Atelier 2 : Matérialisation, dématérialisation de la frontière

22-23 mars 2012
Maison des Astronomes, IMéRA
2 place Le verrier
13004 Marseille

Organisation: Stéphane Rosière (Université de Reims Champagne-Ardenne), Nicola Mai (London Metropolitan University),
Cédric Parizot (IMéRA-IREMAM, Aix Marseille Université, CNRS)

La matérialité des murs et des frontières du XXIe siècle

Stéphane Rosière (géographe, HABITER, Université de Reims)
Les barrières frontalières : seuil, types et logiques

Elisabeth Vallet (politologue, Chaire Raoul-Dandurand, UQAM, Montréal)
Dynamique de construction des barrières frontalières

Hervé Braik (Business Segment Manager, Border Security Systems, C4I Defense & Security Systems Division Thales)
Les systèmes de surveillance des frontières

Matérialisation/dématérialisation des frontières : une question de définition ?

Paolo Cuttitta (politologue, Università di Palermo)
The construction of a border island: The Lampedusa case

Shira Havkin (politologue, CERI, IEP de Paris)
Les transformations du dispositif sécuritaire « frontalier »israélien et l’externalisation des checkpoints

Stéphanie Latte Abdallah (historienne, IREMAM, CNRS, Aix Marseille Université)
Déni de frontières. Toile carcérale et management des prisonniers politiques palestiniens après Oslo (1993-2010)

Olivier Clochard (géographe, ADES/Terre Ferme)
La dilution de la frontière dans le territoire

Transgresser les frontières matérielles et immatérielles

Cédric Parizot (anthropologue, IMéRA/IREMAM, Aix Marseille Université, CNRS)
Crossing and taking over a dysfunctional wall: the Israeli-Palestinian case

Heath Bunting (artiste)
Build a new identity workshop

Résumés

Stéphane Rosière (géographe, HABITER, Université de Reims)
Les barrières frontalières : seuil, types et logiques

Durant cette présentation, la notion de barrière frontalière sera discutée et notamment en termes de seuil, types et logiques à l’œuvre sur ces artefacts. La question du seuil revient à se demander à partir de quel stade un ouvrage frontalier peut être considéré comme une barrière, les frontières « inexistantes » sur le terrain répondent à la représentation dominante des frontières ouvertes, celle-ci sera mise en avant comme l’archétype de la frontière contemporaine, la barrière en étant l’opposé. La question du type renvoie essentiellement à la distinction mur/clôture qui sera discutée d’un point de vue symbolique et d’un point de vue technique. L’efficacité technique des clôtures high-tech pourra être soulignée. Au-delà des questions de morphologie, la difficile mesure de ces artefacts sera aussi envisagée. Enfin, en termes de logiques, les barrières frontalières peuvent être envisagées de façon multiscalaire : logique de leur fonctionnement et logiques d’apparition. En termes de fonctionnent on soulignera leurs liens avec des checkpoints mis en réseau entre eux et relié à des bases de données (nationales et parfois internationales) ; à l’échelle mondiale, les barrières frontalières paraissent liées à des macrologiques géopolitiques et surtout aux discontinuités de développement.

Elisabeth Vallet (politologue, Chaire Raoul-Dandurand, UQAM, Montréal)
Dynamique de construction des barrières frontalières

While drawing a border is, by definition, a bilateral process, building a wall is a unilateral act that freezes a line of demarcation. A border can be seen as an area of contact and influence but the advent of a world without constraints or standards, particularly economic standards, is leading to the creation of barricades around populations as states retreat into the security of feudal reflexes, testifying to certain undercurrents of globalization that paradoxically are encouraging a return to a kind of ‘neo-feudalization’ of the world. Thus the return of the wall as a political tool may be symptomatic of a new era in international relations, redefining interstate couples around the world. As such the US perception of its own borders is symptomatic of this trend. We will explore the history and impact of the border wall issue in a comparative perspective (southern border v. border as well as in other hemispheres) as the US border wall is a relevant referent to explore more complex (and less accessible) fenced borders of the post cold war era.

Hervé Braik (Business Segment Manager, Border Security Systems, C4I Defense & Security Systems Division Thales)
Les systèmes de surveillance des frontières

De plus en plus de pays à travers le monde font face à une forte augmentation des entrées illégales à travers leurs frontières. Les menaces sont le traffic de marchandises prohibées telles que la drogue, les armes et l’immigration illégale, plus rarement le terrorisme. Afin de lutter contre ses activités criminelles, les autorités publiques de ces pays investissent dans la mise en place de systèmes de surveillance des frontières. Utilisant diverses technologies, les systèmes déployés permettent par une automatisation accrue et par de meilleures performances de supporter les gardes-frontières dans leurs tâches quotidiennes de surveillance des zones frontalières et d’interception des contrevenants. Ces solutions se traduisent par une meilleure efficacité dans le contrôle des frontières.

