Maps of Secession, Berlin, 2014

Exposition collective
Institut Français, Berlin
Du 16 septembre au 10 octobre 2014

Œuvres de Anri Sala, Kader Attia, Álvaro Martínez Alonso, Julie Bena, Famed, Hackitectura, Simona Koch, Nicolas Maigret, Migreurop, Cédric Parizot, Marco Pezzotta, Philippe Rekacewicz, Stéphane Rosière, ChTo et Watch the Med. Avec la participation d’Isabelle Arvers.

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En septembre, l’antiAtlas s’exporte à Berlin dans le cadre du programme Secession, un projet itinérant aux dimensions littéraires, philosophiques et artistiques qui se concentre sur l’espace européen pour explorer sa multiplicité, ses « entre-deux », et se détacher de la conception actuelle de l’Union Européenne et des nations qui la constituent. Secession se déroule en deux événements, une soirée de lectures et performances le 23 septembre et une exposition du 16 septembre au 10 octobre 2014.

Photographs © Mittel Europa

Œuvres exposées

Simona Koch, Borders, since 2010

Hackitectura, Critical cartography of the straits of Gibraltar, 2004

Cédric Parizot et Douglas Edric Stanley, A Crossing Industry, 2013

Philippe Recacewicz, L’Europe se fond dans l’Asie dans une immense étreinte, 2013

Stéphane Rosière, Planisphère des frontières fermées, 2012

Partenariats

Allianz Kultur Stiftung, Centre Marc Bloch, Institut Français de Berlin

Conférence – performance : « Data dramatization: Art, Science, Design et data visualization »

Vendredi 12 septembre 2014
Lab de L’Institut culturel de Google,
8 rue de Londres, 75009 Paris

Conférence-performance interrogeant les interactions entre artistes et scientifiques autour de la mise en scène de données :

Roger Malina, astrophysicien et fondateur du ArtSciLab de l’Université du Texas (Dallas)

Andrew Blanton, artiste compositeur

Tommaso Venturini, professeur associé au MediaLab de Sciences Po

Isabelle Arvers, commissaire d’expositions, auteur, critique

Atelier machinimas avec Isabelle Arvers et Ahmed El Shaer

25 février-1er mars 2014
La compagnie, lieu de création, Marseille

Un atelier machinima avec la commissaire d’exposition Isabelle Arvers et l’artiste égyptien Ahmed El Shaer à La Compagnie, dans le cadre de l’exposition L’antiAtlas des frontières #2. Cet atelier est réalisé en partenariat avec des organisation à but non lucratif qui travaillent avec La compagnie sur des actions sociales et culturelles.

Pour accompagner l’exposition, l’atelier a été thématisé sur la frontière pour aborder les questions de l’antiAtlas : mmigration, traversée des frontières, économie de la frontière, représentation des frontières.

Soirée antiAtlas des frontières 2

27 février 2014
Rencontre-discussion autour du numéro « Frontières » de la revue Hommes & Migration
La Compagnie, Marseille, France

A l’occasion de la parution prochaine d’un dossier consacré aux frontières, Marie Poinsot, rédactrice en chef de la revue Hommes & Migration, invite Catherine Wihtol de Wenden, politologue, directrice de recherches au CERI à Paris et spécialiste des migrations internationales et Virginie Baby-Collin, géographe, Maître de conférences à Aix-Marseille Université et spécialiste des migrations dans le golfe du Mexique.

Avec la mondialisation, une nouvelle cartographie des frontières et des migrations ? Depuis le début des années 2000, la mondialisation a non seulement accéléré les mouvements migratoires, mais elle a aussi reconfiguré les circulations qui contournent désormais les frontières les plus contrôlées. De nouveaux profils de migrants apparaissent, motivés par des considérations plus aptes à développer des stratégies multiples malgré les obstacles et les errances de la clandestinité ? Comment se redessine la cartographie des frontières les plus fréquentées par les migrations internationales ? Peut-on comparer les frontières de l’Europe de Schengen et celles qui séparent le Mexique des Etats-Unis ? Les systèmes de surveillance et de contrôle sont–ils similaires ? Peut-on parler d’une militarisation croissante des frontières ? Quelles sont les incidences concrètes sur les migrants, en terme de tactique de passage, de situation dans le pays d’accueil et de relations avec son pays d’origine ?

Dans le cadre de cette rencontre, l’antiAtlas des frontières a proposé à l’artiste Dalila Madjhoub de présenter le projet artistique qu’elle a réalisé avec Martine Derain en 1998-1999 : En Palestine, il n’y a pas de petites résistances.

Soirée antiAtlas des frontières 1

Mercredi 19 février 2014
La Compagnie, Marseille

Avec Morgane Guiard, Nicola Mai, Stephanos Mangriotis et Laurence Pilland

Nicola Mai présentera Samira, installation présentée dans l’exposition en cours. Stephanos Mangriotis et Laurence Pilland présenteront les images de Europa Inch’Allah, également présent dans l’exposition, ainsi que les réflexions qu’ils partagent. Morgane Guiard, remarquée à l’occasion de l’appel à projet, présentera ses recherches sur les murs de Marignane.

Morgane Guiard, Les murs montent
Photographies numériques, Bouches-du-Rhône, 2012-2013

Depuis quelques années les habitants de ces villas modestes entament des travaux pour ajouter des rangés de parpaing et créer un refuge d’aspect impénétrable.Parce que le travail de maçonnerie est généralement réalisé à la va vite et avec peu de budget la trace de l’élévation se charge d’une paranoïa sécuritaire qui semble devenir indispensable. Les habitant s’enferment dans leur espace intime. Il ne doit y avoir aucunes intrusions, que cela soit celle d’une personne malhonnête ou que cela soit les regards de passants curieux. Les individus se tournent sur eux même et limite le contact avec le voisinage et l’espace public.

Atelier 10 : Topologie, Territoire et Frontières

27-28 janvier 2014
La Compagnie, 13001 Marseille
Maison des Astronomes
IMéRA (Mediterranean Institute for Advanced Research)
2 place Le Verrier, Marseille

Comité d’organisation: Gabriel Popescu (Indiana University & IMéRA), Cedric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS-AMU)

La topologie est une branche de la géométrie qui s’intéresse aux relations de positions dans les cadre des déformations spatiales d’objets qui conservent leurs propriétés. Les chercheurs en sciences sociales se sont inspirés de la topologie pour comprendre les transformations des territoires impliquées par la globalisation. Cependant, la relation entre topologie et territoire ne va pas de soi, alors que le territoire renvoie à une projection euclidienne de l’espace, la topologie s’inscrit dans une géométrie non euclidienne.

Lundi 27 janvier 2013

La Compagnie, Marseille

8h45 Ouverture du séminaire – Session 1

Lauren Martin, géographe, Université de Oulu, Finlande
Border Topologies: Law, Territory, and Bodies in US Immigration Enforcement

Christophe Sohn, géographe, Centre public de recherche, CEPS, Luxembourg
The border assemblage: A relational approach to bordering

Gabriel Popescu, géographe, Indiana University, résident de l’IMéRA
The topological imagination: Territorializing mobile borders?

11h00 – 12h00 Discussion

14h00 – 15h30 Session 2

Alessandro Petti, architecte, Decolonizing Architecture Project, Palestine
Lawless lines

Anne-Laure Amilhat Szary, géographe, Université de Grenoble, France
The mobile border hypothesis

Stephanie Simon, géographe, Université d’Amsterdam, Pays Bas
Border temporalities: The space-time topology of interoperability and situational awareness

16h30 – 17h30 Discussion

Mardi 28 janvier

Maison des Astronomes, IMéRA (Mediterranean Institute for Advanced Research), 2 place Le Verrier, Marseille

9:00 – 13:00 Séminaire fermé sur la topologie

Résumés

Lauren Martin, Geographer, University of Oulu, Finland
Migration, Law, and Territory: A Topological Approach to Borders

In this talk, I will critically engage with the concept of topological borders, an increasingly cited but under-examined aspect of contemporary mobility control regimes. Borders have evoked both territorial bounding and the state’s prerogative to admit or exclude noncitizens, but this traditional association of borders with sovereign territoriality seems in conflict with empirical research on immigration and border policing. Databanking technologies, risk analysis, and surveillance practices allegedly allow state officials identify and detain dangerous individuals from the population far from the territorial margins of a nation-state. In addition, the interiorization and externalization of immigration policing—and the legal mechanisms that enable them—complicate notions of borders’ fixity. Paradoxical legal categorizations allow migrants to be physically present, yet excluded from legal protections, so that states can hold people simultaneously inside and outside the law. Moreover, new immigration laws sometimes work retroactively, calling not only the « where » but the « when » of migrant’s inclusion/exclusion into question. Topology, or the mathematical study of objects under continual transformation, seems to provide a provocatively nonlinear, open, and fluid alternative to Cartesian, cartographic space, one more capable of dealing with the complexity of borders’ contemporary spatiality. However, while references to topological borders are rife, it is unclear how borders operate topologically. My aim is to refine and clarify a topological approach to borders and bordering, and to do so I bring recent conceptions of topological space to bear on immigration policing and border literatures.

Christophe Sohn, Geographer, Public Research Center, CEPS, Luxembourg
The border assemblage: a conceptual exploration into border’s multiplicity

This paper is an attempt to conceptualize borders multiplicity by mobilizing the theory of assemblage developed by Deleuze and Guattari. The aim is to examine how multiple meanings emanating from various actors constitute a border assemblage and how this heterogeneous grouping of different parts allows us to scrutinize in a new way the changing significance of borders. In the first place, an analytical framework addressing borders multiplicity in terms of structure and agency is elaborated. Based on their enabling or constraining effect over agency, debordering and rebordering processes are interpreted according to four ‘conceptual invariants’. In the second place, the concept of assemblage is mobilized in order to understand how these different meanings that do not form a coherent whole relate one with each other. The border assemblage, conceived as a relational approach to borders multiplicity, makes it possible to unravel the uneven power relations that are both constitutive of and mediated by the border. The theory of assemblage also allows us to take into consideration the non-linear processes of territorialisation and coding that stabilize or disrupt borders ‘identity’. This leads us to consider the notion of ‘topological invariants’. Lastly, a conceptualization of the connections that hold together the disparate elements is undertaken in order to be able to represent a border assemblage in contextuality. Based on discourse network analysis, new ways of mapping real world border assemblages are considered.

Gabriel Popescu, Geographer, Indiana University & IMeRA
The topological imagination: territorializing mobile borders

Current attempts to securitize transnational mobility are profoundly altering borders’ relationship to space. If modern political territoriality is built on a geographical imagination that sees space as a rigid object to be divided by linear borders, recently we are witnessing a changing geographical imagination to incorporate a polyvalent perspective that is more in tune with a notion of space defined by mobility and connectivity rather than by proximity and distance decay. Accordingly, we are witnessing the emergence of complementary forms of state borders that, shaped in large part by digital technologies, depart from the norms of territorial linearity by becoming embedded into flows that can travel and be monitored continuously across space. Such articulation of borders changes the way movement through space is organized and how people and places come into contact. This “portal-like” logic of border geography brings people and places together by connecting them directly across space, unlike modern border territoriality that connects them via contiguous state territories. However, just what kind of political territoriality these mobile borders engender remains unclear as the tension between the two geographical imaginations is proving difficult to reconcile in practice. While the network model is often advanced when it comes to representing topological phenomena, this falls short of capturing the more complex dinamics of technologically embedded border flows.

Alessandro Petti, Architect, Decolonizing Architecture Project, Palestine
Lawless lines

When historian and former deputy mayor of Jerusalem Meron Benvenisti famously asked “who owns the ‘width of the line’?” he was referring to the 1949 cease-fire lines between Israel and Jordan. The lines, he wrote, had been drawn on a 1:20,000 scale map by the two military commanders— Moshe Dayan and Abdullah al-Tal. Meeting in an abandoned house in the frontier neighborhood of Musrara in Jerusalem, they laid out a map on the floor. Each drew a line using a different colored grease pencil: Dayan used green, and al­Tal, red. The thickness and softness of the colored pencils resulted in lines that were, generally, three to four millimeters wide. But because the floor under the map was uneven (or perhaps Dayan and al-Tal were a little careless), in some areas of Jerusalem the width of the line became wider.

Before and since then Palestine is traversed by these borderlines that aim to reduce modern geopolitics into a flat Euclidian space. However when these lines encounter reality, fields, olive and fruit orchards, roads, gardens, kindergartens, fences, terraces, homes, public buildings, mosques they produce a different reality.

By investigating the clash of these geopolitical lines onto the space of a house in Jerusalem, a mosque in the village of Burin, southwest of Nablus and in the unfinished and abandond Palestinian Parliament located in Abu Dis, we aim to revel how in Palestine, political spaces are not defined by the fictional partitions extablshed during two decades of « peace agreements », but operate through legal voids. It is in these lawless lines that the regime manifest its nature but it is also in these extraterritorial dimension of these lawless lines that lays the possibility for tearing apart of the entire system of division.

*Research project developed with DAAR and Nicola Perugini

Anne-Laure Amilhat-Szary, Geographer, University of Grenoble, France
The mobile border hypothesis

Facing a world where the forms and functions of borders do not coincide anymore, we are confronted with a paradoxical episteme: one tendency to see borders everywhere, as they multiply in all kinds of spaces; another tendency to account for their topographical disparition in favour of a world of connections, which abides by complex topological systems. A closer look into the territoriality of borders reveals that the power games engaged across the linear borders have not totally disappeared, transferred into high tech surveillance devices and data basis sets. The mobile border hypothesis allows opens the ground for reflexion on the political impact of new topologies. Does the fragilizing of sovereignty induce the disappearance of the democratic political ideal?

Stephanie Simon, Geographer, University of Amsterdam, Netherlands
Border temporalities: The space-time topology of interoperability and situational awareness

This paper focuses on the imaginations of temporal and spatial topology in contemporary border surveillance by considering the push for ‘situational awareness’ and ‘interoperability’ as the prized traits of border surveillance actors and operations. In particular, the paper focuses on the new European external border surveillance program, EUROSUR, which ultimately wishes to foster situational awareness and interoperability by forging alignments between spatially and temporally dispersed elements. The program’s security imaginary resonates with the language of topology in its ambitions to bridge, morph, and blend intelligence from wildly dispersed sources—from undersea sensors to outer space satellites, from European liaisons in Libya to transnational security bodies like FRONTEX—and arranged these disparate pieces in ‘interoperable’ databases and analyzed by ‘seamless’ technological, perceptual, and visual measures. Ultimately the goal is to produce ‘situational awareness’ for border security actors, which envisions a kind of dynamic knowledge of unfolding spaces in real time and the ability to act quickly within them. This paper argues that the ambition for situational awareness rewrites the underlying spatio-temporal logic of border practices in Europe. The topological space-time of situational awareness is to be able to take cues from emergent spaces and their continual transformations and to co-evolve with them in real time. The paper maintains, however, that while this topological imagination produces effects, it does not ultimately replicate its ideal in practice. That is, there is a gap between the topological surveillance imagination and its inability to translate this into practice. This paper explores how the failures and fragilities of the topological translation offer productive inroads for security critique.

Partenariat

Institut Méditerranéen de Recherche Avancées (IMéRA, AMU), Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence, PACTE (UJF, CNRS), Isabelle Arvers, La compagnie, lieu de création

Image: DAAR, 2015

La Compagnie, Marseille, 2013-2014

Exposition collective
Du 13 décembre 2013 au 1er mars 2014
La Compagnie, lieu de création, Marseille

Œuvres de Boats 4 people & Forensic Oceanography, Collectif Daar, Masaki Fujihata, Atelier hypermédia, Nicola Mai, Stephanos Mangriotis, Migreurop, Ken Rinaldo. Commissaires Isabelle Arvers et Paul-Emmanuel Odin

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Photos : Myriam Boyer

L’antiAtlas des frontières présente une approche inédite des mutations et du vécu des frontières terrestres, maritimes, aériennes et virtuelles au croisement de la recherche, de l’art et de la pratique. Cette manifestation est l’aboutissement d’un programme de recherche exploratoire art-science qui a donné lieu à l’organisation de 10 séminaires depuis 2 ans. En septembre 2013 ont eu lieu à Aix-en-Provence un colloque international et l’exposition #1 au musée des Tapisseries. L’exposition #2 est co-produite par l’IMéRA (Institut Méditerranéen de Recherches Avancées), l’École Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, PACTE (Université de Grenoble), Isabelle Arvers (commissaire indépendante) et La compagnie, lieu de création.

L’antiAtlas des frontières met en jeu plusieurs niveaux de lecture, différentes formes d’implication et de participation. À la compagnie, les visiteurs sont invités à évoluer dans un espace de documentation transmédia. Ils peuvent ainsi expérimenter des propositions aussi diverses qu’un jeu vidéo critique sur l’industrie du passage clandestin aux frontières, la vidéo du projet The Lawless Line (collectif DAAR), l’approche photographique de Stephanos Mangriotis autour de la ville portuaire de Patras en Grèce, les cartes interactives des collectifs Watch the Med et Migreurop. Sont aussi présentées les œuvres d’artistes internationaux : Kenneth Rinaldo mêle drones et aspirateur dans une création robotique pour évoquer l’intrusion des technologies sécuritaires dans le privé (une création pour l’antiAtlas) ; Masaki Fujihata associe images de synthèse et données GPS dans un espace immersif en 3D où le visiteur expérimente un nouveau rapport au champ et contrechamp des images vidéo prélevées autour de la frontière alsacienne. Deux oeuvres transdisciplinaires inédites ont été produites : Samira, une ethno-fiction de l’anthropologue Nicola Mai qui déjoue subtilement les stéréotypes et les discours discriminants sur la prostitution, le transsexualisme et l’exil (œuvre présentée dans une pièce séparée) ; un jeu vidéo sur la traversée des frontières, A Crossing Industry, réalisé par l’atelier hypermédia de l’Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence sous la direction de Douglas Edric Stanley et à partir des enquêtes de terrain de l’anthropologue Cédric Parizot.

