La revue antiAtlas Journal invite pour son n°6 « Hétérographies » l’artiste Lauren Lee McCarthy, qui s’intéresse aux enjeux des relations sociales dans un contexte de surveillance, d’automatisation et de vie algorithmique, avec l’article You Can Say :
« Un logiciel est un ensemble d’instructions, un code ou un script. J’applique alors une logique similaire aux interactions sociales, en me comportant moi-même comme une interface pour les autres. Mais il y a toujours une part d’humanité dans un protocole social, alors qu’une machine exige une série précise d’instructions, faute de quoi elle échoue. Ainsi, au mesure que la technologie se rapproche de nous, les scripts commencent à se confondre. »
La revue antiAtlas Journal est dédiée aux enjeux et aux formes contemporaines des frontières. Son n°6, Hétérographies, s’intéresse aux manières dont les humains s’écrivent eux-mêmes et écrivent « leurs autres ». Il s’origine dans une réflexion menée au sein de l’Institut d’ethnologie méditerranéenne européenne et comparative d’Aix-en-Provence (IDEMEC), à partir d’une relecture croisée des travaux de Michel de Certeau sur l’écriture et de ceux d’André Leroi-Gourhan sur le style. Il réunira des articles de Crys Aslanian & Ludmilia Postel, Claire Lapique & Ana Maria Lozano Rivera, Lauren Lee McCarthy, Manoël Pénicaud et Patrick Suter, qui seront publiés individuellement entre juin et septembre 2023. Coordination du numéro : Eléonore Armanet, Thierry Fournier, Cédric Parizot et Manoël Pénicaud.
Design de la revue et ds articles : Thierry Fournier.
Lauren Lee McCarthy crée des pièces qui humanisent ou incarnent les rôles que jouent les appareils intelligents ou les technologies, pour questionner la manière dont elles infléchissent les relations sociales. Elle met en jeu un large spectre de médias comme les installations, la performance, l’intelligence artificielle et les œuvres interactives. En 2017, avec l’œuvre LAUREN, elle a invité des participant·es à installer un système d’assistance personnelle virtuelle à leur domicile, similaire à sur Amazon Alexa – la différence essentielle étant que le dispositif était animé 24/7 par l’artiste elle-même. Elle a ensuite renversé les rôles avec son projet SOMEONE, où des participant·es avaient accès et contrôle 24/7 au domicile de l’artiste. SOMEONE a reçu le Golden Nica d’Ars Electronica et le Japan Media Arts Social Impact Award, et LAUREN a reçu le prix DocLab de l’IDFA pour la non-fiction immersive.
Ses œuvres ont été exposées dans le monde entier, notamment au Barbican Centre, au Fotomuseum Winterthur, à la Haus der elektronischen Künste, au SIGGRAPH, au Onassis Cultural Center, à l’IDFA DocLab, à la Science Gallery Dublin, au Seoul Museum of Art et au Japan Media Arts Festival. Elle a bénéficié de bourses et de résidences de Creative Capital, United States Artists, LACMA, Sundance New Frontier, Eyebeam, Pioneer Works, Autodesk et Ars Electronica. Elle est également la créatrice de p5.js, une plateforme d’art et d’éducation open-source qui donne la priorité à l’accès et à la diversité dans l’apprentissage du code, et qui compte plus de 10 millions d’utilisateurs. Elle a développé ce travail dans son rôle de 2015 à 21 au sein du conseil d’administration de la Processing Foundation, dont la mission est de servir ceux qui n’ont historiquement pas eu accès aux domaines de la technologie, du code et de l’art dans l’apprentissage des logiciels et de l’alphabétisation visuelle. Lauren est professeur à l’UCLA Design Media Arts. Elle est titulaire d’une maîtrise en beaux-arts de l’UCLA, d’une licence en informatique et d’une licence en art et design du MIT.
Directeur de la publication : Jean Cristofol
Directeur de rédaction : Cédric Parizot
Directeur artistique : Thierry Fournier
Comité de rédaction : Jean Cristofol, Thierry Fournier, Anna Guilló, Cédric Parizot, Manoël Penicaud
Production : IREMAM, Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (UMR7310, Aix Marseille Université/CNRS), Institut d’ethnologie méditerranéenne, européenne et comparative (Idemec)
Revue numérique annuelle, bilingue et gratuite, antiAtlas Journal est dédiée à la recherche sur les enjeux et les formes des frontières contemporaines. La revue prolonge les réflexions et les expérimentations menées par le groupe de recherche antiAtlas des frontières : colloques, publications, conférences, expositions… Reposant sur une collaboration entre chercheurs et artistes, elle expérimente de nouvelles pratiques d’édition et de modélisation de la recherche. Elle est consultable sur le web (desktop, tablettes et mobiles) et en PDF.
Conçue et dirigée par Thierry Fournier, la conception éditoriale et le design de la revue s’emparent des potentialités d’une publication numérique pour étendre l’expérience de lecture de textes de recherche. Son design en « articles-paysages » renouvelle radicalement l’approche des textes de recherche. En ouvrant des voisinages et de circulations multiples entre textes et images, il autorise des parcours transversaux et des échelles variables de perception, qu’une organisation linéaire ne permettrait pas – bien qu’elle soit toujours disponible dans la version PDF. Certaines très grandes images débordent largement des écrans : la circulation exclusive dans une image devient un des récits proposés, au même titre que la circulation dans un texte.
La revue antiAtlas Journal invite pour son n°6 Hétérographies l’écrivain, critique et traducteur suisse Patrick Suter, professeur extraordinaire de littératures de langue française contemporaines à l’Université de Berne, avec l’article Hétérographies et polyphonies littéraires :
« En mettant en relation deux œuvres monumentales (Le Parthénon des livres de Marta Minujín et Le Génie du lieu de Michel Butor), et tout en opérant un tournant qui mène de l’art contemporain aux littératures de langue française, cet article étudie les procédures d’exclusion dans l’espace politique ainsi que les moyens de rapprocher des voix appartenant à des espaces culturels ou sociaux différents.»
antiAtlas Journal est dédiée aux enjeux et aux formes contemporaines des frontières. Son n°6 Hétérographies s’intéresse aux manières dont les humains s’écrivent eux-mêmes et écrivent « leurs autres ». Il s’origine dans une réflexion menée au sein de l’Institut d’ethnologie méditerranéenne européenne et comparative d’Aix-en-Provence (IDEMEC), à partir d’une relecture croisée des travaux de Michel de Certeau sur l’écriture et de ceux d’André Leroi-Gourhan sur le style.
Il réunit des articles de : Crys Aslanian & Ludmilia Postel, Claire Lapique & Ana Maria Lozano Rivera, Lauren Lee McCarthy, Manoël Pénicaud et Patrick Suter, qui seront publiés individuellement entre juin et septembre 2023.
La coordination du numéro est assurée par Eléonore Armanet, Thierry Fournier, Cédric Parizot et Manoël Pénicaud. Le design de la revue et de chaque article est conçu par Thierry Fournier.
Patrick Suter
Patrick Suter est professeur de littératures de langue française contemporaines à l’Université de Berne (théorie et histoire de la culture). Il a interrogé les relations entre presse et littérature de Mallarmé à Rolin (Le journal et les Lettres, MētisPresses, 2 volumes). Ses champs de recherche embrassent les avant-gardes, la dramaturgie, la poésie, l’interculturalité et l’étude des frontières en littérature. Sur le plan littéraire, il a publié Le Contre-geste (La Dogana, 1999), Faille (MētisPresses, 2005), et Frontières (Passage d’encres, 2014). En tant que traducteur, il s’est consacré à la poétesse allemande Annette von Droste-Hülshoff (Tableaux de la lande et autres poèmes, La Dogana, 2014). Il a codirigé des publications collectives sur Pinget (Robert Pinget. Inédits, Revue des Sciences Humaines, 317, 2015), sur l’interculturalité (Regards sur l’interculturalité, MētisPresses, 2016), sur Goldschmidt (Georges-Arthur Goldschmidt – Überqueren, überleben, übersetzen, Wallstein,2018), sur Butor (Michel Butor et la radio, Komodo 21, 15, 2021 ; Cahier Butor 2 : Michel Butor et les peintres, 2022) et sur la poétique des frontières : Poétique des frontières. Une approche transversale des littératures de langue française, MētisPresses, 2021).