Paolo Cuttitta (politologue, Università di Palermo)
The construction of a border island: The Lampedusa case

Why is Lampedusa more ‘border’ than other Italian and European border spots? I start from the assumption that Lampedusa’s high degree of ‘borderness’ results not only from its geographical location within the current historical context, but also from a specific ‘borderisation’ process. Specific policies and practices of immigration control have transformed the island in the Strait of Sicily not only into a hotspot of the Italian and EU border regime, but also into a stage on which the narratives of the ‘tough border’ and of the ‘humane border’ coexist in the performance of what I call the ‘border play’. After summarising Lampedusa’s ‘borderness’ from different points of view (the volume of immigration by sea, the deadly consequences of border controls, their compliance with human rights, the agency of migrants etc.), I will analyse the main measures and practices as well as the narratives prevailing, between 2004 and 2011, in five different acts of the ‘border play’.

Shira Havkin (politologue, CERI, IEP de Paris)
Les transformations du dispositif sécuritaire « frontalier »israélien et l’externalisation des checkpoints

Une des particularités de la géographie politique israélienne tient à l’ambivalence qu’y prend le terme de frontière. Trois des frontières de l’Etat israélien ne sont pas reconnues au niveau international et sont considérées comme frontières temporaires. Le dispositif sécuritaire mis en place afin de contrôler l’entrée dans le territoire national est pourtant extrêmement important. Ce dispositif concerne tout d’abord les forces déployées aux points de contrôle placés à la périphérie et à l’intérieur des territoires palestiniens occupés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, mais il renvoie également à la construction d’un mur sur la frontière israélo-egyptienne destiné à réduire le flux d’immigrants et de réfugiés, ainsi qu’à la restructuration de la police de l’immigration dans le cadre d’une réforme structurelle. Dans cette présentation, je vais étudier les dernières évolutions des dispositifs sécuritaires « frontaliers », en soulignant les liens avec les caractéristiques et les transformations internes à la société israélienne. Le processus de délégation de la gestion des checkpoints « frontaliers » à des entreprises de sécurité privées, entamé en 2006, constitue un exemple particulièrement intéressant pour analyser l’articulation de logiques sécuritaires et de logiques néolibérales. Si cette réforme, désignée comme « citoyennisation» par ses initiateurs, est souvent présentée comme une démarche de« démilitarisation » d’une sphère militaire,l’analyse de ses modalités révélera qu’elle est accompagnée par un processus parallèle de « re-militarisation » de la société. L’étude des différentes composantes du dispositif sécuritaire« frontalier » israélien et de son évolution dégagera des modalités hétérogènes qui renvoient à la restructuration du dispositif sécuritaire et militaire ainsi que les nouvelles configurations que prend la notion de frontière.

Stéphanie Latte Abdallah (historienne, IREMAM, Aix Marseille Université, CNRS, Aix en Provence)
Déni de frontières. Toile carcérale et management des prisonniers politiques palestiniens après Oslo (1993-2010)

Le système carcéral israélien adressé aux Palestiniens étend sur les territoires occupés une toile carcérale qui est tout à la fois une réalité et une virtualité carcérale, c’est-à-dire une capacité à emprisonner quasiment tout le monde à partir de l’âge de 12 ans. Cette toile carcérale crée un espace suspendu dont les limites géographiques, juridiques et temporelles sont floues, et à certains égards indéterminées. Cette communication entend ainsi reconsidérer la question des frontières et des limites (entre Israël et les territoires occupés/entre dedans et dehors) dans les espaces israélo-palestiniens à partir des modalités de l’incarcération des Palestiniens en lien avec les morcellements territoriaux dans les territoires et les pratiques destinées à pallier enfermements et fragmentations.

Olivier Clochard (géographe, ADES/Terre Ferme)
La dilution de la frontière dans le territoire

Les lieux d’enfermement de l’Union européenne et ses pays voisins relèvent d’une grande diversité. De l’important centre de rétention administrative construit récemment – selon des normes rappelant des standards de grandes chaînes d’hôtels – à l’espace informel marqué par des conditions matérielles dégradantes, tous ces lieux forment un ou plusieurs dispositifs dont les limites sont parfois difficile à saisir. Si les premiers s’inscrivent dans des cadres législatifs de plus en plus complexes, l’existence des seconds résulte souvent de montages locaux, ad hoc, ponctuels. Mais les deux types de structures s’inscrivent dans le temps – marquant les politiques migratoires contemporaines – et sont devenus des jalons importants dans les parcours des exilés. Enfin les circulations entre ces lieux – et à l’intérieur de ses structures –participent à l’élaboration de frontières avec les sociétés dans lesquelles les migrants ont envisagé de vivre.

