Didier Danet – 120 000 dollars le “Wet Back” : quelle rationalité économique pour la Smart Border aux Etats-Unis ?


Didier Danet, responsable du Pôle Action globale et forces terrestres – Centre de recherche des écoles de Saint-Cyr Coëtquidan, France

Brutalement ramenée à une donnée chiffrée, l’érection d’une « frontière intelligente » entre les Etats-Unis et le Mexique a coûté 18 milliards de dollars en 2012 et a permis l’arrestation de 357 000 personnes qui tentaient de la traverser illégalement, ce qui revient à dire que le coût d’interception d’un clandestin s’élève à plus de 50 000 dollars. Ce coût extrêmement élevé conduit à s’interroger sur la pertinence de la politique mise en œuvre et du type de solution qu’elle privilégie, solution dans laquelle le plus gros de l’effort est porté sur le déploiement de dispositifs technologiques sophistiqués confortés par des moyens humains substantiels. La pertinence de la solution retenue est d’autant plus importante à évaluer qu’elle exerce sur de nombreux décideurs publics un puissant effet d’attraction alors même que les ressources qu’ils pourraient mobiliser à cet effet seraient sans commune mesure avec les budgets affectés dans la durée par l’administration américaine à ce programme. S’agissant des questions de sécurité et de défense telles qu’elles se présentent à nous, deux des caractéristiques fondamentales du programme américain doivent retenir notre attention. La première tient aux conditions de mise en œuvre d’une solution dans laquelle la technologie est présentée comme l’axe central d’une politique visant à traiter une question globale à caractère politique, économique, sociale… Or, ce thème est récurrent dans l’analyse des questions de sécurité et de défense contemporaines. En second lieu, la politique de « frontière intelligente » est consubstantielle d’une montée en puissance des acteurs privés dans la mise en oeuvre, voire dans la conception, d’une mission manifestement régalienne. Sans condamner a priori l’intervention d’un certain type d’acteurs dans la conduite d’une politique étatique, il est toutefois permis de s’interroger sur la pertinence du dispositif ainsi retenu.

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Nicola Mai – En assemblant Samira : une installation art-science sur l’incorporation des frontières humanitaires


Nicola Mai – LAMES, AMU/CNRS, France, London Metropolitan University, UK

La protection humanitaire des groupes de migrants vulnérables a imposé de nouvelles frontières biographiques. Les migrants cherchent à obtenir la bienveillance de l’Etat et un statut légal en réalisant et incorporant des discours humanitaires mettant l’accent sur la victimisation et de la souffrance. Seuls ceux dont les performances de souffrance en tant que sujets dignes de protection humanitaire sont jugés crédibles et bénéficient d’une telle protection. Genre et sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques à travers lequel les frontières humanitaires et biographiques sont inscrites sur les corps des migrants. Le projet Emborders, à la fois projet de realisation cinématographique et de recherche scientifique, reproduit les différentes représentations et les récits des migrants ciblés par la protection humanitaire tels qu’ils ressortent des entretiens avec les autorités, avec des chercheurs en sciences sociales ainsi qu’avec les autres migrants et les familles. Il s’appuie sur des histoires vraies et des gens réels, qui sont jouées par des acteurs afin de protéger l’identité des personnes interrogées originaux et refléter la nature intrinsèquement fictive de toute narration de soi. En utilisant des acteurs pour reproduire de vraies personnes et des histoires de la vie réelle, le projet remet en cause ce qui constitue finalement une réalité crédible et acceptable en termes scientifiques, filmiques et humanitaires. Samira est une installation d’art-science à deux écrans, présentant l’histoire de Karim. Elle assemble différents moments et scripts ethnographiques tels qu’ils sont apparus à travers le travail de terrain à Marseille. Karim est un homme migrant algérien commerçant le sexe, tout comme SAMIRA, la nuit à Marseille. Il a quitté l’Algérie comme un jeune homme dont les seins commençaient à se développer à la suite de la prise d’hormones ce qui lui a permis d’obtenir l’asile en France, en tant que femme transgenre. Vingt ans plus tard, alors que son père se meurt et que Samira/Karim est en passe de devenir le chef de la famille, elle se fait chirurgicalement enlever les seins et se marie avec une femme afin d’obtenir un nouveau passeport lui permettant de retourner en Algérie pour assumer son nouveau rôle.

Slides de la conférence, l’installation Samira.

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Jean Cristofol – Distance et proximité dans un espace multidimensionnel


Jean Cristofol – philosophe, Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence, France

L’espace concret dans lequel nous vivons est indissociable des formes dans lesquelles nous nous le représentons. Ces formes mobilisent des connaissances objectives, mais elles engagent aussi un imaginaire dans lequel nous nous projetons. De ce point de vue, l’espace concret n’est pas seulement la résultante de nos pratiques, il est aussi habité par des sujets qui y situent et y identifient des enjeux et il est traversé de fictions et de récits. Les récits et les fictions, dont nous sommes culturellement les héritiers, mettent en oeuvre un espace continu qui s’articule sur les oppositions du proche et du lointain, de la distance et de la proximité, de l’ici et de l’ailleurs. Les frontières y dessinent des lignes de discontinuité entre des entités homogènes. La figure du voyage, celle de l’utopie, le thème de l’ile ou du labyrinthe, celui de la limite et de son franchissement en sont des incarnations. Mais ces figures ne sont pas seulement de libres constructions de l’esprit, elles sont aussi en correspondance avec les médiums dans lesquels elles ont été articulées et elles sont concrètement produites par la relation aux modes d’existence technique et sociaux d’une époque. Quand les échanges et les déplacements sont déterminés par les flux informationnels et que des dispositifs autonomes ubiquitaires agissent sur nos modes de perception et nos capacités directes d’action, comment pouvons-nous les penser et les mettre en oeuvres ? Que devient notre relation à l’espace quand celui-ci se construit dans une complexité qui vient bouleverser les façons de comprendre le sens même de ce qu’on appelle la distance ou la proximité ? Si l’espace dans lequel nous vivons et communiquons est un espace complexe et multidimensionnel, comment pouvons nous en construire la représentation ?

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Noel Sharkey – Les empêcher de passer et les empêcher de sortir : la frontière robot


Noel Sharkey – intelligence artificielle, Sheffield University, UK

Cette présentation examinera les évolutions potentielles de la robotique applicable dans le futur à la protection des frontières. L’utilisation d’avions sans pilote est déjà utilisé pour identifier les incursions frontalières et suivre les «délinquants». Il y a également des projets d’utilisation de robots terrestres pour intercepter ces franchissement de frontières illégaux. Mais ce n’est que le début. La prochaine génération de robots militaires trouvera ses propres objectifs et attaquera sans contrôle humain. Malgré les protestations internationales, certains États n’ont pas hésité à explorer de telles pistes. S’ils continuent, il faudra peu de temps avant que les robots autonomes entrent en service dans le monde civil pour aider à contrôler les immigrés «illégaux». Par ailleurs, toute discussion sur les nouvelles technologies, doit tenir compte de leur éventuelle utilisation abusive pour confiner les populations à l’intérieur des frontières.