Ouvrages parus sur les frontières :
– Patrick Suter, Frontières, Guern, Passages d’encres, Trace(s), 2014.
« Elles sont l’impensé de la mondialisation. Plus actuelles que jamais. Elles n’ont jamais disparu, ne disparaîtront pas, ne peuvent disparaître. Elles ont produit, produisent, produiront des effets considérables. Elles déterminent l’organisation du monde. Frontières géographiques. Politiques. Culturelles. Sociales. Urbaines. Écologiques…
Patrick Suter a voulu les saisir de façon synthétique. Dans leur diversité. Par-delà les représentations partielles et subjectives qui abondent. Il fallait les faire éprouver au public. Inventer un appareil nouveau. Prendre en compte l’espace de façon inédite. Tresser une écriture polyphonique.
Les frontières devaient s’affronter. L’espace se fendre, se tendre. Le livre est comme un chœur, dissonant, divergent. Comme un labyrinthe moderne, offert à la méditation. Il insiste obstinément. Telle une prière – telles les frontières. À chacune d’elles, le lecteur peut être arrêté. Saisi de crainte. »
– Patrick Suter & Corinne Fournier Kiss (dir), Poétique des frontières. Une approche transversale des littératures de langue française (XXe-XXIe siècles), , Genève, MētisPresses, « Voltiges », 2021
ISBN : 978-2-940563-94-4 ; DOI: 10.37866/0563-94-4
Participant à l’organisation et à la mise en forme du monde, les frontières apparaissent également comme des lignes de forces dans de nombreuses œuvres littéraires. Périphériques ou centrales, statiques ou dynamiques, explicites ou implicites, pleines ou creuses, précaires ou tenaces, elles signalent des points de rupture ou des zones d’attraction dans les textes. Donnant lieu aux expériences les plus variées, elles engagent des formes et des esthétiques très différenciées.
À partir de cet objet commun, et en convoquant les débats récents sur la littérature mondiale, cet ouvrage invite à un voyage à travers les littératures de langue française. Il rejoint ainsi les préoccupations de la recherche contemporaine visant à décloisonner les différentes histoires littéraires nationales.
Mots-clés : Marta Minujín, Michel Butor, littératures de langue française, polyphonie, frontières.
Directeur de la publication : Jean Cristofol
Directeur de rédaction : Cédric Parizot
Directeur artistique et design des articles : Thierry Fournier
Comité de rédaction : Jean Cristofol, Thierry Fournier, Anna Guilló, Cédric Parizot, Manoël Penicaud
Revue numérique annuelle, bilingue et gratuite, antiAtlas Journal est dédiée à la recherche sur les enjeux et les formes des frontières contemporaines. La revue prolonge les réflexions et les expérimentations menées par le groupe de recherche antiAtlas des frontières : colloques, publications, conférences, expositions… Reposant sur une collaboration entre chercheurs et artistes, elle expérimente de nouvelles pratiques d’édition et de modélisation de la recherche. Elle est consultable sur le web (desktop, tablettes et mobiles) et en PDF.
Conçue et dirigée par Thierry Fournier, la conception éditoriale et le design de la revue s’emparent des potentialités d’une publication numérique pour étendre l’expérience de lecture de textes de recherche. Son design en « articles-paysages » renouvelle radicalement l’approche des textes de recherche. En ouvrant des voisinages et de circulations multiples entre textes et images, il autorise des parcours transversaux et des échelles variables de perception, qu’une organisation linéaire ne permettrait pas – bien qu’elle soit toujours disponible dans la version PDF. Certaines très grandes images débordent largement des écrans : la circulation exclusive dans une image devient un des récits proposés, au même titre que la circulation dans un texte.
Production : IREMAM, Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (UMR7310, Aix Marseille Université/CNRS), Institut d’ethnologie méditerranéenne, européenne et comparative (Idemec)
Cédric Parizot
Habilitation à diriger des recherches
soutenue le 27 septembre 2021
Aix-Marseille Université
Institut d’ethnologie et méditeranéenne, européenne et comparative
Sous le parainage scientifique de Dionigi Albera, Directeur de recherche, IDEMEC (CNRS, Aix-Marseille Université)
Télécharger le Vol 1 Synthèse des travaux et les volumes annexes:
– Vol 2 Recueil de publications
– Vol 3 Expérimentations
– Vol 4 Au seuil de la frontière, replier les espaces israélo-palestiniens (Introduction et la table des matières)
– Vol 5 Jeu de cartes
– Vol 6 Jeu vidéo
JURY
Dionigi Albera, Directeur de recherche au CNRS, IDEMEC (Aix-Marseille Université, CNRS) William Berthomière, Directeur de recherche au CNRS, PASSAGES (CNRS, Université Bordeaux Montaigne) Riccardo Bocco, Professeur, IHEID, Genève Lætitia Bucaille, Professeure des universités à l’INALCO, CESSMA (INALCO, IRD, Université de Paris) Aline Caillet, Maîtresse de conférences (HDR), ACTE (Université Paris 1 — Panthéon-Sorbonne) Frédérique Fogel, Directrice de recherche au CNRS, LESC (CNRS, Université Paris Nanterre) Nicolas Puig, Directeur de recherche à l’IRD, URMIS (IRD, CNRS, Université de Paris)
Written by Beatrice Bottomley, and published into the antiAtlas Journal #2 this article focuses on a collection of short stories by the Palestinian writer Raji Bathish: On Countries and Hotels (2007). The stories take place in hotel rooms that are marked by the strong presence of media, or means of communication, allowing for a disassembling of linear time and place. To what extent does this enable the text to produce a space of movement? And what is the potential of such a space?
Beatrice Bottomley is a doctoral candidate at the Warburg Institute, University of London, supported by a studentship from the London Arts & Humanities Partnership. Her research interrogates the relationship between language and philosophy.
Dans ce mémoire, je vise à explorer la convergence entre la pandémie de Covid-19 et l’événement migratoire survenu dans l’archipel des Canaries, en Espagne, au cours de l’année 2020, en me concentrant plus spécifiquement sur l’île de Gran Canaria. En ce sens, je questionne le développement de cet événement en tant que crise et les effets de la gestion de l’urgence qui en découle sur la reconfiguration des acteurs et la matérialité de la frontière européenne des îles Canaries. J’aborde également les transformations du paysage politique insulaire depuis cet événement et la montée de l’extrême droite. L’objectif de ce mémoire est de penser, à travers l’exemple des îles Canaries, l’effet que la pandémie de Coronavirus aura sur d’autres frontières européennes.
La route migratoire atlantique des îles Canaries, considérée comme quasiment obsolète depuis une dizaine d’années, est revenue sur le devant de la scène internationale au cours de l’année 2020. En effet, les autorités espagnoles ont signalé une augmentation de 881% du nombre de migrants arrivant sur ses côtes par rapport à 2019 (PE, 2021). Quelque 22 000 personnes ont atteint les îles en provenance de diverses enclaves du Maroc, du Sahara occidental et d’Afrique de l’Ouest, une tendance qui s’est poursuivie au cours de cette année 2021 (Bautista, 18 mai 2021). Si ce chiffre peut sembler relativement faible par rapport à d’autres zones frontalières d’Europe, l’archipel a été complètement dépassé par cette situation, principalement en raison du contexte déjà complexe généré par l’épidémie de Covid-19.