Cédric Parizot (anthropologue, IMéRA/IREMAM, Aix Marseille Université, CNRS)
Crossing and taking over a dysfunctional wall: the Israeli-Palestinian case

Le perfectionnement et l’automatisation des technologies de surveillance est souvent perçu comme un moyen de déployer un contrôle plus fiable, plus standardisé, plus prévisible que le contrôle humain. Je montrerai que cette approche est illusoire : il n’est pas possible de dissocier une technologie de surveillance aussi automatisée soit-elle des conditions politiques, sociales, et économiques dans lesquelles elle est mise en œuvre. Déployées et associé à des systèmes de contrôle préexistant, des acteurs institutionnels et politiques spécifiques, les technologies de surveillance reproduisent les contradictions et les imprévisions des systèmes et des acteurs qui les mettent en oeuvre, bien souvent, en transforment la réalité qu’elles sont censées contrôler, elles créent de nouveaux défis qui échappent à leurs promoteurs. Pour illustrer mon propos, je prendrais pour exemple le cas du mur de séparation construit en Cisjordanie. Partant d’observations développées sur ce terrain, je montrerai que le fonctionnement de ces technologies de contrôle ne peut être envisagé sans prendre en compte leurs disfonctionnements et la manière dont ceux-ci sont réappropriés par un ensemble d’acteurs formels et informel en dehors de l’Etat.

Partenariats

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Photo: Cédric Parizot, Le Mur de séparation, Bethlehem, Cisjordanie, 2008

Atelier 1 : Réseaux et frontières

26-27 janvier 2012
Maison des Astronomes,
IMéRA,
2 PLace Le verrier,
13004 Marseille

Organisation: Nicola Mai (London Metropolitan University), Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, Aix Marseille Université, CNRS)

Approche en réseau et étude de cas

In this session, through the presentation of three case studies we will discuss the relevance of different conceptualizations and theories of networks in understanding both state control mechanisms and circumvention processes deployed by actors on the ground. What kinds of boundaries do networks challenge and reproduce? How can they become controlled and manipulated by state powers? How can they in turn control and manipulate the mobility of people and the surveillance targeting them?

Olivier Clochard (Géographe, programme Terrferme / ADES / Univ. Bordeaux 3)
Construction de réseaux dans le contrôle frontalier de l’Union européenne

Francesca Sirna (Sociologue, ANSO-UCL) (Anthropologist, Reader in Migration Studies at London Metropolitan University)
Réseaux, espaces et mobilités : le cas des Piémontais et des Siciliens en Provence

Nicola Mai
Of trafficking and other networks: the moralist criminalisation of migrant networks supplying the sex industry

Conceptualiser, analyser et gérer les réseaux

The participants of this session will try to provide a general view of mechanisms, techniques and methodologies by which state authorities, smugglers and hard scientists conceptualize networks of data, mobilities and materialities. Whose interests do these technologies and governmentalities serve? What forms of political resistance and complicity can emerge in the process?

Lionel Pascal (expert douanier (OMD et FMI), Bordeaux IV-Montesquieu)
Réseaux et frontières : des contrôles deterritorialisés

Cédric Parizot (Anthropologue, IREMAM, CNRS, Aix Marseille Université)
Individualizing control, duplicating borders: Biosocial profiling, sponsorship and smuggling networks between Israel and the West Bank

Représenter des réseaux et les pratiques de réseaux

This third session will address the ways by which networks could be represented through different images and devices and the implications these representation have at different levels. How do we represent networks? Who do they represent? What are the differences and similarities emerging between the political and the scientific dimension of the representation of networks? Can we transcend subjectivity and politics in understanding and representing networks?

