives utilisées en situation d’esclavage pour ne pas fournir de main d’œuvre supplémentaire aux maîtres).
Cet ouvrage veut échapper à la dualité dominant/dominé pour montrer, aussi, comment les savoirs ne sont pas nécessairement conservés ou détruits mais aussi « mutants », osmotiques.
Il étend sa critique des savoirs dominants aux mouvement sociaux et politiques occidentaux dits de gauche dans la mesure où ils reproduisent également de façon irréfléchie, certains modes de domination (Cf. Ramón Grosfoguel et de Sousa Santos).
(À compléter post-partum selon les bonnes idées de auteurs !)

Quelques pistes bibliographiques et liens pour commencer

(une « vraie » bibliographie serait infinie, elle se constituera en fonction des contributions).

BOUMEDIENE Samir,Une histoire des plantes médicinales du « Nouveau Monde » (1492-1750), Vaulx-en-Velin, Les éditions des mondes à faire, 2021.

COMITÉ INVISIBLE, À nos amis, Paris, La Fabrique, 2014.

CRAWFORD Matthew B., Éloge du carburateur. Essai sur le sens et la valeur du travail, trad. (Etats-Unis) Marc Saint-Upéry, Paris, La Découverte, 2010.

DEUTINGER Théo, Handbook of Tiranny, Zürich, Lars Müller Publishers, 2017

FEDERICI Silvia, Une guerre mondiale contre les femmes. Des chasses aux sorcières au féminicide, Paris, éd. La Fabrique, 2021
_________, Le Capitalisme patriarcal, Paris, éd. La Fabrique, 2019
_________, Caliban et la sorcière. Femmes, corps et accumulation primitive, Paris/Genève/Marseille, éd. Entremonde/Senonevero, 2014

MAUVAISE TROUPE (collectif), Constellations. Trajectoires révolutionnaires du jeune 21e siècle, Paris, éd. de l’éclat, « premiers secours », 2014.

LUSTE BOULBINA Seloua, Les miroirs vagabonds ou la décolonisation des savoirs (arts, littérature, philosophie), Paris/Dijon, éd. Les Presses du réel, coll. « Figures », 2018.

SANTOS Boaventura de Sousa, Épistémologies du Sud. Mouvements citoyens et polémique sur les sciences, trad. de l’anglais au français par Alain Montalvão Lantoine, Séverine Laffon et Alexis-Michel Gauvrit. Traduction remaniée et adaptée par Aline Chabot et Jean-Louis Laville, Paris, éd. Desclée de Brouwer, coll. « Solidarité et société », 2016.

SPIVAK Gayatri C., Les subalternes peuvent-elles parler ? trad. de l’anglais par Jérôme Vidal, Paris, éd. Amsterdam, 2006

Liens vers articles scientifiques et généralistes :

COLLIGNON Béatrice, « Que sait-on des savoirs géographiques vernaculaires ?» https://www.persee.fr/doc/bagf_0004-5322_2005_num_82_3_2467

DELL’OMODARME Marco Renzo, « Pour une épistémologie des savoirs situés : de l’épistémologie génétique de Jean Piaget aux savoirs critiques » (Thèse)
https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-01233068/

GOURGUES Jean-Michel, « Les manuels scolaires : courroie de transmission des connaissances de la colonialité dans les pays périphérisés ».
https://www.researchgate.net/publication/287206803_Analyse_Les_manuels_scolaires_courroie_de_transmission_des_connaissances_de_la_colonialite_dans_les_pays_peripherises

GROSFOGUEL, Ramón, « Un dialogue décolonial sur les savoirs critiques entre Frantz Fanon
et Boaventura de Sousa Santos »
https://www.cairn.info/revue-mouvements-2012-4-page-42.htm

LEFEBVRE, Camille et SURUN, Isabelle, « Exploration et transferts de savoir : deux cartes produites par des Africains au début du XIXe siècle » https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00682112

LEFEBVRE, Camille, « Itinéraires de sable : Paroles, gestes et écrits au Soudan Central au XIXe siècle. » https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-00676325/

RENOULT, Yann, « L’éthnomathématique, un outil de lutte contre les épistémicides » https://pedaradicale.hypotheses.org/2375

Qui sommes-nous ?

https://www.antiatlas.net/
https://www.antiatlas-journal.net/
https://www.annaguillo.org/

Image: Anna Guilló, Vers un antiAtlas des épistémicides, 2021. Photographie, dimensions variables.

Aires de jeux: workshop de création de jeux

Un workshop de création de jeux à la frontière entre arts et sciences humaines

18 au 22 septembre 2019

L’atelier

Aires de jeux est un atelier d’expérimentation pratique au croisement de la recherche et de la création artistique centré autour du thème des frontières et de la production de l’espace. Proposé sur cinq jours (18 au 22 septembre septembre 2019), il a été conçu à destination de chercheurs et de jeunes artistes désirant explorer de nouvelles formes d’écritures. L’atelier a été envisagé comme un espace de collaboration entre des participantes d’horizons divers cherchant à construire des espaces à mettre en jeu, des lieux de dialogue partageables.

Encadré par deux artistes, Leslie Astier et Théo Godert,Leslie Astier et Théo Godert et un chercheur, Cédric Parizot, les participantes se sont confrontées en binômes à d’autres modes narratifs ainsi qu’à d’autres conditions de production dans le but de matérialiser leurs savoirs respectifs. En se basant sur les matériaux et recherches apportés par le chercheur et l’artiste, l’enjeu pour chaque binôme était de trouver leur propre mode de construire et rendre jouable leurs propositions respectives.

Lorsque nous jouons, nous ne manions pas simplement des objets, des gestes, de la parole : nous nous engageons avec les règles qui organisent leurs modes d’interaction. À la recherche d’autres espaces et conditions d’élaboration de la recherche, l’atelier avait pour but de mettre en crise les relations entre les participantes et leurs objets d’étude, permettant de faire émerger de nouvelles zones de compréhension.

Philosophie

Aires de Jeux flirte avec différents domaines, à la bordure du jeu lui-même. Sur le mode de la navigation et de la dérive, nous avons cherché à baliser ensemble ce que pouvait être un jeu et quelles étaient les idées préconçues que les participantes pouvaient avaient à propos de sa pratique.

Le jeu est un médium sensible qui se dévoile par l’expérience qu’en font les joueurs. En parcourant aussi bien des formes, des idées, des sensibilités, des concepts, que des systèmes interactifs, ensemble nous nous sommes questionnés sur ce que sont, et ce que pouvaient être, des jeux qui parlent du réel. Il nous a été important de remettre cette question en perspective d’un point de vue de créateur et non seulement dans une optique pédagogique.

Dix participantes ont été amenées à penser les sensibilités permises par le jeu et la position que leur prototype allait prendre par rapport au réel.

Photo: Valérie Caraguel

Les jeux fabriqués

Collaboration entre chercheurs en sciences humaines et étudiants en école d’art :
5 binômes – 5 prototypes

Raconte moi une légende inuit…

Photo: Leslie Astier/Théo Godert

Dans ce jeu de cartes, des joueurs incarnent des anthropologues à la recherche d’une légende Inuit au Nunavik (dans le Grand nord québécois). Chaque anthropologue doit faenquête ire des rencontres et des expéditions pour récolter des données dans son carnet de notes. Mais attention, ils ne savent pas toujours de quoi parle leur légende !

Natacha Roudeix
Inès Lamalchi

KHNata

Photo: Leslie Astier/Théo Godert

Expérience narrative entre matériel et immatériel, KHNata est une immersion progressive dans deux consciences du livre manuscrit. Il trouve son origine dans l’expérience d’un chercheur codicologue et paléographe ainsi que dans la démarche de questionnement d’une artiste autour de l’identité multiple. À l’ère de la numérisation des données, KHNata opère un parcours sensible entre différents états de la matière.

Laurie-Anne Jaubert
Élodie Attia

A Place in The City

Photo: Sara Scatà/Aline Lugo

A Place in the City est une narration interactive. Le joueur est plongé dans la ville de Magma et il assiste à une conversation : qui sont-ces personnages ? Pourquoi sont-ils réunis ? Le joueur se balade à la découverte du destin d’un quartier. Dans cet univers imaginaire il reconnaît des choses, dans un jeu entre fiction et réalité, il fait des allers-retours entre poétique et politique, entre Magma et Beyrouth.

Sara Scatà
Aline Lugo

Parcours d’enfant

Photo: Leslie Astier/Théo Godert

Incarner trois acteurs dans la vie d’un enfant placé. En communiquant, vous opérez à trois des décisions qui constitueront le parcours d’une vie jusqu’à l’âge adulte. Chaque message, son code et sa réception auront un impact sur le jeu et ainsi sur la vie de l’enfant.

Nathalie Chapon

GFBA

Velvet Aubry/Estelle Tzotzis

Gay Family Builder Agency (GFBA) est un jeu collaboratif entre deux joueurs. Il met en scène un couple gay qui décide d’avoir un enfant. Situé dans un futur proche, le jeu présente la GFBA : une agence fictive qui offre des services pour aider les couples de même sexe dans leur projet d’enfant.

Vous incarnez Noah et Basil et devez répondre à un questionnaire qui décidera, ou non, de votre droit d’accès à la parentalité.

Velvet Aubry
Estelle Tzotzis

Processus de création

Tout au long de l’atelier les participantes ont visité différents paysages ludiques et théoriques suivant un rythme soutenu. En trois jours, les chercheures et artistes devaient se prêter à différents excercices de déterritorialisation de leurs recherches menant à la construction d’un prototype de jeu. Pour les accompagner, un programme sur-mesure a été mis en place visant quelques points clefs d’expérimention, de réflexion et de conception.