Photo Andrea Gallinal, 2021
J’aborde cette arrivée soudaine de migrants comme un événement au sens où Alain Badiou le définit, c’est-à-dire comme un processus par lequel le surgissement d’une situation met en échec les modes opératoires par lesquels nous composons avec notre environnement (Badiou, 2007). Ici, l’émergence soudaine et radicale de populations exclues sur la scène sociale, en l’occurrence les migrants irréguliers, est venue perturber l’apparence de normalité et a ouvert un processus de reconfiguration de la réalité. Bien que l’arrivée de migrants irréguliers dans l’archipel des Canaries soit un phénomène récurrent et, en ce sens, prévisible, son articulation avec la pandémie de Covid-19 a créé un événement sans précédent sur l’île qui a laissé cette partie de la frontière européenne sans les outils pour faire face à la situation. La gestion des frontières dans les îles dans le contexte épidémique actuel a dû être adaptée par le biais de nouveaux mécanismes et acteurs afin de garantir que les migrants soient gérés conformément aux restrictions sanitaires. Le manque de préparation logistique et stratégique de l’archipel pour répondre à cet événement a généré un bricolage institutionnel qui a été, comme j’ai pu le constater sur le terrain, une source de contradictions et de vulnérabilités à tous les niveaux : un système d’accueil des migrants complètement dépassé en termes de nombre ; des structures d’accueil médiocres qui ont dû être assistées par de nouvelles structures comme des hôtels ou des macro-camps ; des politiciens et des travailleurs sociaux épuisés ; des immigrants désespérés et confus ; et une population locale polarisée succombant aux théories conspirationnistes et aux manifestations xénophobes.
En ce sens, l’objectif de ce mémoire est d’analyser comment l’émergence du Covid-19 a conduit à l’effondrement du fragile système d’accueil des îles Canaries et a forcé une reconfiguration profonde de l’infrastructure et de la politique frontalière et, par conséquent, des collectifs impliqués dans son fonctionnement formel et informel. La question de l’impact de la pandémie sur les modes de gestion des frontières de l’Europe semble significative pour deux raisons. Premièrement, la diffusion des vaccins Covid-19 ne semble pas nécessairement garantir la fin de la pandémie, comme le montre déjà la tendance dans certains pays (Genoux, 11 avril 2021). Ensuite, le fait que les politiques de vaccination ne soient mises en œuvre que dans les pays les plus privilégiés peut conférer à la mobilité internationale un rôle clé dans l’évolution de la situation sanitaire (Héran, 2020), comme le montre la création du Programme mondial de l’OMS pour la santé et la migration (OMS, 2020). L’analyse de la reconfiguration du scénario de la frontière européenne aux Canaries pourrait, par effet de loupe, fournir une illustration des questions que la pandémie va soulever dans les années à venir en termes de gestion des frontières et de la mobilité en Europe.
Mon questionnement s’articule autour de trois axes principaux : la transformation d’un événement migratoire en crise ; les réponses des différents acteurs impliqués et l’impact de ces actions sur le paysage frontalier de l’île ; et l’articulation de l’événement migratoire avec la transformation de la composition politique de l’archipel.
Tout d’abord, j’aborde la manière dont l’événement migratoire sur l’île de Gran Canaria a été progressivement présenté comme une crise. Comme Cuttitta l’explique pour l’île de Lampedusa, les crises sont généralement créées et » performées » par des mesures et des pratiques politiques comme moyen de gouverner la migration (2014), ce qui permet la mise en œuvre de procédures de contrôle supplémentaires. En outre, les îles sont des lieux particuliers qui, en matière de migration, attirent une attention médiatique extraordinaire (Bernardie-Tahir et Schmoll, 2014 ; Cuttitta, 2014) et où la réalité et les implications de la migration irrégulière prennent des formes exacerbées (Bernardie-Tahir et Schmoll, 2014), ce qui facilite la mise en scène des crises migratoires. En ce sens, je suggère que les mesures d’urgence déployées pour la gestion de la pandémie de Coronavirus sur le territoire espagnol ont facilité la reconfiguration de cet événement migratoire en crise. Il semble alors approprié de s’interroger sur l’articulation entre la pandémie et l’événement migratoire, sur le devenir d’une crise perçue, ainsi que sur les acteurs impliqués dans ce processus.
Dans un deuxième temps, je traite de la manière dont les réactions des autorités et des acteurs locaux déployés afin de maîtriser la crise ont contribué à la transformation du borderscape canarien. Je privilégie la notion de borderscape à celle de frontière car, d’une part, elle me permet de mettre en évidence la nature fluide et changeante des frontières (Bernardie-Tahir & Schmoll, 2014 ; Brambilla, 2014) et de me concentrer sur les relations entre les différents collectifs qui la composent : les confrontations, contradictions, alliances et concessions à différents niveaux qui ont émergé dans ce contexte changeant. D’autre part, elle me permet de délocaliser la frontière à la fois dans l’espace et dans le temps (Brambilla, 2015 ; Perera, 2007), en appréhendant tous les acteurs -humains ou non- qui interviennent avant dans le temps et loin dans l’espace : c’est le cas des directives et lois européennes qui ont un rôle central en la matière sur le territoire des Canaries.
Dans ce sens, je me concentre sur la manière dont la réponse à la » crise » migratoire a reconfiguré les relations entre les différents acteurs présents dans cet espace, ainsi que sur l’émergence de nouveaux acteurs. Plusieurs auteurs ont étudié l’émergence d’organisations citoyennes et d’ONG comme réponse aux urgences migratoires (Cuttitta, 2018 ; Danese, 2001), cependant, au cours de mon travail de terrain, j’ai pu observer l’émergence d’acteurs privés acquérant un rôle central dans le système d’accueil. Dans le vide généré par le manque de moyens de l’État espagnol, des propriétaires de différents hôtels ont réussi à s’organiser dans le but d’offrir une réponse digne à l’urgence d’accueil sur l’île. D’autres acteurs, déjà existants, ont dû ajuster leurs modes de fonctionnement pour s’adapter à la situation sanitaire. J’évalue ainsi les changements provoqués par ces réactions au niveau des collectifs locaux : la redistribution des rôles, leurs compositions, leurs limites.
Enfin, j’aborde les transformations du tissu politique et social de l’île à travers la gestion de l’événement migratoire. Lors de mon séjour à Gran Canaria, j’ai pu clairement constater l’émergence et la recrudescence d’un discours xénophobe jusqu’alors inconnu ainsi que de nouvelles pratiques et formes de solidarité. Cela me permet de postuler que l’événement migratoire va au-delà de la gestion logistique et stratégique du phénomène, mais qu’il a également un impact sur la composition politique et l’imaginaire collectif d’une société. En ce sens, j’aborde les réactions de la population locale à la gestion de la situation migratoire, ainsi que l’instrumentalisation politique de cet événement par les partis politiques d’extrême droite.
Méthodologie, sources et terrains
Cette recherche est le résultat d’un travail de terrain de deux mois réalisé en janvier et février 2021 sur l’île de Gran Canaria. Mon étude se base sur trois types de matériaux d’analyse : un travail ethnographique dans différents milieux lors de mon séjour sur l’île, des entretiens avec différents représentants de collectifs impliqués dans le domaine de la gestion des migrations et des articles de presse à travers lesquels j’ai pu construire une chronologie des événements, aussi bien pendant mon séjour sur l’île qu’à distance avant et après mon travail de terrain.
En ce qui concerne mon travail ethnographique, j’ai pu obtenir des informations de première main grâce à l’observation participante pendant mon travail en tant que volontaire dans deux grandes associations qui géraient deux centres d’accueil pour immigrants. Après un peu moins de deux semaines sur l’île de Gran Canaria, j’ai pu commencer à travailler comme professeure d’espagnol bénévole dans l’un des centres pour femmes migrantes de la Fondation Croix Blanche. Ce premier contact avec l’organisation m’a permis, plus tard durant mon séjour, de visiter l’un des macro-camps construits pour répondre à la situation migratoire sur l’île, puisqu’il était géré par la même association. Quelque temps plus tard, j’ai également pu rejoindre l’équipe du Centre d’Accueil Intégral (CAI) de Tafira, dans la banlieue de la capitale Las Palmas, géré par la Croix Rouge. Ce centre, où j’ai également travaillé en tant que professeure d’espagnol, accueillait uniquement des familles originaires du Maroc et du Sahara occidental. Ces deux expériences ont été particulièrement enrichissantes sur le plan personnel, notamment en ce qui concerne les relations interpersonnelles que j’ai pu établir avec plusieurs des résidents. En outre, elles m’ont donné accès à des témoignages de première main sur les différentes phases du projet migratoire des migrants et sur l’attention reçue à leur arrivée sur les îles. Ce fut également une très bonne occasion de voir de l’intérieur comment fonctionne ce type de ressources d’accueil temporaire au niveau institutionnel et humain.