Wouter Van den Broeck, chercheur et designer (ISI Foundation, Turin, Italie; Addith.be)
The language of network representations

Christophe Bruno (artiste et commissaire d’expositions)
Art et réseau, cartographie de flux, cycles et échelles

Antoine Vion (Sociologue, LEST, AMU)
What does the representation of ‘transnational networks’ refer to ? Reconsidering data, contexts, and borders

Résumés

Olivier Clochard, géographe (programme Terrferme / ADES / Univ. Bordeaux 3)
Construction de réseaux pour renforcer le contrôle frontalier de l’Union européenne

Selon Claude Raffestin, les réseaux sont une forme d’inscription d’un pouvoir sur l’espace. Ainsi les évolutions techniques comme les bases de données informatiques et les centres de rétention administrative transforment la frontière plus qu’elles ne la suppriment, en la déplaçant de part et d’autre des limites internationales, en la dilatant à l’échelle d’une région frontalière et la connectant à d’autres lieux. Quelles relations peut-on alors établir entre les reconfigurations des frontières européennes entamées depuis les années quatre-vingt-dix, l’évolution des centres de rétention administrative européens et l’établissement des bases de données informatiques ? Comment la mise en réseau de ces différents dispositifs se rapporte-t-elle à l’établissement de frontières migratoires ?

Francesca Sirna (Sociologue, ANSO-UCL)
Réseaux, espaces et mobilités : le cas des Piémontais et des Siciliens en Provence

L’objectif de cette intervention est de reconstruire les séquences génératives de comportements migrants dans des contextes donnés, en essayant de détailler et d’expliquer les différences entre immigration « de proximité » (Piémontaise) et de « longue distance » (Sicilienne).

Le choix d’installation des Piémontais et des Siciliens en Provence relève également de questions d’ordre différent. Quel est leur rapport au territoire d’émigration et d’immigration ? Est-ce que l’ancienneté de la présence en pays d’immigration peut déterminer des modes d’insertion différents dans les pays d’accueil ? Est-ce que les Piémontais et les Siciliens, en partageant le même lieu d’immigration, se côtoient, s’aident, font partie du même réseau migratoire, du même groupe de «migrants italiens » ? Est-ce que le départ a le même rôle pour les deux groupes et pour leurs familles restées dans les villages d’origine ? Quel type de liens unit les migrants et les sédentaires ?

J’ai voulu privilégier la dimension processuelle, dynamique et historique du phénomène migratoire, afin de montrer les tâtonnements, les incertitudes et les revirements de trajectoires certes individuelles, mais insérées dans un entrecroisement de relations qui partent du village d’origine pour s’étendre au niveau international.

Nicola Mai (Anthropologist, Reader in Migration Studies at London Metropolitan University)
Of trafficking and other networks: the moralist criminalisation of migrant networks supplying the sex industry

The granting of asylum and the social protection of vulnerable migrant groups have become strategic borders between the West and those of the Rest of the world. In the process, state benevolence and fundamental rights are allocated on the basis of the performance of ‘true’ victimhood scripts according to well-rehearsed politics of compassion. Anti-trafficking moral panics and social interventions play a strategic role within the deployment of these neoliberal governmentalities. By criminalising the involvement of young female and male migrants in the sex industry and the personal and professional networks they use to migrate in terms of trafficking and exploitation, the anti-trafficking paradigm enforces new embodied borders and hierarchies of mobility. Paradoxically, these reinforced borders and the parallel criminalisation of the networks of migrants working in the sex industry produce the exploitative conditions that anti-trafficking rhetoric and social interventions aim to eradicate.

Lionel Pascal (Expert douanier OMD et FMI, Bordeaux IV-Montesquieu )
Des contrôles déterritorialisés

Le passage en frontière est un franchissement « à la carte » ! Tout est fait pour obtenir des informations (renseignements) sur les personnes, les moyens de transport et les marchandises  avant que ces éléments se présentent.  Pour cela, les services utilisent leurs réseaux pour recueillir les données permettant de choisir la forme de contrôle adaptée aux risques présumés par une analyse informatique obligeant les agents à suivre les directives résultant de cette analyse. Les données recueillies arrivent de tous les autres services en charge de la sécurité et du croisement avec d’autres éléments archivés. Les inconnus et les suspects feront l’objet d’un contrôle approfondi.

Cédric Parizot (Anthropologue, IREMAM-CNRS, IMéRA)
Individualizing control, duplicating borders: Biosocial profiling, sponsorship and smuggling networks between Israel and the West Bank

This presentation focuses on sponsorship that Palestinians need from an Israeli citizen in order to apply to an entry permit into Israel. It shows that this rule makes the belonging to a network often more relevant than the bio-social profile of an individual regarding mobility access. Yet, this study does not merely assess the impact of an administrative procedure on people practices and rights. Based on ethnographic investigations carried out since the mid 1990s between Israel and the West Bank, studies the ways by which Israeli, Palestinian and international actors have taken over these regulations, and the power relations they entail, in order to serve their own interests and develop new economic activities. Relying on the assumption that personal networks are constitutive of mobility access, this presentation will explore the ways these re-appropriations of local actors and these networks restructure people relationships to space, territory and borders.