Œuvres

Ken Rinaldo, Drone eat drone: American scream, 2013

Collectif Daar, Decolonizing Architecture, 2012

Boats 4 people & Forensic Oceanography, Watch the Med, 2013

Migreurop, Carte dynamique des étrangers détenus aux frontières des États, 2012

Stephanos Mangriotis, Europa Inch’Allah, 2009-2010

Nicola Mai, Samira, 2013

Cédric Parizot & Douglas Edric Stanley, A Crossing Industry, 2013

Masaki Fujihata, Field Work@Alsace, 2004-2005

Soirées, rencontres, projections

Samedi 14 décembre de 16h à 19h
Rencontre avec les artistes, les chercheurs, les organisateurs : Masaki Fujihata, Nicola Mai, Cédric Parizot, Douglas Edric Stanley et l’atelier hypermédia et les membres du comité scientifique et artistique

Vendredi 17 janvier à 19h : Fiction de la frontière
Projection du film Sleep Dealer avec Alex Rivera, présentation par Isabelle Arvers

Lundi 27 janvier de 9h-12h 14h-18h : Topology, Territory and Border Spaces
Séminaire de l’IMéRA organisé par Gabriel Popescu (Résident IMéRA, Indiana University, South Bend) ouvert au public, en anglais, avec Alessandro Petti du collectif DAAR : à la compagnie

Jeudi 30 janvier à 19h : soirée Rivesaltes
Projections de La guerre est proche de Claire Angelini (2011) et de Un camp, cinq stèles de Serge Le Squer (2009), en présence des artistes et en dialogue avec Jean Cristofol.

Mercredi 19 février à 19h
Projections et rencontre avec Avec Morgane Guiard, Stephanos Mangriotis et Laurence Pilland, Nicola Mai.

Jeudi 20 février à 19h : Economie de la frontière
Projection du film De outro de lado de Lucas Bambozzi (2004), présentation par Nicola Mai et Cedric Parizot.

Jeudi 27 février 2013 à 19h Soirée antiAtlas des frontières
Rencontre-discussion autour du prochain numéro « Frontières » de la revue Hommes & Migration.

Atelier

Vacances de février : Atelier machinimas. Films conçus à partir de jeux vidéo comme GTA, Halo, Far Cry, frontiers the game – avec l’artiste égyptien Ahmed El Shaer et Isabelle Arvers. Films conçus autour des thématiques de la migration, de la frontière et de leur vécu.

Galerie en ligne

Cette galerie vient compléter et augmenter les expositions avec des œuvres de net.art, des œuvres interactives en ligne, des œuvres de vidéastes ou de photographes qui traitent des questions posées par l’antiAtlas :

Clémence Lehec, Laurent Davin, Street art on the separation wall

Magali Daniaux & Cédric Pigot, Cyclone Kingkrab & Piper Sigma

Magali Daniaux & Cédric Pigot, Arctic tactic

Julie Chansel et Michaël Mitz, La machine à expulser

Patrick Lichty, The private life of a drone

Alban Biaussat, The Green(er) Side of the Line

Romain de l’Ecotais, Au pied du mur

Ben Fundis, Clara Long, John Drew, <Border stories

Olga Kisseleva, Arctic Conquistadors

Martin De Wulf, Migrations map

Joana Moll, AZ: move and get shot

L’atelier Limo (Simon Brunel, Nicolas Pannetier et Maya Keifenheim), Border Bistro et enquête frontalière

Production

Institut Méditerranéen de Recherches Avancées (AMU), Marseille
Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence
Laboratoire PACTE (Université de Grenoble Alpes/CNRS)
Isabelle Arvers, commissaire d’exposition indépendante, Marseille
La compagnie, lieu de création à Marseille

Partenariats

Aix-Marseille Université (AMU), Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Réseau Français des Instituts d’Études Avancées (RFIEA), Labex RFIEA+, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Euborderscapes (Union Européenne, FP7), Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM – AMU/CNRS), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES – AMU/CNRS), Laboratoire d’Économie et de Sociologie du Travail (LEST- AMU/CNRS), Laboratoire d’Études et de Recherche sur le Monde Anglophone (LERMA-AMU), Laboratoire d’Arts, Sciences, Technologies pour la Recherche Audiovisuelle Multimédia (ASTRAM-AMU), Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (MMSH), LabexMed, Information Media production, Aviso Events, MarseilleProvence 2013 (MP 2013), ville d’Aix-en-Provence, Organisation Mondiale des Douanes (OMD)

Partenariat média

Télérama, Arte, PARIS Art, Culture Science en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Journal of Borderlands Studies, Perspectives (journal du RFIEA), L’Espace Politique, Ventilo (journal culturel bimensuel), MCD (Musiques et Cultures Digitales), Digitalarti, Poptronics, Digicult

Atelier 9 : De l’économie de la frontière à l’industrie de la migration

11 octobre 2013
Musée des Tapisseries, Aix en Provence

Comité d’organisation: Olivier Grojean (CERIC, CNRS-AMU), Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS-AMU), Antoine Vion (LEST, AMU)

Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS, AMU) et Olivier Grojean (CERIC, AMU)
Introduction

Gabriel Popescu (IMéRA, AMU; Indiana University South Bend, USA)
Privatiser la prise en charge de la frontière/ Privatising Border Making

Ruben Hernandez-Leon (UCLA, USA)
L’industrie de la migration : une institution « batarde »/The industry of migration: a « Bastard institution »

Discutant : Antoine Vion (LEST, AMU)

Résumés/Abstract

Gabriel Popescu (IMéRA, AMU; Indiana University South Bend, USA)
Privatiser la prise en charge de la frontière

S’efforçant d’atteindre une perméabilité sélective pour les personnes et les biens, de nombreux aspects de la prise en charge des frontières sont en cours de privatisation. La privatisation soulève la question de la souveraineté sur les frontières et de la nature des acteurs impliqués dans la prise en charge. En tant que limites du territoire étatique, les frontières modernes ont été historiquement régulées par les institutions publiques. Plus récemment, de nombreux gouvernements ont délégué une partie de la gestion des frontières à un éventail de groupes privés et des institutions semi-publiques, voir même aux particuliers. Le résultat a été un brouillage des frontières entre acteurs publics et privés rendant plus difficile l’attribution de la responsabilité aux uns et aux autres.

Les coûts de la « sécuritisation » des frontières sont également énormes. Le contrôle des frontières au XXIe siècle est un marché estimé à plusieurs milliards de dollars. L’investissement de cet argent public intervient à une période de réductions massives des dépenses liées à l’enseignement public, la santé et d’autres programmes sociaux. Une telle logique soulève plusieurs questions: Quels sont les avantages de ces investissements pour la société? Est-ce que la richesse créée par les investissements publics dans la sécurité des frontières justifie le désinvestissement public dans les programmes sociaux ? Est-ce que ces milliards investis dans le contrôle ne pourraient pas générer de meilleurs rendements s’ils étaient investis au sein des sociétés concernées ?

Privatizing border making

Striving to achieve selective permeability for people and goods, numerous aspects of border making are being privatized. Privatization raises the issue of authority over borders and involves changes in the nature of the actors engaged in border making. In their capacity as territorial limits of the public institution of the state, modern state borders have been historically regulated through public institutions. More recently, numerous governments have delegated certain border management responsibilities to an array of private groups and quasi-public institutions, and even to private citizens. The result has been a blurring of the lines between private and public border-making actors that make it more difficult to establish where accountability for border management lies.

Another privatization-related aspect is that the costs of border securitization are enormous. Border making in the twenty-first century is a worldwide multi-billion-dollar business that are public money invested in border security at a time of massive spending cuts in public education, health care, and other social programs. Such logic begs several questions: What are the benefits of these investments for society? Is the wealth created by public investments in border security worth the losses created by public disinvestment in social programs when it comes to the well-being of societies? Can these billions bring better security returns if strategically invested in the sending societies?

Ruben Hernandez-Leon (UCLA, USA)
L’industrie de la migration : une institution « bâtarde »

Cette présentation s’efforcera d’envisager l’industrie de la migration comme une institution sociale « bâtarde ». Inventé par le sociologue américain Everett Hughes (1984), le concept d’institution « bâtarde » se réfère aux «écarts chroniques des institutions établies ». Les institutions « bâtardes » représentent des canaux alternatifs à ceux mis en place pour la distribution de biens et de services. Elles n’interviennent pas seuls, mais uniquement en relation et en interaction avec les institutions sociales considérées comme légitimes. Le recours à ce concept n’a pas pour objectif de qualifier cette industrie de déviante, mais davantage de réintroduire dans l’horizon analytique des phénomènes sociaux et économiques qui ont été marginalisés et exclus des études sociologiques.

The Migration Industry as a Bastard Institution

In this presentation, I advance the conceptualization of the migration industry as a bastard institution.  Coined by sociologist Everett Hughes, bastard institutions are chronic deviations from established institutions, which provide alternative distribution channels of goods and services.  The migration industry can be conceptualized as a bastard institution in that such industry, its actors and infrastructures provide alternatives to state sanctioned mobility across international borders.  Often deemed illegal by states, the migration industry as bastard institution enjoys varying degrees of legitimacy and support from migrants, employers, migration entrepreneurs and other actors of the social field of international migration.     

Partenariat

LabexMed (AMU), IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Isabelle Arvers (Marseille), La compagnie (Marseille), IREMAM (CNRS- AMU), LEST (CNRS-AMU)

Photographie : Claude Chuzel, 2006

Colloque antiAtlas, Aix-en-Provence, 2013

Colloque international antiAtlas des Frontières
Nouveau Conservatoire Darius Milhaud, Aix-en-Provence
Du 30 septembre au 2 octobre 2013

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Présentation générale

Du 30 septembre au 2 octobre 2013, le Nouveau Conservatoire d’Aix en Provence accueille un colloque international qui réunit les chercheurs en sciences humaines et en sciences dures, les artistes et les professionnels qui ont participé au projet. L’organisation de ce colloque au moment de l’ouverture de l’exposition au Musée des Tapisseries renforce le décloisonnement que nous nous efforçons d’opérer entre les mondes de la recherche, de l’art et du politique.

L’objectif de ce colloque est de présenter et diffuser nos travaux à l’intention du monde universitaire, des institutionnels, des politiques et bien sûr du grand public. Une large communication est donc faite autour de cet événement en partenariat avec la presse écrite, radio et télévisée. Les représentants d’institutions publiques et privées ainsi que d’organisations non gouvernementales directement concernées par la thématique sont invités à participer aux débats de ce colloque : le secrétaire général de l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD), des personnalités universitaires centrales dans les recherches sur la frontière, des représentants d’entreprises impliquées dans le contrôle des frontières (telles que Thales, Cassidian), des hommes politiques, des institutionnels et des représentants des associations travaillant avec les migrants (telles que Migreurop, La Cimade, etc.).

Les interventions se font en français et en anglais avec traduction simultanée.

Programme

I. Introduction : l’antiAtlas des Frontières

Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM – CNRS/AMU, France), Anne-Laure Amilhat Szary (PACTE, UJF/CNRS, France), Antoine Vion (LEST, AMU/CNRS, France), Isabelle Arvers (commissaire d’exposition indépendante, France)

II. Discussions

E. Brunet Jailly (UVIC, Canada)
Pushing the frontiers of border studies
Voir la vidéo de l’intervention

III. Technologies à la frontière

Gabriel Popescu (IMéRA, AMU, Indiana University South Bend, USA)
Déterminisme technologique et mise en forme des frontières mobiles
Voir la vidéo de l’intervention

L’organisation politico-territoriale moderne du monde a été construite sur un imaginaire géographique qui conçoit l’espace en termes absolus, comme un objet rigide qui peut être découpé en morceaux quantifiables. Dans la pratique politique, cela a conduit à la division de la planète  en unités territoriales mutuellement exclusives, fondées sur des frontières linéaires. Récemment, nous assistons à un changement d’imaginaire géographique qui intègre une perspective polyvalente et reconnaissant la nature relationnelle de l’espace; un imaginaire plus en phase avec une notion d’espace définie par la mobilité sous la forme de liens et de nœuds plutôt que par la proximité territoriale et la variation de la distance. En conséquence, nous assistons à l’émergence de formes complémentaires de frontières étatiques qui dérogent aux normes de linéarité territoriale en devenant intégrées aux flux qui peuvent voyager et être constamment répertoriés à travers l’espace. La mise en forme de ces frontières mobiles est fortement influencée par les technologies numériques qui sont supposés avoir des pouvoirs prédictifs et sont généralement conceptualisées en termes d’efficacité inébranlable et perçues comme étant là  pour assurer la sécurité dans un contexte de mobilité transnationale. Le problème d’une telle logique derrière l’incorporation de la technologie dans la fabrication de frontière est qu’elle suppose que la vie sociale peut être rendu numériquement connaissable et donc définissant (mal) les sujets aux frontières comme des objets matériels détachés de leurs contextes sociaux et politiques. Il est essentiel de bien comprendre les limites et les avantages pour la société de ces technologies aux frontières afin de s’assurer que la gouvernance de la frontière de celles-ci préserve les intérêts publics au lieu de les étouffer.

Hervé Braik (Thalès, France)
Les nouveaux besoins et les nouvelles solutions pour la surveillance des frontières terrestres

Face à l’augmentation générale des activités illégales et criminelles aux frontières voire pour certains États des attaques terroristes, de nombreux pays sont dans l’obligation de renforcer les contrôles aux frontières afin de ne pas handicaper leur développement et/ou d’assurer leur sécurité intérieure. Devant impérativement améliorer l’efficacité des dispositifs et ne pouvant la plupart du temps recruter des milliers de personnes pour assurer ces missions, les administrations choisissent de plus en plus de s’équiper avec des systèmes intégrés de surveillance.

Andrea Rea (Université Libre de Bruxelles, GERME, Belgique)
Les usages du pouvoir discrétionnaire des gardes frontières à l’aéroport Charles de Gaulle (Paris)
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La communication entend présenter les principales approches contemporaines de la notion de frontière. La deuxième partie du document est consacrée à une approche alternative des processus de frontièrisation en se concentrant davantage sur la relation entre la frontière et la mobilité plutôt qu’entre frontière et territoire, relation rencontrée fréquemment dans la littérature. La frontière est définie comme frontière-réseau composée d’unités d’espace-temps (aéroport, port maritime, l’espace public par exemple) où des humains (bureaucrates dans les consulats, les gardes-frontières, les agents de liaison, des voyageurs, etc.) et des non-humains (bases de données, des lois, des procédures) interagissent avec l’objectif de produire des pratiques de souveraineté étatique. Une attention particulière est accordée à la relation entre l’Europe et les pays du sud de la Méditerranée dans une troisième partie. Basé sur le concept de frontière-réseau, il est possible d’analyser la politique européenne de la mobilité en ce qui concerne les pays du sud de la Méditerranée, en accordant une attention particulière aux dispositifs de sécurité qui tendent à accélérer la mobilité des voyageurs légitimes, d’une part, et à filtrer et à bloquer les indésirables, les personnes soupçonnées de contourner les lois de l’immigration, d’autre part. Toute personne en mobilité est soumise à la surveillance mais certains sont placés sont contrôle. La dernière partie de la communication est consacrée à l’analyse qui pourrait être faite du contrôle à l’aéroport à partir du concept de frontière-réseau.

Noel Sharkey (Sheffield University, UK)
Les empêcher de passer et les empêcher de sortir : la frontière robot
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Cette présentation examine les évolutions potentielles de la robotique applicable dans le futur à la protection des frontières. L’utilisation d’avions sans pilote est déjà utilisé pour identifier les incursions frontalières et suivre les «délinquants». Il y a également des projets d’utilisation de robots terrestres pour intercepter ces franchissement de frontières illégaux. Mais ce n’est que le début. La prochaine génération de robots militaires trouvera ses propres objectifs et attaquera sans contrôle humain. Malgré les protestations internationales, certains États n’ont pas hésité à explorer de telles pistes. S’ils continuent, il faudra peu de temps avant que les robots autonomes entrent en service dans le monde civil pour aider à contrôler les immigrés «illégaux». Par ailleurs, toute discussion sur les nouvelles technologies, doit tenir compte de leur éventuelle utilisation abusive pour confiner les populations à l’intérieur des frontières.

Julian Oliver (artiste, Nouvelle-Zélande)
Retour sur le projet « EU/US Border Bumping » : infrastructure réticulaire et télé-cartographie aux limites

Border Bumping est un travail de déconstruction par les medias qui envisage les télécommunications cellulaires comme une force perturbatrice, contestant l’intégrité des frontières nationales. Comme nous traversons les frontières, nos terminaux cellulaires sautent d’un réseau à l’autre à travers des territoires voisins, souvent avant ou après que nous soyons arrivés. Ces moments, où nos appareils fonctionnent dans un territoire, tandis que notre corps évolue dans un autre, peuvent être conçus comme aptes à produire un terrain d’action inédit et contradictoire. Dans cette conférence, je présenterai des documents et des expériences issus du déploiement de “Border Bumping” sur la frontière USA / Canada et dans toute l’UE. J’envisagerai les réseaux comme des territoires tangibles, en mettant l’accent sur ​​les nouveaux défis techno-politiques dans ce domaine.

IV. L’économie de la frontière

Robert Ireland (WCO, Bruxelles, Belgique)
Nouvelles perspectives sur le « paradigme de la sécurité de la chaîne logistique en douane
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Cette présentation retrace la genèse du paradigme de la sécurité de la chaîne logistique en douane, né de la participation des administrations douanières au contre-terrorisme suite aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Ces  nouvelles perspectives sont le fruit d’une réflexion sur l’évolution de ce modèle, question politique de moins en moins prioritaire pour les douanes, même aux États-Unis. À la suite des attentats du 11 septembre, il s’est incarné dans un ensemble de régulations douanières nationales et de nouveaux standards internationaux élaborés par l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD). Celles-ci avaient pour but de dissuader l’utilisation des navires de fret international pour transporter des terroristes ou accomplir des actes terroristes. La communication examinera la mise en œuvre du paradigme par l’étude de deux programmes-clefs des douanes américaines, C-TPAT et CSI, puis son internationalisation par l’adoption du « WCO SAFE Framework of Standards to Secure and Facilitate Global Trade » à l’OMD et sa traduction politique dans la loi du « 100% container scanning ». Puis seront discutés les principaux thèmes politiques défendus par le gouvernement américain : la communication à l’avance des données de cargaison, la gestion du risque douanier, les équipements de contrôle non-intrusif (scanners) et les programmes d’opérateur agréé à vocation sécuritaire. Enfin, la communication s’intéressera au déclin actuel de ces dispositifs, avec l’abandon, de facto, du 100% scanning, dans un contexte de crise budgétaire qui laisse présager une réduction des moyens consacrés aux programmes en cours.