En plus de ce type d’observation participante, j’ai également utilisé l’observation flottante, très courante en anthropologie, pour décrire sur mon journal de terrain à la fois les lieux et les pratiques que j’ai observés dans ces différents environnements. Cette technique m’a été particulièrement utile lors des explorations dans les différents quartiers où les macro-camps s’étaient installés, ainsi que lors de mes différents déplacements dans le sud de l’île, où je me suis principalement concentrée sur l’observation des structures touristiques, vides en raison du Covid-19, et de la nouvelle forme que prenait le paysage avec la présence des centaines de migrants. Outre le travail ethnographique, j’ai également pu réaliser un total de six entretiens avec différents représentants d’organisations et d’acteurs impliqués d’une manière ou d’une autre dans la gestion de l’accueil des migrants sur l’île de Gran Canaria.
Lors de mes rencontres avec les migrants eux-mêmes, j’ai décidé de privilégier le format de la conversation informelle à celui de l’entretien arrangé car il me semblait plus approprié au contexte. Étant donné la situation dans laquelle beaucoup d’entre eux se sont trouvés à leur arrivée sur les îles – confus, ayant vécu des moments de grande tension, parfois traumatisants, et très méfiants quant au type de relation qu’ils établissaient – les conversations informelles m’ont semblé la meilleure option pour favoriser la construction d’une relation de confiance et aussi pour préserver et respecter la situation de vulnérabilité dans laquelle beaucoup d’entre eux se trouvaient.
Les relations que j’ai pu établir avec les migrants, à l’intérieur et à l’extérieur des structures d’accueil, ont été la partie la plus enrichissante de mon travail de terrain. Cependant, elles ont également été les plus complexes : étant donné que la plupart des migrants avec lesquels j’ai pu parler en dehors des centres d’accueil étaient dans des situations difficiles, où ils se sentaient désespérés et frustrés, j’ai rapidement compris que mes efforts pour leur tendre la main pouvaient rapidement se transformer en une relation de dépendance. Si je donnais mon numéro de téléphone pour un contact ultérieur, je recevais des messages et des appels à toute heure. En ce sens, j’ai dû prendre du temps pour comprendre où et comment fixer les limites dans ce type de relation. Après réflexion, j’ai décidé que j’étais effectivement intéressée à nouer des relations humaines au-delà de mon objet d’étude. Je ne voulais pas simplement obtenir des informations de ces personnes en ignorant leur situation personnelle. Mais pour ce faire, je devais être assez sélective quant aux personnes avec lesquelles je facilitais mon contact personnel et celles avec lesquelles je ne le faisais pas. Ainsi, bien que mes échanges aient été multiples et avec de nombreux immigrants différents, j’ai privilégié l’établissement d’une relation de confiance avec un total de quatre personnes que je voyais régulièrement et avec lesquelles j’étais aussi personnellement impliqué. Cette sélectivité m’a permis d’avoir un accès privilégié à des informations de première main sur la situation dans les différents hôtels et les expériences matérielles et psychologiques à l’intérieur de ceux-ci, sans devoir négliger les relations personnelles établies puisque j’avais le temps de répondre à tous les messages ou appels.
Enfin, depuis le début du mois d’octobre 2020, j’ai commencé à travailler sur une revue de presse avec différents articles publiés par différents médias numériques. Cela m’a permis d’avoir une chronologie exhaustive de tous les événements importants qui se produisaient au fur et à mesure de l’évolution de la situation. Cela m’a également permis de suivre la reproduction des faits dans les médias, ce qui a également facilité l’identification des discours positionnés contre et en faveur du séjour des migrants sur l’île. Travailler avec la presse écrite dans différentes langues (espagnol, anglais, français) m’a également permis d’analyser la façon dont les événements ont été perçus dans la sphère internationale.
Grâce à ces trois sources d’information, j’ai pu construire mon analyse de la situation aux Canaries avant, pendant et après mon travail de terrain sur l’île de Gran Canaria.
Photo Andrea Gallinal, 2021
Les défis de mon travail de terrain : réflexions sur le genre
Il y a un élément important qui s’est distingué au cours de mon travail de terrain et que je voudrais aborder séparément : le fait d’être une chercheuse en contact avec des interlocuteurs principalement masculins. Je n’aborderai ici que la partie de mon travail de terrain relative à mon contact avec les migrants eux-mêmes en dehors des centres d’accueil dans lesquels je donnais des cours d’espagnol.
Tous les migrants que j’ai pu voir et à qui j’ai pu parler, à l’exception des deux centres où j’ai travaillé comme bénévole, étaient de jeunes hommes. En ce sens, les comportements et commentaires sexistes ou sexualisés étaient assez récurrents. Gurney décrit l’intimidation sexuelle à laquelle les chercheuses sont souvent exposées comme » une gamme allant du comportement de flirt et des remarques sexuellement suggestives à la proposition sexuelle ouverte » (1985). L’une des plus grandes difficultés lors de mon approche des jeunes migrants masculins a été les tentatives constantes de drague qui discréditaient complètement la position de chercheur dans laquelle je voulais me maintenir. En général, trois réactions étaient possibles lorsque je m’approchais pour parler aux jeunes hommes : une réponse timide et respectueuse ; une tentative d’approche avec des compliments et des questions sur ma vie personnelle ; ou, très souvent, ils voulaient simplement prendre des photos de moi ou avec moi. Les deux dernières réactions étaient assez inconfortables et, bien que le comportement de harcèlement ne soit pas quelque chose de spécifique à ce contexte particulier, puisque j’y suis confrontée dans ma vie quotidienne, dans cette situation il y avait une difficulté supplémentaire : comment devais-je réagir ?
Gurney souligne qu’un « minimum de tolérance est nécessaire à l’égard de tout comportement que les répondants peuvent manifester, sinon très peu de recherches sur le terrain seraient accomplies », mais « la question de savoir où fixer la limite » et comment est plutôt difficile (1985). Il est évident que je ne pouvais pas réagir dans ce contexte comme je le ferais dans ma vie de tous les jours, car il était dans mon intérêt de me rapprocher de ces personnes. La capacité de parler français a grandement facilité mon approche des migrants que j’ai rencontrés sur l’île. Comme ils me l’ont dit, le fait d’être ignoré par la plupart de la population locale, voire relativement maltraité, faisait de mon approche un événement inhabituel. Cela a été très souvent interprété de leur part comme un intérêt de nature romantique ou sexuelle. Plusieurs des hommes avec lesquels j’ai établi un contact plus solide m’ont expliqué qu’ils ne comprenaient pas pourquoi j’étais si gentil avec eux par rapport au reste des personnes qu’ils rencontraient. Au début, j’ai été obligé de justifier constamment ma gentillesse à leur égard, non pas par intérêt romantique, mais simplement par respect. Les questions sur mon état civil, si j’avais un petit ami, si j’étais mariée, revenaient régulièrement.