Introduire

Peignant un paysage de possibles en alternant entre des œuvres jouables par des supports physiques et des œuvres numériques, Aires de Jeux a débuté sur la présentation d’un inventaire non exhaustif de ce que peut-être un jeu qui a trait au réel. Traversant à grandes enjambées un domaine très vaste, du jeu textuel au jeu de plateau, les participantes ont pu faire une première rencontre avec le paysage ludique actuel, un paysage qui déjoue souvent les attentes lorsqu’on parle de jeu ou de jeu-vidéo.

Contextualiser

Ponctuant les premières journées de réflexion, deux présentations sont venues accompagner les participantes dans leurs réflexions.

Jean Cristofol, professeur d’épistémologie à l’ESAAix, a mené une discussion sur les chevauchements territoriaux entre le jeu, la fiction et les pratiques de groupes sociaux différents.
Embrassant des questionnements sur la distanciation brechtienne aussi bien que l’oulipisme, Jean a questionné cette pratique du plateau comme lieu de production d’espaces sociaux et créatifs.
Douglas E. Stanley, artiste et professeur à l’ESAAix, et Cédric Parizot, anthropologue (Iremam, Aix-Marseille Univ/CNRS), ont quant à eux fait un retour d’expérience sur le processus d’élaboration qui les a mené depuis 2013 à la co-construction du jeu vidéo A Crossing Industry. Ils ont ainsi présenté un exemple de pratique concrète à travers laquelle un chercheur et un artiste peuvent articuler une démarche artistique avec ses enjeux esthétiques et poétique avec une démarche scientifique.

Familiariser

L’atelier a également été un temps d’apprentissage de deux outils numériques, selon le support choisi par les participantes : Cardpen / Twine – outils de création de cartes et de récit hypertextuel. Tous deux en ligne gratuitement, ces outils permettent d’obtenir rapidement des jeux en apprenant quelques bases de programmation et de graphisme.
Avec ces outils peuvent se développer de nouvelles écritures, de nouvelles manières de raconter portées par les envies de récits des participantes.

Dialoguer

Les temps de travaux étaient aussi des moments d’accompagnement, nous nous déplacions dans le but d’aider à la conceptualisation ou réalisation des prototypes.

Photo: Valérie Caraguel

Formuler

Formuler un pitch permet de trouver l’objectif et l’atmosphère d’un jeu en une présentation ne dépassant pas les 2 minutes. Régulièrement, les participantes ont été invitées à pitcher le jeu qu’ils projetaient de faire. Ces présentations collectives ont permis de faire rapidement surgir les endroits de tensions où quelque chose peut se déployer mais aussi les endroits d’incompréhension. Les pitchs ont été formulés au cours de sessions collectives où chaque groupe a pu discuter, échanger et reformuler les ébauches de jeu des autres groupes.

Orienter

Pour faciliter certaines étapes d’idéations, nous avons mis au point un outil qui permet aux participantes de tirer des questions et d’y répondre rapidement.
Cadres est un jeu de cartes s’inspirant du Water Yam de Georges Brecht couplé avec les Stratégies Obliques de Brian Eno. Le jeu est utilisé à la manière d’un oracle et s’adresse au joueur-créateur afin de l’aider à aller plus loin dans sa démarche créative, l’amenant à envisager les choses sous un jour nouveau ou demandant un positionnement face à une question non encore résolue.

Jouer

Durant les cinq jours, les participantes ont pu jouer à des jeux créés dans une optique artistique, mais ils ont également, tout au long de l’atelier, joué aux jeux qu’ils étaient en train de créer. Ces étapes de mise à l’épreuve ont été essentielles et ont souvent révélé les fragilités ou les forces expressives d’une idée. Le workshop s’est terminé par une session de jeu mutuelle dans un espace prévu à cet effet.

Conclusion

Aires de Jeux est un atelier visant à faire émerger des zones de frictions entre la recherche artistique et la recherche académique. Le jeu y est utilisé comme espace de rencontres modulable : il permet de régler les relations entre les participantes et de les faire concourir ensemble vers un objectif commun. Tout au long de l’atelier nous avons cherché à désigner certaines de ces zones d’interaction et à donner aux participantes des points d’entrée.

Les contraintes ont permis de délimiter un plateau d’interaction destiné à accélérer un processus de collaboration qui peut prendre des mois avant de donner naissance à des pistes de jeu. Le programme, qui a été conçu lors d’un premier atelier ayant eu lieu en 2018, a été perfectionné pour cette session afin d’inviter les participantes à ne se soucier que du développement de leurs idées et de leur première réalisation. Ce processus créatif accéléré peut être déroutant pour les participantes qui entrent en contact avec une nouvelle manière d’organiser leurs connaissances et qui doivent s’approprier un médium inconnu. Il est important d’accompagner et de soutenir les participantes dans ces zones d’émergence.

Photo: Leslie Astier/Théo Godert

Aires de Jeux a pour but d’amener à la création d’un objet dont l’expérience, le jeu, ne peut être substituée à une simple explication. Se départissant des narrations proprement scientifiques et de la forme socialement construite de ce que devrait être un jeu, les participantes ont formulé des expériences liées à des observations faites sur le réel.

Photo: Leslie Astier/Théo Godert

Leslie Astier et Théo Godert, Aix-en-Provence, 31 août 2020

Image principale: Leslie Astier/Théo Godert

Bureau des dépositions: Exercice de justice spéculative

Pièce jointe 17. Extrait de la performance Bureau des dépositions: Exercice de justice spéculative
A travers l’oeuvre Bureau des dépositions. Exercice de justice spéculative, nous fabriquons de la justice depuis les interstices et les limites du droit. Nous reprenons ce que d’autres ont écrit sur les murs de la ville : « les femmes n’ont pas eu le droit de vote en allant voter », ce qui confirme la nécessité d’instituer le droit par nos mouvements sociaux qui prennent soin de la vie et des liens, quand d’autres les tuent. Bureau des dépositions oeuvre à créer des précédents, en développant une stratégie contentieuse en matière de droit d’auteur et de liberté fondamentale contre le contentieux du droit des étrangers et du droit d’asile. Par “justice spéculative”, nous entendons une justice possible, qui a lieu depuis le droit existant et ses limites. En nous réunissant, nous créons aussi une forme de justice transformatrice, au sens d’une justice qui donne à entendre les causes et les conséquences de ces violences, et par là ouvre à de nouveaux possibles.

Une oeuvre immatérielle et processuelle

Bureau des dépositions. Exercice de justice spéculative est une oeuvre immatérielle, processuelle, performée par dix co-autrices et co-auteurs : Mamadou Djouldé Baldé, Ben Moussa Bangoura, Laye Diakité, Mamadou Aliou Diallo, Pathé Diallo, Mamy Kaba, Ousmane Kouyaté, Sarah Mekdjian, Marie Moreau, Saâ Raphaël Moundekeno.

Depuis janvier 2019, nous nous réunissons au Patio solidaire, lieu d’occupation sur le campus universitaire grenoblois, et écrivons des lettres de déposition. Ces lettres repoussent le lexique de la compassion et de l’humanitaire, et lèvent les responsabilités des violences produites par les politiques migratoires, qui circulent le long d’un continuum logistique, reliant notamment la Guinée (Conakry), ancienne colonie française, la France et l’Union Européenne.

La performance s’active dans la discussion publique de ces lettres, face au vide d’une justice manquante, et à un public-témoin. La condition principale d’activation de la performance tient dans la co-présence physique des 10 co-autrices, co-auteurs. Or, plusieurs co-auteurs sont empêchés dans le processus créatif et pendant les temps de performance, en raison d’expulsions, de transferts Dublin, de menaces d’éloignement, de clandestinisation. Notre performance se prolonge ainsi dans une requête juridique non-fictionnelle, qui est en cours de dépôt dans un tribunal administratif par une avocate : quand un ou plusieurs des co-auteurs est éloigné ou clandestinisé, en raison de son statut administratif, nous demandons au tribunal de constater une entrave à notre liberté de création artistique (Loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016), une atteinte à l’intégrité de notre oeuvre, une atteinte à notre droit de divulgation de l’oeuvre.

Une stratégie contentieuse

Opposer le droit d’auteur et la liberté de création artistique, au contentieux du droit des étrangers.

Nous nous inspirons, en complicité, de la performance Plaidoirie pour une jurisprudence. X et Y/Préfet de…, co-créée en 2007 aux Laboratoires d’Aubervilliers, par Olive Martin, Patrick Bernier, artistes, Sylvia Preuss-Laussinotte et Sébastien Canevet, avocat.e.s. Cette performance a ouvert une brèche dans laquelle nous nous glissons : « Là où la Préfecture voit un étranger, nous voyons d’abord un auteur ». La reprise de cette stratégie contentieuse dans d’autres cas est une nécessité, nous nous adressons à des auteur.trice.s qui souhaiteraient élaborer et déposer, elles, eux, avec nous, des requêtes auprès des tribunaux administratifs.

Partitions de la performance

Pour lire la première version de la partition de notre performance, datée de juin 2019.
Une deuxième version de la partition est en cours de publication par la Criée, Centre d’art contemporain à Rennes, (revue Lili, la rozell, le marimba, 2020).

Bureau des dépositions. Exercice de justice spéculative est actuellement en résidence au Centre National d’Art Contemporain de Grenoble depuis janvier 2019, et soutenu par l’Université Grenoble Alpes. Une antenne radio « Bureau des dépositions » est ouverte depuis juin 2019 au sein de la radio r22 Tout-Monde, notamment pour la radiodiffusion d’un séminaire intitulé « Œuvrer les limites du droit », URL : https://r22.fr/antennes/bureau-des-depositions

Performances

Une performance est programmée à l’Hexagone, scène nationale, à Meylan, le 21 février 2020 (biennale arts sciences, Experimenta). L’oeuvre a été sélectionnée à Manifesta 2020 (Marseille, biennale internationale d’art contenporain).