Wouter Van Den Broeck (Designer, Data-driven Exploration of Dynamical Networks)
The language of network representations

In this presentation I will outline a bottom-up analysis of the applications, mechanisms and constraints of network representations. This analysis will lead us from the basic nature of data and information, over the mechanisms of visual representation of information in general, to the grammar and semantics of network representations in particular.  Its aim is to provide a common ground for reasoning about networks and their representations across disciplines.

Christophe Bruno (artiste et commissaire d’expositions)
Art et réseau, cartographie de flux, cycles et échelles

Ses travaux (détournements, installations, performances, œuvres conceptuelles…) proposent une réflexion critique sur les phénomènes de réseau et de globalisation dans les champs du langage et de l’image. Il présentera quelques-unes de ses œuvres, notamment divers détournements de structures globales du Web 2.0, comme le « Google Adwords Happening », performance au sujet du prix des mots sur le réseau. Il montrera également ses projets plus récents comme le Dadamètre (www.iterature.com/dadameter) qui traite de cartographie des concepts sur le Web, et Artwar(e) (en collaboration avec le philosophe Samuel Tronçon, www.artwar-e.biz). Ce dernier projet concerne la gestion des risques et l’analyse de tendances dans le champ de l’art. S’inspirant à la fois de méthodes marketing comme les « cycles de hype », des « cycles de Kondratiev » du système-monde à grande échelle, et de la théorie contemporaine des réseaux,  Artwar(e) a pour objectif de détecter les phénomènes d’émergence, d’obsolescence et d’import-export de concepts, en particulier sur les réseaux sociaux. Il parlera aussi des travaux qu’il poursuit actuellement en tant que commissaire de l’espace virtuel du Jeu de Paume, avec les expositions « identités précaires » et « blow-up ».

Antoine Vion (Sociologue, LEST, Aix Marseille Université)
What does the representation of ‘transnational networks’ refer to ? Reconsidering data, contexts, and borders

A growing set of network studies is applied to transnational networks. Ontologically, the transnationality of links which structure such networks often seems to be taken for granted. This first calls for a conceptuel framework of transnational dynamics. But even if it is provided, paying attention to transnational networks supposes a sharp examination of data. A first question in this field is thus the reliability of the data collected. A second problem is related to the meaning which is carried out by representing transnational networks. Following Goodman & Elgin, referring to any object cannot be separated to the context within which it may be understood. This poses problems for designers and readers of graphical representations of transnational networks used in comparative or longitudinal studies. Sharing common backgrounds on contexts especially requires common abilities to spot the evolving political or social borders showed out by the graphs. Making these borders more explicit and discernible remains a huge challenge in this field, and demands a complex integration of data properties, context shifting and of social ways of  border-making.

« A quoi réfère la représentation des réseaux transnationaux ? Pour un nouvel examen des données, des contextes, et des frontières »

Les études de réseaux sont marquées par l’émergence d’un pan de plus en plus important d’analyses traitant de réseaux transnationaux. Ontologiquement, la question de la transnationalité des liens qui structurent de tels réseaux semble souvent tenue pour acquise, alors même que le modèle conceptuel qui sous-tend l’idée de dynamique transnationale doit être précisé. Mais même lorsque cela est établi, l’attention aux réseaux transnationaux suppose un examen scrupuleux des données, et de leur fiabilité au regard des critères définis. Un deuxième problème est lié au sens que produit la représentation des réseaux transnationaux. En suivant Goodman & Elgin, on rappellera que toute forme de référence est difficilement séparable d’un contexte qui rend possible une compréhension de l’objet. Cela pose à ceux qui dessinent ou lisent une représentation graphique de réseaux transnationaux un défi particulier lorsque les graphes appuient une étude comparative ou longitudinale. Partager des connaissances d’arrière-plan est nécessaire pour repérer les frontières politiques ou sociales que font ressortir les graphes, ce qui suppose des dispositions que tout le monde n’a pas. Il y a donc un enjeu à outiller la représentation graphique de ces frontières pour les rendre plus explicites et discernables, ce qui suppose l’intégration complexe de propriétés propres aux données, de changement de contexte et des modes d’existence sociale de la frontière.