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Cédric Parizot – antiAtlas des frontières : une expérimentation art-science


Cédric Parizot, coordinateur du projet antiAtlas, anthropologue, IMéRA, Institut de Recherche et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM – AMU/CNRS), Aix en Provence

A l’aube du XXIe siècle, les fonctions dévolues aux frontières étatiques sont exercées bien au-delà des lieux, circonscriptions et administrations où elles étaient traditionnellement actives. Elles perdent ainsi leur aspect linéaire. Elles adoptent une nature plus mobile, plus diffuse afin de s’adapter à la globalisation. Les acteurs du contrôle sont devenus de plus en plus nombreux ; aux côtés des Etats interviennent aujourd’hui des agences (Frontex en Europe), des entreprises privées, des organisations non gouvernementales… Le contrôle de la circulation des personnes et des biens revêt des formes de plus en plus nombreuses et différenciées. Nos existences sont ainsi traversées par de multiples réseaux et dispositifs d’identification. Toutes ces recompositions doivent être analysées le plus finement possible, en mobilisant une palette étendue de modes d’expression et d’outils critiques.

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Manifeste : Vers un antiAtlas des frontières

À l’aube du XXIe siècle, les fonctions dévolues aux frontières étatiques sont exercées bien au-delà des lieux, circonscriptions et administrations où elles étaient traditionnellement actives. Elles perdent ainsi leur aspect linéaire.  Elles adoptent une nature plus mobile, plus diffuse afin de s’adapter à la globalisation. Les acteurs du contrôle sont devenus de plus en plus nombreux ; aux côtés des Etats interviennent aujourd’hui des agences (Frontex en Europe), des entreprises privées, des organisations non gouvernementales… Le contrôle de la circulation des personnes et des biens revêt des formes de plus en plus nombreuses et différenciées.  Nos existences sont ainsi traversées par de multiples réseaux et dispositifs d’identification. Toutes ces recompositions doivent être analysées le plus finement possible, en mobilisant une palette étendue de modes d’expression et d’outils critiques.

Les mutations des frontières au XXIe siècle

Les mutations des frontières sont indissociables de la mondialisation qui fait évoluer les chaînes productives, les systèmes de communication et de défense, le travail et la culture. Le projet néo-libéral des trente dernières années a placé au cœur des réformes nationales la maîtrise des dépenses, le libre-échange ou la compétition salariale, tout en promouvant des accords mondiaux sur la fiscalité, les normes techniques, bancaires et comptables. Les projets de liberté de circulation ont été promus dans une logique économique. Ils se sont accompagnés de stratégies d’exclusion pour faire face aux pressions migratoires par un filtrage de plus en plus sélectif des flux.

Du contrôle des flux à la gestion des risques

Il en résulte d’abord  une contradiction entre des pratiques économiques qui accentuent le développement mondial inégal et la nécessité d’un développement mondial durable et équitable. Il y a ensuite une contradiction géopolitique entre l’action de gouvernements nationaux qui sont limités par leur souveraineté territoriale , et la nécessité d’une gouvernance mondiale pour réguler le nombre croissant de processus transnationaux.

Pour tenter de résoudre ces contradictions, les Etats ont attribué aux frontières la fonction de garantes de la sécurité des peuples dans un monde caractérisé par une augmentation de la mobilité transfrontalière des personnes, des capitaux, des biens et des idées. En d’autres termes, les frontières doivent maintenant permettre la mobilité tout en protégeant simultanément contre les risques sociaux, économiques, politiques et médicaux générés par cette mobilité.

Le fait que la migration, le terrorisme, les flux économiques et financiers, la criminalité informatique et la pollution de l’environnement peuvent provenir aussi bien de l’intérieur que de l’extérieur du territoire d’un Etat a considérablement réduit le rôle des frontières comme moyen de protection. La ligne de démarcation entre sécurité intérieure et extérieure est devenue tellement floue que ces domaines tendent à fusionner.

Dans ce contexte, le contrôle est davantage envisagé comme un procédé sélectif et individualisé. Il ne s’agit plus seulement de sécuriser le groupe national pour garantir le bien-être des citoyens.  Il s’agit aussi de sécuriser l’individu pour perpétuer l’institution politique de la société nationale.

Envisagés comme des risques sécuritaires, les circulations des hommes, des biens et des informations deviennent les principales cibles des dispositifs de surveillance et le contrôle frontalier un système de gestion du risque. Etant donné que ces mouvements ne sont pas circonscrits à l’échelle des Etats mais s’étendent bien au-delà, les stratégies sécuritaires déployées aux frontières doivent maintenant être imaginées à l’échelle mondiale.

Cette « sécurisation » (securitization) des frontières vise moins à les fermer hermétiquement qu’à améliorer leur capacité de filtrage. Elles doivent autoriser certaines catégories de personnes et de marchandises à circuler, tout en excluant d’autres. Elles fonctionnent donc comme des pare-feux, permettant le bon fonctionnement du trafic légitime tout en bloquant les « indésirables » ou ceux qui représentent des risques. Elles sont ainsi très poreuses pour la plupart des formes de capital, mais pas pour la plupart des catégories de main-d’œuvre non qualifiée.

La mise en œuvre de ces nouvelles logiques de contrôle a contribué à un processus d’intégration sans précédent entre les dispositifs de contrôle frontaliers et les technologies numériques telles que la biométrie, les systèmes sans fil, RFID, drones, robots télécommandés, les radars de chaleur, détecteurs de CO2 et d’autres utilisés pour incorporer des frontières dans les corps et les produits afin de les détecter, de les identifier et de suivre leurs mouvements. Ce processus est favorisé par l’idée que l’automatisation technologique permettra d’améliorer les capacités de contrôle des frontières tout en réduisant ses coûts et l’erreur humaine.

Mutations des frontières et transformations des formes de mobilité

Afin de surveiller les flux, les contrôles frontaliers (policiers, douaniers, privés) sont projetés jusque sur les territoires d’autres Etats ainsi qu’au cœur du territoire national. Les douanes de certains pays opèrent ainsi dans les ports d’autres pays. De même que les contrôles en vue de la délivrance de visa s’effectuent également dans les pays d’origine des ressortissants. Parallèlement, les points et les opérations de contrôle se multiplient sur les territoires nationaux afin de traquer les personnes ou les marchandises qui ont réussi à contourner ces dispositifs de filtrage. Enfin, en vue d’exclure ou de tenir à l’écart certaines populations, flux ou activités, des lieux disposant d’un statut juridique incertain se multiplient : c’est le cas des camps de rétentions de migrants sans papiers, des zones de transit dans les aéroports ou encore des zones franches.

Ce contrôle de plus en plus sélectif génère une diversification des régimes de circulation : les régimes de circulation des marchandises sont de plus en plus organisés par les accords fiscaux et commerciaux de l’OMC et les impératifs de la rapidité d’échange, tandis que les régimes de circulation des hommes sont encadrés par les politiques de contrôle des flux migratoires. Les chances de mobilité sont déterminées par un ensemble de facteurs complexes comme le statut professionnel, le genre, les origines, les stéréotypes ethno-religieux, les capacités économiques, linguistiques, les affiliations diverses, etc. Dans le contexte de l’après 11 septembre, les contradictions entre la lutte anti-terroriste par la sécurisation des voies d’accès et les logiques économiques de la globalisation ont fait émerger de nouveaux dilemmes opérationnels.

Il en ressort une mobilité négociée selon des arbitrages contingents : les conditions de la fluidité et des interconnexions font l’objet de régimes juridiques dérogatoires de plus en plus sophistiqués. Les grandes entreprises multinationales, par exemple, marchandent leurs accès et tarifs douaniers. Dans ce contexte, on voit apparaître des décalages criants entre des espaces et des hommes hyper-connectés et d’autres qui n’ont pas accès à cette mobilité.