Autres publications ou expérimentations en lien avec participants de ce projet

– Mekdjian Sarah et Moreau Marie, « Redessiner l’expérience : Art, sciences et conditions migratoires », antiAtlas Journal, 01 | 2016, En ligne, publié le 13 avril 2016, URL : http://www.antiatlas-journal.net/01/re-dessiner-lexperience-art-science-et-conditions-migratoires, DOI : http://dx.doi.org/10.23724/AAJ.4
Crossing Maps, cartographies traverses, 2013

Les murs de Dheisheh

De la géographie expérimentale à la création audiovisuelle

Ce film a été réalisé dans le cadre d’une thèse de doctorat en géographie soutenue par Clémence Lehec en juin 2019 (Universités de Genève et de Grenoble-Alpes). L’approche de géographie expérimentale a mené à la création audiovisuelle qui s’est révélée être un moyen de faire coexister dans un même objet, les questions de recherche, la collecte de données et la production de résultats. Pensé comme une manière de collaborer, au sens de travailler ensemble, il est un apport méthodologique ayant permis de produire du savoir en collectif, via la coréalisation du film avec une cinéaste palestinienne originaire du camp de Dheisheh, Tamara Abu Laban. Le support documentaire permet de décloisonner les manières de produire du savoir et également de le diffuser au-delà du contexte académique, tel que dans des festivals de cinéma.

Synopsis

Dans le camp de réfugiés de Dheisheh en Cisjordanie, les murs des ruelles sont recouverts de graffitis. Cet espace, refuge et exil, est paradoxalement situé au cœur de la Palestine. Des origines du graffiti palestinien à nos jours, les peintres retracent leurs motivations.

In the Dheisheh refugee camp located in the West Bank, the alley walls are covered with graffitis. This space, refuge and exil, is paradoxically situated in the heart of Palestine. From the origin of Palestinian graffiti until today, the painters retraces their motivations.

Fiche technique

Durée 36’
Pays de production Suisse, Palestine
Production et scénario Clémence Lehec
Réalisation Clémence Lehec et Tamara Abu Laban
Direction artistique et montage Tamara Abu Laban
Assistant caméra Ahmed Saleh
Ingénieur son Husam Al Khateeb
Interprètes Mohammad Abu Laban et Nadim Al Ayaseh
Catering Abla Al Qaisy
Traduction Kiyana Al Saifi et Suha Zyada
Sous-titrage Fabio El Khoury
Design graphique Clovis Duran
Étalonnage et mixage son Florian Golay

Avec
Saleh Abu Laban
Mohammad Manasra
Mohammad Allaham
Mohammad Al Saifi
Aysar Al Saifi
Ali Obeid
Kareema Obeid
Ahmed Saleh

Participation à des festivals

Karama Beirut Human Rights Film Festival, Beyrouth, juillet 2019

19è festival Cinéma Méditerranéen, Bruxelles, novembre 2019

Red Carpet Human Rights Film Festival, Gaza et Jérusalem, décembre 2019

Contact

graffitipalestinien@gmail.com

Une géographie expérimentale de l’art aux frontières

La thèse de doctorat porte sur les graffitis et les figures de la frontière dans un camp de réfugiés palestiniens à savoir le camp de Dheisheh, situé à Bethléem, dans les Territoires palestiniens occupés. Une recherche formelle et expérimentale est proposée, entre réalisation documentaire et écriture scientifique. À travers une étude des éléments figuratifs peints sur les murs, il s’agit de proposer une actualisation du savoir sur l’imagerie populaire palestinienne ainsi que d’interroger de manière originale les représentations de la frontière au sein d’un espace à la marge. L’analyse du réseau d’acteurs et de leurs motivations à peindre permet d’entrer dans la compréhension des spécificités du mouvement graffiti palestinien, dans une perspective diachronique qui en dessine l’ontologie. La production et coréalisation du film Les murs de Dheisheh permet de mettre en scène l’étude des graffitis, leurs auteurs et les frontières qui traversent le camp, tout en proposant de manière continue une réflexion sur la méthodologie originale employée. Se situant dans une perspective extradisciplinaire, cette thèse de géographie expérimentale porte une dimension épistémologique dans la réflexion qu’elle conduit sur la manière de produire du savoir géographique, en prônant une éthique collaborative qui se pose comme une alternative aux modèles participatifs. L’expérimentation se situe à chaque étape de la recherche puisque le film documentaire permet de coréaliser en un seul objet : méthode d’enquête, données collectées et résultat final. Documenter et analyser les frontières au prisme des graffitis palestiniens à Dheisheh permet d’amener les border studies vers une perspective de géopolitique féministe qui définit l’espace des camps comme étant traversé par des lignes de front mobile et des frontières de Damoclès plaçant les corps au cœur du processus de contrôle mis en place par l’occupation israélienne.

This dissertation focuses on graffiti and borders in a Palestinian refugee camp, namely Dheisheh camp, located in Bethlehem, in the Occupied Palestinian Territories. A formal and experimental research is proposed, involving documentary film production and scientific writing. Through a study of figurative elements painted on walls, the dissertation contributes to updating current knowledge of Palestinian popular imagery. It also questions, in an original way, representations of the border within a marginal space. The analysis of the network of relevant actors and their motivation to paint allows for an understanding of the specificities of the Palestinian graffiti movement from a diachronic perspective that draws its ontology. The production and co-direction of the documentary Les murs de Dheisheh (The Walls of Dheisheh) makes it possible to bring the study of graffiti, the artists and the borders that cross the camp to the screen, while continuously proposing a reflection on the original methodology used. From an extradisciplinary perspective, this dissertation in experimental geography offers an epistemological reflection on how geographical knowledge is produced by advocating a collaborative ethic that is seen as an alternative to participatory models. The experimental dimension of the dissertation unfolds at each stage of the research process since the documentary makes it possible to carry out in a single object: survey method, data collection and final result. Documenting and analysing the borders through the lens of Palestinian graffiti in Dheisheh makes it possible to bring border studies towards a feminist geopolitical perspective that defines the camp space as being crossed by mobile front lines and Damocles’ borders, placing bodies at the heart of the control process set up by the Israeli occupation.

Autres travaux de Clémence Lehec

Clémence Lehec & Laurent Davin – Street Art on the Separation Wall

Le pire n’est pas (toujours) certain

Le pire n’est pas (toujours) certain

Cela se passe dans un futur proche. Les dystopies sécuritaires entrevues dans plus sombres cauchemars sont devenues réalité. Pourtant des femmes et des hommes continuent de tenter de traverser les frontières désormais toutes hérissées de murs qui quadrillent l’Europe. À l’intérieur des barricades que chaque nouvelle mesure institutionnelle vient épaissir, sans suspense aucun, pourtant, l’espoir demeure en la personne d’un réseau d’activistes dont la lutte contre le système passe par l’aide au passage des frontières.

La pièce imaginée par C. Boskowitz fait le pari de s’immiscer au cœur des doutes que nous vivons au présent à travers un double détour : le décalage fictionnel dans le futur et le fait de faire reposer l’intrigue sur un chien qui s’avère être le personnage principal de la pièce. Cet « actant non-humain » révèle cependant plus d’humanisme que nos congénères, dans ce labyrinthe organisé des politiques migratoires dont l’absurde n’est jamais absent. Le chien est le personnage central, il décentre l’humain tout en le ramenant à ses fondamentaux : chaleur, partage. Seul dernier compagnon de l’homme dans la déroute . Chiens de rue, chiens de migrants, chiennes de frontières ! Son propos est mis en dialogue avec celui de l’Europe, grosse vache aux mamelles débordantes qui éructe ses certitudes malgré le bruit des avions qui tonnent la proximité de la guerre.

Le pari de cette pièce c’est de ne pas parler de l’autre. À travers une mise en textes et en scène selon un dispositif complexe, C. Boskowitz fait preuve d’une capacité démiurgique, celle de mettre en tension des fragments. De nous parler à la fois de ce qui se passe sur les rives de la Méditerranée, dans les Balkans, à Calais et à Bobigny, ou encore au cœur des huis clos de la Commisssion Européenne, mais aussi de nos contradictions intérieures. Elle nous raconte nous-mêmes, sans prendre le prétexte ambitieux de raconter ces « autres » que nous avons tendance à enfermer dans le qualificatif de migrants. Tissée autour d’une composition textuelle inédite et du dialogue de textes préexistants (P. Chamoiseau, H. Arendt, P. Claudel, A. Gatti et A. Tabucchi), l’œuvre est portée par un groupe de comédiens, musicien, scénographe et ingénieur lumières qui se connaissent et aiment rechercher ensemble l’avènement d’une performance collective. Des personnes dans l’exil récent ont travaillé avec eux à différentes étapes du projet et sur scène, leur masques témoignent de l’importance de leur présence.

Une géographe invitée au théâtre

La proposition de travailler avec une chercheuse et enseignante, géographe, est venue d’une rencontre, lors de la première résidence de la troupe réunie autour du projet, en juillet 2018. Le texte venait juste d’être écrit et commençait à être porté au théâtre. La collaboration ne portait pas sur la composition initiale et A.L. Amilhat Szary n’a jamais eu de rôle pré-déterminé tout au long de sa présence qui s’est prolongée durant tout le processus de création de la pièce. À quoi cela sert donc d’ouvrir le plateau à une spécialiste de migrations et de l’intégrer dans un projet qui n’a pas pour but de représenter la réalité ?