Face aux compliments et aux commentaires concernant mon apparence physique, j’essayais de les ignorer ou de simplement sourire. Petit à petit, j’ai commencé à développer des mécanismes me permettant d’éviter les questions gênantes concernant ma vie personnelle. J’ai remarqué que, comme le fait remarquer Gurney, » le harcèlement sexuel est plus susceptible de se produire lorsque la femme est perçue comme célibataire ou sans attache avec un homme » (1985). J’ai donc commencé à répondre à chaque occasion que j’étais mariée, ce qui semblait être un prétexte suffisant pour combattre le harcèlement, du moins dans une certaine mesure. Malgré cela, je devais encore faire face à des situations dans lesquelles je me trouvais certainement mal à l’aise. Je citerai en particulier le moment où l’un de mes interlocuteurs a tenté à plusieurs reprises de m’embrasser, alors que je lui avais clairement fait comprendre que je n’étais pas du tout intéressée. À une autre occasion, une autre personne avec laquelle j’ai essayé d’établir un contact a insisté pour m’épouser, même lorsque je lui ai dit que j’avais un partenaire. Encore une fois, dans ces occasions, trouver la bonne réaction n’a pas été facile et, en y repensant, je pense que j’aurais dû réagir plus fortement. Cependant, la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvaient ces personnes m’a également incitée à ne pas générer d’autres conflits avec elles.
Le fait d’être une femme, dans ce contexte, a également été bénéfique car cela m’a permis d’approcher plus facilement mes interlocuteurs, même si cela a généré des situations non souhaitées. Il est clair que si j’avais été un homme, je n’aurais pas eu à subir bon nombre des commentaires, des regards ou des comportements auxquels j’ai dû faire face en tant que femme, mais il est également probable qu’une présence masculine et une éventuelle approche en tant qu’homme auraient généré plus de méfiance chez mes interlocuteurs. Être une jeune femme a été, en ce sens, à la fois un avantage et un inconvénient.
Photo Andrea Gallinal, 2021
Contenu
Ce mémoire se compose de trois parties et de huit chapitres. Le découpage des différentes parties correspond à la logique explicative qui guide l’analyse.
Dans la première partie, je contextualise la convergence de la pandémie et de l’événement migratoire dans les îles et je questionne son caractère supposé imprévisible. J’examine également la construction de ce double événement comme une crise et comment cette catégorisation a impacté l’évolution des différents mécanismes institutionnels d’urgence développés au cours des derniers mois. Enfin, j’établis une comparaison entre la situation migratoire des Canaries en 2020 et celle de l’île de Lampedusa à la même période, dans le but de contextualiser la situation de l’archipel espagnol dans un panorama européen plus large.
Dans la deuxième partie de ce mémoire, je me concentre sur les différentes phases de développement et de mise en œuvre des systèmes de gestion et d’accueil des migrants. J’entends présenter ici la reconfiguration du paysage frontalier canarien à travers la recomposition des différents collectifs qui le constituent. Après un premier moment où le manque de moyens et de ressources de la part du gouvernement central est devenu évident, ce dernier a lancé le Plan Canarias, une feuille de route qui visait à mettre fin à la situation d’urgence vécue jusqu’alors. En ce sens, je me concentre ici sur l’utilisation des hôtels comme centres d’accueil temporaires et toutes leurs implications, ainsi que sur la mise en œuvre et la gestion des différents macro-camps établis sur l’île de Gran Canaria grâce à ce nouveau plan.
Enfin, dans la troisième partie, je me concentre sur les implications de la nouvelle infrastructure migratoire qui émerge de la recomposition du paysage frontalier des îles. Ainsi, j’analyse les nouvelles pratiques de ce système, basées sur des mobilités contraintes et des temporalités en expansion pour les migrants. J’aborde également les conséquences sociales et politiques résultant de la gestion de l’urgence de ce double événement. En ce sens, je fais principalement référence à l’augmentation et à l’expansion du discours xénophobe sur l’île, ainsi qu’à l’instrumentalisation de cette agitation par diverses formations politiques, notamment d’extrême droite, afin d’obtenir un levier politique.
Photo Andrea Gallinal 2019
Références bibliographiques
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WHO. (2020). ApartTogether survey: preliminary overview of refugees and migrants self-reported impact of COVID-19. World Health Organization.
This article published on antiAtlas-Journal #4 explores the multifarious ways in which freight and migrant mobilities have rearticulated to one another in the port of Patras. It argues that, through the re-appropriation of urban and logistical empty spaces, migrants have elaborated alternative strategies of settlement and escape that have allowed them to navigate the border and create independent patterns of mobility.
Marco Mogiani obtained his PhD in Development Studies at SOAS and is currently University Assistant at the University of Vienna. His work looks at border management within capitalism; migrant mobilities across the EU; acts and practices of citizenship.
Sur les murs de Palestine. Filmer les graffitis aux frontières de Dheisheh
Metis Presses, collection «vues d’ensemble Essais», 2020
Clémence Lehec
Le graffiti palestinien a une histoire et des spécificités aussi particulières que méconnues. Né dans les camps de réfugiés à la fin des années 1960, le graffiti y est encore largement répandu aujourd’hui. Il est pratiqué par des graffeurs ne se revendiquant pas tous comme artistes et mobilisant des thèmes éminemment politiques. Sur les murs de Palestine nous emmène au sein du camp de Dheisheh pour nous révéler les dessous de ce mouvement aux prises avec les multiples enjeux de la frontière, dans un espace où celle-ci est systématiquement contestée.
Ce livre nous raconte également l’histoire de la création d’un film documentaire, coréalisé avec la cinéaste palestinienne Tamara Abu Laban, qui explore les rues du camp et fait entendre ses voix. À travers le récit et le parcours d’une chercheure au plus près de son terrain d’étude, cet ouvrage fait l’éloge du travail en collectif et contribue au renouvellement de la méthodologie d’enquête, en décortiquant la dimension politique qui s’y cache.
Un dispositif transmédia
Préface et carte de Philippe Rekacewicz.
Cet ouvrage inclut l’accès à une version numérique enrichie, et au film coréalisé par Clémence Lehec et Tamara Abu Laban Les murs de Dheisheh.
(Sélection 2019: Karama Beirut Human Rights Film Festival, Beyrouth; 19e festival Cinéma Méditerranéen, Bruxelles; Red Carpet Human Rights Film Festival, Gaza et Jérusalem et 2020 : Al Ard Film Festival, Sardaigne où il a été primé). Pour plus d’information sur le film
Clémence Lehec
Clémence Lehec est docteure en Sciences de la société, mention géographie et environnement. Ses recherches dans l’espace israélo-palestinien ont débuté en 2013 et se sont concentrées sur le graffiti palestinien dans les camps de réfugiés de Cisjordanie. Le concept de frontière est un élément clef de son travail, tout comme l’échelle du corps et l’expérimentation en géographie. Cultivant une approche collective et extradisciplinaire, ses recherches sont une hybridation entre production scientifique et cinéma documentaire.
Cédric Parizot, Chargé de recherche au CNRS, anthropologue, Institut de Recherche et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman
Présentation dans le cadre du webinaire « Habiter et Participer: La place des territoires dans la recherche culturelle participative », 20 novembre 2020, 14h30-16h30, organisé par le réseau Paricip-Arc. Particip-Arc est un réseau d’acteurs engagés dans la recherche culturelle participative. Ce réseau est coordonné par le Muséum national d’Histoire naturelle et soutenu par le Ministère de la Culture.
Bibliographie
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CHARTIER, Denis, and Estienne RODARY, 2007, « Géographie de l’environnement, écologie politique et cosmopolitiques. » L’Espace Politique. Revue en ligne de géographie politique et de géopolitique 1
CORTES, Geneviève, et Denis Pesche, 2013, « Territoire multisitué », L’Espace géographique, vol. tome 42, no. 4, pp. 289-292. [En ligne]
GIRAUT, Frédéric, 2008, « Conceptualiser le territoire », Historiens et Géographes, 2008, no. 403, p.
57-68 [En ligne]
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LEVY Jacques, 2003, “Territoire” in Dictionnaire de la géographie
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Paris : Belin, 907-910.
LUSSAULT Michel, 2007, L’homme spatial. La construction sociale
de l’espace humain, Paris: Le Seuil.