Les individus privés de droit à la circulation sont pris en charge par  un régime humanitaire étendu, qui dépasse le régime de l’asile. Les ONG gèrent des groupes de migrants «indésirables», définis comme vulnérables. Des droits fondamentaux sont attribués sur la base de la performance dans le répertoire de ‘vraie victime’, dans lequel la mise en scène du corps souffrant du migrant devient un outil stratégique pour susciter la compassion et la solidarité. Parce que des politiques plus restrictives encadrent les migrations mondiales, l’octroi de l’asile et la protection sociale des groupes de migrants vulnérables sont devenus de nouvelles frontières humanitaires entre l’Occident et le reste du monde. La sophistication des régimes d’accès conduit à l’individualisation des contrôles (appuyée notamment sur le recours aux données biométriques). Les personnes qui souhaitent échapper à cette emprise sont contraintes de tenter de modifier leur identité corporelle, notamment par des mutilations conduisant à l’effacement de leurs empreintes digitales. Les frontières sont désormais susceptibles d’être « portées » ou transportées par tout un chacun. Le processus de détachement de la frontière par rapport au territoire se traduit par son inscription dans les corps. Elle provoque également une incorporation du contrôle et une biographisation de la frontière.

Contournements et détournements des règles du jeu

Ces transformations sont d’autant plus complexes qu’elles impliquent une multiplicité d’acteurs. Au côté, des compagnies privées et des agences supranationales qui secondent les Etats dans la surveillance des frontières interviennent une multitude d’entreprises. Celles-ci monnayent leurs services pour fluidifier la circulation des hommes, des marchandises et des capitaux. Certaines se spécialisent dans l’aide à l’obtention de visa ou d’agréments permettant de traverser les frontières avec un minimum de contrôle et plus de rapidité ; d’autres s’attachent à faciliter la circulation des marchandises. C’est le cas de certaines sociétés de consulting intervenant auprès des grandes compagnies marchandes. Elles produisent des études et des bases de données sur les différences de capacité logistiques des ports de la planète. Ces données permettent aux entreprises de traiter les flux de marchandises et de mettre les ports et les Etats en compétition. En conséquence, les dispositifs de contrôle sont aménagés pour mieux attirer les flux.

Au niveau informel, un grand nombre d’acteurs interviennent également pour moduler le degré de porosité des systèmes de filtrage et les modalités de leur mise en œuvre. Le trafic de migrants fournit une illustration pertinente. En s’organisant et en se professionnalisant, les passeurs deviennent incontournables pour qui veut traverser une frontière clandestinement ou contourner les systèmes de contrôle. En fonction de leurs intérêts économiques, ils n’hésitent pas à faciliter ou à rendre plus difficile le passage et l’évitement. Ils s’imposent ainsi comme des « autorités régulatrices » parallèles aux acteurs formels en charge de la surveillance. Les autorités formelles n’ont pas les moyens de mettre fin à ces réseaux de passeurs. Elles préfèrent souvent les instrumentaliser dans leurs stratégies de lutte contre d’autres formes de criminalité. Ce faisant, elles intègrent ces réseaux informels au sein de leurs mécanismes de régulation et de contrôle.

Pourquoi un antiAtlas ?

Les atlas, ces recueils de cartes géographiques, instruisent depuis des siècles les populations et comblent les amateurs de beaux livres. Ce  sont des objets édifiants. Ils produisent un double effet de représentation scientifique de l’espace et d’unification du monde. Les sciences de l’espace (topologie, géométrie, géographie) ont manifesté une attention constante à la précision du relevé, de la mesure et des ordres de grandeur (échelles, écarts, etc.). L’histoire de la représentation des frontières est celle d’une réitération constante de la  confrontation entre d’un côté des représentations statiques et réglées avec de l’autre la fluidité de l’expérience sociale. L’instabilité des relations internationales a fait le bonheur des cartographes. Elle a fait de la carte un objet politique par excellence. La reconnaissance mutuelle des tracés par les traités est le principal processus par lequel les frontières ont acquis une certaine stabilité. Faire un atlas des frontières suppose une telle stabilité, ou peut en produire l’illusion. C’est un effet de la systématicité des atlas que de rendre compte du morcellement du monde tout en produisant son unification. La mise en ordre cartographique est donc une mise en ordre sociale et politique. Alors, pourquoi entreprendre un anti-atlas des frontières ? Pour créer du désordre social et politique ?

Une approche dynamique et critique

La réponse décevra autant les tenants de l’ordre prompts à débusquer les fauteurs de trouble et les ennemis intérieurs que ceux du désordre en quête d’étayages intellectuels. Notre entreprise est d’abord une entreprise d’exploration collective. Parler d’anti-Atlas des frontières, c’est d’abord dire que la représentation graphique systématique n’est pas le mode de connaissance le plus acceptable ni désirable des frontières. Nous ne sommes pas contre les cartes comme production scientifique et comme outil de connaissance, mais contre l’idée qu’une compilation systématique de cartes, agrémentée de commentaires, pourrait produire une connaissance suffisante des frontières. Les catalogues géopolitiques ont souvent la faveur des états-majors, parce qu’ils permettent d’organiser une vision synthétique des rapports politiques et sociaux. A ce genre de portage titanesque du monde, nous préférons des investigations multiples sur sa complexité. La frontière, au-delà de la topologie (étude des lieux), pose des problèmes d’ontologie (questionnement sur le mode d’existence), de morphologie (étude des formes), de sociologie (études des faits sociaux), d’anthropologie (étude des êtres humains), de psychologie (étude des faits psychiques), etc. La question est peut-être aujourd’hui moins de postuler un ordre territorial que de savoir dans quelle mesure les frontières ont vraiment une inertie physique, comment elles se construisent socialement, à partir de quelles mobilisations et démobilisations, comment elles se matérialisent et se dématérialisent selon les contextes, se présentent à nous comme dispositifs en évolution, supportent des opérations de contrôle et de surveillance déterritorialisées, « fonctionnent » mécaniquement, électroniquement, biologiquement, conditionnent les échanges, génèrent des règles formelles et informelles, fabriquent régulièrement ou aléatoirement du légitime et de l’illégitime. Il s’agit donc moins de donner à voir la frontière comme lieu que de chercher à la comprendre comme processus, et donc comme fait en perpétuelle évolution. L’atlas produit une synthèse statique et réglée, l’antiAtlas une analyse dynamique et critique.

De l’exploration scientifique à l’expérimentation artistique

Conçu au départ comme un projet de recherche exploratoire, l’antiAtlas est devenu une expérimentation dans le sens artistique du terme. Le fait de réunir des chercheurs en sciences humaines, en sciences dures, les professionnels du contrôle (douaniers, militaires, industriels) et les artistes au cours de dix séminaires de recherche (2011-2013) a non seulement permis de confronter différentes approches des frontières mais a également conduit des expériences transdisciplinaires (jeux vidéo basés sur des faits observés, cartographie participative, représentation graphique ou fictionnelle de données d’enquête, etc.), où la frontière vécue a trouvé des voies de représentation originales. Par ailleurs, les œuvres artistiques sur la frontière sont autant d’explorations et d’expérimentations du rapport ambivalent à la frontière – ce qu’elle fait de nous, de notre identité, de notre intimité, de notre corps, mais aussi ce que nous en faisons, comment nous la faisons apparaître et disparaître matériellement et immatériellement, comment nous en jouons, soit pour nous libérer de sa présence, soit pour surveiller et dénoncer nos contemporains. Les médias tactiques (détournement des dispositifs de surveillance) sont autant de manifestations spectaculaires de cette ambivalence. Ces œuvres nous permettent également de prendre des distances avec l’alternative domination/résistance, pour donner à voir la relation sans cesse rejouée entre la rationalité des entreprises de contrôle et les pratiques qui les déjouent.