Ce que nous partagions tous lors de la création de « Le pire n’est pas (toujours) certain », c’est la nécessité de dire, de transmettre, de faire sentir et comprendre un fait politique. Celui du rejet de l’autre, bouc émissaire d’une crise sociale et économique profonde. Sans dénoncer de façon binaire, sans s’exclure des responsabilités. Tâche incommensurable que toute la production de connaissance et toute la créativité du monde ne peuvent embrasser…

Collaborer, co-construire, mettre ses forces ensemble, certes, mais comment ? Géographier c’est comprendre le rôle du placement dans l’espace, déchiffrer et pouvoir organiser les mondes. Je me suis donc transformée en apprentie aux côtés de celles et ceux qui organisaient le plateau. J’ai été aussi un tiers médian des échanges depuis mon point de vue esthétique, fourni quelques points documentaires et un air de musique orientale quand il s’en faisait besoin. Aucune nécessité de ma présence, et pourtant, au fil du temps long de nos rencontres, il m’a semblé avoir trouvé une place et un rôle dans l’émergence ce que le site du théâtre qui a produit cette œuvre, la MC93 de Bobigny, qualifie fort justement d’« utopie très documentée ». Anne-Laure Amilhat Szary

« L’écriture de cette pièce a été librement inspirée par l’essai de Patrick Chamoiseau « Frères Migrants » (éditions du Seuil).​ Les écrits d’Hannah Arendt, notamment sur ce que pour elle signifie « penser », m’ont accompagnée pendant toute l’élaboration du spectacle. Le théâtre d’Armand Gatti (Les 7 possibilités du train 713 en partance d’Auschwitz, éditions Verdier), de Paul Claudel (Le soulier de Satin, éditions Gallimard), et une nouvelle d’Antonio Tabucchi (Passé composé, éditions Gallimard), dont certains passages sont cités à l’intérieur de la pièce, m’ont permis de rêver avec leurs auteurs. Les demandeurs d’asile du Foyer Oryema à Bobigny ainsi que les réfugiés rencontrés en Grèce et à travers toute l’Europe, certains devenus mes amis, m’ont aidée à imaginer cette histoire qui leur est dédiée. » Catherine Boskowitz

Texte et mise en scène Catherine Boskowitz

Acteurs Marcel Mankita, Nanténé Traoré, Frédéric Fachéna, Estelle Lesage, Andreya Ouamba et Catherine Boskowitz

Musique Jean-Marc Foussat
Lumières Laurent Vergnaud
Scénographie Jean-Christophe Lanquetin
Costumes Zouzou Leyens
Dessin Catherine Boskowitz
Assistanat à la mise en scène Laura Baquela
Régisseur plateau Paulin Ouedraogo
Assistants scénographie Anton Grandcoin et Jacques Caudrelier
Stagiaires technique plateau Kosta Tashkov, Khalid Adam et Aboubakar Elnour

Avec l’accompagnement amical de Anne-laure Amilhat Szary, géographe, professeure à l’Université Grenoble-Alpes et à Pacte, Laboratoire de Sciences Sociales.

Remerciements pour leur aide et leurs conseils artistiques à Maria Zachenska (clown), à Myriam Krivine (chanteuse lyrique) et à Matisse Wessels (marionnettiste).

Représentations

MC93, Bobigny, 11-21 décembre 2019. Le 19 décembre à 17h – En entrée libre Hall de la MC93 Rencontre En présence de chercheurs de l’antiAtlas des Frontières, de l’Institut des Migrations, de chercheurs en études théâtrales, de la Cimade et des partenaires associatifs de la résidence de Catherine Boskowitz, nous évoquerons comment le théâtre peut aujourd’hui être un outil politique pour parler des enjeux des migrations.

Collectif 12, Mantes-la-Jolie, 28, 29, 30 novembre 2019

Autres publications ou expérimentations en lien avec participants de ce projet

– « Revendiquer le potentiel critique des expérimentations arts-sciences sociales ? Portrait du chercheur en artiste », paru le 13 avril 2016, antiAtlas Journal #1 | 2016, en ligne
Crossing Maps, cartographies transverses, 2013

Image principale: Bruce Milpied- Hans Lucas

La vie cachée d’un utilisateur d’Amazon

Un projet de Joana Mol, 2019

La vie cachée d’un utilisateur Amazon révèle les coûts économiques et en-vironnementaux cachés à chaque achat d’un livre sur Amazon.com: 87,33 Mo de données sont activées pour naviguer à travers 12 interfaces différentes – 1307 requêtes différentes totalisant 8724 pages de code imprimé – toutes utilisées en continu, suivi du comportement des clients pour amplifier la monétisation de l’utilisateur final et augmenter les revenus de l’entreprise. En clair, l’utilisateur n’est pas simplement exploité au moyen de son travail gratuit, il est également obligé d’assumer les coûts énergétiques d’une telle exploitation.

Le projet comprend trois textes commandés par Jussi Parikka, Jara Rocha et Christian Ulrik Andersen et Søren Bro Pold, disponibles sur le site Web du projet.

Visitez le projet: https://www.janavirgin.com/AMZ/

Ce travail a été réalisé dans le cadre du programme EMARE du programme des plate-formes européennes d’art médiatique à IMPAKT, avec le soutien du programme Culture de l’Europe créative de l’Union européenne.

Autres projets de Joana Mol

Virtual Watchers, 2016
AZ: Move and get shot, 2012
Texas Border, 2011

Image: Joana Mol, 2019

Oligoptik, frontières intelligentes?

Une pièce inspirée d’une recherche ethnographique

Dans Oligoptik, frontières intelligentes ? (2018), Vincent Berhault et Cédric Parizot mettent en scène un comédien (Barthélémy Goutet) et un danseur (Grégory Kamoun). Alternant les rôles de guide, de garde-frontière, ou encore de clandestin, mobilisant les registres comiques, dramatiques et de l’absurde, ces deux artistes interrogent les dysfonctionnements, la fragilité et l’aberration de ces frontières « intelligentes ».

Inspirée d’une recherche ethnographique réalisée par Cédric Parizot en Israël Palestine, cette pièce revient sur un événement intervenu en 2007 : le découpage par des Palestiniens de 1,5 km de clôture au nord-est de Jérusalem. Chargées dans des camions les portions de la barrière avaient été revendues au plus offrant. L’information à propos de cet évènement n’avait pas du tout circulé, ni du côté israélien, ni du côté palestinien. L’événement posait donc deux questions : d’une part, comment un tel dispositif de surveillance de surveillance, doté de capteurs extrêmement sophistiqués, n’avait pas permis aux autorités israéliennes de voir et d’arrêter les Palestiniens en train de découper le grillage, et d’autre part, pourquoi un événement de cette nature n’avait pas été médiatisé. Plutôt que de fournir une vision panoptique, la frontière intelligente et les médias locaux, semblaient offrir une vision « oligoptique » du terrain.

Oligoptik, frontières intelligentes? from antiAtlas on Vimeo.

Une expérimentation art-science

L’enjeu de cette pièce n’est pas de mobiliser des artistes pour communiquer avec plus de facilité un propos scientifique préalablement construit par un chercheur. Oligoptik n’est ni un exercice de valorisation, ni une tentative de vulgarisation du savoir. Elle doit être davantage envisagée comme une expérimentation art-science, à deux niveaux.

Tout d’abord, dans le cadre de sa préparation, cette pièce a conduit le chercheur à appréhender un objet de recherche sur lequel il avait déjà travaillé à travers de nouvelles formes; des formes qui ont été élaborées avec les artistes en s’appuyant sur des vocabulaires et des écritures provenant du théâtre physique, de la danse contemporaine, de la Capoeira et du cirque. Ce processus l’a conduit à des déplacements, des frustrations et des perturbations. Loin d’être des échecs, ceux-ci ont stimulé un retour critique sur la relation qu’il entretenait avec son objet d’étude, sur ses modes d’écritures et sur les dispositifs qu’il mobilise pour assurer la circulation et la diffusion de son savoir.

Ensuite, les restitutions de cette pièce ont également constitué des expérimentations. Que ce soit à l’Abbaye de Sylvacane ou au MUCEM, ses auteurs ont testé et mis à l’épreuve des types de mise en scène, des formes et différents types de registres. Il s’agit donc encore d’une écriture en devenir. En outre, plutôt que de mobiliser ces formes pour représenter le fonctionnement ou les dysfonctionnement des frontières intelligentes, ils s’en servent pour produire un dispositif artistique et scientifique critique, c’est-à-dire, un dispositif qui propose de remettre en jeu la relation qu’entretiennent les spectateurs avec les murs. En bref, plutôt que d’informer, Oligoptik propose de nous interroger sur les manières dont nous nous engageons, nous pensons et communiquons à propos de la multiplication des barrières et des murs le long des frontières des États au 21ème siècle.

Genèse du projet

A l’origine Oligoptik avait été créée conçue pour le Festival Jours et [nuits] de Cirque(s) 2018 organisé par le CIAM. Grâce au soutien du projet LabexMed et de la Maison méditerranéenne des Sciences de l’Homme, l’équipe se réunit à nouveau entre Aix en Provence et Marseille pour poursuivre ce travail d’écriture. La nouvelle version est présentée le 10 octobre 2019 lors de la célébration des 80 ans du CNRS à l’auditorium du MUCEM à Marseille.