Didier Danet (Responsable du Pôle Action globale et forces terrestres, Centre de recherche des écoles de Saint-Cyr Coëtquidan, France)
120 000 dollars le « Wet Back » : quelle rationalité économique pour le programme de Smart Border à la frontière sud des Etats-Unis ?
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Brutalement ramenée à une donnée chiffrée, l’érection d’une « frontière intelligente » entre les Etats-Unis et le Mexique a coûté 18 milliards de dollars en 2012 et a permis l’arrestation de 357 000 personnes qui tentaient de la traverser illégalement, ce qui revient à dire que le coût d’interception d’un clandestin s’élève à plus de 50 000 dollars. Ce coût extrêmement élevé conduit à s’interroger sur la pertinence de la politique mise en œuvre et du type de solution qu’elle privilégie, solution dans laquelle le plus gros de l’effort est porté sur le déploiement de dispositifs technologiques sophistiqués confortés par des moyens humains substantiels. La pertinence de la solution retenue est d’autant plus importante à évaluer qu’elle exerce sur de nombreux décideurs publics un puissant effet d’attraction alors même que les ressources qu’ils pourraient mobiliser à cet effet seraient sans commune mesure avec les budgets affectés dans la durée par l’administration américaine à ce programme. S’agissant des questions de sécurité et de défense telles qu’elles se présentent à nous, deux des caractéristiques fondamentales du programme américain doivent retenir notre attention. La première tient aux conditions de mise en œuvre d’une solution dans laquelle la technologie est présentée comme l’axe central d’une politique visant à traiter une question globale à caractère politique, économique, sociale… Or, ce thème est récurrent dans l’analyse des questions de  sécurité et de défense contemporaines. En second lieu, la politique de « frontière intelligente » est consubstantielle d’une montée en puissance des acteurs privés dans la mise en oeuvre, voire dans la conception, d’une mission manifestement régalienne.  Sans condamner a priori l’intervention d’un certain type d’acteurs dans la conduite d’une politique étatique, il est toutefois permis de s’interroger sur la pertinence du dispositif ainsi retenu.

Janna Shadduck-Hernández (UCLA, USA)
Transgresser la limite: actions et mobilisations politiques des jeunes sans papiers face aux politiques migratoires américaines
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Environ 65.000 lycéens sans-papiers terminent chaque année un cursus d’enseignement secondaire avec un diplôme, mais seulement 5 à 10 % vont à l’université. La plupart des quelques 1,9 million de jeunes sans papiers (16-30 ans) résidant aux États-Unis se voient offrir très peu d’encouragements pour aller au bout de leur cursus secondaire, ce qui conduit à des taux élevés d’abandon, sans possibilité légale de travailler. Pendant le premier mandat du président Obama, un nombre sans précédent de jeunes sans papiers et leurs familles ont été arrêtés et expulsés. En réponse aux politiques d’immigration draconiennes des États-Unis qui séparent les parents de leurs enfants et refusent aux jeunes sans-papiers des possibilités éducatives et professionnelles, un mouvement de jeunesse national, communément appelé le Mouvement du Rêve, a questionné, contesté et résisté à la législation fédérale sur l’immigration et le contrôle aux frontières, grâce à une organisation politique, une action directe et une participation  et une éducation civique.. Des centaines de manifestations et d’actions menées par des jeunes sans-papiers sont organisées dans tout le pays. Il s’agit notamment de bloquer l’accès aux bureaux d’immigration du gouvernement fédéral et des centres de détention; des sit-ins dans les bureaux des membres du Congrès, des actions de solidarité transfrontalières où les familles sans-papiers communiquent à travers les clôtures frontalières ou encore l’organisation de concerts bi-nationaux, la distribution publique de textes engagés écrits par des sans-papiers et leur diffusion dans les médias sociaux; ainsi que des auto-expulsions et les auto-arrestations très médiatisées, organisée par ces mêmes jeunes. Dans cet atelier, je vais discuter de ce que les décideurs politiques conservateurs ont appelé, “le franchissement de la ligne” par les jeunes – les expériences d’un nombre toujours croissant de jeunes immigrés sans-papier qui se dressent et contestent directement la politique frontalière du gouvernement américain et ses politiques d’immigration, malgré leur statut migratoire précaire et liminal.

Thomas Cantens (WCO, Brussels, EHESS, Marseille)
Le temps et l’argent de la frontière : le cas des corridors de transport en Afrique de l’Ouest
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À partir d’une réflexion sur les projets d’aide publique au développement et les travaux de normalisation et de régulation du commerce menés dans les institutions internationales, la communication étudiera le passage des marchandises en frontière. Bien que souvent présentée dans le cadre contemporain de la globalisation et attachée aux paradigmes du développement, la flexibilité accordée au passage des marchandises est ancienne, liée à la circulation et l’accumulation de richesses et la représentation de l’abondance au-delà du territoire ou de la communauté. À partir de l’observation des pratiques commerçantes et administratives, la communication montrera comment les frontières sont des espaces de calculs suivant une topologie spécifique.

V. Représentation-Fiction aux frontières

Jean Cristofol (ESAA, France)
Distance et proximité dans un espace multidimensionnel
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L’espace concret dans lequel nous vivons est indissociable des formes dans lesquelles nous nous le représentons. Ces formes mobilisent des connaissances objectives, mais elles engagent aussi un imaginaire dans lequel nous nous projetons. De ce point de vue, l’espace concret n’est pas seulement la résultante de nos pratiques, il est aussi habité par des sujets qui y situent et y identifient des enjeux et il est traversé de fictions et de récits. Les récits et les fictions, dont nous sommes culturellement les héritiers, mettent en oeuvre un espace continu qui s’articule sur les oppositions du proche et du lointain, de la distance et de la proximité, de l’ici et de l’ailleurs. Les frontières y dessinent des lignes de discontinuité entre des entités homogènes. La figure du voyage, celle de l’utopie, le thème de l’ile ou du labyrinthe, celui de la limite et de son franchissement en sont des incarnations. Mais ces figures ne sont pas seulement de libres constructions de l’esprit, elles sont aussi en correspondance avec les médiums dans lesquels elles ont été articulées et elles sont concrètement produites par la relation aux modes d’existence technique et sociaux d’une époque. Quand les échanges et les déplacements sont déterminés par les flux informationnels et que des dispositifs autonomes ubiquitaires agissent sur nos modes de perception et nos capacités directes d’action, comment pouvons-nous les penser et les mettre en oeuvres ? Que devient notre relation à l’espace quand celui-ci se construit dans une complexité qui vient bouleverser les façons de comprendre le sens même de ce qu’on appelle la distance ou la proximité ? Si l’espace dans lequel nous vivons et communiquons est un espace complexe et multidimensionnel, comment pouvons nous en construire la représentation ?

Anne-Laure Amilhat Szary (PACTE, UJF/CNRS, France), Sarah Mekdjian (PACTE, UPMF/ CNRS, France) ET GLADEEMA NASRUDIN ? QUALITÉS ?
Un anti-atlas des frontières vécues. Partager la sensibilité des migrants cartographes
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Cette communication rend compte du projet, mené conjointement par des chercheurs, des artistes et des migrants, de cartographier l’entre-deux migratoire de manière créative et critique. Cette expérience d’ateliers de cartographie participative, entre art et science, porte aussi sur l’entre-deux d’un point de vue méthodologique, c’est-à-dire sur les conditions de mises en relation des acteurs d’un projet de recherche et de création. Comment créer un cadre d’échanges entre les chercheurs, les artistes et les personnes invitées en raison de leurs parcours migratoires ? Sur de nombreuses cartes scientifiques, les espaces parcourus par les migrants pendant leurs voyages sont souvent survolés par des flèches, qui désignent des flux ou la direction de trajectoires. Les expériences de franchissements frontaliers sont pourtant des événements très significatifs dans les histoires migratoires individuelles. Pour les personnes qui n’ont pas de droit de séjour, la frontière parcourue s’étend jusque dans les espaces dits d’accueil. Ainsi, à Grenoble, mais cela pourrait être ailleurs dans de nombreuses villes européennes, des voyageurs voyagent encore… Quatre dispositifs cartographiques, entre art et science, ont été proposées à douze personnes en situation de demande d’asile ou ayant obtenu le statut de réfugié, avec pour objectif de présenter des frontières vécues « expansées ». Même produite à partir d’une méthodologie participative, la carte n’est jamais dégagée d’enjeux de pouvoir. L’interaction avec les artistes a permis de diversifier le pouvoir de cet outil de médiation dans les relations entre les différents acteurs des ateliers. Raconter des souvenirs de voyages par la cartographie a constitué un cadre original et créatif d’échanges, aujourd’hui transmissible dans le cadre d’une exposition. La réalisation de cartes, sur quatre supports différents, a permis de contourner le registre narratif dominant connu par les demandeurs d’asile, c’est-à-dire le récit de vie chronologique et linéaire exigé par les administrations. Au service d’une projet scientifique, artistique et politique, la carte a ainsi permis de produire des formes originales de constitution de savoirs « indisciplinaires ».

Nicola Mai (LAMES, AMU/CNRS, France, London Metropolitan University, UK)
« Assembling Samira / En assemblant Samira » : une installation art-science de l’AntiAtlas sur l’incorporation des frontières humanitaires
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La protection humanitaire des groupes de migrants vulnérables a imposé de nouvelles frontières biographiques. Les migrants cherchent à obtenir la bienveillance de l’Etat et un statut légal en réalisant et incorporant des discours humanitaires mettant l’accent sur la victimisation et de la souffrance. Seuls ceux dont les performances de souffrance en tant que sujets dignes de protection humanitaire sont jugés crédibles et bénéficient d’une telle protection. Genre et sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques à travers lequel les frontières humanitaires et biographiques sont inscrites sur les corps des migrants. Le projet Emborders, à la fois projet de réalisation cinématographique et de recherche scientifique, reproduit les différentes représentations et les récits des migrants ciblés par la protection humanitaire tels qu’ils ressortent des entretiens avec les autorités, avec des chercheurs en sciences sociales ainsi qu’avec les autres migrants et les familles. Il s’appuie sur des histoires vraies et des gens réels, qui sont jouées par des acteurs afin de protéger l’identité des personnes interrogées originaux et refléter la nature intrinsèquement fictive de toute narration de soi. En utilisant des acteurs pour reproduire de vraies personnes et des histoires de la vie réelle, le projet remet en cause ce qui constitue finalement une réalité crédible et acceptable en termes scientifiques, filmiques et humanitaires.

Samira est une installation d’art-science à deux écrans, présentant l’histoire de Karim. Elle assemble différents moments et scripts ethnographiques tels qu’ils sont apparus à travers le travail de terrain à Marseille. Karim est un homme migrant algérien commerçant le sexe, tout comme SAMIRA, la nuit à Marseille. Il a quitté l’Algérie comme un jeune homme dont les seins commençaient à se développer à la suite de la prise d’hormones ce qui lui a permis d’obtenir l’asile en France, en tant que femme transgenre. Vingt ans plus tard, alors que son père se meurt et que Samira / Karim est en passe de devenir le chef de la famille, elle se fait chirurgicalement enlever les seins et se marie avec une femme afin d’obtenir un nouveau passeport lui permettant de retourner en Algérie pour assumer son nouveau rôle. SAMIRA ( Emborders 1) est le premier de 4 installations/films. Il a été produit par l’IMéRA en coopération avec SATIS (Département Sciences Arts et Techniques de l’Image et du Son de l’Université Aix-Marseille) et sera présenté à l’exposition Antiatlas.

Micha Cardenas (University of Southern California, USA)
The transborder immigrant tool / L’outil transfrontière pour le migrant : la science de l’opprimé
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La science de l’opprimé est un terme qui a d’abord été utilisé par la philosophe féministe de Monique Wittig et qui a été plus tard adopté par les collectifs “artivistes” Groupe particules et Electronic Disturbance Theatre 2.0. Ils proposent une approche de la production de connaissances qui ne revendique pas une position objective ou une approche motivée par le profit, mais qui est informée par une expérience de l’oppression et vise à contribuer à la justice sociale. Dans cette présentation performative, je vais présenter le travail de création du Transborder imigration tools effectué en collaboration avec le Electronic Disturbance Theater 2.0. A la fois outil médiatique perturbateur et virus pour les médias, il est conçu pour pourvoir à la subsistance poétique et physique des personnes qui traversent la frontière Mexique/Etats-Unis. Mon travail sur ce projet m’a permis de développer des pratiques inédites de science de l’opprimé, notamment dans le cadre d’un projet intitulé Réseaux d’Autonomie Locale/Autonets. Le but de ce second projet était de faire construire aux communautés locales des réseaux à la fois numériques et post-numériques, pour prévenir la violence contre les femmes transgenres de couleur, les personnes handicapées et les travailleurs du sexe. Autonets étend la science de l’opprimé à Femme Science et Femme Disturbance, utilisant le développement  de relations comme stratégie pour construire un monde sans prisons.

VI. Frontières, flux et réseaux

Ruben Hernandez Leon (UCLA)
L’industrie de la migration: recenser les relations entre passeurs, acteurs du contrôle et du secours dans les migrations internationales
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Dans cette présentation, je montrerai que l’industrie de la migration joue un rôle plus important dans la structuration de la mobilité humaine à travers les frontières que cela n’a été envisagé par la plupart des théories sur les migrations internationales. J’identifie trois premières formes d’industrie de la migration: les animateurs classiques de la migration, l’industrie florissante du contrôle et de l’industrie du soi-disant sauvetage. J’utilise ensuite le cadre théorique défini par Zolberg dans Strange Bedfellows of American Immigration Politics qui explique les alliances inhabituelles que nouent ces différents acteurs en place dans le domaine de l’immigration, pour mieux localiser et identifier les liens de ces acteurs avec  l’industrie de la migration. Enfin, j’envisagerai les déplacements de ces acteurs à travers différentes ensembles ou groupes (profit/non-lucratif, facilitation/control, pro-immigration/anti-immigration). Je soulignerai ainsi que loin d’être opposés ces acteurs établissent des liaisons régulières au moyen de plusieurs ponts et d’infrastructures.

Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, AMU/CNRS, France), Antoine Vion (LEST, AMU/CNRS, France), Wouter van den Broeck (Addith, Belgium)
Israël-Palestine sous les cartes : une expérience anthropologique de réseaux à travers les murs
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Israël Palestine sous les cartes est un projet de visualisation dynamique des chaînes relationnelles développées par un anthropologue au cours de ses enquêtes de terrain dans l’espace israélo-palestinien (2005-2010). Ce travail exploratoire implique un anthropologue (Cédric Parizot), un sociologue (Antoine Vion) et un spécialiste de visualisation de données complexes (Wouter Van den Broeck). Le premier objectif est d’analyser sous un autre angle le niveau d’imbrication entre espaces israéliens et palestiniens. Le second est de confronter les trois chercheurs à des pratiques, des méthodologies et des données inhabituelles émanant d’autres disciplines. D’une part, en ayant recourt à un niveau beaucoup plus élevé d’abstraction, l’anthropologue opère un repositionnement radical par rapport à ses données de terrain. En dépit de la perte temporaire de la précision de l’observation anthropologique, cette visualisation dynamique lui offrira une compréhension plus globale du monde social dans lequel il a évolué. D’autre part, cette expérience permettra au sociologue et à l’anthropologue de mieux apprécier les conditions de production de leur connaissance, non seulement en tenant compte du fait que ces données sont situées dans le temps, dans l’espace et dans des interactions spécifiques, mais aussi et surtout en soulignant que l’anthropologue et le sociologue font partie intégrante du réseau-frontière qu’ils tentent de déchiffrer. En d’autres termes, ce projet implique l’anthropologue et sociologue à la fois en tant que chercheurs et en tant qu’objets de recherche. Enfin, en traitant un autre type de réseau complexe (impliquant moins d’individus, mais des couches plus complexes d’interactions), Wouter van den Broeck a l’intention d’expérimenter une nouvelle sémiologie de la cartographie de réseau applicable à l’étude des réseaux issus de la recherche qualitative.

Olivier Clochard (MIGRINTER, CNRS, MIGEUROP, France) et Laurence Pillant (TELEMME, AMU/CNRS, France)
Connected camps : les lieux d’enfermement en Europe et au-delà
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Bien que les camps d’enfermement de migrants en Europe possèdent chacun leurs particularités et une histoire singulière, la justification de leur existence, de même que les appareils juridiques, politiques et économiques qui les sous-tendent se ressemblent et s’inscrivent dans des processus communs. L’approche par le réseau permet d’entrevoir ces lieux qui constituent aujourd’hui les frontières réticulaires de l’espace Schengen et de la politique européenne de voisinage (PEV), à savoir pour les autorités la recherche d’un bornage « exhaustif » dans et en dehors des territoires de l’Union Européenne. Il s’agira ici de définir les échelles et la mesure de ces liens entre les camps. Après analyse la représentation cartographique de ce réseau permet d’appréhender et de rendre visible ce phénomène d’enclosure régionale relative au contrôle migratoire européen.

Joana Moll (artist, Spain)
Move and get shot : la surveillance par les réseaux sociaux le long de la frontière américano-mexicaine
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The Texas Border et AZ: move and get shot sont deux œuvres d’art numérique qui explorent le phénomène de la surveillance sur Internet effectué par des civils à la frontière entre le Mexique et les États-Unis à partir de plateformes mises en place par les autorités américaines. Beaucoup de ces plateformes en ligne sont apparues lors du développement des réseaux sociaux dont la structure a été adoptée comme une alternative moins chère et plus efficace pour surveiller la frontière. Ainsi, l’activité de loisir est devenue un outil pour la militarisation de la société civile. Cette présentation exposera le processus de recherche derrière les deux œuvres d’art et analysera l’évolution de certaines de ces plateformes internet depuis leur création jusqu’à nos jours.