Cette confrontation et ce dialogue entre l’art, la science et la pratique, ne cherche pas à construire une nouvelle « doxa » pour l’étude de la frontière. Nous pensons simplement que la transdisciplinarité permet des stratégies d’emprunts et de déplacements. Chaque discipline peut servir à un moment donné de véhicule à une autre. Ceci n’annule en rien la logique propre et la cohérence d’une forme spécifique de savoir, mais propose une forme d’expérimentation, avec toutes les limites que cette notion d’expérience peut porter, et toute la richesse qu’elle peut engager. C’est dans ce sens que l’antiAtlas nous place dans une situation d’expérimentation commune qui nous oblige à prendre en charge la position de l’autre dans notre propre réflexion.

Du réel au virtuel

La question des mutations des frontières au 21ème siècle renvoie enfin aux transformations de l’espace, des façons de l’expérimenter et de l’organiser. Les frontières constituent des éléments majeurs de notre façon de nous représenter le monde dans lequel nous vivons et de nous représenter notre place et notre position dans ce monde. A travers l’expérience commune de l’antiAtlas, nous essayons notamment de comprendre comment les individus traversent les frontières mais également comment les mutations des frontières contribuent à construire différemment leur expérience. Les nouvelles technologies de contrôle en réseau contribuent à organiser de nouveaux espaces qui ne sont pas de l’ordre de l’étendue, mais de la circulation et du flux, de la boucle et de l’interaction. Ce sont des espaces virtuels, dont le web est sans doute la manifestation la plus évidente. Le territoire de l’Etat nation dans son acception westphalienne renvoyait à des étendues géographiques bornées par des limites, les frontières. Dire que l’espace construit par ces technologies de contrôle et par le vécu quotidien des populations est maintenant déterminé par des flux et des réseaux, c’est bouleverser les logiques anciennes et ouvrir de nouveaux questionnements.

Ces évolutions nous amènent à reconsidérer les formes d’organisation et de pratiques sociales, économiques, culturelles et politiques ; par conséquent, elle pousse à s’interroger sur l’idée de communauté, ou de lien social. Ces communautés ont maintenant des caractéristiques particulières : elles sont provisoires et mouvantes, elles reposent sur des choix et des formes de participation nouvelles, elles ne tendent plus à englober la personne dans les différents aspects de sa vie mais elles sont partielles, multiples et entrecroisées. Ces formes réticulaires impliquent une redéfinition profonde de la distinction ancienne entre espace public et espace privé, entre l’ordre de l’individuel et du collectif, ainsi qu’entre le monde virtuel et le monde réel. En somme, l’objectif ultime de cet antiAtlas est de comprendre l’évolution des rapports politiques à l’espace et d’interroger notre devenir collectif.

Aix en Provence, septembre 2013

Cédric Parizot – coordinateur du projet, anthropologue, IMéRA, Institut de Recherche et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman (UMR 7310)

Anne-Laure Amilhat Szary – géographe, Laboratoire Pacte (UMR 5194), Université J. Fourier, Grenoble
Antoine Vion – sociologue, AMU, Laboratoire d’Économie et de Sociologie du Travail (UMR 7317)
Gabiel Popescu – géographe, Indiana University South Bend
Jean Cristofol – philosophe, École Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence (ESAA)
Isabelle Arvers – commissaire d’exposition, productrice
Nicola Mai – vidéaste, anthropologue, London Metropolitan University, Londres
Joana Moll – artiste media

Andrea Rea – Contrôler les indésirables à la frontière-réseau

Andrea Rea, Université Libre de Bruxelles-GERME, Belgique

La communication entend présenter les principales approches contemporaines de la notion de frontière. La deuxième partie du document est consacrée à une approche alternative des processus frontièrisation en se concentrant davantage sur la relation entre la frontière et la mobilité plutôt qu’entre frontière et territoire relation rencontrée fréquemment dans la littérature. La frontière est définie comme frontière-réseau composé d’unités d’espace-temps (aéroport, port maritime, l’espace public par exemple) où des humains (bureaucrates dans les consulats, les gardes-frontières, les agents de liaison, des voyageurs, etc.) et de non-humains (bases de données, des lois, des procédures) interagissent pour objectif de produire des pratiques de souveraineté étatique. Une attention particulière est accordée à la relation entre l’Europe et les pays du sud de la Méditerranée dans une troisième partie. Basé sur le concept de frontière-réseau, il est possible d’analyser la politique européenne de la mobilité en ce qui concerne les pays du sud de la Méditerranée, en accordant une attention particulière aux dispositifs de sécurité qui tendent à accélérer la mobilité des voyageurs légitimes, d’une part, et à filtrer et à bloquer les indésirables, les personnes soupçonnées de contourner les lois de l’immigration, d’autre part. Toute personne en mobilité est soumise à la surveillance mais certains sont placés sont contrôle. La dernière partie de la communication est consacrée à l’analyse qui pourrait être faite du contrôle à l’aéroport à partir du concept de frontière-réseau.

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Gabriel Popescu – Déterminisme technologique et mise en forme des frontières mobiles

Gabriel Popescu – IméRA, AMU, Indiana University South Bend, USA

L’organisation politico-territoriale moderne du monde a été construite sur un imaginaire géographique qui conçoit l’espace en termes absolus, comme un objet rigide qui peut être découpé en morceaux quantifiables. Dans la pratique politique, cela a conduit à la division de la planète en unités territoriales mutuellement exclusives, fondées sur des frontières linéaires. Récemment, nous assistons à un changement d’imaginaire géographique qui intègre une perspective polyvalente et reconnaissant la nature relationnelle de l’espace; un imaginaire plus en phase avec une notion d’espace définie par la mobilité sous la forme de liens et de nœuds plutôt que par la proximité territoriale et la variation de la distance. En conséquence, nous assistons à l’émergence de formes complémentaires de frontières étatiques qui dérogent aux normes de linéarité territoriale en devenant intégrées aux flux qui peuvent voyager et être constamment répertoriés à travers l’espace. La mise en forme de ces frontières mobiles est fortement influencée par les technologies numériques qui sont supposés avoir des pouvoirs prédictifs et sont généralement conceptualisées en termes d’efficacité inébranlable et perçues comme étant là pour assurer la sécurité dans un contexte de mobilité transnationale. Le problème d’une telle logique derrière l’incorporation de la technologie dans la fabrication de frontière est qu’elle suppose que la vie sociale peut être rendu numériquement connaissable et donc définissant (mal) les sujets aux frontières comme des objets matériels détachés de leurs contextes sociaux et politiques. Il est essentiel de bien comprendre les limites et les avantages pour la société de ces technologies aux frontières afin de s’assurer que la gouvernance de la frontière de celles-ci préserve les intérêts publics au lieu de les étouffer.