Représentations

10 octobre 2019, 80 ans du CNRS, MUCEM, Marseille
16 septembre 2018, Abbaye de Silvacane, La Roque d’Anthéron

Partenariats

Compagnie Les Singuliers
antiAtlas des frontières
Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans
Projet LabexMed
Centre international des arts en mouvements, Aix en Provence
Maison méditerranéenne des sciences de l’Homme
Aix Marseille université
CNRS

Photos: Christophe Raynaud de Lage, 2018

Hétérographies circassiennes I

Représentations

Cirque et sciences humaines, 17 et 18 janvier 2020, Centre International des Arts en Mouvement, La Molière, Aix en Provence
– Séminaire Recherche, arts et pratiques numériques #29, 15 janvier 2020, MMSH, Aix en Provence
Festivals jours et nuits du Cirque 2019, Centre International des Arts en Mouvement, La Molière, Aix en Provence, Samedi 28 septembre 2019 18h, Dimanche 29 septembre 2019 17h

Quand des chercheurs en sciences humaines montent sur scène avec des artistes- Hétérographies circassiennes

Dans le cadre du Festival Jours [et nuits] de cirque(s) 2019 et du projet Changement de scènes une série de workshops cirque et sciences humaines réunit des professionnels issus d’horizons variés, afin de les faire phosphorer, créer, réfléchir, innover ensemble.

Photo: Jean-François Dars, 2019

Trois duos artiste de cirque-chercheur en sciences humaines ont été constitués :
Vincent Berhault, jongleur et metteur en scène | Vincent Geisser, politologue et sociologue
Karima Direche, historienne | Angela Laurier, contorsionniste
Cédric Paga, clown | Olivier Tourny, ethnomusicologue

Les pièces de ces duos ont été élaborées dans le cadre de workshop conçus par Vincent Berhault et Cédric Parizot avec le soutien du CIAM, du LabexMed, de l’IREMAM, TELEMME et l’IDEMEC. Ils ont amenés, les chercheurs en science humaines et sociales à s’approprier l’écriture circassienne des artistes pour formuler des propositions scientifiques à travers un agencement dramaturgique.

Photo: Jean-François Dars, 2019

Généalogie du projet

Depuis plusieurs années des artistes de cirque développent des collaborations avec des scientifiques (Fourmentraux 2011). Adrien Mondot ou encore Charlène Dray mobilisent des systèmes numériques dédiés pour explorer de nouvelles formes de dramaturgie. D’autres explorent de nouveaux formats autour d’agrès inédits (Jean Michel Guy 2011). Afin de travailler ensemble le mouvement du corps et de l’objet, l’artiste Johan Le Guillerm a poussé particulièrement loin ce type de recherches. D’autres acteurs de l’univers du cirque, ou des arts avoisinants, se sont emparés de la forme académique de la prise de parole, la conférence, pour produire des œuvres hybrides, comme les « circonférences » de J.-M. Guy ou les spectacles de Frédéric Ferrer.

Notre projet s’inscrit dans le prolongement de ces initiatives tout en proposant d’inverser les rapports entre artistes et chercheurs : car il s’agit moins d’amener le cirque à s’appuyer sur les sciences, que de proposer aux chercheurs de s’emparer des écritures circassiennes. N’étant plus confinés dans un rôle de consultants ou de techniciens au service de l’artiste, les chercheurs émergent comme des auteurs au même titre que l’artiste. Ce projet s’inscrit donc également dans le prolongement des expérimentations menées par des anthropologues (Schneider et Wright 2006, Parizot et Stanley 2016) ou des collectifs scientifiques et artistiques (V et V. De Lavenère, GDRA, antiAtlas des frontières). Jouant sur l’articulation et les circulations entre humanités et arts, ils envisagent le potentiel créatif et heuristique des déplacements et des perturbations provoqués par ces expérimentations. L’enjeu n’est donc plus d’évaluer la capacité d’inspiration que la science peut apporter au cirque, ni celle de traduction ou de valorisation que le cirque peut apporter à la science (Raichvag et Walmer 2000), mais plutôt de démontrer comment l’articulation de ces démarches peut renouveler profondément nos pratiques respectives.

Photo: Jean-François Dars, 2019

Dispositifs artistiques critiques

Ces expérimentations ont impliqué les artistes et les chercheurs dans un rapport collaboratif pour élaborer ensemble une écriture au croisement de la création artistique et de la recherche. Il ne s’agissait donc pas que l’artiste mobilise le chercheur comme simple consultant, ni que le chercheur instrumentalise l’artiste comme un technicien talentueux. Ces expérimentations ont au contraire permis d’ouvrir des moments et des espaces dans lesquels artiste et chercheur ont confronté, testé et se sont approprié les modes d’écritures, les pratiques et les démarches de l’autre. L’enjeu n’était pas que l’un adopte la pratique de l’autre ou que les deux inventent des pratiques hybrides mais de jouer sur le caractère créatif et heuristique des déplacements et des écarts qu’ont généré ces expérimentations.

Photo: Jean-François Dars, 2019

Les travaux menés par certains anthropologues autour de l’intégration de la pratique artistique à la recherche (Schneider et Wright 2006, Parizot 2016) ont montré qu’à travers les perturbations et les repositionnements qu’elles entrainaient chez les participants, ces expérimentations art-science peuvent jouer le rôle de dispositifs artistiques (Fourmentraux 2010) critiques (Caillet 2014). C’est-à-dire qu’elles amènent à la fois artistes et chercheurs envisager de manière critique leurs pratiques et les modalités à travers lesquelles ils s’engagent, pensent, représentent et mettent en forme le monde qui les entourent (Caillet 2014).

Photo: Jean-François Dars, 2019

Des écritures inédites au potentiel artistique et heuristique fort

En élargissant des expérimentations de co-production d’œuvres menées par Vincent Berhault et Cédric Parizot depuis 2016 (Chroniques à la frontière, Entre, Oligoptik), ce projet visait deux objectifs principaux : confirmer l’hypothèse de travail selon laquelle la confrontation et la circulation des écritures entre cirque et recherche en sciences humaines et sociales recèle un potentiel artistique et heuristique fort ; jeter les bases d’une forme d’écriture et de création inédite pour le cirque et la recherche en sciences humaines et sociales.

Photo: Jean-François Dars, 2019

Photo: Jean-François Dars, 2019

Photo: Jean-François Dars, 2019

Vidéos

Partenaires

Compagnie Les Singuliers
antiAtlas des frontières
Centre international des arts en mouvements, Aix en Provence
Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans
Projet LabexMed
Aix Marseille université
CNRS

Photo principale: Jean-François Dars, 2019

Regards traverses- atelier de création vidéo

Le 22 septembre 2019, dans le cadre des journées du patrimoine, a eu lieu, à l’Ecole d’art d’Aix en Provence, la restitution des créations vidéo au croisement de la recherche et de la pratique artistique, réalisées dans le cadre du workshop « Regards traverses ».

Regards traverses – création vidéo

Conçu et encadré par la réalisatrice Katia Saleh, en collaboration avec le vidéaste François Lejault, cet atelier autour de la création vidéo a réuni pendant trois jours des chercheurs, des enseignants et des étudiants travaillant sur la question des migrations. Sélectionnés dans le cadre d’un appel à candidature, les participants ont travaillé en binôme pour réaliser une courte vidéo.
Organisé en collaboration avec l’Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence, l’IMéRA, l’Institut d’études sur les mondes arabes et musulmans et le projet LabexMed, cet atelier a permis de faire découvrir la création vidéo à partir des expériences plurielles et singulières des participants. Il a croisé la thématique générale de la saturation médiatique sur la « crise des migrants » en Europe avec une réflexion sur l’utilisation et le rôle de l’image.

Participants

Andrea di Georgio, journaliste freelance
Pascale Hancart Petitet, chercheure, anthropologue, TransVIHMI (IRD/INSERM/Université de Montpellier)
Juliette Honvault, chercheure, historienne, IREMAM (CNRS/Aix Marseille Université)
Geun Young Hwang, étudiante 3ème année, Ecole supérieure d’Art d’Aix en Provence
Louise Lett, étudiante 2ème année, Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
Vera Penuela, Master 2 anthropologie, EHESS, Marseille

Partenaires

Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
Institut d’études avancées d’Aix Marseille Université (IMéRA)
Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans
Projet LabexMed
Aix Marseille Université
CNRS

Photo: Cédric Parizot, Tijuana, 2010

Changements de scènes

Rencontres et formats irréguliers

Dans le prolongement des expérimentations de formats inédits au croisement de la recherche et de la création menées dans le cadre de l’antiAtlas des frontières, Changements de scènes propose un programme de rencontres irrégulières au cours desquelles le but sera d’explorer la dimension créatrice et heuristique d’expérimentations entre recherche et art. L’enjeu est de réfléchir à travers des approches inédites sur les mutations des spatialités de nos sociétés contemporaines.

Photo:Jean-François Dars, 2019

Lancé en septembre 2019, à Aix en Provence, ce programme nous conduira d’une scène à une autre : Maison méditerranéenne des Sciences de l’Homme, Ecole d’art d’Aix en Provence, Centre international des arts en mouvements, Institut d’Etudes Avancées d’Aix Marseille Université, Ecole supérieure d’Art de Marseille, MUCEM, la Cité des arts de la rue. Chaque scène aura pour défi de produire un nouveau format de rencontre au croisement de différentes disciplines ou champs.
Pensé sur le long cours, développant une démarche inclusive pour impliquer chaque fois de nouveaux partenaires, Changements de scènes vise à stimuler une dynamique collaborative sur la métropole d’Aix Marseille et de sa région pour encourager et fédérer les initiatives qui se sont développées autour de l’articulation entre recherche et création artistique.