Partenariat

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Photo: Cédric Parizot, Le mur de séparation, Sud de la Cisjordanie, 2006

Atelier 0 : Journée Art-Science de l’IMéRA, les frontières du 21e siècle

29-30 Septembre 2011
IMéRA,
2 place Le verrier,
13004 Marseille

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS/AMU), Roger Malina (Observatoire astronomique Marseille-Provence
Samuel Bordreuil, sociologue (Laboratoire méditerranéen de sociologie)

Les deux journées Art-sciences permettront un premier éclairage transdisciplinaire des frontières par des artistes, des chercheurs en sciences sociales et des spécialistes des sciences dures, en s’inspirant le cas échant des quatre chantiers d’interdisciplinarité identifiés dans le programme exploratoire de l’IMéRA  :

Thème 1. Flux et réseaux, les dynamiques des frontières. Les participants discuteront des nouvelles techniques déployées par les Etats pour aménager l’espace, contrôler les mobilités et les flux, et de la manière dont les acteurs (populations frontalières et mobiles) développent de nouvelles stratégies de contournement ou de réappropriation de ces dispositifs. L’attention sera également portée sur la structuration des réseaux et leurs articulations à l’interface entre acteurs étatiques/non-étatiques, formel/informel.

Thème 2 : Contrôles et biométrie. L’accent est mis ici sur les techniques de contrôle qui travaillent directement sur les corps. Il s’agira d’abord d’étudier les conditions techniques autant que les conditions sociales, économiques et politiques de la diffusion de la biométrie. Ensuite, tout en tenant compte des limites de l’application pratique de cette technique, les participants envisageront ses effets sur la transformation du fonctionnement des frontières, leurs structures, leurs manifestations.

Thème 3 : Frontières physiques, frontières virtuelles. L’objectif de cette thématique est d’aborder et d’analyser les processus en apparence contradictoires qui entraînent d’un côté une sur-matérialisation (construction de murs, mise en scène du renforcement des frontières aux marges des territoires) et de l’autre, la déterritorialisation (éclatement, flexibilisation, frontières ponctiformes) et la dématérialisation des frontières et leur inscription dans le monde virtuel (internet, etc.). Nous analyserons ici tout à la fois les modalités de virtualisation du contrôle déployées par l’Etat, ainsi que les nouvelles méthodes de contournement ou de détournement que développent les acteurs qui y sont confrontés ou qui sont impliqués dans sa gestion.

Thème 4 : Représentations des frontières et de leurs vécus. L’objectif de ce thème est d’ouvrir un chantier de réflexion sur les modalités de représentation des frontières dans leur complexité (éclatement, flexibilisation, frontières ponctiformes, virtualisation, etc.), de leurs vécus de plus en plus asymétriques et de leurs nouveaux modes de contournement.

L’Art et les frontières

Scott Gresham-Lancaster, compositeur, spécialiste des nouveaux medias ; résident de l’IMéRA
Boundaries between music and sound

Pierre Paliard, historien d’art, Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence
Ritournelles

Jean Cristofol, philosophe, Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence
La frontière comme catalyseur sensible ou Une zone de fractures politique et poétique

Sciences dures et frontières

Roger Malina, astrophysicien (OAMP), co-responsable du pôle Art-Sciences de l’IMéRA
Frontières du Réel : Les Terrains Art-Sciences

Bruno Giorgini, physicien (Laboratoire de Physique de la Ville, Bologna University and Istituto Nazionale di Fisica Nucleare), résident de l’IMéRA
Venice network and the bridges

Frontières, art et sciences humaines

Cédric Parizot, anthropologue du politique, IREMAM (Aix Marseille Université, CNRS)
Présentation du programme exploratoire transdisciplinaire de l’IMéRA

Nick Mai, anthropologue, Institute for the Study of European Transformations (ISET) – London Metropolitan University
The border between filmaking, migration and social research : exploring embodied boundaries

Anne-Laure Amilhat-Szary, géographe, Institut de Géographie Alpine, Université Joseph Fourier, Laboratoire PACTE-Territoires, Membre de l’Institut Universitaire de France
L’art au temps du boycott : culture et politique autour du mur de séparation entre Israël et les territoires palestiniens

Dynamical Networks

Equipe “Dynamical Networks”, anciens résidents de l’IMéRA : Ciro Cattuto et Marco Quaggiotto, chercheurs en sciences des réseaux complexes (ISI Torino), et Wouter Van den Broeck, chercheur et designer
Drawing borders from behavioral patterns

Résumés

Scott Gresham-Lancaster, compositeur, spécialiste des nouveaux medias ; résident de l’IMéRA

Boundaries between music and sound

I will bring to the new boundary between sound that is generated directly from data and music that is generated and/or perturb more conventional musical forms. This includes the problematic perceptual and cultural problems of distinction between solid information and the implication of information that might be more a part of the structural integrity of the style or form of the music that is being used as a « carrier » of information. This is why the concept of « exformation » is so primary to what I am working on. Without user familiarity with the music (carrier) that is actively being changed by the time domain information there is no point of reference for the information to be discerned.