Federica Infantino (FNRS/Université Libre de Bruxelles (Cevipol), Sciences Po Paris)
La frontière au guichet externalisé. Les effets de la coopération public-privé sur la mise en oeuvre de la politique des visas à Casablanca
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Cette contribution explore les réponses de l’État à l’immigration dans le cadre de mode de régulation qui impliqunt davantages d’acteurs non étatiques (Guiraudon & Lahav, 2000). Il se concentre sur le cas des États Schengen qui coopèrent avec des prestataires privés pour mettre en œuvre leur politique de visas. Cette présentation applique le cadre théorique de la bureaucratie de proximité à un champ d’étude inhabituel: la frontière politique plutôt que la politique sociale. Reposant sur une enquête de terrain approfondie de (12 mois) effectué dans les consulats de Belgique, de France, d’Italie et de leurs centres de demande de visa par rapport à Casablanca, elle étudie le processus d’externalisation des services de visa au Maroc. L’objectif est double: identifier les processus conduisant à la gouvernance publique/privé comme mode émergent de la gestion des frontières Schengen; évaluer comment cette coopération public/privé change les conditions de coopération dans lesquelles la politique des visas est mis en œuvre et modifier les politiques publiques.

VII. Matérialisation-Dématérialisation des frontières

Steve Wright (Reader in Applied Global Ethics, Leeds Metropolitan University, UK)
Approches entrepreneuriales de la gestion militaire du changement climatique : du refuge à l’exclusion
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Si nous devons anticiper correctement et juger avec précision la trajectoire probable de futures réponses au changement climatique, l’hypothèse de travail doit être qu’il y a de fortes probabilités pour que les «solutions» proposées au cours des 50 prochaines années par les élites, les Etats et les entreprises seront nécessaires, mais pas suffisantes. Pour plusieurs pays, cela peut signifier la fin, d’autres seront confrontés à d’importantes migrations internes et d’autres à un exode massif vers des rivages étrangers, à mesure que les gens lutteront pour trouver la continuité. Cette présentation considère que les préparatifs pour répondre à ces défis seront tout à fait inadaptés. Les États prendront des mesures d’urgence dans la panique, incluant des entraves profondes à la liberté de mouvement. Les recherches passées ont traité de tels scénarios comme les catastrophes environnementales, mais cette présentation envisagent ces scénarios comme des options d’aménagements d’urgence qui ont déjà été structurés dans le cadre de planification d’Etat. Que pouvons-nous attendre lorsque la continuité des chaînes d’approvisionnement énergétique et alimentaire ne peut plus être garanti? Je présenterai ici des preuves que de nombreuses organisations militaires travaillent déjà sur les réponses au changement climatique du point de vue de la sécurité de l’Etat plutôt que dans une perspective de sécurité humaine. Qu’est-ce que cela implique?

Essentiellement, deux processus interdépendants font irruption: l’un fondé sur l’informatique, l’autre orienté sur les technologies d’exclusion physique systématique des citoyens non autorisées et basé sur une grande variété de systèmes coercitifs émergents. Les Etats disposent déjà de systèmes de contraignants aux frontières pour empêcher quiconque sans documentation de passer; et ceux-ci deviennent de plus en plus sophistiqués, avec différents moyens de reconnaissance, de surveillance et de suivi biométriques. La reconnaissance faciale et les systèmes de repérage de véhicules, conçus à l’origine en réponse à la “guerre contre le terrorisme », peuvent être rapidement réorientés vers les réfugiés du changement climatique. Ces personnes ne seront pas officiellement désignées comme telles, car l’étiquette généralement péjorative d’immigrants illégaux facilitera une solution d’exclusion juridique, les réfugiés du changement climatique n’ont aucun statut juridique. Nous assistons déjà à un changement de paradigme en matière de sécurité entre les grandes puissances militaires pour reformuler le changement climatique en tant que menace majeure pour la sécurité. De même, l’armée, la police, les médias, le complexe sécuritaire universitaire sont déjà en train de renforcer leur capacité à définir de nouvelles mesures pour assurer la sécurité des frontières et de l’exclusion de cette zone. Ces nouvelles mesures et moyens incluent déjà des algorithmes non-humains ainsi que des éléments robotiques pour patrouiller les longues frontières. Une grande variété d’armes sublétales a également émergé. Elles peuvent être soit utilisées contre des foules par des humains ou exploitées par intelligence artificielle. Quelle est la probabilité de ces développements? Nous explorons ici la reconfiguration actuelle des principales manufactures de systèmes intelligents de clôtures, drones, sécurité robotique et les systèmes de patrouille ainsi que les technologies d’armes létales et subléthales ainsi que les doctrines qui répondent aux exigences de ces nouveaux marchés.

La présentation se termine par une discussion sur certains dilemmes éthiques sur la façon de répondre à une telle fixation technique. Doit-on acquiescer (ce qui pourrait équivaloir à une collusion) , ou devrions-nous nous engager dans l’activisme de recherche pour révéler les conséquences sociales et politiques de systèmes de clôtures existantes comme celles récemment érigé au Bangladesh. Cette question éthique inconfortable sera au cœur de toute réponse politique intelligente aux migrations de masse induites par le climat.  Devons-nous renforcer la résilience au sein des architectures modernes et des infrastructures ou faire une forteresse : un menu humain ou inhumain de solutions pour l’avenir ?

Amaël Cattaruzza (CREC Saint-Cyr Coëtquidan, France)
Mur ou réseau : le contrôle des frontières en question
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Cette communication part d’un constat : les dispositifs de sécurité aux frontières oscillent aujourd’hui entre deux architectures complémentaires : celle du « mur » et celle du « réseau ». Les murs, ce sont ces barrières plus ou moins épaisses, permettant de canaliser les flux matériels et humains, et de les filtrer par l’intermédiaire du checkpoint, du point de passage. Les réseaux, ce sont les interconnexions toujours plus fortes d’agences de renseignements, permettant par l’accumulation et le croisement de données d’anticiper, d’identifier et de tracer tous types de flux (modèle Frontex et Eurasur). Ces dispositifs de contrôle méritent l’un comme l’autre d’être interrogés et évalués. Le mur est coûteux et engendre toute une économie du contournement qui amène à se demander si le remède n’est pas pire que le mal. Le réseau déplace le contrôle frontalier du lieu physique aux bases de données virtuelles et centralisées. Mais l’émergence de ce contrôle virtuel, mis en place sans avoir donné lieu à aucun débat, nécessite de réfléchir à la validité des données collectées, à leur traitement, à leur stockage et à leur sécurisation.

Stéphane Rosière (Université de Reims, France)
Les frontières internationales entre matérialisation et dématérialisation
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Les frontières internationales contemporaines sont caractérisées par un processus, en apparence contradictoire, de virtualisation ou d’effacement et de matérialisation. La virtualisation résulte de la porosité grandissante des frontières traversées par des flux de plus en plus importants. Les frontières s’effaceraient donc, ou se feraient « discrètes », elles seraient aussi marquées par une logique de délinéarisation et déterritorialisation (développement de frontières « punctiformes », comme dans les aéroports). Cependant, dans le même temps, les frontières sont marquées par un processus de sur-matérialisation avec la construction de nombreuses « barrières » (Israël, États-Unis, Arabie saoudite, Ceuta et Melilla, etc.) souvent appelées « murs ». Cette présentation tentera de montrer comme ces dynamiques, loin d’être contradictoires, sont plutôt liées dans une logique de hiérarchisation des flux dans laquelle l’homme apparaît plus problématique que les marchandises.

Mariya Polner (WCO, Brussels)
Les technologies de contrôle des frontières: tendances et schémas de développement généraux
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La protection de la souveraineté a toujours été la principale tâche de l’Etat, depuis sa création, en lien avec une autre fonction importante, celle de différencier le «nous» du «eux». Ainsi, les frontières ne servent pas seulement comme de seuils vers un territoire particulier, mais aussi comme les manifestations de la souveraineté de l’Etat. Dans le même temps, dans un monde globalisé où l’interconnexion et l’intégration sont les dynamiques clés pour influer sur la croissance économique et le développement social, les décideurs ont de plus en plus conscience de la nécessité d’accélérer la réforme de la réglementation de la gestion des frontières pour réduire les obstacles inutiles et les charges qui present sur le commerce. Le dilemme qui consiste à mettre en balance la sécurité (et dans une certaine mesure, la souveraineté de l’Etat) et la facilitation du commerce a poussé les États et les organisations internationales à rechercher des solutions différentes, inscrites dans tout un ensemble de politiques et de normes nouvellement créées. Cette présentation abordera une petite partie de la «machine» de la gestion des frontières globale: celle des technologies de contrôle des frontières. Avec les progrès technologiques, en fonction des nouveaux outils utilisés dans les opérations quotidiennes, les agences de contrôle des frontières se réinventent et réinventent la façon dont elles opèrent. Par conséquent, le suivi du développement des technologies de frontières donne un aperçu intéressant sur le fonctionnement de l’État et de ses politiques.

Charles Heller (Centre for Research Architecture, Goldsmiths College, University of London/ Watch The Med project)
Les frontières maritimes de l’UE: strier la mer
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Parce que toute trace sur l’eau semble être immédiatement dissoute par les courants, les mers ont longtemps été associées à un présent permanent, qui résiste à toute écriture de l’histoire. L’étendue de liquide infini a également représenté un défi pour la gouvernance: l’impossibilité de dresser des frontières stables dans des eaux en constante mouvement a conduit à considérer les mers comme un espace de liberté absolue et de circulation – les «mers libres». Dans cette présentation, je vais montrer qu’au contraire, les mers sont de plus en plus documentées et partagées, et ceci de manière inextricable. Un appareil de détection complexe est fondamental pour une forme de gouvernance qui associe la division des espaces maritimes et le contrôle du mouvement et qui instrumentalise le chevauchement partiel et la nature élastique des juridiction maritimes et des lois internationales. C’est dans ces conditions que les régimes de migration imposés par l’UE fonctionnent, ils étendent sélectivement les droits souverains par des patrouilles en haute mer, tout en rétractant parfois la responsabilité, comme dans les nombreux cas de non-assistance aux migrants en mer. A travers les politiques et les conditions de la gouvernance maritime organisées par l’UE, la mer se transforme en un liquide mortel – la cause directe de plus de 13.000 décès documentés au cours des 15 dernières années. Cependant, en utilisant des appareils de télédétection de la Méditerranée contre le grain et violations spatialisation des droits des migrants en mer, je vais démontrer qu’il est possible de ré-inscrire responsabilité dans une mer d’impunité.

Organisation

Comité d’organisation

Cédric Parizot – anthropologue, coordinateur du projet IMéRA (AMU), Marseille, IREMAM (AMU/CNRS), Aix-en-Provence
Anne-Laure Amilhat-Szary – géographe, PACTE (Université de Grenoble Alpes/CNRS)
Isabelle Arvers – commissaire d’exposition indépendante, Marseille
Jean Cristofol – philosophe, École Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence
Nicola Mai – anthropologue et vidéaste, LAMES (AMU/CNRS), London Metropolitan University, Londres
Joana Moll – artiste
Gabriel Popescu – géographe, Indiana University

Production

Institut Méditerranéen de Recherches Avancées (AMU), Marseille
Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence
Laboratoire PACTE (Université de Grenoble Alpes/CNRS)
Isabelle Arvers, commissaire d’exposition indépendante, Marseille
La compagnie, lieu de création à Marseille

Partenaires

Aix-Marseille Université (AMU), Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Réseau Français des Instituts d’Études Avancées (RFIEA), Labex RFIEA+, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Euborderscapes (Union Européenne, FP7), Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM – AMU/CNRS), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES – AMU/CNRS), Laboratoire d’Économie et de Sociologie du Travail (LEST- AMU/CNRS), Laboratoire d’Études et de Recherche sur le Monde Anglophone (LERMA-AMU), Laboratoire d’Arts, Sciences, Technologies pour la Recherche Audiovisuelle Multimédia (ASTRAM-AMU), Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (MMSH), LabexMed, Information Media production, Aviso Events, MarseilleProvence 2013 (MP 2013), ville d’Aix-en-Provence, Organisation Mondiale des Douanes (OMD)

Musée des Tapisseries, Aix-en-Provence, 2013

Exposition collective
du 1er octobre au 3 novembre 2013
Musée des Tapisseries, Aix-en-Provence

Avec Ian Howard, Amy Franceschini, Ken Rinaldo, Hackitectura, Claude Chuzel, Stéphane Rosière, Philippe Rekacewicz, RYBN, Gold Extra, Till Roeskens, Dana Diminescu, Nicola Mai, Sigalit Landau, Heath Bunting, Joana Moll & Heliodoro Santos, The Electronic Disturbance Theater 2.0 / b.a.n.g. lab., Micha Cardenas, Brett Stalbaum, Ricardo Dominguez, Amy Sara Carroll, Elle Mehrmand, Francis Alys, Fabien Fischer, Lauriane Houbey, Sarah Mekdjian et Anne-Laure Amilhat-Szary, Marie Moreau, Simona Koch. Commissariat Isabelle Arvers.

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Photos © Myriam Boyer

Projet

L’exposition L’antiAtlas des frontières est un projet construit en relation avec un processus de recherche consacré aux mutations du fonctionnement et du vécu des frontières au 21e siècle. Cette recherche s’est développée sur deux années, elle a rassemblé des chercheurs de différentes disciplines, de différents pays, mais aussi des artistes et des auteurs, dans une démarche profondément interdisciplinaire. L’une des caractéristiques de cette démarche a été le choix de ne pas opérer de hiérarchie préalable entre les formes de savoir, de faire se rencontrer des disciplines différentes, mais aussi de ne pas considérer les dimensions symboliques, culturelles ou les pratiques de création comme des épiphénomènes secondaires. Il s’est agi de réunir les différentes approches, celles des disciplines scientifiques, des acteurs de terrain, des artistes, comme des éléments indispensables à la compréhension de transformations qui ne touchent pas seulement à tel ou tel secteur de la vie sociale, mais aux représentations que nous nous faisons du monde dans lequel nous vivons et de nos propres identités.

L’exposition vise à rendre sensible la réalité complexe de ces mutations. Associant des productions élaborées en collaboration entre des chercheurs en sciences humaines et en sciences dures, des professionnels et des artistes, elle propose aussi un véritable décloisonnement entre les champs de la connaissance. Cette « hybridité » conduit l’exposition « antiAtlas des frontières » à proposer plusieurs niveaux de lecture et de participation. Différents moyens d’accès aux contenus sont ainsi mis à la disposition du public : des œuvres dont certaines ont été créées pour l’exposition, des expérimentations interactives, des cartes, des témoignages, un espace de documentation transmedia. L’exposition trouve dans son site internet (antiatlas.net) une extension virtuelle. Ce site est aussi un espace de recherche et de ressources, un lieu de débat et de partage des connaissances et des expériences.

Scénario des expositions

Escalade sécuritaire et technologique à la frontière

On a pu penser, avec la chute du mur de Berlin, que les frontières disparaissaient. Depuis, on n’a jamais autant construit de murs et de barrières. L’escalade sécuritaire aux frontières, sur terre, en mer, dans les airs et sur la toile, en Europe et dans le reste du monde, a radicalement transformé la nature des frontières et leur mode de fonctionnement. Dans le contexte du développement des flux de personnes, de marchandises et d’informations, les dispositifs de contrôle se détachent des territoires pour donner aux frontières des formes réticulaires, ponctiformes, ou même s’inscrire dans le corps des individus. C’est ce qu’il s’agit d’expérimenter au travers de Finger Print Maze de l’artiste Amy Franceschini. Donner son empreinte digitale pour ensuite pouvoir jouer dans le labyrinthe de notre identité. Ou nous faire prendre en photo à notre insu par les Paparazzi bots de Kenneth Rinaldo tout en nous plongeant dans la cartographie des frontières fermées  de Stéhane Roziere ou en nous enfermant dans l’installation X Ray de Claude Chuzel.

Frontières, flux et réseaux

Les dispositifs de contrôle créent des disjonctions entre les flux de personnes, de marchandises et les mouvements financiers, ainsi que des disjonctions entre leurs niveaux de fluidité. Si les circulations des marchandises et des flux financiers sont facilitées, celles des hommes sont en revanche assujetties à des contrôles de plus en plus stricts. Ces dispositifs ont bouleversé et profondément réorienté les flux et les dynamiques migratoires. Ils ont enfin multiplié les drames humains aux frontières. RYBN avec son robot trader ADM9 nous invite à découvrir les flux financiers qui dépassent frontières et vitesse de la lumière, la carte dynamique des étrangers détenus d’Olivier Clochard nous permet quant à elle une prise de conscience du marché global de la rétention humaine.

Contrôles, espaces et territoires

Le durcissement du contrôle des mobilités, dans un monde où se développent des moyens de communication de plus en plus rapides, favorise la création d’espaces et de mondes asymétriques et décalés. Il s’agira ici de montrer comment les populations mobiles, mais aussi ceux qui décrivent leurs expériences (chercheurs et artistes) réagissent et s’adaptent en développant de nouvelles formes de sociabilités et de pratiques de l’espace. Les oeuvres exposées souligneront également les limites de la cartographie classique pour cerner les espaces vécus et reconstruits par les populations frontalières et mobiles. Tels Francis Alys se jouant de la ligne verte ou Tll Roeskens proposant à des habitants de camps en Palestine de se réapproprier leur espace au travers du dessin.

Incorporation et biographisation de la frontière

En se complexifiant, la frontière tend à se disséminer, à se déployer au delà de son rapport au territoire pour s’inscrire jusque dans les corps. L’individualisation du contrôle et la définition de profils bio-sociaux et psychosociaux ne conduit pas uniquement à créer de nouvelles hiérarchies définissant des droits à la mobilité distincts entre les citoyens et les non citoyens. Elle provoque également une incorporation du contrôle et une « biographisation » de la frontière. Pour ne plus être identifiés ou fichés par l’intermédiaire de leurs empreintes digitales certains migrants n’hésitent pas à se brûler ou se limer les doigts ; d’autres entreprennent de transformer leur identité nationale, leur histoire personnelle et parfois leur identité sexuelle pour pouvoir bénéficier de programme de protection et d’assistance humanitaire, et ainsi ne pas être victimes de déportation.  C’est le cas de Samira, personnage réel rejoué pour l’installation Emborders de Nicola Mai  . Parce qu’il veut devenir femme, il doit fuir l’Algérie et obtient alors le statut de réfugié politique. Lorsqu’il souhaite revenir au pays, c’est à la transformation inverse qu’il procède afin d’obtenir des papiers et une nouvelle identité de chef de famille.