Notre démarche s’inscrira dans un processus de co-production d’œuvres. Ce faisant, nous voulons éviter toute forme de hiérarchie dans notre processus de travail, c’est-à-dire, que les artistes ne joueront pas le rôle d’exécutants dans la modélisation d’un projet scientifique et les chercheurs ne se limiteront pas au rôle de consultant dans un processus créatif. Notre objectif sera d’ouvrir des espaces et des périodes de temps qui permettront d’apprécier, d’explorer et de jouer avec les écarts prévalant entre nos démarches pour mieux explorer par la suite des formes d’échanges et d’articulations que ceux reconnus comme étant légitimes dans nos domaines respectifs.

Programme automne-hiver 2019

Entre le mois de septembre et le mois de décembre 2019, Changements de scènes ouvrira trois workshops de trois à quatre jours au croisement de la recherche création autour des thèmes suivants : (1) écritures ludiques et interactives, (2) création vidéo, (3) hétérographies circassiennes. Encadrés par des enseignants ou des artistes, ou encore des scénographes, ces workshops permettront à des universitaires, des enseignants du secondaire et des étudiants sélectionnés sur appel à candidature d’expérimenter concrètement de nouvelles formes d’écriture collaborative avec des artistes.

Ces workshops intégreront également une série d’interventions/conférences effectuées par des chercheurs et des artistes qui feront part aux participants de leurs retours d’expérience de chercheurs et d’artistes. Les œuvres produites au cours de ces six workshops seront exposés lors d’une série de restitutions publiques dans les différentes structures partenaires.

Trois workshops recherche-création

Aires de jeux

“Aires de jeux” est un atelier d’expérimentation pratique au croisement de la recherche et de la création artistique centré autour du thème des frontières et de la production de l’espace. Proposé sur trois jours (18 au 20 septembre septembre 2019), il est ouvert aux chercheurs, enseignants et doctorants désirant explorer de nouvelles formes d’écritures, avec l’aide de jeunes artistes.
Photo: Cédric Parizot, 2018
Organisé en collaboration avec l’Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence, le projet LabexMed, l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (CNRS/Aix Marseille Université) et l’antiAtlas des frontières, l’atelier sera encadré par deux artistes (Leslie Astier et Théo Godert), ainsi que par un anthropologue (Cédric Parizot, IREMAM, CNRS/Aix Marseille Université).
Les prototypes ludiques réalisés au cours des trois jours seront exposés les 21 et 22 septembre 2019 à l’Ecole d’art d’Aix en Provence dans le cadre des journées du patrimoine.
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Regards traverses – Création vidéo

Cet atelier vidéo aura lieu les 19, 20 et 21 septembre 2019 à l’Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence. Organisé en collaboration avec l’IMéRA, il vise à faire découvrir la création vidéo à un groupe de chercheurs et étudiants, à partir des expériences plurielles et singulières des participants. Il permettra de croiser la thématique générale de la saturation médiatique sur la « crise des migrants » en Europe avec une réflexion sur l’utilisation et le rôle de l’image.

Photo: Cédric Parizot, 2010

L’objectif principal est d’explorer des nouveaux outils de fabrication de l’image permettant aux participants de s’exprimer visuellement et de créer une image sur eux même ou sur « l’Autre ». Au cours de trois jours que durera l’atelier, les participants examineront les méthodes générales de narration visuelle. Ils se pencheront sur des exemples visuels conçus par les mass media pour le grand public pour pouvoir contester les représentations problématiques. Cette expérience permettra à chaque participant de créer un court portrait vidéographique à la fin de l’atelier le 22 septembre 2019.

Cet atelier est conçu et encadré par Katia Saleh (réalisatrice) en collaboration avec François Lejault (vidéaste).

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Hétérographies circassiennes

Conçu par Vincent Berhault et Cédric Parizot, en collaboration avec le CIAM, l’IREMA, TELEMME et l’IDEMEC, ce workshop amènera des chercheurs en science humaines et sociales à s’approprier l’écriture circassienne avec des artistes pour formuler des propositions scientifiques à travers un agencement dramaturgique. L’enjeu n’est donc pas d’évaluer la capacité d’inspiration que la science peut apporter au cirque, ni celle de traduction ou de valorisation que le cirque peut apporter à la science, mais plutôt de démontrer comment l’articulation de ces démarches peut renouveler profondément nos pratiques respectives.
Photo: Ouriana Policandrioti, 2019
Trois expérimentations sont mises en œuvre au CIAM (Centre International des Arts en mouvement) à Aix en Provence. Elles impliquent Karima Direche – historienne, Olivier Tourny – ethnomusicologue et Vincent Geisser- politologue, en binômes avec trois circassiens Angéla Laurier – contorsionniste, Cédric Capa – clown et Vincent Berhault – jongleur). Ils travailleront ensemble au CIAM du 22 au 25 septembre, leur travail sera restitué les 28 et 29 septembre 2019 lors du Festival Jours [et nuits] de Cirque(s).
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Partenariats

antiAtlas des frontières
CIAM (Centre international des arts en mouvement)
Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
IMéRA (Institut d’études avancées d’Aix Marseille)
IREMAM (Institut de recherche et d’études sur les mondes arabes et musulmans)
IDEMEC (Institut d’ethnologie européenne méditerranéenne et comparative)
Projet LabexMed
TELEMME (Temps, espaces, langages, Europe méridionale, Méditerranée)
Aix Marseille Université
CNRS

Photo principale: Cédric Parizot, 2017

Aires de jeux: un workshop à la rencontre des écritures ludiques et interactives

Le 21 et 22 septembre 2019, dans le cadre des journées du patrimoine, aura lieu, à l’Ecole d’art d’Aix en Provence, la restitution des prototypes ludiques réalisés par des chercheurs et des artistes dans le cadre du workshop art-science « Aires de jeux ».

Workshop

“Aires de jeux” est un atelier d’expérimentation pratique au croisement de la recherche et de la création artistique centré autour du thème des frontières et de la production de l’espace. Il aura rassemblé pendant trois jours (18 au 20 septembre septembre 2019) des chercheurs, des enseignants et des doctorants désirant explorer de nouvelles formes d’écritures, avec l’aide de jeunes artistes.
Organisé en collaboration avec l’Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence, le projet LabexMed, l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (CNRS/Aix Marseille Université) et l’antiAtlas des frontières, l’atelier sera encadré par deux artistes (Leslie Astier et Théo Godert), ainsi que par un anthropologue (Cédric Parizot, IREMAM, CNRS/Aix Marseille Université).
Autres espaces, autres écritures de la recherche

Un autre espace de recherche

À partir de binômes chercheur + artiste, ce workshop prendra appui sur les objets ou les thématiques de recherches des participants afin de construire rapidement des prototypes ludiques qui permettront d’en donner une autre présentation et une autre lecture. Des jeux de cartes aux jeux textuels en passant par des jeux de plateaux physiques ou virtuels, les équipes s’inspireront des méthodes développées depuis de nombreuses années à l’École supérieure d’art et plus récemment au Pang Pang Club à Aix-en-Provence pour présenter à la fin du workshop une maquette de jeu.
À travers le jeu, chercheurs et doctorants se confronteront à d’autres modes d’écritures ainsi qu’à d’autres conditions de production afin de matérialiser, manipuler leur savoir et de construire leur recherche.

Partenariats

Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
Projet LabexMed
Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans

Photo: Cédric Parizot, 2018

Chroniques à la frontière

Un blog scénique entre cirque et anthropologie politique

Chroniques à la frontière (30′) est une performance solo, un billet d’humeur théâtral et jonglé, un blog scénique. Au croisement d’un numéro de jonglage, de clown et d’une conférence de science politique, elle interpelle sur les manières dont nous parlons, représentons et pensons les transformations des frontières au 21ème siècle.

Cette expérimentation est la première tentative de collaboration entre Vincent Berhault et Cédric Parizot. Elle a été mise en oeuvre à Aix en Provence, avec le soutien du Centre International des Arts en Mouvement (CIAM). L’objectif était de préparer une pièce art-science pour l’ouverture de l’exposition/colloque Coder et décoder les frontières à l’école d’architecture de Bruxelles.

Pensée comme un dispositif artistique critique, cette expérimentation a tenté d’ouvrir un espace de collaboration entre un circassien et un anthropologue afin de tester, d’éprouver des échanges et des modes d’écritures qui ne sont pas reconnus comme légitimes dans leurs champs respectifs. Le chercheur et l’artiste questionnent ainsi la forme de la conférence et jouent avec les modes de transmission du savoir. Sur scène, par un étrange mélange d’analyses et de manipulation d’objets, tout en s’appuyant sur un récit autobiographique, un personnage décalé oscille entre le mode conférentiel et le mode confidentiel. Vincent Berhault prend la parole et joue avec des objets, des matières aussi variées que des feuilles de papiers, des vestes ou encore des sacs plastiques. Les « Chroniques à la frontière » questionnent l’impact que peut avoir la parole lorsqu’elle est portée par une performance artistique impliquant le corps et la dextérité du geste.

Stimulés par cette première tentative, Vincent Berhault et Cédric Parizot entendent poursuivre leur collaboration. En 2016-2017, le premier à invité le second à participer à l’écriture de Entre, ils envisagent en 2018 la création d’autres « petits objet art-science » entre cirque et recherche anthropologique.


Reportage sur Chroniques à la frontière, réalisé lors du 33ème Forum Culture Sciences PACA par anonymal tv on Vimeo.

Représentations

Point H^UT, lieu de création urbaine, Saint-Pierre-des-Corps, 11 mars 2016
Maison des jonglages, La Courneuve, 29 avril 2016
Festival Jours [et nuits], Centre international des arts du mouvement, Aix en Provence, 23 septembre 2017
Université de Bern, Suisse, 8 mars 2018
Maison Méditerranéenne des sciences de l’Homme, Aix en Provence, 28 mai 2018
Institut d’études avancées d’Aix Marseille université, Marseille, 5 juin 2018
MUCEM, auditorium, samedi 29 septembre 2018 à 16h30
Théâtre de l’Echangeur, 20 octobre 2018 à 17h30
Festival du jeu de l’oie, MUCEM, Marseille, 21 juin 2019, auditorium du MUCEM 11h30-12h00
Colloque spectaculaire, Ateneum, 7 décembre 2021, 14h00, Dijon.