Voir également l’interview de Gabriel Popescu

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Joana Moll – AZ: move and get shot

Joana Moll
AZ: move and get shot
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AZ: move and get shot by Joana Moll est une pièce basée sur le net qui montre les flux naturels, humains et animaux dans le paysage de la frontières entre USA et Mexique, à travers l’oeil de six caméras de surveillance.

Ces caméras font partie d’une plateforme en ligne créée par un groupe de propriétaires de terrains à la frontière américaine. La plateforme montre les images de six caméras placées à la frontière. Le but principal de cette communauté est de donner accès au public à des images directes d’immigrants traversant la frontières à travers leurs terres. Chaque caméra est équipée d’un détecteur de mouvement qui déclenche la capture d’images à la moindre vibration du paysage. Ensuite ces images sot envoyées à un serveur et affichées directement sur la page internet.

Alors que le but principal des habitants est de capturer et disséminer des photographies d’immigrants illégaux aux Etats Unis, les caméras sont programmées pour détecter et enregistrer tout mouvement. En délégant la surveillance à une machine, l’intention humaine originelle est perdue, et la volonté première prend la forme d’une collection d’images qui révèlent non seulement les immigrants mais aussi toutes les activités humains, animales et naturelles. La capture d’images devient alors incontrôlable, et peut perdre de son sens.

La pièce est composée de six images indépendantes générées automatiquement grâces aux vues capturées par chaque caméra. Toues les 24h, un robot analyse si de niuvees images ont étét prises. Celles-ci sont enregistrées sur un serveur local et ajoutées de manière algorythmique après la dernière images prise du point de vue correspondant. Ainsi, les images s’étendent, révélant  les différents mouvements qui rythment jour après jour la frontière d’Arizona.

Joana Moll est née à Barcelone en 1982. Elle est titulaire d’une maîtrise en arts numériques de l’Université de Pompeu Fabra et d’un BA en arts visuels de l’Université Autonome de Barcelone. Elle exposé son travail à l’international dans des lieux tels que les Arts Santa Monica et le musée Picasso de Barcelone, l’Institut Futuro Oi à Rio de Janeiro, l’Albuquerque Museum of Art and History, l’Université de Lancaster au Royaume-Uni et le Collège Ithaca, New York, où elle a reçu un prix pour «Texas Border ». Elle a participé à FILE 2011 un festival d’art électronique à Sao Paulo, FILE 2012 à Rio de Janeiro, ISEA edition 2012 et le Festival Internacional de la Imagen 2013 à Manizales. Elle a également contribué à l’élaboration de projets interactifs pour le Musée des Sciences de Grenade, l’Institut de Paléontologie de Sabadell et l’Université de Pompeu Fabra. Elle collabore activement avec Sauti ya Wakulima project. Elle est membre du comité scientifique et artistique de l’antiAtlas des frontières.

Julie Chansel & Michaël Mitz – La machine à expulser

Julie Chansel et Michaël Mitz
La machine à expulser
Web documentaire
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Il y a aujourd’hui en France métropolitaine et en outre-mer 25 centres de rétention administrative (CRA) ; onze d’entre eux sont habilités à enfermer des familles et des enfants. Des dizaines de milliers de personnes y sont enfermées chaque année, en vue d’être expulsées du territoire. Leur seul délit est de ne pas avoir de papiers. Ces lieux de privation de liberté, de plus en plus sécurisés, échappent à notre regard.

La Machine à expulser parle de ces hommes et de ces femmes qui « disparaissent », dont la vie bascule soudain, lors d’un contrôle d’identité. Placés en rétention administrative pour une durée maximale de 32 jours et bientôt de 45, ils deviennent des « retenus », avant d’être « reconduits à la frontière ».

Nous avons recueilli leurs paroles, entre deux rendez-vous devant un juge, dans l’anonymat de leur chambre du CRA, parfois à quelques heures d’être embarqués vers un pays que, pour la plupart, ils ne connaissent pas. Leur enfermement est double, dans un lieu et dans une procédure complexe. Ce sont eux qui subissent la « politique du chiffre », eux qui nourrissent les « objectifs chiffrés de reconduite à la frontière ».

Avec ce web documentaire, nous avons voulu décrypter « la rétention administrative des personnes en situation irrégulière », interroger l’instrumentalisation de l’étranger, expliciter un acharnement administratif, expliquer des lois de plus en plus répressives, déconstruire un discours politique. Il s’agit pour nous de révéler l’absurdité d’un système et ses conséquences humaines dramatiques. Nous voulons inviter chacun à y réfléchir.

Ce webdocumentaire vous offre une plongée inédite dans le dispositif complexe et déshumanisant des Centres de Rétention Administrative.

Nicola Mai – Samira – Emborders #1

Nicola Mai
Samira – Emborders #1
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Karim est un immigrant algérien vendant son corps comme Samira, la nuit à Marseille. Il a quitté l’Algérie adolescent et s’est enfuit en Italie quand ses seins commencèrent à se développer suite à la prise d’hormones. Dix ans plus tard Karim obtient l’asile politique en France grâce à ses seins qui lui permettent de défendre son cas comme celui d’une femme transgenre risquant le meurtre si on la rapatrie en Algérie.

Vingt ans plus tard, Karim se fait chirurgicalement enlever les seins pour recevoir de son père mourant le statut de chef de famille. Il se marie alors avec une femme pour avoir un nouveau passeport lui permettant de retourner en Algérie pour assumer son nouveau rôle.

Samira la première de quatre installations formées de deux écrans qui constituent le projet de réalisation cinématographique / de recherche Emborders, qui sera finalisé entre 2014 et 2015. Au cours des trentre dernières années, les flux migratoires se sont accrus et diversifiés. Les politiques néolibérales ont inclus le genre et la sexualité parmi les critères d’éligibilité à la protection humanitaire, tout en restreignant l’accès aux marchés du travail dans le Nord. C’est pourquoi la protection humanitaire et le droit d’asile sont devenues des frontières stratégiques, donnant (ou refusant souvent) l’accès aux droits de l’homme et au marché du travail. Emborders questionne la façon dont les frontières humanitaires sont inscrites dans le corps et la subjectivité des migrants grâce à réalisation, l’incorporation et l’internalisation de discours standardisés et européo-centrés de victimisation, vulnérabilité et de caractérisation du genre / sexe. En utilisant des acteurs professionnels pour mettre en scène des vraies personnes, ainsi qu’en juxtaposant les différentes versions du soi qui sont mises en évidence par l’analyse ethnographique et les frontières humanitaires, le projet questionne également les revendications d’authenticité, d’objectivité et de crédibilité qui sous-tendent à la fois l’action humanitaire et la recherche scientifique.

Samira été produit par l’IMéRA et SATIS (respectivement l’Institut Méditerranéen d’Etudes Avancées et leDépartement Sciences Arts et Techniques de l’Image et du Son de l’Université Aix-Marseille) .

Nicola Mai est ethnologue et réalisateur, Professeur de Sociologie et Etudes migratoires au Working Lives Research Institute de l’Université Metropolitaine de Londres. Ses publications universitaires et ses films ont pour objet les expériences et perspectives des migrants qui vendent leur corps et leur amour, insérés dans l’industrie globalisée du sexe pour vivre leurs vies. A travers  des ethno-fictions expérimentales et des résultats de recherches inédites, Nicola Mai met en cause les politiques qui lisent forcément la migration liée au travail sexuel en termes de trafics, tout en portant l’accent sur la complexité ambivalente des dynamiques d’exploitation et d’auto-affirmation qui sont en jeu. Dans sa (Sex Work Trilogy), il explore différentes expériences de renontres entre la migration et l’industrie du sexe.