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PECQUEUR, Bernard, 2009, « De l’exténuation à la sublimation : la notion de territoire est-elle encore utile ? », Géographie, économie, société, vol. vol. 11, no. 1, pp. 55-62.
Art et Hacktivisme technocritique
Jean Paul FOURMENTRAUX
Editions Les Presses du réel, Coll. Perceptions, 2020
ISBN : 978-2-37896-185-5
Format : 15 x 21 cm – 232 pages (51 ill. coul.) Présentation / Commande
Une analyse des actes technocritiques d’artistes, hackers et activistes de l’ère (post-)numérique
Contre l’hégémonie de l’innovation, ces derniers invitent à « mordre la machine », ré-ouvrir les boîtes noires, reprendre la main, transformer l’imaginaire technique. Leurs différentes approches – sous-veillance, médias tactiques, design spéculatif, statactivisme, archéologie des médias – explorent et expérimentent le hardware des machines, les coulisses de l’intelligence artificielle, les algorithmes de surveillance, la reconnaissance faciale, la visualisation des données.
Ces actes de désobéissance numérique prennent le contre-pied de la gouvernementalité et souveraineté des plateformes (GAFAM). Ils réinscrivent l’histoire du code, du cryptage et du calcul dans une critique de la culture contemporaine et ré-ouvrent des voies d’émancipation citoyenne. « Faire œuvre de hacking » recouvre ici des enjeux sociaux et politiques autant qu’esthétiques : réflexivité (critique), autonomie, indépendance, réappropriation des cultures matérielles (contre l’obsolescence et contre l’opacité des systèmes). La question du détournement y est centrale, l’humour et la parodie y occupent une place de choix.
En proposant de « penser par l’art », l’ouvrage aborde différentes figures de cette désobéissance numérique à travers les œuvres de plusieurs artistes internationaux : Trevor Paglen (USA), Paolo Cirio (Italie, USA), Julien Prévieux, Benjamin Gaulon, Christophe Bruno, Samuel Bianchini (France), Bill Vorn (Canada), Disnovation (France, Pologne, Russie), HeHe (France, Allemagne, Royaume-Uni).
Jean-Paul Fourmentraux, socio-anthropologue (PhD) et critique d’art (AICA), est professeur à l’Université d’Aix-Marseille et membre du Centre Norbert Elias (UMR-CNRS 8562) à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur les (contre-)cultures numériques, dont Art et Internet (CNRS éd., 2010), L’Ère Post-media (Hermann, 2012), L’œuvre Virale. Net art et culture Hacker (La lettre volée, 2013), Identités numériques (CNRS éd. 2015).
Sous la direction de Jean Cristofol et Anna Guilló
Le numéro 4 de antiAtlas Journal s’intéresse aux cartes considérées comme des dispositifs qui participent à des démarches artistiques, militantes ou scientifiques. Elles ne sont plus les représentations immobiles d’une réalité objective, mais plutôt des moments constitutifs de démarches productives et réalisatrices, prises dans les enjeux d’une réalité en mouvement. Pour la première fois, ce numéro est multilingue, comprenant des articles seulement en français ou en anglais.
Un workshop de création de jeux à la frontière entre arts et sciences humaines
18 au 22 septembre 2019
L’atelier
Aires de jeux est un atelier d’expérimentation pratique au croisement de la recherche et de la création artistique centré autour du thème des frontières et de la production de l’espace. Proposé sur cinq jours (18 au 22 septembre septembre 2019), il a été conçu à destination de chercheurs et de jeunes artistes désirant explorer de nouvelles formes d’écritures. L’atelier a été envisagé comme un espace de collaboration entre des participantes d’horizons divers cherchant à construire des espaces à mettre en jeu, des lieux de dialogue partageables.
Encadré par deux artistes, Leslie Astier et Théo Godert,Leslie Astier et Théo Godert et un chercheur, Cédric Parizot, les participantes se sont confrontées en binômes à d’autres modes narratifs ainsi qu’à d’autres conditions de production dans le but de matérialiser leurs savoirs respectifs. En se basant sur les matériaux et recherches apportés par le chercheur et l’artiste, l’enjeu pour chaque binôme était de trouver leur propre mode de construire et rendre jouable leurs propositions respectives.
Lorsque nous jouons, nous ne manions pas simplement des objets, des gestes, de la parole : nous nous engageons avec les règles qui organisent leurs modes d’interaction. À la recherche d’autres espaces et conditions d’élaboration de la recherche, l’atelier avait pour but de mettre en crise les relations entre les participantes et leurs objets d’étude, permettant de faire émerger de nouvelles zones de compréhension.
Philosophie
Aires de Jeux flirte avec différents domaines, à la bordure du jeu lui-même. Sur le mode de la navigation et de la dérive, nous avons cherché à baliser ensemble ce que pouvait être un jeu et quelles étaient les idées préconçues que les participantes pouvaient avaient à propos de sa pratique.
Le jeu est un médium sensible qui se dévoile par l’expérience qu’en font les joueurs. En parcourant aussi bien des formes, des idées, des sensibilités, des concepts, que des systèmes interactifs, ensemble nous nous sommes questionnés sur ce que sont, et ce que pouvaient être, des jeux qui parlent du réel. Il nous a été important de remettre cette question en perspective d’un point de vue de créateur et non seulement dans une optique pédagogique.
Dix participantes ont été amenées à penser les sensibilités permises par le jeu et la position que leur prototype allait prendre par rapport au réel.
Photo: Valérie Caraguel
Les jeux fabriqués
Collaboration entre chercheurs en sciences humaines et étudiants en école d’art :
5 binômes – 5 prototypes
Raconte moi une légende inuit…
Photo: Leslie Astier/Théo Godert
Dans ce jeu de cartes, des joueurs incarnent des anthropologues à la recherche d’une légende Inuit au Nunavik (dans le Grand nord québécois). Chaque anthropologue doit faenquête ire des rencontres et des expéditions pour récolter des données dans son carnet de notes. Mais attention, ils ne savent pas toujours de quoi parle leur légende !
Natacha Roudeix
Inès Lamalchi
KHNata
Photo: Leslie Astier/Théo Godert
Expérience narrative entre matériel et immatériel, KHNata est une immersion progressive dans deux consciences du livre manuscrit. Il trouve son origine dans l’expérience d’un chercheur codicologue et paléographe ainsi que dans la démarche de questionnement d’une artiste autour de l’identité multiple. À l’ère de la numérisation des données, KHNata opère un parcours sensible entre différents états de la matière.
Laurie-Anne Jaubert
Élodie Attia
A Place in The City
Photo: Sara Scatà/Aline Lugo
A Place in the City est une narration interactive. Le joueur est plongé dans la ville de Magma et il assiste à une conversation : qui sont-ces personnages ? Pourquoi sont-ils réunis ? Le joueur se balade à la découverte du destin d’un quartier. Dans cet univers imaginaire il reconnaît des choses, dans un jeu entre fiction et réalité, il fait des allers-retours entre poétique et politique, entre Magma et Beyrouth.
Sara Scatà
Aline Lugo
Parcours d’enfant
Photo: Leslie Astier/Théo Godert
Incarner trois acteurs dans la vie d’un enfant placé. En communiquant, vous opérez à trois des décisions qui constitueront le parcours d’une vie jusqu’à l’âge adulte. Chaque message, son code et sa réception auront un impact sur le jeu et ainsi sur la vie de l’enfant.
Nathalie Chapon
GFBA
Velvet Aubry/Estelle Tzotzis
Gay Family Builder Agency (GFBA) est un jeu collaboratif entre deux joueurs. Il met en scène un couple gay qui décide d’avoir un enfant. Situé dans un futur proche, le jeu présente la GFBA : une agence fictive qui offre des services pour aider les couples de même sexe dans leur projet d’enfant.
Vous incarnez Noah et Basil et devez répondre à un questionnaire qui décidera, ou non, de votre droit d’accès à la parentalité.