Partenariat

Centre International des Arts en Mouvement
Institut de recherche et d’études sur les mondes arabes et musulmans (UMR7310, Aix Marseille Université, CNRS)
Institut d’études avancées d’Aix Marseille Université

Entre, une hétérographie circassienne

De la création à la recherche

Entre est un projet de création artistique à mi-chemin entre le cirque, le théâtre et l’anthropologie met en place un dispositif art-science dont le but est d’explorer les formes alternatives d’écriture que peut offrir le spectacle vivant, et notamment le cirque, à la recherche en sciences sociales.

Ce projet a été initié par Vincent Berhault, jongleur, auteur et metteur en scène de la compagnie Les singuliers, il s’appuie sur une écriture collaborative qui associe étroitement les interprètes (Barthélémy Goutet, Benjamin Colin, Grégory Kamoun, Toma Roche et Xavier Kim) au niveau de l’écriture au plateau.

Un autre format d’écriture

Hétérographie circassienne, Entre propose ainsi une autre forme d’écriture, au croisement d’une démarche de création et de recherche. Les langages du corps et du mouvement s’associent à la communication verbale, non pas pour tenter de transmettre un message ou une analyse à propos de l’expérience ou du contrôle aux frontières, mais davantage pour amener les spectateurs à s’interroger sur les cadres et les images à travers lesquels ils envisagent et construisent ces phénomènes.

La démarche consiste à rechercher des résonnances entre les sources nourrissant l’écriture et des images évidentes sur le plateau. Sans didactisme, la performance circassienne se fait écho d’une idée, d’un concept ou d’une théorie. Le travail de recherche au plateau est ainsi stimulé et la dimension circassienne de l’écriture apparait particulièrement dans la mise à l’épreuve des corps, de tous les objets (scénographiques ou accessoires) ainsi que dans le questionnement permanent de la relation acteurs – objets – spectateurs.

Grâce au détournement des objets la question des échappatoires dont dispose l’homme face à un grand système de surveillance et de contrôle est aussi abordée. En réinventant l’usage de ce qui les entoure, parfois de manière absurde, les interprètes renvoient autant aux dysfonctionnements des systèmes de contrôle qu’aux multiples façons dont ils sont réappropriés, instrumentalisés et détournés par les entrepreneurs formels et informels qui se saisissent des opportunités générées par les fermetures des frontières aux mobilités humaines.

Photo, Cédric Parizot. Filage, Théâtre d’Arles, novembre 2017

De la mise en scène de la frontière à la déshumanisation des migrants

Entre est une pièce bouleversante, perturbante qui vient remettre en jeu notre rapport aux migrants et aux frontières. A une époque où nos responsables politiques instrumentalisent, à des fins électoralistes, l’arrivée de migrants qui fuient la misère et les guerres, et appellent à la surenchère sécuritaire, cette pièce est d’une grande actualité.

Elle démarre avec une certaine pesanteur, autour d’un récit tragique, celui d’un homme, Merhan Karimi Nasseri, cet Iranien qui resté 16 ans enfermé dans le Terminal 1 de Roissy en attendant de voir dans l’attente d’un règlement de sa situation administrative. D’emblée, la lenteur de ses mouvements et de son rythme d’élocution tranchent avec le rythme effréné avec lequel se déplace quelques passagers en transit. Ce sentiment de déphasage ne cesse de croître, au fur et à mesure que la pièce superpose et mêle, aux prises de paroles de cet homme, enfermé dans la circulation, des scènes qui mettent successivement en jeu le contrôle des flux de passagers, le personnel chargé du nettoyage, la formation de futurs contrôleurs, des humanitaires interviewant des migrants, un chercheur en conférence, etc. La multiplication de ces fragments, l’accélération progressive du rythme du jeu viennent noyer le récit et la vie de cet homme pour leur donner un caractère presque anecdotiques. Et c’est là une des forces de Entre, celle d’insister sur la déshumanisation des migrants qu’entraine toute la dramaturgie autour des frontières contemporaines.

Mais la pièce va beaucoup plus loin. Oscillant entre nouveau cirque et théâtre, alternant entre tragique et burlesque, Entre mobilise une écriture et une mise en scène qui ne laissent jamais au spectateur le temps de s’installer confortablement dans un registre qu’il maîtrise. Entre nous interroge donc doublement : tout d’abord, sur le regard et l’attitude que nous devons adopter à l’égard de ces migrants et du contrôle aux frontières ; et ensuite, sur la légitimité des formes artistiques et scientifiques à travers lesquelles nous pouvons évoquer, penser et aborder les phénomènes qui touchent nos sociétés.

Photo, Cédric Parizot. Filage, Théâtre d’Arles, novembre 2017

Presse

Anaïs Heluin, « La frontière au risque de l’art« , Sceneweb.fr, 18 octobre 2018
Sarah Franck, « Entre. Une parabole sur les notions de frontière et de migration. Entre les mondes, entre les arts.« , Arts-chipels.fr, 19 octobre 2018
Mathieu Dochtermann, « ‘Entre’ Les frontières, ou les limbres du monde globalisé« , Toutelaculture.com, 17 octobre 2018
Valérie de Saint-Do, « De l’air!« , Débords, Media Part, 19 octobre 2018

Création

Auteur et metteur en scène: Vincent Berhault

Une partie de l’écriture du spectacle résulte d’une recherche au plateau, les interprètes sont donc tous également inscrits comme auteurs au répertoire.

Avec: Barthélémy Goutet, Benjamin Colin, Grégory Kamoun, Toma Roche et Xavier Kim.

Composition musicale: Benjamin Colin

Contribution à l’écriture : Cédric Parizot – Anthropologue du politque

Costumes: Barthélémy Goutet

Création lumière: Benoit Aubry

Construction décor : Plug In Circus

PARTENARIATS

Co-productions et accueil en résidence :

Théâtre d’Arles, scène conventionnée art et création – nouvelles écritures
Cie 36 du mois – Cirque 360
Pôle National des Arts du Cirque de la Verrerie, Alès
L’Espace Périphérique de la Villette, Paris

Accueils en résidence de recherche/labos :

L’échangeur à Bagnolet du 20 au 22 juillet 2015
2R2C Paris – laboratoire de recherche du 12 au 15 octobre 2015.
Centre des arts et du Mouvement (CIAM) Aix-en-Provence – laboratoire de recherche du 24 et 25 février 2016.
Le Point HauT, lieu du pOlau à St pierre des Corps – recherches scientifiques et typographiques du 4 et 11 mars 2016.
Le vent se lève Pantin – laboratoire de recherche du 7 au 8 mai 2016.
Atelier du plateau Paris – étape de recherche avec les interprètes du 30 mai au 4 juin 2016.

Accueils en résidence de création :

Académie Fratellini Saint-Denis – du 27 juin au 2 juillet 2016.
l’Espace Périphérique de la Villette Paris – du 20 au 24 février 2017.
Théâtre Sylvia Monfort Paris –du 27 février au 3 mars 2017.
Cie 36 du mois – Cirque 360 – du 10 au 21 avril 2017.
PNAC de la Verrerie Alès – du 22 mai au 2 juin 2017.
Ville du Plessis-Paté – du 15 au 22 septembre 2017
Théâtre d’Arles – du 23 octobre au 6 novembre 2017.

Soutiens et Subventions :

aide à la production dramatique de la DRAC Ile-de-France
aide à la création pour les Arts du Cirque de la DGCA
soutien de la SACD / Processus Cirque
aide au projet de la Région Ile-de-France
Institut de Recherche et d’Etude sur le Monde Arabe et Musulman (UMR7310, Aix Marseille Université, CNRS)
Institut d’Etudes Avancées (IMéRA) d’Aix Marseille Université
aides à la création de l’ADAMI et de la SPEDIDAM

Représentations antérieures

Théâtre d’Arles, 7 et 8 novembre 2017
La verrerie d’Alès, 10 novembre 2017
Théâtre Le Monfort, Paris, 15-18 mars 2018, Festival des illusions
Théâtre de l’Echangeur, 16-20 octobre 2018

A Crossing Industry, un jeu vidéo documentaire et artistique

Recherche ethnographique, création artistique et technologie vidéo-ludique

Intitulé A Crossing Industry, ce jeu porte sur le fonctionnement du régime de séparation israélien en Cisjordanie dans les années suivant la fin de la seconde Intifada (2007-2010). Son élaboration, toujours en cours, est effectuée par une équipe transdisciplinaire composée d’un anthropologue (Cédric Parizot), d’un artiste (Douglas Edric Stanley), d’un philosophe (Jean Cristofol) et de onze étudiants et anciens étudiants de l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence. Cette expérimentation essaie d’envisager comment la technologie vidéo ludique permet d’articuler une démarche documentaire dont l’objectif est de modéliser une analyse ethnographique, avec une démarche artistique animée par ses propres enjeux esthétiques et poétiques.

Les premières réflexions autour du contenu et de la forme du jeu ont commencé début 2013. Elles ont été menées au sein de l’École d’Art d’Aix-en-Provence. Nous avions pris l’habitude de nous retrouver chaque semaine dans l’Atelier Hypermédia de Douglas, dans lequel il expérimente avec ses étudiants la programmation dans leur pratique artistique.