Détournements de frontières

L’État n’est cependant plus le seul acteur aux frontières. Les politiques migratoires et les systèmes de contrôle  sont mis en œuvre dans le cadre de coopérations complexes entre les États et une multitude d’acteurs infra et supra-étatiques, publics et privés. De même, le renforcement du contrôle pousse les populations vivant aux frontières et celles qui les traversent à réajuster leurs activités, leurs parcours et leurs modes de passage. Faute de moyens, ces populations sont souvent contraintes de se tourner vers des individus ou des groupes spécialisés dans le contournement des obstacles physiques (murs, barrières, etc.), des systèmes de surveillances (radars, drones, systèmes biométriques), des réglementations juridiques (visas, systèmes de permis de déplacement, contrats de travail, etc.) ou encore des barrières virtuelles. L’escalade sécuritaire à la frontière ouvre donc toujours des opportunités pour des passeurs, des contrebandiers, des fabricants de faux papiers, mais aussi pour des agences spécialisées dans le recrutement d’employés étrangers, etc. En tirant profit de cette demande et des failles de ces systèmes, ces acteurs contribuent à faire émerger une économie sociale et politique complexe. Que ce soit pour l’étudier, la perturber ou encore mettre en lumière les dynamiques qui la structurent, les chercheurs et les artistes participent directement à cette économie. The Transborder Immigrant Tool imaginé par The Electronic Disturbence Theater, est une application d’aide aux migrants pour déjouer les contrôles à la frontière mexicaine. Le collectif Forensic Oceanography imagine quant à lui une application en ligne pour documenter de manière participative les morts des migrants en mer médierranée.

L’antiAtlas des frontières  constitue l’une des « étapes» du parcours Ulysses, événement majeur de Marseille-Provence 2013 porté par le Frac (Fonds régional d’art contemporain). L’ensemble de la manifestation est co-produite par l’Institut Méditerranéen de Recherches Avancées (IMéRA), l’École Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence (ESAA), le laboratoire PACTE (Université de Grenoble-CNRS), le lieu de création La compagnie, et Isabelle Arvers, commissaire d’exposition indépendante.

Artistes et travaux de recherche exposés

Francis Alys, Sometimes doing something poetic can become political and sometimes doing something political can become poetic, 2004-2005

Heath Bunting, BorderXing, 2002

Claude Chuzel, X-ray, 2006

Dana Diminescu, E-diasporas, 2012

The Electronic Disturbance Theater 2.0 / b.a.n.g. lab., Micha Cardenas, Brett Stalbaum, Ricardo Dominguez, Amy Sara Carroll, Elle Mehrmand, The Transborder Immigrant Tool, 2009

Fabien Fischer, Lauriane Houbey, Sarah Mekdjian et Anne-Laure Amilhat-Szary, Marie Moreau, Crossing Maps, Cartographies transverses, 2013

Amy Franceschini, Finger Print Maze, 2003

Gold Extra, Frontiers the game, 2012

Hackitectura, Cartographie critique de Gibraltar, 2004

Ian Howard, Chinese Border Fence, 2004-2011

Simona Koch, Borders, 2010

Sigalit Landau, Barbed Hula, 2000

Nicola Mai, Samira (Emborders 1), 2013

Joana Moll & Heliodoro Santos, The Texas Border, 2010

Philippe Rekacewicz, Cartographie, 2012

Ken Rinaldo, Paparazzi Bots, 2009

Stéphane Rosière, Planisphère des frontières fermées, 2012

Till Roeskens, Videomappings : Aida, Palestine, 2009

RYBN, Robot ADM8, 2011

Galerie en ligne

Cette galerie vient compléter et augmenter les expositions avec des œuvres de net.art, des œuvres interactives en ligne, des oeuvres de vidéastes ou de photographes qui traitent des questions posées par l’antiAtlas :

Alban Biaussat, The Green(er) Side of the Line

Julie Chansel et Michaël Mitz, La machine à expulser

Magali Daniaux & Cédric Pigot, Cyclone Kingkrab & Piper Sigma

Magali Daniaux & Cédric Pigot, Arctic tactic

Martin De Wulf, Migrations map

Ben Fundis, Clara Long, John Drew, Border stories

Olga Kisseleva, Arctic Conquistadors

Romain de L’Ecotais, Au pied du mur

L’atelier Limo (Simon Brunel, Nicolas Pannetier et Maya Keifenheim), Border Bistro et Enquête frontalière

Patrick Lichty, The private life of a drone

Joana Moll, AZ: move and get shot

Presse

La frontière en question, Digitalarti

L’antiAtlas des frontières explore les mutations du XXIè siècle!, Marseille Face B

AntiAtlas des frontières, Télérama Plus, sept. 2013

Ventilo

Antiatlas de las fronteras, El proyecto es contraste con las libertades humanas logradas en buena parte del planeta, La Opinion, sept. 2013

Temps libre, avec Jean Cristofol sur l’antiAtlas des frontières, Radio Grenouille, 27 septembre 2013

Lettre d’information de l’INSHS (CNRS) N°25

Bypassing cartography, interview d’Isabelle Arvers par Marc Garett pour Furtherfield

Aux confins des frontières, Mouvement

Intervention d’Isabelle Arvers , Pechakucha

La frontière en ligne de mire, Poptronics

Extrait du journal 19/20, France 3 : reportage de M. Frey, R. Gasc, B. Joubert

L’antiAtlas des frontières, à la pointe du dialogue art-science, Lettre d’AMU, no. 16, septembre 2013, p. 20

L’antiAtlas des frontières, présentation par Cédric Parizot dans Perspectives, le journal du RFIEA (télécharger le numéro entier)

A La compagnie, un antiAtlas pour faire reculer les frontières, La Provence

Deuxième épisode de l’antiAtlas des frontières à Marseille, Digitalarti

Evénement, Paris Art

Evénement Marseille-Provence 2013

L’antiAtlas des frontières #2, MCD

L’antiAtlas des frontières, Marseille expos

Migreurop lance le site participatif closethecamps.org, Migreurop

Interventions créatives entre art et science, Causes communes

Les frontières et leur antiAtlas, Med’in Marseille

Le (sens dessus) dessous des cartes, Ventilo n. 330, p. 21

L’armée des drones, article d’Annick Rivoire sur Arte Creative

antiAtlas des frontières, Carnets de l’IREMAM

Production

Institut Méditerranéen de Recherches Avancées (AMU), Marseille
Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence
Laboratoire PACTE (Université de Grenoble Alpes/CNRS)
Isabelle Arvers, commissaire d’exposition indépendante, Marseille
La compagnie, lieu de création à Marseille

Partenariats

Aix-Marseille Université (AMU), Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Réseau Français des Instituts d’Études Avancées (RFIEA), Labex RFIEA+, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), Euborderscapes (Union Européenne, FP7), Institut de Recherches et d’Études sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM – AMU/CNRS), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES – AMU/CNRS), Laboratoire d’Économie et de Sociologie du Travail (LEST- AMU/CNRS), Laboratoire d’Études et de Recherche sur le Monde Anglophone (LERMA-AMU), Laboratoire d’Arts, Sciences, Technologies pour la Recherche Audiovisuelle Multimédia (ASTRAM-AMU), Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (MMSH), LabexMed, Information Media production, Aviso Events, MarseilleProvence 2013 (MP 2013), ville d’Aix-en-Provence, Organisation Mondiale des Douanes (OMD)

Nicola Mai – Samira – Emborders #1

Nicola Mai
Samira – Emborders #1
Voir le projet

Karim est un immigrant algérien vendant son corps comme Samira, la nuit à Marseille. Il a quitté l’Algérie adolescent et s’est enfuit en Italie quand ses seins commencèrent à se développer suite à la prise d’hormones. Dix ans plus tard Karim obtient l’asile politique en France grâce à ses seins qui lui permettent de défendre son cas comme celui d’une femme transgenre risquant le meurtre si on la rapatrie en Algérie.

Vingt ans plus tard, Karim se fait chirurgicalement enlever les seins pour recevoir de son père mourant le statut de chef de famille. Il se marie alors avec une femme pour avoir un nouveau passeport lui permettant de retourner en Algérie pour assumer son nouveau rôle.

Samira la première de quatre installations formées de deux écrans qui constituent le projet de réalisation cinématographique / de recherche Emborders, qui sera finalisé entre 2014 et 2015. Au cours des trentre dernières années, les flux migratoires se sont accrus et diversifiés. Les politiques néolibérales ont inclus le genre et la sexualité parmi les critères d’éligibilité à la protection humanitaire, tout en restreignant l’accès aux marchés du travail dans le Nord. C’est pourquoi la protection humanitaire et le droit d’asile sont devenues des frontières stratégiques, donnant (ou refusant souvent) l’accès aux droits de l’homme et au marché du travail. Emborders questionne la façon dont les frontières humanitaires sont inscrites dans le corps et la subjectivité des migrants grâce à réalisation, l’incorporation et l’internalisation de discours standardisés et européo-centrés de victimisation, vulnérabilité et de caractérisation du genre / sexe. En utilisant des acteurs professionnels pour mettre en scène des vraies personnes, ainsi qu’en juxtaposant les différentes versions du soi qui sont mises en évidence par l’analyse ethnographique et les frontières humanitaires, le projet questionne également les revendications d’authenticité, d’objectivité et de crédibilité qui sous-tendent à la fois l’action humanitaire et la recherche scientifique.

Samira été produit par l’IMéRA et SATIS (respectivement l’Institut Méditerranéen d’Etudes Avancées et leDépartement Sciences Arts et Techniques de l’Image et du Son de l’Université Aix-Marseille) .

Nicola Mai est ethnologue et réalisateur, Professeur de Sociologie et Etudes migratoires au Working Lives Research Institute de l’Université Metropolitaine de Londres. Ses publications universitaires et ses films ont pour objet les expériences et perspectives des migrants qui vendent leur corps et leur amour, insérés dans l’industrie globalisée du sexe pour vivre leurs vies. A travers  des ethno-fictions expérimentales et des résultats de recherches inédites, Nicola Mai met en cause les politiques qui lisent forcément la migration liée au travail sexuel en termes de trafics, tout en portant l’accent sur la complexité ambivalente des dynamiques d’exploitation et d’auto-affirmation qui sont en jeu. Dans sa (Sex Work Trilogy), il explore différentes expériences de renontres entre la migration et l’industrie du sexe.

En 2014 et 0215, Nick sera basé au Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, MMSH/Aix -Marseille University), de façon à y réaliser le projet « Queering Sexual Humanitarianism », comparant l’impact des interventions humanitaires ciblant les migrants travailleurs sexuels et les minorités sexuelles en demande d’asile au Royaume-Uni (Londres) et en France (Marseille/Paris) grâce à des protocoles de recherche ciblée et de la réalisation de films expérimentaux.

Atelier 8 : Fictions de Frontières

13 et 14 juin 2013
Institut Méditerranéen de Recherches Avancées – IMéRA (AMU)
Maison des Astronomes, Marseille

Comité d’organisation: Nicola Mai (IMéRA, London Metropolitan University), Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS-AMU)

« Quelle est la relation entre la matérialité et la représentation des frontières? Est-ce que les technologies contemporaines ont fondamentalement modifié cette relation? Est-ce que les cartes représentent ou engendrent des territoires ? Ce séminaire évaluera l’impact des changements technologiques contemporains  sur la relation entre la représentation et l’expérience des frontières ainsi que sur les formes de conscience associées. Il mettra en œuvre une perspective transdisciplinaire en réunissant des chercheurs en sciences humaines (historiens, sociologues, anthropologues, géographes, philosophes, politologues), en sciences dures (intelligence artificielle, informatique) et des artistes (webart, hypermédia, arts plastiques). Dans le premier atelier sur les «Fictions de frontières», les conférenciers discuteront de la façon dont les récits fictifs et les interventions artistiques (films, installations artistiques, spectacles) sont impliqués dans les expériences incarnées des réalités et des territoires frontaliers. Dans le second atelier «Représentations frontiérisantes», les artistes et les chercheurs s’appuieront sur leur propre travail  pour discuter de l’impact des technologies actuelles sur la représentation et l’expérience des frontières. Enfin, le troisième atelier examinera comment l’introduction de nouvelles «Contre-Fictions Art-Science» offre la possibilité de revivre, re-conceptualiser et de redessiner les frontières entre l’art et la science ainsi que celles entre l’écriture, l’expérience et les territoires. »

Jorge Luis Borges, De la Rigueur des Sciences, 1946

« En cet empire, l’Art de la Cartographie fut poussé à une telle Perfection que la Carte d’une seule Province occupait toute une Ville et la Carte de l’Empire toute une Province. Avec le temps, ces Cartes Démesurées cessèrent de donner satisfaction et les Collèges de Cartographes levèrent une Carte de l’Empire, qui avait le Format de l’Empire et qui coïncidait avec lui, point par point. Moins passionnées pour l’Étude de la Cartographie, les Générations Suivantes réfléchirent que cette Carte Dilatée était inutile et, non sans impiété, elles l’abandonnèrent à l’Inclémence du Soleil et des Hivers. Dans les Déserts de l’Ouest, subsistent des Ruines très abîmées de la Carte. Des Animaux et des Mendiants les habitent. Dans tout le Pays, il n’y a plus d’autre trace des Disciplines Géographiques »

Suarez Miranda, Viajes de Varones Prudentes, Lib. IV, Cap. XIV, Lerida, 1658

« Aujourd’hui l’abstraction n’est plus celle de la carte, du double, du miroir ou du concept. La simulation n’est plus celle d’un territoire, d’un être référentiel, d’une substance. Elle est la génération par les modèles d’un réel sans origine ni réalité : hyperréel. Le territoire ne précède plus la carte, ni ne lui survit. C’est désormais la carte qui précède le territoire – précession des simulacres – c’est elle qui engendre le territoire et s’il fallait reprendre la fable, c’est aujourd’hui le territoire dont les lambeaux pourrissent lentement sur l’étendue de la carte. C’est le réel, et non la carte, dont les vestiges subsistent çà et là, dans les déserts qui ne sont plus ceux de l’Empire, mais le nôtre. Le désert du réel lui-même. »

Jean Baudrillard, Simulacres et Simulation, 1981

Border Fictions/Fictions de Frontières

Bernard Guelton (Arts, Paris, UMR ACTE, CNRS, Université Paris 1)
Fiction de Frontières : Dispositifs Fictionnels et Virtuels/ Border Fictions: Virtual and Fictional Mechanisms from antiAtlas of Borders

Michelle Stewart (Film Studies, Résidente IméRa, State University of New York)
Traveling Shots: Cinema, Migration and Borders/Cadrages Mobiles: Cinema, Migration et Frontières

Nicola Mai (Résident IMéRA, London Metropolitan University)
Re-assembling Samira: antiAtlas work in progress installation/Le Ré-assemblage de Samira : présentation du ‘travail en cours’  pour l’exposition antiAtlas

Re-Bordering Representations /Representations Frontièrisantes

Jean Cristofol (Philosophe, École Supérieure d’Art d’Aix en Provence)
Distance and Proximity in a Multidimensional Space/Distance et Proximité dans un Espace Multidimensionnel

Larisa Dryansky (Histoire de l’Art, Université Paris-Sorbonne, Paris IV)
Border and Utopia in the Work of Dennis Oppenheim/Frontière et Utopie chez Dennis Oppenheim

Philippe Rekacewicz (Journaliste et Cartographe, Le Monde Diplomatique ; MIT Program for Art, Culture and Technology)
Cartographie entre Art, Science et Politique/ Cartography between Art, Science and Politics

Art-Science Counter-fictions/Contre-Fictions Art-Science

Susan Ossman (Anthropology, University of California Riverside)
The Arts of the Border: A Transnational Creative Conversation/L’Art de Frontières : une Conversation Créative Transnationale

David Napier (Social Anthropology, University College London)
Undoing the Dichotomy of Self and Other across Immunology, Anthropology and Art/Problematiser la Dicotomie entre Soi et Autre à travers l’Immunologie, l’Anthropologie et l’Art

Maggie O’Neill (Critical and Cultural Criminology, University of Durham)
Transgressive Imaginations: Border Spaces, Ethnography and Performance Art/Les Imaginations Transgressives : Espaces Frontière, Ethnographie et Performance Art

Résumés / Abstracts

Bernard Guelton (Arts plastiques et sciences de l’art, Paris, UMR ACTE, CNRS, Université Paris 1)
Fictions de frontières : dispositifs fictionnels et virtuels

Que deviennent la recréation et l’exploration de l’espace fictionnel lorsque celui-ci ne se conçoit plus du point de vue d’un sujet immobile, mais à travers ses déplacements et ses actions dans les jeux en réalités alternées  ? Une part croissante d’artistes met en œuvre des situations en réalités alternées qui ménagent des confrontations entre univers réels, virtuels et fictionnels et simultanément celles du territoire et de ses frontières. Ici, l’espace physique devient le cadre pour déployer un engagement fictionnel où les actions, la mobilité du sujet et les interactions avec d’autres participants deviennent déterminantes. La cartographie dynamique peut constituer un élément essentiel pour structurer ces différents contextes sous le mode des interactions situées. Elle permet de coordonner la géolocalisation des participants, leurs interactions, et les contenus fictionnels associés à des emplacements réels dans un espace urbain avec les scénarios et les règles mises en jeu. Dans les jeux en réalités alternées, la mobilité des joueurs et les appareillages sollicités sont déterminants. Ils impliquent des situations d’immersion réelle, virtuelle et fictionnelle qui interrogent la construction et les limites des lieux qu’ils soient ludiques ou institutionnels. Ces questions seront exemplifiées à travers un ou deux dispositifs de jeux en réalités alternées. 