Velvet Aubry
Estelle Tzotzis
Processus de création
Tout au long de l’atelier les participantes ont visité différents paysages ludiques et théoriques suivant un rythme soutenu. En trois jours, les chercheures et artistes devaient se prêter à différents excercices de déterritorialisation de leurs recherches menant à la construction d’un prototype de jeu. Pour les accompagner, un programme sur-mesure a été mis en place visant quelques points clefs d’expérimention, de réflexion et de conception.
Introduire
Peignant un paysage de possibles en alternant entre des œuvres jouables par des supports physiques et des œuvres numériques, Aires de Jeux a débuté sur la présentation d’un inventaire non exhaustif de ce que peut-être un jeu qui a trait au réel. Traversant à grandes enjambées un domaine très vaste, du jeu textuel au jeu de plateau, les participantes ont pu faire une première rencontre avec le paysage ludique actuel, un paysage qui déjoue souvent les attentes lorsqu’on parle de jeu ou de jeu-vidéo.
Contextualiser
Ponctuant les premières journées de réflexion, deux présentations sont venues accompagner les participantes dans leurs réflexions.
Jean Cristofol, professeur d’épistémologie à l’ESAAix, a mené une discussion sur les chevauchements territoriaux entre le jeu, la fiction et les pratiques de groupes sociaux différents.
Embrassant des questionnements sur la distanciation brechtienne aussi bien que l’oulipisme, Jean a questionné cette pratique du plateau comme lieu de production d’espaces sociaux et créatifs.
Douglas E. Stanley, artiste et professeur à l’ESAAix, et Cédric Parizot, anthropologue (Iremam, Aix-Marseille Univ/CNRS), ont quant à eux fait un retour d’expérience sur le processus d’élaboration qui les a mené depuis 2013 à la co-construction du jeu vidéo A Crossing Industry. Ils ont ainsi présenté un exemple de pratique concrète à travers laquelle un chercheur et un artiste peuvent articuler une démarche artistique avec ses enjeux esthétiques et poétique avec une démarche scientifique.
Familiariser
L’atelier a également été un temps d’apprentissage de deux outils numériques, selon le support choisi par les participantes : Cardpen / Twine – outils de création de cartes et de récit hypertextuel. Tous deux en ligne gratuitement, ces outils permettent d’obtenir rapidement des jeux en apprenant quelques bases de programmation et de graphisme.
Avec ces outils peuvent se développer de nouvelles écritures, de nouvelles manières de raconter portées par les envies de récits des participantes.
Dialoguer
Les temps de travaux étaient aussi des moments d’accompagnement, nous nous déplacions dans le but d’aider à la conceptualisation ou réalisation des prototypes.
Photo: Valérie Caraguel
Formuler
Formuler un pitch permet de trouver l’objectif et l’atmosphère d’un jeu en une présentation ne dépassant pas les 2 minutes. Régulièrement, les participantes ont été invitées à pitcher le jeu qu’ils projetaient de faire. Ces présentations collectives ont permis de faire rapidement surgir les endroits de tensions où quelque chose peut se déployer mais aussi les endroits d’incompréhension. Les pitchs ont été formulés au cours de sessions collectives où chaque groupe a pu discuter, échanger et reformuler les ébauches de jeu des autres groupes.
Orienter
Pour faciliter certaines étapes d’idéations, nous avons mis au point un outil qui permet aux participantes de tirer des questions et d’y répondre rapidement.
Cadres est un jeu de cartes s’inspirant du Water Yam de Georges Brecht couplé avec les Stratégies Obliques de Brian Eno. Le jeu est utilisé à la manière d’un oracle et s’adresse au joueur-créateur afin de l’aider à aller plus loin dans sa démarche créative, l’amenant à envisager les choses sous un jour nouveau ou demandant un positionnement face à une question non encore résolue.
Jouer
Durant les cinq jours, les participantes ont pu jouer à des jeux créés dans une optique artistique, mais ils ont également, tout au long de l’atelier, joué aux jeux qu’ils étaient en train de créer. Ces étapes de mise à l’épreuve ont été essentielles et ont souvent révélé les fragilités ou les forces expressives d’une idée. Le workshop s’est terminé par une session de jeu mutuelle dans un espace prévu à cet effet.
Conclusion
Aires de Jeux est un atelier visant à faire émerger des zones de frictions entre la recherche artistique et la recherche académique. Le jeu y est utilisé comme espace de rencontres modulable : il permet de régler les relations entre les participantes et de les faire concourir ensemble vers un objectif commun. Tout au long de l’atelier nous avons cherché à désigner certaines de ces zones d’interaction et à donner aux participantes des points d’entrée.
Les contraintes ont permis de délimiter un plateau d’interaction destiné à accélérer un processus de collaboration qui peut prendre des mois avant de donner naissance à des pistes de jeu. Le programme, qui a été conçu lors d’un premier atelier ayant eu lieu en 2018, a été perfectionné pour cette session afin d’inviter les participantes à ne se soucier que du développement de leurs idées et de leur première réalisation. Ce processus créatif accéléré peut être déroutant pour les participantes qui entrent en contact avec une nouvelle manière d’organiser leurs connaissances et qui doivent s’approprier un médium inconnu. Il est important d’accompagner et de soutenir les participantes dans ces zones d’émergence.
Photo: Leslie Astier/Théo Godert
Aires de Jeux a pour but d’amener à la création d’un objet dont l’expérience, le jeu, ne peut être substituée à une simple explication. Se départissant des narrations proprement scientifiques et de la forme socialement construite de ce que devrait être un jeu, les participantes ont formulé des expériences liées à des observations faites sur le réel.
Photo: Leslie Astier/Théo Godert
Leslie Astier et Théo Godert, Aix-en-Provence, 31 août 2020
Programme de recherche et de commissariat itinérant
Out.of.the.blue.map est un programme de recherche et de commissariat itinérant, explorant la liminalité permanente des territoires [fluides+solides] méditerranéens. Ancré entre le Maroc, la France, et les Pays-Bas, le programme porte un regard collectif critique sur les systèmes de gouvernance qui façonnent ces paysages frontaliers. De 2019 à 2020, cet effort collaboratif rassemble artistes, chercheuses.eurs, designers, architectes et activistes française.s, marocain.es et néerlandais.es dont le travail conteste, questionne ou convoque les paysages frontaliers [fluides+solides] méditerranéens. Le programme se structure autour d’une série de haltes au Maroc, en France et aux Pays-Bas, autour desquelles s’organiseront un cycle d’expositions et d’ateliers, prévus de mars à décembre 2020 [International Community of Arts Rotterdam + Mahal Art Space Tanger + Les Parallèles du Sud Manifesta 13 Marseille + Jan Van Eyck Academie Maastricht].
Un lexique
Résultat de 2 ans de recherche, un lexique sera développé, édité et exposé tout au long du programme. Ce dernier constitue un objet éditorial évolutif, composé de fragments tirés des juridictions maritimes et terrestres, de rapports, de paroles d’activistes, d’oeuvres artistiques, de discours politiques et médiatiques, de récits et d’imaginaires informels ainsi que d’éléments visuels. Cet ouvrage constitue en lui-même une carte alternative aux espaces liminaux méditerranéens. Il se développera au fil des expositions, des ateliers et des rencontres organisés dans le cadre du programme. Il sera traduit en arabe, en anglais et en français.
Out.of.the.blue.map rassemble des récits méditerranéens dépassant les hiérarchies et les fictions coloniales pour composer des paysages frontaliers alternatifs, et expérimenter de nouvelles façons de percevoir et de donner sens aux frontières. A la fois lieu de passage et de rupture, la mer Méditerranée constitue un territoire liminal pour certain.e.s de ceux.celles qui la traversent. Cet effort collectif s’attache à déconstruire son territoire, et s’affranchit des narrations imposées en explorant leurs angles-morts.
Comité de rédaction : Jean Cristofol, Anna Guillo et Cédric Parizot. Conçu par Thierry Fournier, le design en « articles-paysages » renouvelle l’expérience des publications de recherche sur le web. Programmation Papascript : Alexandre Dechosal et Maxime Foisseau.