Pierre Paliard, historien d’art, Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence

Ritournelles

Les frontières existent. Elles sont l’expression des mouvements d’une communauté vivante dans ses aspects matériels et immatériels. Faisant suite à un temps de religion et d’utopies où le régime symbolique de l’art organisait un récit tournant autour de l’origine (religion) ou de la fin (idéologie) nous connaissons aujourd’hui le développement d’un art engagé dans les dimensions concrètes de l’expérience contemporaine. Limites et frontières, tant dans les champs du savoir que des pratiques sociales,  sont ainsi interrogées dans des stratégies conscientes de débordements et d’appropriations visant des recompositions dépassant les dimensions identitaires fermées. Je tenterai de montrer, en particulier, qu’entre mondialisation et repli identitaire, il existe dans l’art contemporain des tentatives ouvertes et créatives qui proposent des formes nouvelles brassant des échelles différentes et des objets d’origines très diverses. Laissant de côté le concept d’influence j’insisterai sur la dynamique volontariste des emprunts faits à l’autre.
 
Jean Cristofol, philosophe, Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence

Frontière comme catalyseur sensible ou zone de fractures politique et poétique

Dans sa forme classique, la frontière comme séparation linéaire n’est pas seulement un phénomène politique et économique, mais culturel et esthétique. Or c’est à partir du moment où cet effet cumulatif de la superposition n’opère plus que les artistes ont commencé à s’intéresser à la frontière devenue une zone de fractures politique et poétique. La question de la frontière d’un point de vie artistique est donc d’abord à comprendre dans le jeu des décalages et des déplacements qui s’y opèrent, comme un espace complexe et traversé de contradictions. Le geste artistique est une activation de la non congruence des dimensions constitutives de la frontière. C’est la mise en jeu poétique et symbolique de ce que cette situation de condensation critique permet de faire jouer dans l’espace social. Curieusement, c’est en perdant sa dimension culturelle et esthétique que la frontière devient un opérateur artistique.

Roger Malina, astrophysicien, directeur de l’OAMP ; membre du comité de pilotage de l’IMéRA

Frontières du Réel : Les Terrains Art-Sciences

Bruno Giorgini, physicien, spécialiste de la Physique de la ville (CIG Bologna University and Istituto Nazionale di Fisica Nucleare) ; résident de l’IMéRA

Venice network and the bridges

From the Einstein-Rosen to the Rialto Bridge: a travel of images, words, measures and equations in order to suggest a possible free human dynamics and mobility connecting cultures, territories, populations on this side and beyond the borders.

Cédric Parizot, anthropologue du politique, chercheur à l’IREMAM ; membre du comité de pilotage de l’IMéRA

Présentation du programme exploratoire transdisciplinaire Frontières

En tant qu’institut interdisciplinaire, l’IMéRA propose d’organiser un programme de séminaires transdisciplinaires sur deux ans pour étudier de manière inédite les évolutions des frontières en Europe et en Méditerranée aux 20e et 21e siècles, ainsi que l’économie des relations qu’elles génèrent. Ces séminaires associeront sur cette thématique propre aux sciences sociales des chercheurs en SHS mais aussi en sciences dures, ainsi que des architectes et des artistes. Amorcé par l’IMéRA, le programme de séminaires s’appuiera sur des partenariats scientifiques avec des laboratoires de sciences humaines et de sciences dures de la Région PACA, ainsi qu’avec des institutions internationales.

Le projet vise d’abord à mettre en place une méthode de recherche transdisciplinaire pour décloisonner les différents domaines du savoir impliqués. Ce décloisonnement permettra d’approfondir et de renouveler la réflexion sur les transformations des frontières en Europe et en Méditerranée au 21e siècle, et sur les cadres de leur interprétation. Il permettra ensuite de penser et d’élaborer de nouveaux modes de communication des résultats, entre chercheurs et à destination du grand public sous forme d’un Atlas critique des frontières à l’aube du 21e.

Nick Mai, anthropologue, Institute for the Study of European Transformations (ISET) – London Metropolitan University

The border between filmaking, migration and social research : exploring embodied boundaries

In neoliberal times, the granting of asylum and the social protection of vulnerable migrant groups (minors, victims of trafficking) became strategic borders between the rights of the West and those of the Rest of the world. The entitlement to rights and protection is increasingly articulated by politics of compassions inscribing hegemonic moralities and social hierarchies on migrant bodies. To understand and portray these deep socio-economic and cultural transformations, it is important to engage the subjectivities of the people involved. Methodological approaches encompassing the arts and the social sciences, and film-making in particular, offer innovative ways to research and portray these dynamics.