Border Fictions: Virtual and Fictional Mechanisms

What do the reproduction and exploration of fictional space become if the latter is not seen as an immobile subject but through its displacements and actions in alternated realities? An increasing number of artists create situations in alternated reality negotiating simultaneously confrontations between real, virtual and fictional universes, territories and their borders. Here physical space becomes the context for the deployment of a fictional engagement where actions, mobility of the subject and interactions with others become determinant. Dynamic cartography can constitute an essential element to structure these different contexts according to situated interactions. It coordinates the geolocalisation of participants, their interactions and the fictional contents that are associated with real places in urban settings by following the scenarios and rules of games. Within games taking place in virtual worlds the mobility of players and the required equipment are determinant. They imply situations of real, virtual and fictional immersions that interrogate the construction and limits of leisurely or institutional places. These issues will be exemplified through one or two games in virtual reality.

Michelle Stewart (Cinema Studies, Résidente IméRa, State University of New York)
Traveling Shots: Cinema, Migration and Borders

Borders became sites of security with the modern state’s consolidation of its monopoly on violence within mapped territories.  As such, the experience of the border and passage across has been a problem, both theoretical and material, for some time.  Yet now, with the increasing porousness of borders for the ever more rapid transfer of capital, we find that the physical experience and political discourse of the border have hardened exponentially.  Technological advances have permitted greater securitization and surveillance regimes for these sites of passage.  In recent cinema, a number of filmmakers have crafted parallel aesthetics in an attempt to visualize the phenomenological toll and the political consequences of this border regime.  Via close analysis and comparison of these works that traverse the borders of North America, Europe, and Africa, we see how border fictions intervene in the politics of fortification and exclusion.

Cadrages mobiles: cinéma, migration et frontières

Avec la consolidation du monopole de la violence par l’État moderne dans les territoires cartographiés, les frontières sont devenues des sites sécuritaires. À ce titre, l’expérience de la frontière et de sa traversée sont devenus un problème, théorique et matériel, pendant un certain temps. Cependant, aujourd’hui, avec la porosité croissante des frontières, notamment en raison du transfert de plus en plus rapide du capital, nous constatons que l’expérience physique et le discours politique de la frontière ont durci de façon exponentielle. Les progrès technologiques ont permis la mise en place de régimes de « sécuritisation » et de surveillance de ces sites de passage. Dans le cinéma contemporain, un certain nombre de cinéastes ont conçu des esthétiques parallèles dans le but de visualiser le coût phénoménologique et les conséquences politiques de ces régimes frontaliers. A travers une analyse approfondie et la comparaison de ces œuvres qui traversent les frontières de l’Amérique du Nord, de l’Europe et de l’Afrique, nous verrons comment les fictions de frontières contribuent à la politique de fortification et d’exclusion.

Nicola Mai (Résident IMéRA, London Metropolitan University)
Re-assembling Samira: antiAtlas work in progress installation

The humanitarian protection of vulnerable migrant groups has enforced new biographical borders. Fundamental rights are allocated on the basis of the performance of ‘true’ victimhood repertoires and scripts, reproducing the suffering of the migrant to obtain state benevolence and legal migration status. Gender and sexuality have become strategic narrative repertoires through which humanitarian and biographical borders are inscribed on the bodies of migrants. The Emborders filmmaking/research project reproduces the different performances and narratives of migrants targeted by humanitarian protection as they emerge in interviews with authorities, with social researchers and with peers and families. It draws on real stories and real people, which are performed by actors to protect the identities of the original interviewees and mirror the inherently fictional nature of any narration of the self. By using actors to reproduce real people and real life histories, the project ultimately challenges what constitutes a credible and acceptable reality in scientific, filmic and humanitarian terms.

Le Réassemblage de Samira : présentation du ‘travail en cours’ pour l’exposition antiAtlas

La protection humanitaire des groupes de migrants vulnérables a imposé de nouvelles frontières biographiques. Les droits fondamentaux sont attribués sur la base de la performance de «vrais» répertoires et scripts de victime, qui reproduisent la souffrance des migrants afin d’obtenir la bienveillance de l’Etat et le statut de migrants légaux. Genre et sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques à travers lesquels les frontières humanitaires et biographiques sont inscrites sur les corps des migrants. Le projet de film/recherche Emborders reproduit les différentes représentations et les récits des migrants visés par la protection humanitaire tels qu’ils ressortent des entretiens avec les autorités, avec des chercheurs en sciences sociales, avec leurs pairs et leurs familles. Il s’appuie sur des histoires réelles de gens réels, mais qui ont été performées par des acteurs afin de protéger l’identité des personnes interrogées et refléter la nature intrinsèquement fictive de toute narration de soi. En utilisant des acteurs pour reproduire ces vraies personnes et leurs histoires de vie, le projet remet en cause ce qui constitue finalement une réalité crédible et acceptable en termes scientifiques, filmiques et humanitaires.

Jean Cristofol (Philosophe, École Supérieure d’Art d’Aix en Provence)
Distance et Proximité dans un Espace Multidimensionnel

Les récits des fictions dont nous sommes héritiers mettent en œuvre un espace homogène qui s’articule sur les oppositions du proche et du lointain, de la distance et de la proximité, de l’ici et de l’ailleurs. La figure du voyage, celle de l’utopie, de l’ile ou du passage de la frontière en sont les incarnations. Mais ces figures ne sont pas seulement de libres constructions imaginaires, elles sont aussi générées par les médiums dans lesquels elles sont articulées et elles sont concrètement produites par la relation aux modes d’existence techniques et sociaux d’une époque. Quand les échanges et les déplacements sont déterminés par les flux informationnels et que des dispositifs autonomes ubiquitaires agissent sur nos modes de perception et nos capacités directes d’action, comment pouvons-nous les penser et les mettre en œuvre ? Que devient notre relation à l’espace quand celui-ci se construit dans une complexité qui vient bouleverser les façons de comprendre le sens même de ce qu’on appelle la distance ou la proximité ?

Distance and Proximity in a Multidimensional Space

The fictional accounts which we inherit produce a homogeneous space that is articulated by the oppositions between the near and the far, distance and proximity, here and elsewhere. Figurations of travel, utopia, of islands or of border crossings are the incarnations of such oppositions and dynamics. But these figurations are not simply free imaginary constructions. They are generated by the media and produced by the technological and social arrangements of each era. How can we think and enact exchanges and displacements that are currently determined by information flows, while ubiquitous and autonomous mechanisms influence our capacity to reflect and act? How does our relationship to space changes when space is framed by a complexity that overturns the way in which we understand distance or proximity?

Larisa Dryansky (Histoire de l’Art, Université Paris-Sorbonne, Paris IV)
Frontière et Utopie chez Dennis Oppenheim

Cette communication entend cerner les aspects fictionnels des travaux associés au Land Art en s’appuyant sur le cas exemplaire de l’œuvre de Dennis Oppenheim. Que ce soit avec ses Site Markers, ses inscriptions cartographiques sur le terrain, ou ses « transferts » et « transplantations », Oppenheim a fait de la réflexion sur la notion de site un axe majeur de sa production. En même temps, sa démarche, en articulant non-lieux de l’art et non-localisation, se détache fortement de l’idée de site-specificity. Pour préciser cette approche, nous nous attarderons en particulier sur les œuvres traitant de la frontière que nous envisagerons à la lumière des thèses de Louis Marin sur l’Utopie.

Border and Utopia in the Work of Dennis Oppenheim

This paper addresses the fictional nature of the works associated with Land Art using Dennis Oppenheim’s oeuvre as a case study. The notion of “site” is a cornerstone of Oppenheim’s Land Art pieces as demonstrated by his Site Markers, his works involving the scribing of maps on the ground, and his various operations of “transferring” and “transplanting” spaces. At the same time, his approach, which articulates artistic non-places and a strategy of non-localization, runs counter to the idea of site-specificity. This is particularly apparent in Oppenheim’s treatment of the concept of borders, which may be fruitfully compared with Louis Marin’s writings on Utopics.

Philippe Rekacewicz (Journaliste et Cartographe, Le Monde Diplomatique ; MIT Program for Art, Culture and Technology)
Cartographie entre Art, Science et Politique/ Cartography between Art, Science and Politics

Susan Ossman (Anthropology, University of California Riverside)
The Arts of the Border: A Transnational Creative Conversation

Borders have a special significance for people who have settled in several homelands. I have carried out extensive research on this topic. Recently, I published Moving Matters: Paths of Serial Migration. But it is not the book or my findings that will be the subject of this presentation: rather, I will describe and analyze the artistic project that has emerged in response to the book. In May in Riverside, California. “The Arts of Migration” brought together serial migrant visual artists, dancers, actors and writers, including several who figure in the book.  Some performances such as artist Beatriz Mejia-Krumbien’s “Mi Tiempo, Mein Raum, My Map” address the question of how borders become life chapters; others like Paulo Chagas’ musical composition “Einblick” addresses the accumulated experience of border crossings. Alexandru Balesescu’s story “Dark Green Fade to Black” fictionalizes encounters among serial migrants and “ordinary” migrants in Istanbul, while Natalie Zervou explores the way  “Gestural Landscapes” travel with bodies in her choreography. In a dialogue about their shared life in East Asia, north America, Europe and Central Asia over thirty years, Barbara and Stephen James offer a moving illustration of the idea of ‘the poetics of attachment.” By working through art to respond to my research on borders and their relationship to specific life paths and subject formations, the collaborative arts project offered a unique type of critique. Through art, much of what any book inevitably leaves out could be expressed and shared.  Thus, the project opened up the project to further forms of research and new audiences. It offers an original way of generating cross-disciplinary, transnational conversations that bridge the social sciences, the humanities, and the arts. The discussions after the performances led to the conception of a manner of generating a “transnational workshop,” creating a website and making a film based on this project. These discussions are themselves a fascinating moment in the research process which I will attempt to analyze in this presentation.

Les arts de la frontière : une conversation créative transnationale.

Les frontières ont une signification particulière pour les personnes qui se sont installées dans plusieurs pays. J’ai effectué des recherches approfondies sur ce sujet. Récemment, j’ai publié Moving Matters: Paths of Serial Migration. Mais ce n’est pas ce livre ou mes conclusions qui feront l’objet de cette présentation. Je décrirai et analyserai le projet artistique qui a émergé en réponse au livre. En mai à Riverside, en Californie, «Les Arts de la migration» a réuni une série d’artistes visuels migrants, danseurs, acteurs et écrivains, dont plusieurs qui figurent dans le livre. Certains spectacles comme ceux de l’artiste Beatriz Mejia-Krumbien « Mi Tiempo, Mein Raum, My Map » s’intéressent à la manière dont les frontières deviennent les chapitres de la vie ; d’autres comme la composition musicale « Einblick » de Paulo Chagas traitent de l’expérience accumulée des postes frontaliers. L’histoire de Alexandru Balesescu « Dark Green Fade to Black » fictionnalise les rencontres entre « migrants en série » et les migrants « ordinaires » à Istanbul ; tandis que Natalie Zervou explore la manière dont les « Paysages Gestuels » voyagent avec les corps dans sa chorégraphie. Dans un dialogue à propos de leur vie commune pendant plus de trente ans en Asie de l’Est, en Amérique du Nord, en Europe et en Asie centrale, Barbara et Stephen James offrent une illustration mouvante de l’idée de «la poétique de l’attachement ». L’art a permis de répondre à certaines de mes questions sur les frontières et sur les relations entre d’un côté, mes recherches et, de l’autre, les chemins de vie spécifiques et la formation du sujet. Ce faisant, le projet d’art collaboratif a offert un type de critique inédit. A travers l’art, beaucoup de ce que n’importe quel livre laisse inévitablement de côté pourrait être exprimé et partagé. Ainsi, le projet a ouvert des pistes vers d’autres formes de recherche et vers de nouveaux publics. Il propose une façon originale de générer des conversations interdisciplinaires et transnationales qui lient les domaines des sciences sociales, des sciences humaines et des arts. Les discussions après les représentations ont conduit à la conception d’un «atelier transnational » original, la création d’un site Web et la réalisation un film à partir du projet. Ces discussions ont elles-mêmes été un moment fascinant dans le processus de recherche que je vais essayer d’analyser dans cette présentation.

David Napier (Social Anthropology, University College London)
Changing Borders of Selves and Others: The Implications of Symbiosis for Boundary Construction and Maintenance

Aristotle famously said that “what makes the world one will also be what makes a person’. This talk focuses on the implications of new and emerging understandings of malleable boundaries for traditional constructions of borders and borderlands. Does what biology tells us about selfhood have major implications for ancient and time-honored notions of boundaries—that is, what they are and how they are maintained? Do we actually need radical categories to make sense of life as we now think we know it, or are there meaningful subaltern spaces emerging in which constructive difference can be ameliorated through various intellectual and artistic interventions? Are we now approaching, if unknowingly, a new threshold in our understanding of the limitations in our thinking about boundaries as base-line categorical imperatives? In this talk, the meaningfulness of such questioning is (playfully) examined.

Les frontières changeantes du Soi et des Autres: Les implications de la symbiose pour la construction et l’entretien des limites

Aristote disait que «ce qui fait le monde, est aussi ce qui fait une personne». Cette conférence se concentre sur les implications des formes nouvelles et émergentes de compréhension des limites malléables dans le processus des constructions traditionnelles des frontières et des régions limitrophes. Est-ce que ce que nous dit la biologie à propos du soi remet en cause les notions anciennes et séculaires que nous avons des frontières? Avons-nous réellement besoin de catégories radicales pour donner un sens à la vie telle que nous croyons la connaître, ou y a-t-il des espaces subalternes signifiants émergents où la différence constructive peut être améliorée grâce à diverses interventions intellectuelles et artistiques? Approchons-nous maintenant, même inconsciemment, un nouveau seuil dans notre compréhension des limites dans notre réflexion sur les frontières? Dans cette présentation, j’aborderai de manière ludique le caractère significatif de ce questionnement.

Maggie O’Neill (Critical and Cultural Criminology, University of Durham)
Transgressive Imaginations: Border Spaces, Ethnography and Performance Art

This paper discusses biographical and participatory research undertaken at the borders of ethnography and performance art and the imagination and re-imagination of the borders between deviance and normality. Key themes addressed include the tension between human rights, human dignity and humiliation in the lived experiences of migrants, many of whom exist at the margins of the margins, and the possibilities for a radical democratic imaginary in our cultural criminological work in this area.

Les Imaginations Transgressives : Espaces Frontière, Ethnographie et Performance Art

Cet article traite des recherches biographiques et participatives entreprises aux frontières de l’art, de l’ethnographie, de la performance, de l’imagination et de la ré-imagination de la frontière entre la déviance et la normalité. Les principaux thèmes abordés sont la tension entre les droits de l’homme, la dignité humaine et l’humiliation dans les expériences vécues par les migrants, dont beaucoup existent en marge de la marge, et les possibilités d’un imaginaire démocratique radical dans notre travail de criminologie culturelle dans ce domaine.

Partenariat

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Crossing Maps, cartographies transverses

Cette cartographie alternative se situe à la croisée des sciences humaines et de l’art. Elle est issue d’un atelier de cartographie expérimental et participatif, qui a engagé des voyageurs, des artistes et des chercheurs. La cartographie est abordée comme une technique créative de relevés d’expériences. Les cartes produites avec et par les voyageurs évoquent des souvenirs de parcours et d’épopées migratoires.

Débuté en 2013 à Grenoble, en France, ce projet a réuni deux chercheuses en géographie, trois artistes, et douze habitant·e·s grenoblois·e·s, en situation présente ou passée de demande d’asile. Alors que les administrations exigent des récits de vie « vérifiables » pour délivrer ou non le droit d’asile, le projet de recherche-création Cartographies traverses/Crossing Maps ne répond à aucune injonction de vérité, ni de référentialité.

Depuis le champ de l’art et depuis le champ de la science, nous avons travaillé à mettre en crise la notion de « vérité » narrative, utilisée par les administrations pour juger les récits migratoires des personnes demandant l’asile, en co-produisant des cartes d’expériences migratoires, ni vraies, ni fausses, autant référentielles qu’imaginaires. Nous avons donc invité des personnes en situation de demande d’asile à travailler à des formes d’expression, qui tentent de ne pas reconduire la violence générée par les interactions avec les administrations. Dans les dispositifs de mise en relation que nous avons proposés, nous n’avons posé aucune question. Plutôt que de proposer de « raconter leur histoire », nous avons invité les participant∙e∙s à dessiner des cartes à main levée, sur papier et sur tissu, à partir des thèmes du déplacement, du voyage, de la vie à Grenoble. Point de fond de carte référencé, ni vrai, ni faux. Principe d’Équivalence : bien fait = mal fait = pas fait (Filliou, 1968). Ce travail pose également les enjeux d’une co-production élaborée entre des personnes aux statuts très différents et inégaux (« artiste », « chercheuse », « demandeur∙se d’asile ») : nous relevons des asymétries, des impensés, des complémentarités, et des tentatives de subversion.

Pour plus d’éléments sur ce projet voir l’article de Mekdjian Sarah et Moreau Marie, « Redessiner l’expérience : Art, sciences et conditions migratoires », antiAtlas Journal, 01 | 2016, En ligne, publié le 13 avril 2016.

Atelier 7 : Économie de la frontière

25 et 26 avril 2013
Institut Méditerranéen de Recherches Avancées – IMéRA (AMU)
Maison des Astronomes, Marseille

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS-AMU)

Économie politique et art

Antoine Vion (Sociologue, LEST, AMU)
Échanges licites et illicites : le rôle des cartels. Synthèse des travaux de l’Observatoire économique des structures du capitalisme

Heidrun Freise (Social Anthropology, Ruhr-Universität, Bochum)
L’industrie migratoire naissante. Lampedusa et l’Etat d’exception

Georg Hobmeier (Artist, Gold extra)
Playing Politics – an attempt in serious game development

Flux de marchandises/Flows of goods

Robert Ireland (Political Analyst, Head of the Research and Strategies Unit, WCO)
New Perspectives on the Customs Supply Chain Security Paradigm from antiAtlas of Borders

Mariya Polner (Political Scientist, Research analyst, WCO Research and Strategies Unit) et Thomas Cantens (Anthropologue, Administrateur à l’Unité Recherche et Stratégies de l’OMD et membre du Centre Norbert Elias EHESS-Marseille)
Le temps et l’argent en frontière

Emmanuel Brunet-Jailly (Science politique, University of Victoria, Bristish Columbia)
Intégration économique, flux marchands et frontières en Amérique du Nord et dans l’Union européenne

Flux des personnes/ Flows of people

Swanie Potot (Sociologue, URMIS, CNRS)
Des migrants au service de l’économie monde ?