Le numéro 3 propose des articles qui contribuent de façons différentes, soit à partir de l’évolution des espaces frontaliers, soit à partir de réflexions sur les démarches de recherche en art, à interroger les éléments fondateurs de notre démarche. Ce numéro vaut pour les pistes qu’il ouvre, les investigations qu’il vient poursuivre et les questions qu’il pose.
Dans le cadre du Festival Jours [et nuits] de cirque(s) 2019 et du projet Changement de scènes une série de workshops cirque et sciences humaines (22-27 septembre 2019) a réuni des professionnels issus d’horizons variés. Intitulés Hétérographies circassiennes ces workshops ont été conçus par Vincent Berhault et Cédric Parizot avec le soutien du CIAM, du LabexMed, de l’IREMAM, TELEMME et l’IDEMEC. Ils ont amenés, les chercheurs en science humaines et sociales à s’approprier l’écriture circassienne des artistes pour formuler des propositions scientifiques à travers un agencement dramaturgique.
Dans cette pièce, jouée le 28 septembre, Cédric Paga, clown et Olivier Tourny, ethnomusicologue, IDEMEC (Aix Marseille Université, CNRS) s’engagent dans un jeu autour des formes pour parler d’ethnomusicologie.
Vidéo réalisée par Emilie Rossi avec Mathieu Bertéa
Dans le cadre du Festival Jours [et nuits] de cirque(s) 2019 et du projet Changement de scènes une série de workshops cirque et sciences humaines (22-27 septembre 2019) a réuni des professionnels issus d’horizons variés. Intitulés Hétérographies circassiennes ces workshops ont été conçus par Vincent Berhault et Cédric Parizot avec le soutien du CIAM, du LabexMed, de l’IREMAM, TELEMME et l’IDEMEC. Ils ont amenés, les chercheurs en science humaines et sociales à s’approprier l’écriture circassienne des artistes pour formuler des propositions scientifiques à travers un agencement dramaturgique.
Dans cette pièce, jouée le 28 septembre, Karima Direche, historienne, TELEMME (Aix Marseille Université/CNRS) et Angela Laurier, contorsionniste s’engagent dans un jeu autour des formes pour évoquer leurs pratiques de recherche et création.
Vidéo réalisée par Emilie Rossi avec Mathieu Bertéa
Dans le cadre du Festival Jours [et nuits] de cirque(s) 2019 et du projet Changement de scènes une série de workshops cirque et sciences humaines (22-27 septembre 2019) a réuni des professionnels issus d’horizons variés. Intitulés Hétérographies circassiennes ces workshops ont été conçus par Vincent Berhault et Cédric Parizot avec le soutien du CIAM, du LabexMed, de l’IREMAM, TELEMME et l’IDEMEC. Ils ont amenés, les chercheurs en science humaines et sociales à s’approprier l’écriture circassienne des artistes pour formuler des propositions scientifiques à travers un agencement dramaturgique.
Dans cette pièce, jouée le 28 septembre, Vincent Berhault (jongleur, auteur et metteur en scène) et Vincent Geisser, politiste, IREMAM (Aix Marseille Université, CNRS) s’engagent dans un jeu autour des formes pour évoquer les questions liées à la laïcité.
Vidéo réalisée par Emilie Rossi avec Mathieu Bertéa
Oligoptik, frontières intelligentes? est un travail en cours amorcé en 2018 par Vincent Berhault, auteur, metteur en scène, compagnie les Singuliers et Cédric Parizot, anthropologue, IREMAM (Aix-Marseille université/CNRS). Avec Barthélémy Goutet, comédien et Gégory Kamoun, danseur.
Vidéo réalisée par Emilie Rossi sur la base d’une captation effectuée avec Mathieur Bertéa au MUCEM, Marseille le 10 octobre 2019
Partenaires :
antiAtlas des frontières
Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans
Centre international des arts en mouvement
Maison méditerranéenne des sciences de l’Homme
Projet LabexMed
MUCEM
Aix-Marseille université
Centre national de la recherche scientifique
Un documentaire réalisé par Alice, Anaïs, Camille, Lucie, Maëlie, Madhi et Manon, Master Pro Ecritures documentaires de Pascal Cesaro.
Aix Marseille Université – 2018
Ce film documente une rencontre avec des chercheuses en sciences humaines et sociales venues expérimenter l’écriture vidéographique lors du workshop Regarder ailleurs, écouter loin, création vidéo animé par par François Lejault, vidéaste et professeur à l’ESA Aix-en-Provence (http://lejault.com/) et Nada Rezk, vidéaste égyptienne. Ce workshop a été organisé dans le cadre du Forum 2018 du Groupement d’intérêt scientifique Moyen Orient Mondes Musulmans, intitulé (D’) Ecrire les mondes arabes et musulmans au 21ème siècle.
Le fait divers est un grand déclencheur d’imaginaire. Il dessine souvent un détail frappant d’une société, de son évolution, de ses difficultés, de ses travers. Du ridicule au tragique, de l’absurde au fantastique, la palette est généreuse et foisonnante. Mais comment ces récits de morceaux de vies se transforment de l’oralité ou du compte rendu journalistique à la forme filmique? Comment le passage d’un médium à l’autre va-t-il amplifier, détourner, décadrer ces histoires du quotidien?
C’est ce déplacement entre le récit factuel et sa mise en image et sons auquel se sont confrontés les participants du workshop Regarder ailleurs, écouter loin, création vidéo. A partir des récits colportés par chacun d’entre eux, ils ont élaboré de petites formes filmiques courtes et bricolées dans une urgence créative et avec un souci de précision dans les choix esthétiques. Ils ont exploré avec gourmandise tous les possibles offerts par le numérique en revendiquant le mélange et l’hybridation entre les registres et les techniques.
Les formes filmiques ont été projetées le 1er octobre 2018 dans le salon jouxtant l’auditorium de l’Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence.
Ce film réalisé en 2018 par Robin Grez et Irina Warner (Master Pro documentaire, Aix Marseille Université) propose une réflexion sur le rapprochement entre Arts et Sciences. Il documente l’expérimentation menée par Guillaume De Vaulx et Lola Dubus qui a donné lieu à la création d’un livre interactif inspiré de la fable des animaux dans l’épître 22 des Rasāʾil Ikhwān al-ṣafā. Cette expérimentation a eu lieu lors de l’atelier Ecritures ludiques et interactives organisé par Douglas Edric Stanley et Leslie Astier (septembre 2018) à l’Ecole supérieure d’art d’Aix en Provence, dans le cadre du Forum GIS MOMM 2018, (D’)Ecrire les mondes arabes et musulmans.
A l’occasion du workshop Écritures ludiques et interactives, étudiants en arts et chercheurs se sont réunis en binômes afin de faire émerger ensemble des narrations communes à la rencontre des territoires de recherche de chacun. Durant trois jours les équipes se sont familiarisées avec des techniques de prototypage rapide de jeux (papier, vidéo, narration interactive) accompagnées par des outils ludico-méthodologiques expérimentaux développés au coeur de l’atelier Jeux de l’ESAAix. Poursuivant le travail de collaboration formulé autour du projet A Crossing Industry, les étudiants et les chercheurs ont inventé ensemble des nouvelles formes hybrides entre recherche scientifique et création.
Les cinq jeux résultant de ces journées d’échanges ont été testés par le public le 1er octobre dans le salon jouxtant l’auditorium de l’Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence.
Ce film a été réalisé à l’automne 2018 lors du Forum du Groupement d’intérêt scientifique Moyen Orient Mondes Musulmans par Melissa Robert et Lucille Roche (Master Pro documentaire, Aix Marseille Université). Il propose une réflexion sur le rapprochement entre Arts et Sciences à partir de la présentation du projet de recherche mené par Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley et Robin Moretti A Crossing Industry qui aboutira à la création d’ un jeu vidéo documentaire et artistique.