En octobre 2013, le projet a adopté un langage graphique intégrant des objets 3D simplifiés (low-poly), un fond uni en nuances de gris — plutôt vide et sans sol visible —, et des couleurs primaires pour représenter les différents types de lieux (zones sous contrôle israélien, zones palestiniennes, etc.) et les différents statuts des personnes (Palestiniens, Palestiniens de citoyenneté israélienne, Juifs israéliens, soldats, garde-frontières, etc.). En distribuant ces objets sur une carte inspirée de celle que Cédric Parizot leur avais dessinée, l’équipe a pu élaborer la première ébauche de l’espace de navigation.

Cependant, cette première ébauche nous a fait prendre conscience de la dimension irréconciliable des écarts prévalant entre la proposition scientifique de Cédric et celles, artistiques, élaborées par Douglas et les étudiants. C’est à partir de là que nous avons pris conscience du fait que nous devions repenser nos positions respectives. Cédric ne pouvait plus se cantonner dans le rôle d’un passeur de savoir, tandis que les artistes tenteraient de l’objectiver à travers le codage du langage graphique, du texte et des règles d’interactions. Nous devions nous investir dans une réflexion plus profonde pour comprendre comment nous pourrions composer avec ces écarts.

Un documentaire artistique et critique

En septembre 2014, nous avons alors exploré de nouvelles pistes d’articulation, ainsi qu’un nouveau scénario. De son côté, Cédric s’est efforcé de s’approprier le langage graphique réalisé à partir de Unity et les logiciels d’écriture du scénario. Les réflexions suscitées par ces tentatives lui ont permis d’opérer un retour critique sur le caractère hégémonique qu’avaient pris certains régimes de visibilité, comme la cartographie, dans sa réflexion. Ces échanges ont également permis d’appréhender la nature contingente et intersubjective du processus de construction d’une argumentation à travers un jeu vidéo. Enfin, ils ont contribué à repenser les formes d’intervention que nous offrait A Crossing Industry. C’est en ce sens que ce jeu a joué pleinement son rôle de documentaire critique: non pas tant dans sa capacité de documenter une situation sur le terrain mais en nous conduisant à réfléchir à nos modes d’accès et de construction du réel.

Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley – A Crossing Industry 2014 from antiAtlas Journal on Vimeo.

Cette seconde ébauche devait pouvoir mettre en scène l’histoire d’un jeune Palestinien revenant vivre dans son village d’origine au lendemain de la seconde Intifada (2000-2004). Après quelques années d’absence à l’étranger, il découvre non seulement que celui-ci se trouve enclavé entre des colonies israéliennes et le mur de séparation, mais également que les restrictions de mouvement autour de celui-ci ont été drastiquement renforcées. Mais les Israéliens ne sont pas les seuls à règlementer les déplacements des personnes et des marchandises. Reprenant progressivement ses repères, il découvre toute une économie informelle de l’intermédiation et du passage impliquant des Palestiniens, des Israéliens, et parfois même des internationaux.

Pour plus d’éléments sur ces premières étapes du processus d’élaboration du jeu voir: Parizot, Cedric, Stanley, Douglas Edric, « Recherche, art et jeu vidéo, Ethnographie d’une exploration extra-disciplinaire », antiAtlas Journal, 01 | 2016, [En ligne], publié le 13 avril 2016

Un autre format d’écriture et d’enseignement

En 2016, compte tenu des écarts persistants entre les propositions graphiques et le scénario et de la difficulté de progresser, nous avons choisi de repartir à zéro. Cédric Parizot à alors changé de medium pour penser le cadre du scénario. De l’écrit, il est passé au dessin d’une dizaine de scènes. Sur cette base, l’histoire a été complètement repensée, de même que l’interface graphique. Ce nouveau projet implique dorénavant Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley et Robin Moretti.

Le nouveau scénario s’articule autour d’un jeune anthropologue français qui quitte une ville israélienne dans le désert du Néguev pour se rendre de l’autre côté du mur, dans un village palestinien. Il doit y rencontrer un dernier interloculteur pour finaliser son enquête sur les réseaux de passeurs qui facilitent le passage des ouvriers Palestiniens en Israël. Cependant, il ne rencontrera jamais cette personne. Faute d’informateur, il doit improviser et chercher de nouveau contacts auprès de ses proches et de ses relations. Ce faisant, il réalise qu’Israéliens et Palestiniens sont bien plus interconnectés que ne le laisse entendre le projet de séparation israélien.

Partant de cette histoire, l’objectif est de produire un documentaire ludique à partir d’une approche artistique et critique sur le fonctionnement du régime de séparation israélien imposé aux Palestiniens des Territoires occupés. L’enjeu est également d’expérimenter et de développer des pratiques inédites d’écriture qui associe recherche, art et technologie vidéo-ludique pour :
– construire et mettre en forme une connaissance issue d’une recherche
ethnographique
– créer des supports de formation à l’attention des jeunes artistes et des
jeunes chercheurs en sciences humaines
– développement de nouveaux outils d’écriture et de narration non-linéaire à
destination des chercheurs et des artistes indépendants.

Partenariat

Institut de recheche et d’études sur le monde arabe et musulmans (UMR7310, Aix Marseille Université, CNRS)
Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence
Institut d’études avancées d’Aix Marseille Unuversité (IMéRA)
Ministère de la Culture

Isabelle Arvers – Heroic Makers vs Heroic Land

Isabelle Arvers
Heroic Makers vs Heroic Land
Vidéos Machinimas, 2016

Comment vivre dans la Jungle de Calais? Comment créer des espaces de vie et de partage ? Comment faire le travail du gouvernement qui refuse de voir l’urgence de la situation et qui se focalise sur la réduction du nombre de réfugiés à Calais? En moins d’un an, avec l’aide de nombreuses ONG, les réfugiés ont construit une ville-monde, peuplées de cafés, restaurants, cuisines, écoles, galeries d’art et espaces culturels…

Voir l’article sur Makery qui publie en exclusivité les deux interviews réalisées par Isabelle Arvers

Isabelle Arvers est auteur, critique et commissaire d’exposition indépendante. Son champ d’investigation est l’immatériel, au travers de la relation entre l’Art, les Jeux Vidéo, Internet et les nouvelles formes d’images liées au réseau et à l’imagerie numérique.

Zimako, de la jungle de Calais au machinima d’Isabelle Arvers:

Marko, de la jungle de Calais au machinima d’Isabelle Arvers :

Nicola Mai – Travel

Nicola Mai
Travel
2016

Le projet art-science Emborders de Nicola Mai met a nu et en scène la question des frontières biographiques et les récits de souffrance qui permettent aux demandeurs d’asile d’obtenir la protection humanitaire. Ce projet se compose de deux ethnofictions : Samira et Travel.

L’ethnofiction Travel est le second volet d’Emborders. Travel présente l’histoire de Joy, une femme nigériane se prostituant au Bois de Vincennes à Paris. Joy a quité le Niger pour aider sa famille après la mort de son père. Elle savait avant de partir qu’elle aurait à se prostituer mais n’avait aucune idée des difficultés des conditions de vie et de travail qu’elle aurait à surmonter en France. Après avoir enduré plusieurs mois d’exploitation, Joy décide de réinventer son histoire de migration et de la transformer en histoire de trafic. Avec l’aide d’une association elle obtient la protection humanitaire, mais pour continuer à aider sa famille et à vivre sa vie, elle continue de vendre son corps.

Nicola Mai est ethnologue et réalisateur, Professeur de Sociologie et Etudes migratoires au Working Lives Research Institute de l’Université Metropolitaine de Londres. Ses publications universitaires et ses films ont pour objet les expériences et perspectives des migrants qui vendent leur corps et leur amour, insérés dans l’industrie globalisée du sexe pour vivre leurs vies. A travers des ethno-fictions expérimentales et des résultats de recherches inédites, Nicola Mai met en cause les politiques qui lisent forcément la migration liée au travail sexuel en termes de trafics, tout en portant l’accent sur la complexité ambivalente des dynamiques d’exploitation et d’auto-affirmation qui sont en jeu. Dans sa Sex Work Trilogy, il explore différentes expériences de rencontres entre la migration et l’industrie sexuelle.

The Virtual Watchers

A TRADUIRE

Joana Moll & Cédric Parizot, 2010

The Virtual Watchers is an on-going research project at the intersection of art, research and technology that questions the dynamics of crowdsourcing at contemporary State borders. It focuses on the exchanges that occurred within a Facebook group that gathered American volunteers ready to monitor US-Mexico border through an online platform that displayed live screenings of CCTV cameras. The declared aim of this operation was to bring American citizens to participate in reducing border crime and block the entrance of illegal immigration to the US by means of crowdsourcing. This initiative, a public-private partnership, was originally launched in 2008 and consisted of an online platform called RedServants [1] and a network of 200 cameras and sensors located in strategic areas along the US Mexico border. Some of these cameras were also installed in the private properties of volunteering citizens. The online platform gave free access to the camera broadcasts 24/7 and allowed users to report anonymously if they noticed any suspicious activity on the border. RedServants had 203.633 volunteer users since 2008, and resulted in 5331 interdictions, which overall represents almost 1 million hours of free labour for the authorities. The program stopped in 2012 due to lack of financial support, as announced in its official Facebook page in May 13th 2012.

This project offers an interactive window that allows the public to access some of the original video feeds recorded by the RedServant’s surveillance cameras, and dive into the conversations, jokes, and questionings of the Facebook group that gathered some of the volunteering citizens that actively used the platform [2] . By doing so, it highlights to what extent the emotional investment and exchanges of these people work as an essential mechanism in the construction and legitimization of a post-panoptic system.

1. The original name of the platform has been changed in order to protect the identity of its users.
2. All the profile pictures and real names of the Facebook group members have been faked in order to protect their identities.

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