Laurence Pillant (Géographe, AMU)
Du formel à l’informel : la continuité du système de contrôle migratoire à la frontière gréco-turque from antiAtlas of Borders

Cédric Parizot (anthropologue, IMéRA, IREMAM, CNRS)
Trafiquants et gardes frontières : confusion ou synchronisation ? Le cas israélo-palestinien

Résumés / Abstracts

Antoine Vion (Sociologue, LEST, AMU)
Échanges licites et illicites : le rôle des cartels. Synthèse des travaux de l’Observatoire économique des structures du capitalisme (OPESC)

Les travaux de l’OPESC s’intéressent notamment à la structuration des cartels internationaux au XXe siècle. La présentation abordera d’abord la structuration du cartel pétrolier pour souligner son rôle dans la délimitation des activités légitimes et illégitimes en matière d’industries pétrolières. Elle prendra comme point de comparaison la structuration du cartel international de la production d’opiacées et son rôle dans la structuration de l’industrie du médicament. L’existence d’oligopoles mondiaux très structurés dessine très clairement les frontières entre les espaces d’échanges licites et illicites à travers le monde. La comparaison de ces deux cas invite à s’interroger sur l’émergence de nouveaux acteurs industriels, qui marquent peut-être la fin d’un cycle historique de contrôle occidental de ces industries. Celle-ci entrainerait une forte réorganisation des activités douanières, notamment en Asie et en Afrique.

Heidrun Freise (Social Anthropology, Ruhr-Universität, Bochum)
The Nascent Migration Industry. Lampedusa and the State of Exception

Given extensive media coverage, the island of Lampedusa became a prominent symbol of undocumented mobility in the Mediterranean. The intensification of border controls, the role of the Schengen treaty and the externalization of borders to the European ex-colonies in (North) Africa have been critically scrutinized. Similarly, the border-regimes and new forms of gouvernementalité that have fostered these processes have largely been addressed. Yet, institutionalized border economies and their massive interests have largely escaped attention. The paper therefore, addresses this nascent migration industry and various actors and stakeholders.

Georg Hobmeier (artist, Gold extra)                         
Jouer à la politique-une tentative de développement de « serious game »

Georg Hobmeier, membre du collectif artistique interdisciplinaire Gold extra, présentera Frontiers, un jeu qui conduit aux frontières de l’Europe. Ce jeu en ligne multi-joueurs présente le voyage d’un réfugié des régions subsahariennes vers l’Europe. Les joueurs peuvent aussi jouer le rôle d’un garde-frontières, dans les deux cas ils prendront connaissance des frontières et des luttes qu’implique leur traversée du Sahara, leur arrivée sur les plages du sud de l’Espagne ou dans le port de containers de Rotterdam. Le jeu repose sur des enquêtes extensives conduites en Ukraine, en Slovaquie, en Espagne et au Maroc, ainsi que sur des interviews avec des réfugiés, des organisations non-gouvernementales et avec les autorités en charge des frontières.

Robert Ireland (Political Analyst, Head of the Research and Strategies Unit, WCO)
Nouvelles perspectives sur le paradigme de la sécurité de la chaine logistique en douane

Cette présentation retrace la genèse du paradigme de la sécurité de la chaîne logistique en douane, né de la participation des administrations douanières au contre-terrorisme suite aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Ces  nouvelles perspectives sont le fruit d’une réflexion sur l’évolution de ce modèle, question politique de moins en moins prioritaire pour les douanes, même aux États-Unis. À la suite des attentats du 11 septembre, il s’est incarné dans un ensemble de régulations douanières nationales et de nouveaux standards internationaux élaborés par l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD). Celles-ci avaient pour but de dissuader l’utilisation des navires de fret international pour transporter des terroristes ou accomplir des actes terroristes. La communication examinera la mise en œuvre du paradigme par l’étude de deux programmes-clefs des douanes américaines, C-TPAT et CSI, puis son internationalisation par l’adoption du « WCO SAFE Framework of Standards to Secure and Facilitate Global Trade » à l’OMD et sa traduction politique dans la loi du « 100% container scanning ». Puis seront discutés les principaux thèmes politiques défendus par le gouvernement américain : la communication à l’avance des données de cargaison, la gestion du risque douanier, les équipements de contrôle non-intrusif (scanners) et les programmes d’opérateur agréé à vocation sécuritaire. Enfin, la communication s’intéressera au déclin actuel de ces dispositifs, avec l’abandon, de facto, du 100% scanning, dans un contexte de crise budgétaire qui laisse présager une réduction des moyens consacrés aux programmes en cours.

Mariya Polner  (Political Scientist, Research analyst, WCO Research and Strategies Unit) et Thomas Cantens (Anthropologue, Administrateur à l’Unité Recherche et Stratégies de l’OMD et membre du Centre Norbert Elias EHESS-Marseille)
Le temps et l’argent de la frontière : le cas des corridors de transport en Afrique de l’Ouest

A partir d’une réflexion sur les projets d’aide publique au développement et les travaux de normalisation et de régulation du commerce menés dans les institutions internationales, la communication étudiera le passage des marchandises en frontière, en particulier dans les pays en développement. Bien que souvent présentée dans le cadre contemporain de la globalisation et attachée aux paradigmes du développement, la flexibilité accordée au passage des marchandises est ancienne, liée à la circulation et l’accumulation de richesses et la représentation de l’abondance au-delà du territoire ou de la communauté.

Emmanuel Brunet-Jailly (Science politique, University of Victoria, Bristish Columbia)
Intégration économique, flux marchands et frontières en Amérique du Nord et dans l’Union européenne

La globalisation et l’intégration économique en Europe et en Amérique du Nord ont fourni aux chercheurs de nombreux éléments suggérant que ces processus devaient conduire à la fin de l’État-nation. Certains chercheurs ont défendu l’idée que les « espaces lieux » sont remplacés/déplacés par des « espaces flux ». Par exemple, Manuel Castell écrit que « dépassé par les réseaux de richesses, de pouvoir et d’information propres à la globalisation, l’État-nation a perdu une bonne part de sa souveraineté. » Cependant, des économistes, tels Loesch ou Helliwell, continuent d’insister sur le fait que les frontières accroissent les coûts et constituent des barrières au commerce. Dans ce papier, je montrerai que, compte-tenu du lien étroit entre que  les frontières établissent entre les marchés et le politique, les flux marchands jouent un rôle majeur dans la définition et la structuration des frontières ; les frontières sont ainsi pliées, tordues et remodelées par les forces et les flux marchands.

Swanie Potot (Sociologue, URMIS, CNRS)
Des migrants au service de l’économie monde ?

La frontière est rendue visible par les barrières érigées autour des Etats, pour protéger leur territoire de l’entrée d’indésirables. Cependant,  elle s’exprime au-delà en continuant à distinguer, à l’intérieur même de l’espace national, ceux dont la présence est pleinement légitime de ceux qui ne sont que tolérés, acceptés sous certaines conditions mais toujours maintenus en dehors de la communauté nationale. L’intervention proposée portera sur les travailleurs migrants contemporains.  De plus en plus mobiles, ils éprouvent cette limite au quotidien, non seulement lors de leur multiples déplacements mais également lorsqu’en France, leurs conditions de travail et les lois supposées les protéger relèvent de mesures dérogatoires, les distinguant encore du reste des travailleurs. Après être revenue sur les profondes mutations apparues dans les migrations de travail en Europe depuis une vingtaine d’années, je présenterai trois figures de travailleurs dont le statut d’étranger crée les conditions d’une exploitation particulière mise au service de l’économie mondialisée. Je m’arrêterai ainsi sur les étrangers recrutés en contrat temporaire (saisonniers, CDD, Stagiaires), les travailleurs dits sans-papiers et les salariés détachés dans le cadre de la prestation de service internationale, afin d’explorer ainsi la frontière « de l’intérieur » et ses usages par divers acteurs.

Laurence Pillant (Géographe, TELEMME, AMU)
Du formel à l’informel : la continuité du système de contrôle migratoire à la frontière gréco-turque

L’étude de l’économie frontalière s’est avérée être un outil méthodologique majeur dans l’approche et la compréhension du contrôle migratoire à la frontière gréco-turque. Mais au-delà de ce seul aspect, son analyse montre que les différentes activités formelles et informelles qui constituent le contrôle migratoire et gravitent autour, sont étroitement liées et participent ensemble de la mise à l’écart des migrants de la société locale.

Cédric Parizot (Anthropologue, IMéRA, IREMAM, CNRS/AMU)       
Trafiquants et gardes frontières : confusion ou synchronisation ? Le cas israélo-palestinien

Cette présentation propose une ethnographie des réseaux informels assurant le passage clandestin des ouvriers palestiniens de Cisjordanie vers Israël entre 2007 et 2010. Les travaux qui ont documenté ce phénomène se sont essentiellement concentrés sur le vécu et les perceptions des ouvriers condamnés à la clandestinité. Ils insistent sur leur souffrance ou, au contraire, valorisent leur capacité à résister et à survivre dans un contexte de précarité et d’injustices accrues. Sans négliger la souffrance des Palestiniens, je m’efforcerai de dépasser ces approches : comme le soulignait Lila Abu Lughod (1990), l’idée de résistance tend à surestimer le pouvoir des populations opprimées. Elle favorise, par ailleurs, une construction binaire du conflit. Opposant, terme à terme, les Israéliens aux Palestiniens, elle évacue de multiples acteurs et interactions intermédiaires jouant pourtant des rôles significatifs. Enfin, en se concentrant uniquement sur la souffrance des Palestiniens, on prend le risque de se limiter à une sociologie du pouvoir israélien. Déplaçant le regard des ouvriers vers les passeurs, je propose une ethnographie du trafic d’ouvriers prenant en compte l’ensemble de ces acteurs. Je montrerai ainsi comment des Palestiniens, des Israéliens interviennent au quotidien, formellement et informellement, pour faciliter le passage des Palestiniens de Cisjordanie vers Israël. S’étant appropriés les failles et les opportunités créées par le régime de contrôle israélien, ils entretiennent une « économie du passage » ; ils participent ainsi au fonctionnement et aux réajustements du régime de mobilité israélien aux côté des autorités israéliennes.

Partenaires

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Image: Heidrun Friese, Partire 2, 2009

Atelier 6b : Le temps et l’argent de la frontière

7 mars 2014
Maison méditerranéenne des sciences de l’Homme, Aix en Provence

Organisation: Cédric Parizot(IREMAM, IMéRA, CNRS, AMU)

Le temps et l’argent de la frontière

Mariya Polner (political scientist, research analyst, WCO Research and Strategies Unit) et Thomas Cantens (anthropologue, administrateur à l’Unité Recherche et Stratégies de l’OMD et membre du Centre Norbert Elias EHESS-Marseille)

A partir d’une réflexion sur les projets d’aide publique au développement et les travaux de normalisation et de régulation du commerce menés dans les institutions internationales, la communication étudiera le passage des marchandises en frontière, en particulier dans les pays en développement. Bien que présentée souvent dans le cadre contemporain de la globalisation et attachée aux paradigmes du développement, la flexibilité accordée au passage des marchandises est ancienne, liée à la circulation et l’accumulation de richesses et la représentation de l’abondance au-delà du territoire ou de la communauté.

Partenariat

IMéRA (Aix-Marseille Université), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman, Laboratoire Méditerranéen de Sociologie, Ecole supérieure d’Art,
Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées, Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Photo: Thomas Cantens, Limani, Cameroun, 2013

Atelier 6 : Décoder la frontière

13 et 14 février 2013,
Ecole supérieur d’art d’Aix en Provence,
Rue Emile Tavan, Aix en Provence

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS-AMU), Jean Cristofol (Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence)

Ce séminaire porte sur l’impact de l’escalade sécuritaire et technologique sur le fonctionnement et les manifestations des frontières des Etats au cours des 20 dernières années. Cette réflexion s’opérera dans un cadre transdisciplinaire associant des chercheurs en sciences humaines (historiens, sociologues, anthropologues, géographes, philosophes, politologues), des chercheurs en sciences dures (intelligence artificielle, informatique) et des artistes (webart, hypermedia, etc.). Dans le premier atelier, chercheurs, architectes et artistes discuteront des technologies de plus en plus sophistiquées (robots, drones, technoscience, biométrie) qui sont déployées le long des frontières mais aussi en deçà et au-delà de ces espaces. La perspective socio-historique adoptée dans le second atelier permettra de mieux comprendre dans quels processus s’inscrit l’émergence de ces technologies. Enfin, le troisième atelier présentera à travers deux œuvres transdisciplinaires et une intervention le caractère profondément envahissant et diffus des contrôles aux frontières. Entre biographies et codes, la frontière semble s’immiscer jusque dans les corps des individus, les images et les flux de données numériques.

Drones, robots & technoscience

Noël Sharkey (artificial intelligence, University of Sheffield)
Les robots à la frontière: nouvelles armes, nouveaux problèmes?

RYBN.ORG (collectif artistique, Paris)
Antidatamining : frontières à l’épreuve de l’économie financiarisée

Charles Heller (filmmaker and writer, Center for Research Architecture, Goldsmiths, University of London)
Forensic Oceanography: subverting surveillance, demanding accountability

Klaus-Gerd Giesen (science politique, Université d’Auvergne, Clermont Ferrand)
The biopolitical normalization of the human: a fractal regulation beyond and below borders” from antiAtlas of Borders

De l’identification à la biométrie / From Identification to Biometry

Martine Kaluszynski, (socio-historienne, PACTE, CNRS, Grenoble)
Du carnet anthropométrique au passeport biométrique : l’identification, une pratique constructrice de l’Etat (19e-21e siècle)

Hidefumi Nishiyama (politics and International Studies, University of Warwick)
« Corps frontières » dans le Japon impérial et au-delà

Gabriel Popescu (geographer, Indiana University, South Bend)
Border bodyscapes and precarious life from antiAtlas of Borders

Emmanuel Brunet-Jailly (science politique, University of Victoria, Bristish Columbia)
Frontières, théorie et sécurité: la frontière, ici, là et partout

Frontières intrusives/Pervasive borders

Joana Moll (new media artist, Barcelone)
Move and get shot: la surveillance par les réseaux sociaux le long de la frontière américano mexicaine

Nick Mai (anthropologist, London Metropolitan University)
Emborder: la biographisation de la frontière

Jean Cristofol (philosophe, Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence)
Flux, images et frontières

Résumés

Noël Sharkey (artificial intelligence, University of Sheffield)
Les robots à la frontière: nouvelles armes, nouveaux problèmes?

Les premières décennies du 21e siècle seront considérées comme l’âge des véhicules sans pilote. Depuis 2002, l’utilisation des drones dans les zones de guerre a considérablement augmenté. Beaucoup d’entre eux sont armés et contrôlés à des milliers de kilomètres de leurs zones d’action. La technologie a proliféré au point qu’ils sont utilisés dans au moins 76 pays. Les drones représentent un énorme marché international. Les développements se sont étendus aux navires, aux sous-marins sans pilote, aux voitures et aux robots terrestres, qui commencent à faire leur apparition dans le civil au sein de la police et des organismes de protection des frontières. Cette présentation examinera l’évolution de la technologie et ouvrira une discussion sur la façon dont les drones pourraient être appliqués à la surveillance future des frontières pour garder, exclure ou enfermer les populations.

RYBN.ORG (collectif artistique, Paris)
Antidatamining : frontières à l’épreuve de l’économie financiarisée

Le modèle de gouvernance de l’État-Nation est aujourd’hui mis en concurrence par les méthodes de gestion des flux issues du capitalisme financiarisé. Nombre d’événements récents en témoignent : nomination de Mario Monti en Italie, de Loukas Papadimos en Grèce, crise des dettes souveraines, etc. Ce déplacement du pouvoir nécessite de redéfinir et de retracer les cartes du conflit en cours, en réévaluant les notions d’état, de  sécurité, de frontière, de législation, de suffrage, de droit du travail, d’impôt, de marchés. Le workshop propose de répertorier les lignes de fracture entre capitalisme financiarisé et État-Nation, et de dresser l’inventaire des techniques et technologies qui participent de cette reconfiguration.

Charles Heller (filmmaker and writer, Center for Research Architecture, Goldsmiths, University of London)
Forensic Oceanography: subverting surveillance, demanding accountability

Je présenterai ici une partie du travail que nous avons développé sur les incidents touchant les migrants en mer et les outils que nous avons développés pour en rendre compte dans le projet de recherche Océanographie médico-légale. Je commencerai par contextualiser ce projet en esquissant dans les grandes lignes la tension entre la gouvernance des flux et le partitionnement des mers qui caractérise la gouvernance maritime, l’importance géopolitique de la Méditerranée et les conditions dans lesquelles sont mises en oeuvre les tentatives de contrôle des frontières maritimes de l’UE. J’aborderai ensuite plus en détail les systèmes de détection -radars, données automatisées de suivi des navires, images satellites – qui sont au cœur du “triage des mobilités” aux frontières dans les zones à forte densité de circulation. Je montrerai que, malgré leur sophistication, ces technologies de détection atteignent leurs limites lorsqu’elles sont appliquées au contrôle des flux de migrants illégaux. De fait, la militarisation et la technologisation du contrôle de la migration en mer ont été particulièrement meurtrières – plus de 13.000 cas de migrants morts ont été dénombrés par les ONG. Enfin, je décrirai notre enquête sur un incident en mer qui nous a permis d’aller au-delà du simple comptage des décès de migrants en mer pour les dénoncer et demander des comptes.

Klaus-Gerd Giesen (science politique, Université d’Auvergne, Clermont Ferrand)
The biopolitical normalization of the human: a fractal regulation beyond and below borders” from antiAtlas of Borders

La communication tente d’appréhender les tentatives de régulation, à l’échelle mondiale, de la technoscience génétique appliquée à l’humain. Partant du constat de la crise de l’humanisme dominant, elle examine le basculement dans l’ère du « tout génétique » biologisant, et ses justifications idéologiques. On observe notamment l’instrumentalisation des nombreux comités de bioéthique et d’évaluation technologique (aux niveaux nationaux, supranationaux ou internationaux) au service d’une normalisation de l’humain qui joue précisément sur les frontières pour créer de multiples réseaux institutionnels publics, agencés sous forme de configurations polymorphes, discontinues et complémentaires, se constituant ou se défaisant au gré des nécessités et des besoins concrets de légitimation politique.