En 2014 et 0215, Nick sera basé au Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, MMSH/Aix -Marseille University), de façon à y réaliser le projet « Queering Sexual Humanitarianism », comparant l’impact des interventions humanitaires ciblant les migrants travailleurs sexuels et les minorités sexuelles en demande d’asile au Royaume-Uni (Londres) et en France (Marseille/Paris) grâce à des protocoles de recherche ciblée et de la réalisation de films expérimentaux.

Joana Moll & Héliodoro Santos Sanchez – The Texas Border

Joana Moll & Héliodoro Santos Sanchez
The Texas Border
Installation audiovisuelle en ligne

The Texas Border est une pièce audiovisuelle en ligne qui affiche les retransmissions live des caméras de surveillance placées par BlueServo le long de la frontière Mexique USA au Texas. BlueServo est une plate-forme Internet gérée par la Coalition du Texas Border Sheriff qui ouvre plusieurs caméras de surveillance à toute personne désireuse de contrôler ceux qui tentent d’entrer aux États-Unis de manière illégale et de déclarer ces actions par le biais d’un site Web. La pièce comprend 64 vidéos, dont une partie des archives BlueServo, qui montrent des tentatives d’incursions sur le territoire américain ayant échoué, conséquence directe des rapports envoyés par les utilisateurs anonymes de BlueServo. L’acte d’observation qui vise à «protéger» le pays, est devenue une performance de surveillance vraiment symbolique réalisée par des citoyens américains, dans laquelle les images qui apparaissent sur les écrans n’ont même pas besoin d’être réelles.

Joana Moll est née à Barcelone en 1982. Elle est titulaire d’une maîtrise en arts numériques de l’Université de Pompeu Fabra et d’un BA en arts visuels de l’Université Autonome de Barcelone. Elle exposé son travail à l’international dans des lieux tels que les Arts Santa Monica et le musée Picasso de Barcelone, l’Institut Futuro Oi à Rio de Janeiro, l’Albuquerque Museum of Art and History, l’Université de Lancaster au Royaume-Uni et le Collège Ithaca, New York, où elle a reçu un prix pour «Texas Border ». Elle a participé à FILE 2011 un festival d’art électronique à Sao Paulo, FILE 2012 à Rio de Janeiro, ISEA edition 2012 et le Festival Internacional de la Imagen 2013 à Manizales. Elle a également contribué à l’élaboration de projets interactifs pour le Musée des Sciences de Grenade, l’Institut de Paléontologie de Sabadell et l’Université de Pompeu Fabra. Elle collabore activement avec Sauti ya Wakulima project. Elle est membre du comité scientifique et artistique de l’antiAtlas des frontières. http://www.janavirgin.com/

Héliodoro Santos Sanchez (Colima, au Mexique, 1984) détient une maîtrise en arts numériques à l’Université Pompeu Fabra de Barcelone, en Espagne (2009-2010), un diplôme en arts visuels de l’Université de Guadalajara (2002-2006), et vient de terminer l’atelier de peinture de l’Université de Colima IUBA (1998-2000) et a obtenu un diplôme en art, médias et technologie (art numérique) au Centre de Cultura Casa Lamm, Mexico, DF (2007-2008). Il a également poursuivi différentes études parallèles et des cours en art sonore, graphisme et art contemporain avec les enseignants: Manuel Rocha Iturbide, Ivan Abreu, Betsabeé Romero, Santiago Ortiz et le groupe Graffiti Research Lab, entre autres.

Patrick Lichty – The Private Life of a Drone

Patrick Lichty
The Private Life of a Drone
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The Private Life of a Drone de Patrick Lichty est un travelogue filmé par des drones en vol, explorant la zone autour du Virginia Center for the Creative Arts à Amherst, en Virginie (USA).

Patrick Lichty is a technologically-based conceptual artist, writer, independent curator, animator for the activist group, The Yes Men, and Executive Editor of Intelligent Agent Magazine. He began showing technological media art in 1989, and deals with works and writing that explore the social relations between us and media. He also works extensively with virtual worlds, including Second Life, and his work, both solo and with his performance art group, Second Front, has been featured in Flash Art, Eikon Milan, and ArtNews. He is also an Assistant Professor of Interactive Arts & Media at Columbia College Chicago.

Alban Biaussat – The Green(er) Side of the Line

Alban Biaussat
The Green(er) Side of the Line
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Tracée au crayon vert sur les cartes lors de l’armistice de 1949, la Ligne Verte démarquait jusqu’en 1967 Israël de la Transjordanie et de la bande de Gaza contrôlée par l’Egypte. Depuis l’occupation israélienne de ces territoires, cette ligne est devenue la référence centrale de tous les processus de paix. La légalité de la construction unilatérale par Israël d’un mur de séparation a été contestée par la Cour Internationale de Justice parce qu’elle ne suit pas le tracé de la Ligne Verte.

The Green(er) Side of the Line est un projet photographique qui a pour objectif de matérialiser la ligne d’armistice de 1949, une pseudo frontière tracée en vert sur les cartes, qui sépare Israël des territoires palestiniens occupés. Ce projet a reçu le soutien de la Fondation Al Mamal pour l’Art Contemporain à Jérusalem.
« Au Moyen-Orient, nouveaux concepts politiques, initiatives diverses et slogans se succèdent, mois après mois, pour remplacer les plus anciens qui sont épuisés ou galvaudés. Une référence centrale du conflit Israélo-Palestinien reste toutefois la ligne d’armistice tracée en 1949 à grands coups de crayon vert.

Progressivement tenté, comme tant d’autres avant moi, par une brillante carrière de Messie en cette Terre Sainte, je décidai de faire apparaître la Ligne Verte. Le procédé photographique me servirait de baguette magique. Alors que j’hésitais encore entre plusieurs teintes de vert pour mon ruban de douze mètres de long, certaines personnes critiquèrent mes choix. « Ce vert n’est pas le bon ! » : comme si le tracé de cette Ligne pourtant immatérielle semblait si familier qu’on en connaissait la nuance exacte.

À se promener le long de la Ligne au printemps ou en hiver, elle apparaît, pourtant bien verte. Elle se fait pourtant plus floue à proximité d’un échangeur autoroutier, au milieu de champs cultivés, de vallées ou de collines désertes et fleuries, de terrains toujours pas déminés et de zones militaires juxtaposant des sections de mur, des barbelés et des grillages qui constituent la, finement nommée, « barrière de séparation ». Mais sa validité politique est désormais saturée de discours israéliens et palestiniens souvent contradictoires. Pour toutes ces raisons, la Ligne est aveuglante : elle porte l’espoir de mettre un jour fin aux violences, mais elle demeure artificielle et insaisissable.

C’est cette ambiguïté que je cherche à représenter visuellement, à l’aide de couleurs saturées et de matière plastique, en créant un effet de mouvement de la ligne-ruban, ou en introduisant de larges boules vertes dans le paysage : le chemin qui relie deux points peut en effet prendre une infinité de cours, la ligne droite n’étant qu’une possibilité parmi d’autres.