Anne-Laure Almihat, géographe, Institut de Géographie Alpine, Université Joseph Fourier, Laboratoire PACTE-Territoires, Membre de l’Institut Universitaire de France

L’art au temps du boycott : culture et politique autour du mur de séparation entre Israël et les territoires palestiniens

On peut comprendre le mur comme une projection d’intentionnalité politique qui est de l’ordre de l’imposition d’une transformation des repères spatiaux, concernant à la fois ceux qui doivent vivre dans ce paysage, mais aussi (et surtout ?) ceux qui doivent en recevoir les images. Cela implique de considérer les frontières fermées comme des artefacts matériels dont le pouvoir performatif est extrêmement puissant. Cette idée complexe peut être mise en évidence par l’analyse des interventions que les artistes font sur les frontières murées, qui tentent de transformer l’image imposée. En devenant un support de productions artistiques qui développent différentes figures de contestation, le mur permet une prise de paroles par les populations avec lesquelles on refuse de communiquer. Le mur de Berlin en est l’exemple caractéristique, même s’il n’a été peint que d’un côté. La frontière USA / Mexique constitue l’un des meilleurs exemples d’activisme politique frontalier. Nous avons fait l’hypothèse que l’érection de la barrière de sécurité par les Israéliens face aux Palestiniens pouvait avoir été accompagnée d’une telle recrudescence artistique. Deux campagnes d’entretiens nous ont révélé une prolifération créatrice extrêmement contrastée. Nous avons mis en parallèle deux corpus, celui des œuvres d’art répertoriées par nos soins, celui des récits faits par les artistes rencontrés de leur rapport au « mur ». Trois points seront développés dans la présentation : l’omniprésence du discours sur la raison nationale chez les artistes de tous les côtés de la barrière ;  l’ irruption du mur dans la production visuelle dans des démarches artistiques très variées ; la mise en évidence d’une chronologie fine qui va de quelques tentatives de projets communs à leur rejet récent, accompagné de l’affirmation forte de la séparation, du refus de la coopération – même culturelle –, qui font de l’art un véritable support de la résistance, dans les deux communautés concernées.

Walls can be understood as a projected political intentionality which imposes the transformation of spatial bearings which touch both those who live in the landscape and (above all ?) those for whom these images are intended. This implies to consider closed borders as material artifacts with a very strong performative power. This complex idea can be evidenced by analyzing artists’ interventions on walled borders, trying to transform the imposed image. By becoming the support for artistic productions which develop various contestation figures, the wall allows for communication with populations which had been denied a voice to the political debate. The Berlin wall often appears as the characteristic example, even if it was only painted on one side. The USA / Mexico border constitutes the best example of border activism. We put up the hypothesis that the erection of a security barrier by Israelis facing Palestinians could have been accompanied by such an artistic upsurge. Two interview campaigns allowed us to witness a very contrasted creative proliferation. We have built to parallel corpuses, one composed of the works of art which we have identified, the second made of the artists’ narratives, related to their relationship to the “wall”. Three points will be developed here: the omnipresence of a narrative on the national imperative amongst artists on both sides of the barrier; the bursting out of the wall in visual production (within very diverse artistic approaches); the evidencing of a micro-chronology which lead from scarce attempts at common projects to a recent rejection of them, together with the claim for separation, the refusal of cooperation – even cultural cooperation –, which make art stand a real support for resistance, in both of the concerned communities.

Equipe “Dynamical Networks”, chercheurs en science des réseaux complexes et designers ; anciens résidents de l’IMéRA

Drawing borders from behavioral patterns

Digital traces of human activity allow to gain insight into the interplay of geographical space – or built space – and the behaviors of the individuals who inhabit that space. In the first part of this talk we review recent literature in the domain of complex systems science where access to traces of human behaviors (for example, by means of mobile phones) exposes invisible borders in our societies.  Conversely, the analysis of virtual worlds reveals that people connect to one another in a way that is shaped by the geography and borders of the physical world they live in. The second part of the talk will explore issues related with the representation of borders. Discussing the issues of geopolitical boundaries visualization addressed by traditional cartography, we will explore recent experiments in the representation of the new kind of borders defined by our digital traces. Flexible, temporary and indistinct borders find their place in the new cartographies of digital and human territories.

Image: Fingerprint Maze, Amy Franschescini, photo, Myriam Boyer 2013