Ce projet est conçu tel un souffle, léger et absurde, venant troubler les grands yeux verts de la solution majoritairement préconisée de « deux États voisins vivant en paix et en sécurité le long des frontières dès 1967 ». Il s’agit de livrer au regard le paysage réel de cette possible séparation politique, là où ce fut déjà le cas par le passé, en espérant améliorer la compréhension des enjeux et des implications d’une telle perspective. Mon espoir est de communiquer, avec un sourire en coin, ce sentiment d’absurdité qui en saisit plus d’un à l’évocation du partage de cette terre par le moyen de véritables frontières, et d’encourager l’émergence d’une réflexion critique qui permette d’entrouvrir la porte à des alternatives constructives.

Source : Collateral Creations

Born in Paris, France, in 1970 Alban Biaussat moved professionally into photography after years working for international organisations in Eastern Europe, the Caucasus, Central Asia, Africa and the Middle East. Alban Biaussat is interested in exploring creative documentary photography to address complex socio-political issues and their perception. Member of Picturetank, a Paris-based cooperative photo agency, since 2008, he is also co-founder & Director of Collateral Creations, an innovative audio-visual production platform based in Paris, working in partnership with research institutes, policy analysts, international organisations, and corporate clients for communication and advocacy purpose.

Romain de l’Ecotais – Au pied du Mur

Romain de l’Ecotais
Au pied du mur
Documentaire
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Depuis 2007, d’immenses piliers métalliques plantés dans le désert, sur plus d’un tiers des 3600 km de frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, constituent la nouvelle barrière qui compte déjà plus de victimes que le mur de Berlin. Sur ce territoire, les familles disloquées se multiplient. Accéder à l’American Dream est un projet de plus en plus périlleux, et les espoirs des migrants sont souvent proportionnels à l’énergie et aux moyens déployés pour anéantir leurs tentatives. En ces temps de crise, Mexicains et Américains se mobilisent aussi en faveur des migrants, afin de défendre leurs droits et faire connaitre leur condition. Pour la jeunesse mexicaine, les Etats-Unis paraissent d’année en année plus inaccessibles, mais pas hors de portée, pour autant qu’elle en rêve encore.

« Je suis videaste independant né en 1980, spécialisé dans la réalisation de films en équipe légère et aux techniques de tournages en DSLR. Après des études universitaires – une maîtrise d’Economie Internationale et un DESS Film Documentaire et Sciences Sociales – je commence à travailler sur la thématique de l’exil et du travail.

Je réalise des projets de toutes sortes, du film d’entreprise au film documentaire, en passant par la direction d’ateliers audiovisuels avec des jeunes d’Aubervilliers. Des réalisations que j’ai conduit aussi bien au Conservatoire de musique de Marseille, que dans un café social à Belleville, à la rencontre de la cuisine moléculaire de Thierry Marx, et à la découverte d’initiatives environnementales au Japon, ou encore dans le quotidien des lutteurs Sénégalais à Pikine/Sénégal.

Entre 2009 et 2010, j’ai réalisé La Quête, illustrant les problèmes d’accès à l’eau. Au Pied du Mur, webdocumentaire décrivant la vie le long du mur séparant les Etats-Unis du Mexique diffusé par france5.fr dans le cadre de la série Portraits du Nouveau Monde qui a reçu le grand prix du jury au festival WebTV de la Rochelle. Et « We Are One » clip de la chanson du groupe Watcha Clan. Ce film au croisement des genres a été primé au festival international du clip Protoclip 2011, avec le prix spécial du jury. En 2011, je me suis consacré à une série intitulée « En route pour Londres » pour la fédération des Asptt sur des sportifs en phase de qualifications pour les JO2012 à Londres. En 2012, je travaille sur des séries de films cross-média à travers le monde pour des grandes marques comme BMW ou encore Mini. Et dans la lignée en 2013, je réalise les films pour la campagne mondiale BMW Motorrad « The ride of your life » et découvre ainsi derrière ma caméra de nouveaux pays tels que le Laos, la Nouvelle Zélande, ou encore l’Afrique du Sud. »

Ben Fundis, Clara Long, John Drew – Border Stories

Ben Fundis, Clara Long, John Drew
Border Stories
Documentaire
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Bordes Stories réinvente le documentaire, un documentaire sans début, ni milieu ni fin. Son seul aspect linéaire est la frontière elle-même. Notre équipe voyage le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, de Brownsville, Texas à Tijuana, Mexique, à la recherche d’histoires qui font le portrait d’un humanité aux prises avec cette région chargée de questions politiques et d’émotions.

Ben Fundis a suivi des études cinématographiques au Bard College. Il est le réalisateur et directeur de “Que Mira?”, un documentaire sur un refuge qui accueille des enfants sans domicile au Nicaragua.

Clara Long a fait des études sur l’étude du développement et les droits de l’homme, et est diplômée de Stanford University en journalisme. Elle a travaillé et étudié au Brésil et au Venezuela. Son travail de journalisme a été diffusé sur la Radio Publique Nationale, dans le Times de Londres, et dans l’Associated Press.

Jonh Drew est co-créateur et ancien éditeur associé de The Citizen, un magazine local basé à New York. Il a grandi au Pérou, en Bolivie et au Venezuela, et a été diplômé de Duke University en économie.

Olga Kisseleva – Arctic Conquistadors

Olga Kisseleva
Arctic Conquistadors
Carte interactive
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Arctic Conquistadors est une carte interactive du Pôle Nord, générée en temps réel. En pistant les entreprises qui s’installent quotidiennement dans la région polaire, ce programme original, développé par Olga Kisseleva en collaboration avec des chercheurs en géopolitique, met en perspective les conflits économiques possibles de ce nouvel Eldorado. L’artiste a construit un programme qui analyse les situations en temps réel et qui fait apparaître les entreprises sur la carte de l’Arctique là où elles sont en train de s’implanter.

Sur l’écran, une carte de l’Arctique. Des logos de groupes majoritairement pétroliers comme Shell, Esso, Total, Tschudi, y apparaissent au fur et à mesure. Le rythme s’accélère, les logos se superposent de plus en plus vite, s’empilent, s’amassent jusqu’à déborder de l’écran : le programme se met à délirer tout seul. A la fin, ça explose, ça ne devient plus supportable. Cette oeuvre est une mise en garde contre les risques qui guettent cette région riche en réserves de pétrole et encore peu exploitée. Aprés les guerres de religion, les guerres d’empires, les guerres politiques, on assiste aujourd’hui à la guerre des marchés entre multinationales. La plupart des problèmes politiques découlent de ce nouveau partage du monde.

Source : www.ressource0.com

Olga Kisseleva fait partie de cette première génération de la Perestroïka, qui a fait tomber le mur de Berlin et lever le rideau de fer. Ses installations, ses photographies, ses vidéos et ses peintures traitent du mélange des cultures, de la mixité des langages, des nouvelles technologies, de la mouvance des rapports sociaux.
Dès le début des années 1990 Olga Kisseleva intègre, sur invitation de la Fulbright Foundation, une équipe de créateurs qui travaillent sur le développement des technologies numériques aux États-Unis. Elle séjourne notamment à l’université Columbia de New York et à l’université de Californie, où elle participe à l’aventure des premières start-up de la Silicon Valley.

En conclusion de ce travail universitaire, elle soutient en 1996 sa thèse de doctorat sur les nouvelles formes d’hybridation, rejoint l’Institut des hautes études en arts plastiques à Paris, et ensuite l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est fondatrice du laboratoire Art&Science, qui joue un rôle pionnier dans le domaine de la création contemporaine de recherche, et de réflexion sur les formes de création émergentes.
L’œuvre d’Olga Kisseleva entremêle des actions qui se déroulent dans les milieux urbains ou en réseau avec des interventions dans les galeries et musées. Elle a été notamment présentée au Centre national d’art contemporain (Moscou, Russie), à l’ARC (Paris, France), à Kiasma (Helsinki, Finlande), au musée Reina Sofía (Madrid, Espagne), dans les biennales : Biennale de Venise, Biennale d’Istanbul, Biennale de Dakar, Biennale de Tirana, Biennale de Rennes et Biennale de Moscou1…

Le travail artistique d’Olga Kisseleva fait partie de nombreuses collections. Son œuvre est notamment intégrée aux collections suivantes : Centre national d’art contemporain (Moscou, Russie), Musée Russe (Saint-Pétersbourg, Russie), CNEAI (Chatou, France), Fonds municipal d’art contemporain de la ville de Marseille, Fonds municipal d’art contemporain de la ville de Paris, FRAC Aquitaine, FRAC Languedoc-Roussillon, MOMA de New York, musée d’art contemporain de Moscou, musée d’art contemporain Pecci (Prato, Italie) et Fine Art Foundation (New York).

Olga Kisseleva est représentée par la galerie Rabouan Moussion Paris.

Source : Wikipedia

Atelier Limo – Border Bistro et Enquête frontalière

Atelier Limo, Border Bistro
Webdocumentaire, année ?

Le Café du Centre, Le Stade, La Maison du Peuple, The Snug Pub, Le Gambrinus, Café Brem, Le Cercle Saint-Georges, Café der Pley, Haas Casino… Le web-documentaire Border Bistro de l’Atelier Limo propose de revivre le déroulé de 9 journées passées dans 9 cafés le long de la frontière linguistique belge et de reconstituer des discussions de comptoir sur la base d’interviews effectuées sur place.

Atelier Limo
Enquête frontalière, base de données

À quoi ressemble une frontière dans l’espace? Comment appréhender une ligne géographique de 3000 km?

La base de données enquête frontalière propose 238 fiches interactives le long de l’itinéraire Świnoujście-San Bartolomeo qui racontent à leur manière la réalité de lieux atypiques car se trouvant sur cette frontière qui séparait jusqu’en décembre 2007 les anciens des nouveaux pays de l’Union européenne au coeur du continent. Effectuée durant l’été 2006, cette collecte d’informations effectuée sous forme de photos, d’interviews, de textes, schémas et prises de sons constitue un témoignage vivant, un état des lieux, une année avant le démantèlement des infrastructures frontalières et la fin des contrôles effective suite à l’entrée de 9 nouveaux pays membres dans l’espace Schengen. Ces lieux qui par leur positionnement géographique et leur histoire se trouvent être au coeur des enjeux de l’élargissement européen connaissent d’importantes mutations.

L’Atelier Limo est né de la rencontre de Simon Brunel et Nicolas Pannetier, deux architectes / réalisateurs diplômés de l’École d’Architecture de Lille qui ont étudié l’anthropologie visuelle à Francfort sur l’Oder en Allemagne. Ils ont été rejoints en 2012 par Maya Keifenheim qui a apporté avec elle son expérience dans le monde de la production, des nouveaux médias et du théâtre.

Simon Brunel est né en 1982 à Boulogne-sur-Mer (F). Diplôme d’architecte (DPLG) à l’Ecole d’Architecture et de Paysage de Lille en 2007. Différentes expériences en tant qu’architecte en France et à Berlin. Invité en 2007/2008 via l’organisme DAAD à l’Université Européenne Viadrina de Frankfurt/Oder (D) au sein du séminaire d’Anthropologie Visuelle pour y développer le projet de film itinérant „La frontière intérieure“.

Nicolas Pannetier est né en 1977 à Bordeaux (F). Musicien et architecte DPLG diplômé de l’Ecole d’Architecture et de Paysage de Lille en 2007. Différentes expériences en tant qu’architecte en France et en Autriche. Invité en 2007/2008 via l’organisme DAAD à l’Université Européenne Viadrina de Frankfurt/Oder (D) au sein du séminaire d’Anthropologie Visuelle pour y développer le projet de film itinérant „La frontière intérieure“. Interprète et compositeur notamment pour les bandes originales des films « La frontière intérieure » et « The Detour ».

Maya Keifenheim est artiste, réalisatrice et pédagogue. Après des études de philosophie et de sciences en communication et média, elle s’est engagée dans de nombreux projets dans les domaines du film et du théâtre. Elle était récemment à la tête du département de production vidéo de la compagnie berlinoise Sofatutor. Depuis 2012, elle est active au sein d’Atelier Limo.

Simona Koch – Borders

Simona Koch
Borders
Série d’animations vidéo

Les êtres vivants laissent derrière eux des traces à travers leur existence, les chemins qu’ils empruntent, les actions qu’il réalisent, et influencent alors les vies d’autres organismes. Ils ont tendance à marquer leur territoire, ou, comme l’être humain, à tracer des frontières. Les frontières nationales marquent les limites de dominations. Une frontière signifie toujours à la fois inclusion et exclusion, et affecte les facteurs politiques, sociaux, culturels et économiques.

En général, le déplacement des frontières se produit au cours de guerres, impliquant des effusions de sang et des tragédies humaines et écologiques. Pour les exilés et les réfugiés, cela signifie la perte de leur pays natal, de leurs racines et des lieux chers à leurs cœurs. Pour la nature, cela peut entraîner la dévastation de pans entiers de terres. Dans le cas de l’Armada espagnole du 16e siècle, la moitié du pays fut rasée pour construire une flotte avec laquelle les Espagnols cherchèrent à conquérir l’Angleterre. La légende raconte qu’avant cet dégagement massif, les écureuils pouvaient voyager des Pyrénées à l’Andalousie, sautant d’arbre en arbre, sans jamais avoir à toucher le sol. Les conflits des frontière conduisent également à la perte de racines culturelles – même après plusieurs générations, les traces du déplacement d’une frontière sont toujours palpables.

Simona Koch a visualisé ces traces dans une série d’animations vidéo. Elle a d’abord utilisé des cartes historiques pour rechercher les déplacements de frontières. Ensuite, pour l’animation, elle dessine les frontières au crayon sur une feuille blanche, les effaçant successivement pour les remplacer par les différents changements qu’elles on subi jusqu’à aujourd’hui. Avec la vue plongeante on peut observer l’humanité, telle des insectes, se creuser un territoire sur la Terre. Et finalement, les frontières d’aujourd’hui finissent par s’effacer aussi. Ne subsistent que de vagues formes des différentes régions du monde dessinées par une myriade de lignes floues.

L’artiste allemande Simona Koch est fascinée par la variété du monde du vivant. D’où vient la vie, et où va-t-elle ? Comment les êtres sont-ils reliés les uns aux autres, et quel rôle jouent les humains dans ce cadre ?

Après avoir obtenu un diplôme en design graphique, Simona Koch a étudié à l’Académie des Beaux arts de Nuremberg en Allemagne. Son travail multi-supports est montré à travers le monde. Elle a reçu plusieurs prix et bourses, comme la bourse du ministère de l’éducation et des affaires culturelles bavarois pour un voyage de six mois, qui a donné naissance au projet ORGANISM 4 / Fungi en 2009. Elle a également obtenu le Kunstförderpreis, prix bavarois pour les arts visuels en 2012. En 2012 également a été publié son livre « ORGANISMS », aux éditions Verlag für moderne Kunst.