Martine Kaluszynski, (socio-historienne, PACTE, CNRS, Grenoble)
Du carnet anthropométrique au passeport biométrique : l’identification, une pratique constructrice de l’Etat (19e-21e siècles) 

Les technologies du contrôle social, les instruments d’identification sont de véritables techniques de gouvernement qui vont contribuer à construire l’Etat Nation. La méthode anthropométrique permit pour la première fois d’établir scientifiquement l’identité des délinquants et de sanctionner les récidivistes. L’établissement rigoureux des signalements des prévenus, juxtaposé à une technique rationnelle de classement, aboutit à l’instauration d’un fichier judiciaire élaboré et efficace. Ces éléments forment la clef de voûte du système anthropométrique. Le cheminement de cette méthode, son application, ses résultats et ses conséquences vont nous montrer à quel point elle fut une pratique permettant d’établir dans un premier temps le maintien de l’ordre et la répression, et dans un second temps l’instauration d’une technique (et « politique ») républicaine de gouvernement fondée sur l’identité. Ce processus général de rationalisation des techniques policières d’identification des individus (Bertillonnage, dactyloscopie,…) connaît une profonde mutation en France à partir du dernier tiers du XIXe siècle. Elle aboutit notamment à l’élaboration et la proposition du projet INES (Identité nationale électronique sécurisée) par le ministère de l’Intérieur en 2005. Cette intensification des technologies traduit une réorganisation des formes d’expression de la puissance publique. Elle conduit à s’interroger sur les conséquences de sa recherche d’une nouvelle efficacité et légitimité qui la conduit à s’ancrer de plus en plus dans la société elle-même et à s’appuyer sur les développements technologiques qui brouillent les frontières, pourtant classiques, entre sécurité et liberté, entre police et justice ou entre répression et surveillance.

Hidefumi Nishiyama (politics and International Studies, University of Warwick)
« Corps frontières » dans le Japon impérial et au-delà

En 1926, des scientifiques japonais menés par Furuhata Tanemoto, un professeur de science médico-légale et plus tard le chef de l’Institut national de recherches scientifiques de police, ont commencé à classifier des groupes raciaux et ethniques à partir de leurs empreintes digitales. Cette recherche, ou ce que Furuhata appelle “l’index des empreintes digitales”, a servi de support pour établir une corrélation entre des modèles d’empreintes digitales et des groupes raciaux et ethniques catégorisés en fonction de la hiérarchie des civilisations définie par  l’Empire : de ceux assimilés à des “civilisé” et “de type japonais” aux “primitifs” considérés comme “dangereux”. A partir de cette étude de cas historique sur le traitement des empreintes digitales entre les années 1920 et les années 1930, ce papier montre que les corps sont devenus des espaces de confinement et de délimitation, où l’on distingue les individus en fonction de leurs prédispositions à la criminalité. La spatialisation du corps est double: d’une part, ils sont spatialisés parce que les attributs corporels deviennent la sphère de production d’une identité particulière; d’autre part, ils sont territorialisés dans des lieux géographiques et dans le spectre de pouvoirs politiques. En historicisant l’identification biométrique, cet article s’attache à mettre en lumière les liens entre identité et identification dans le cadre des contrôles frontaliers contemporains, au sein desquels l’in/désirabilité des corps est continuellement calculée de manière à la fois similaire et distincte.

Gabriel Popescu (geographer, Indiana University, South Bend)
Border bodyscapes and precarious life from antiAtlas of Borders

Les stratégies de gestion des risques associées à la sécurisation de la mobilité transnationale ont déclenché une course technologique favorisant un processus d’intégration des frontières dans le corps humain. La croyance dominante est que les risques mobiles peuvent être évalués et éliminés dans le processus même de mobilité afin que les flux et le trafics ne soient pas perturbés à la frontière. Ainsi, les corps sont imaginés comme des espaces d’inscription de la frontière. Cette logique du pouvoir repose sur un point de vue prédominant dans les sciences naturelles selon lequel le corps est perçu comme un objet matériel pouvant être identifié numériquement à l’aide de la technologie. Les technologies biométriques, entre autres, sont utilisées pour acquérir des connaissances complètes sur les corps mobiles avant même qu’ils ne traversent les frontières étatiques. Ces données corporelles sont utilisées pour classer les individus en termes de bonnes et de mauvaises mobilités. L’objectif est de produire des catégories qui se prêtent au calcul de risques. Cette connaissance du corps génère inévitablement de nouvelles formes de pouvoir qui agissent sur des espaces à la fois intimes et mobiles. Cette logique de contrôle spatial a tendance à imaginer l’automatisation des frontières comme une panacée permettant de concilier la mobilité sans entrave et la sécurité du territoire. Pourtant, contrairement aux affirmations selon lesquelles les technologies numériques aux frontières aideraient à la prise de décision humaine, la manière dont elles sont mises en œuvre suggère que l’automatisation des frontières cherche à générer de nouveaux automatismes dans la prise de décision qui réduiraient l’intervention humaine. Il s’agira ici de comprendre si la biométrie peut effectivement réduire l’incertitude pour rendre la vie plus sûre ou si au contraire elle crée plus d’incertitude, rendant les vies des individus encore plus précaires.

Emmanuel Brunet-Jailly (science politique, University of Victoria, Bristish Columbia)
Frontières, théorie et sécurité: la frontière, ici, là et partout

Les 18e et 19e siècles ont été des époques où les sociétés disciplinaires ont mis en place un type de pouvoir, un ensemble d’instruments, de techniques, de procédures, des niveaux d’application et des technologies qui étaient anti nomade. L’ère d’aujourd’hui est celle du contrôle. Il s’agit d’un moment où un type de pouvoir et de technique permet au corps de devenir un mot de passe dans un flux codé, permettant l’accès à la mobilité et au statut. Parallèlement, la sécurité qui a été traditionnellement conçue comme mono-sectorielle et axée sur l’armée, devient multi-sectorielle. Ceci suggère l’importance de penser clairement l’équilibre entre les secteurs, les types de menaces, les acteurs et les éléments qui, ensemble, ont des implications importantes pour les politiques de sécurité. Les politiques de sécurité sont plus complexes, car les problèmes identifiés comme des menaces sécuritaires sont également plus diversifiés: ils sont pluriels et multiformes. Les politiques de contrôle aux frontières sont aux prises avec ces nouvelles dimensions complexes de la sécurité. En effet, cette nouvelle complexité se traduit de façons diverses et inégales aux frontières des États et aux niveaux des politiques frontalières ; elle affecte d’ailleurs leurs relations de voisinage et les relations internationales. Cette complexité accrue en matière de sécurité a également des conséquences pour la définition des frontières et des régions frontalières – c’est la frontière ici, là, partout.

Joana Moll (new media artist, Barcelone)
Move and get shot: la surveillance par les réseaux sociaux le long de la frontière américano mexicaine

The Texas Border et AZ: move and get shot sont deux œuvres d’art numérique qui explorent le phénomène de la surveillance sur Internet effectué par des civils à la frontière entre le Mexique et les États-Unis à partir de plateformes mises en place par les autorités américaines. Beaucoup de ces plateformes en ligne sont apparues lors du développement des réseaux sociaux dont la structure a été adoptée comme une alternative moins chère et plus efficace pour surveiller la frontière. Ainsi, l’activité de loisir est devenue un outil pour la militarisation de la société civile. Cette présentation exposera le processus de recherche derrière les deux œuvres d’art et analysera l’évolution de certaines de ces plateformes internet depuis leur création jusqu’à nos jours.

Nick Mai (anthropologist, London Metropolitan University)
Emborders: la biographisation de la frontière

En raison des politiques plus restrictives encadrant les migrations mondiales, l’octroi de l’asile et la protection sociale des groupes de migrants vulnérables ont généré de nouvelles frontières biographiques entre l’Occident et le reste du monde. Au sein de la gouvernance humanitaire de la migration, le genre et la sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques à travers lesquels les hiérarchies d’appartenance et les obstacles à la mobilité sont renforcés. L’accent mis sur la dimension sexuelle pour construire et pour contrôler des groupes de migrants définis comme vulnérables peut être définie comme un «humanitarisme sexuel». Le projet de recherche cinématographique Emborders (l’incorporations de frontières biographiques) problématise l’efficacité et la portée de l’humanitarisme sexuel en comparant les expériences de deux groupes de migrants qui sont abordées comme de potentielles «victimes cibles »: des migrants qui travaillent dans l’industrie du sexe et des migrants appartenant à des minorités sexuelles. Emborders rassemble les récits de victimisation et d’émancipation développés par les migrants dans le cadre d’entretiens de recherche originaux et d’observations ethnographiques.

Jean Cristofol (philosophe, Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence)
Flux, images et frontières 

Les images sont des moments saisis, partagés, modifiés dans la circulation des flux d’information. De ce fait elles contribuent à constituer la matière même de notre expérience quotidienne, non seulement comme des objets que nous rencontrons et qui véhiculent du sens, mais comme la réalité mouvante de l’environnement dans lequel nous nous trouvons. La place et le lieu des images a donc changé, comme la relation des images aux lieux. Il ne s’agit plus seulement de parler de l’image du monde, ni du monde des images, mais des modes par lesquels s’effectue l’interpénétration du monde et de l’image. Cette nouvelle place de l’image est en relation avec la façon dont on peut penser l’espace des flux informationnels. Longtemps, on a pensé la relation au cyberespace comme à une sphère seconde, un autre monde dans le monde dans lequel il était devenu possible de s’immerger. Un monde sans frontière qui se déploierait au delà de l’espace géographique, ou dans lequel les formes de séparation et de clôture seraient d’une autre nature. Il faut bien constater que ce qui se passe est sensiblement différent et que l’immersion a pris une toute autre forme, celle de l’intrusion ou de ce qu’on peut appeler par emprunt à l’anglais la « pervasion ». C’est de la relation entre image, immersion et pervasion qu’il va donc être question.

Partenariats

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Affiche et photographies : Myriam Boyer, 2013

ISPABEMA: Israel Palestine below Maps

Une cartographie alternative des espaces israélo-palestiniens

Fin 2012, afin de renouveler le traitement de ses données de terrain récoltées entre 2005 et 2010 dans les espaces israélo-palestiniens, Cédric Parizot (anthropologue) s’associe avec une équipe transdisciplinaire composée d’un artiste numérique, spécialisé dans la visualisation des données complexes, Wouter Van Den Broeck, et un sociologue des réseaux, Antoine Vion (LEST, Aix Marseille Université/CNRS). L’objectif est d’élaborer une première base de données pour saisir et visualiser les interactions que l’anthropologue a observées pendant ses enquêtes sur les réseaux de passeurs facilitant le passage des ouvriers palestiniens en Israël.

Les premiers tests de ce système de visualisation ont été présentés lors du colloque de l’antiAtlas des frontières (octobre 2013) à Aix en Provence et en juin 2014 au Congrès Mondial de l’Association for Borderlands Studies de Joensuu (Finlande). Les graphes réalisés avaient permis d’exposer et d’analyser près de 1000 interactions observées au cours de deux mois de terrain en 2005. Le fait de passer de l’observation fine et riche fournie par l’ethnographie à une abstraction graphique permettant de visualiser simultanément plusieurs centaines d’interactions, avait permis de valider un certain nombre d’hypothèses de recherche mais surtout de visualiser des agencements dont le chercheur n’avait pas pris conscience à la seule lecture de ses carnets de notes.

De la carte à un outil de visualisation sur mesure

Compte tenu de l’intérêt de ces premiers résultats, nous avons décidé de poursuivre le projet entre le printemps 2014 et 2015. Nous avions trois objectifs : (1) créer un outil sur mesure pour renouveler l’analyse des données consignées dans mes carnets de notes ; (2) mettre en image une cartographie alternative des espaces israélo-palestiniens et de leurs frontières ; (2) et enfin, (3) proposer un logiciel mobilisable par d’autres chercheurs en sciences humaines dans le traitement des données réseaux.

Wouter Van Den Broeck n’ayant pu poursuivre, l’équipe s’est recomposée autour de Cédric Parizot, Antoine Vion, un autre artiste numérique et programmeur, Guillaume Stagnaro (Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence) ainsi qu’un géomaticien, Mathieu Coulon (LAMES, CNRS/Aix Marseille Université).

Intitulé ISPABEMA (Israel Palestine below Maps), ce projet a permis de constituer un premier prototype de ce logiciel en novembre 2014 au salon de la valorisation en sciences humaines et sociales porté par le LabexMed à Marseille ; puis nous avons fait un dépôt d’invention auprès de la SATT sud-est et Aix Marseille université en janvier 2015. Enfin en juin 2015, nous avons présenté un prototype plus abouti au salon Innovative SHS qui s’est tenu à la Villette à Paris.

Toutefois, faute de financements, nous n’avons pu mener le projet jusqu’au bout. Le projet reste pour l’instant en suspens.

Equipe

Cédric Parizot, anthropologue ; Mathieu Coulon, géomaticien ; Guillaume Stagnaro, artiste numérique et programmeur ; Wouter Van Den Broeck; Antoine Vion, sociologue

Partenariat

Institut d’Etudes et de Recherche sur le Monde Arabe et Musulman
Laboratoire Méditerranéen de Sociologie
Laboratoire d’Economie et de Sociologie du Travail
Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence
Projet LabexMed (Fondation A*MIDEX)
Aix Marseille Université
Centre National de la Recherche Scientifique

Atelier 5 : Bilan de l’année 2011-2012

6 et 7 décembre 2012
Maison des Astronomes, IMéRA,
2, place Le Verrier
13004 Marseille

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA/CNRS-IREMAM)

Ce séminaire de recherche s’articulera autour de trois axes : un bilan des réflexions développées dans notre programme au cours de l’année 2011-2012 ; la présentation d’approches transdisciplinaires de la frontière ; et enfin, la préparation de l’exposition l’Anti Atlas des frontières qui se tiendra au Musée des Tapisseries d’Aix-en-Provence en octobre 2013.

Retour sur les ateliers de la première année

Antoine Vion (sociologue, LEST, AMU)
Réseaux et frontières

Stéphane Rosière (géographe, HABITER, Université de Reims)
Matérialisation, dématérialisation des frontières

Anne Laure Amilhat-Szary (PACTE, Université Joseph Fournier, Grenoble)
Aux frontières de l’art et de la science

Explorations transdisciplinaires

Cédric Parizot (IMéRA, IREMAM, CNRS), Antoine Vion (Sociologue, LEST, AMU), Wouter Van den Broeck (Data visualization, ISI Foundation, Turin, Italie; Addith.be)
De la contrebande à la visualisation des réseaux: Cartographier un parcours anthropologique entre Israël et les Territoires occupés palestiniens (2005-2010)

Douglas Edric Stanley (Hypemédia, Game-Art, Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence)
Vous avez été mangé par une grue ! Navigation spatiale et jeux vidéos

Olivier Clochard (Géographe, MIGRINTER, CNRS, ADES/Terre Ferme)
Où est la frontière?

Frontières, images, exposition

Jean Cristofol (Philosophe, Ecole Supérieure d’Art d’Aix en Provence)
Art et représentation

Isabelle Arvers (commissaire de l’exposition l’antiAtlas des Frontières)
Présentation du scénario de l’exposition l’antiAtlas des Frontières (octobre- novembre 2013)

Partenariats

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Photo: Myriam Boyer, 2012

Atelier 4 : Représenter les frontières

6-8 juin 2012
Maison des astronomes
IMéRA
2, place Le Verrier
13004 Marseille

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA/CNRS-IREMAM), Anne Laure Amilhat-Szary (PACTE, Université Joseph Fournier, Grenoble), Isabelle Arvers (Curatrice indépendante, Marseille), Jean Cristofol (École Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence), Nicola Mai (IMéRA/London Metropolitan University)

L’objectif de ce séminaire de recherche est d’ouvrir un chantier de réflexion sur les difficultés, modalités, voire impossibilités de représenter les frontières dans leur complexité (éclatement, flexibilisation, frontières ponctiformes, virtualisation, etc.), leurs vécus de plus en plus asymétriques, et les nouveaux modes de contournement qu’inventent les populations.

6 Juin : Session 1

Nicola Mai (Anthropologist, IMéRA/London Metropolitan University)
Présentation en exclusivité du projet film / recherche Emborders : problématiser l’humanitarisme sexuel à travers la création d’un film expérimental

Heath Bunting
Atelier de construction d’une identité nouvelle

7 juin: Session 2 – Cartographier la frontière et ses transgressions

Olivier Denert (Secrétaire Général de la Mission Opérationnelle Transfrontalière)
Cartographie des régions transfrontalières, présentation de l’Atlas de la MOT : Contexte, méthode, conséquences et usages

Aurélie Arnaud & Michel Chiappero (Institut d’Urbanisme et d’Aménagement Régional, AMU, laboratoire LIEU, Marseille)
Cartographie d’objets complexes : la frontière

Ron Terrada (Artiste, Canada)
Voir l’autre côté du signe

7 juin : Session 3 – Pour une approche non-représentationnelle des frontières

Anne-Laure Amilhat Szary (PACTE, Université Joseph Fournier, Grenoble)
Incorporer la frontière : une approche non représentationnelle des frontières

Cédric Parizot (IMéRA/CNRS-IREMAM) et Ariel Handel (Tel Aviv University)
Indexer des espaces incertains : les Palestiniens de Cisjordanie confrontés aux systèmes de contrôle israéliens (2005-2010)

Jérôme Epsztein (INMED-INSERM U901)
Des réseaux neuronaux pour représenter l’espace et ses frontières

8 juin: Session 4 – La frontière en scène

Patrick Bernier et Olive Martin (Artistes, France)
À travers champs: une certaine façon de faire l’école buissonnière

Norma Iglesias Prieto (San Diego State University)
‘Transborderism’ and Social Imaginary in the U.S.-Mexican Border from antiAtlas of Borders

Atelier LIMO (Simon Brunel & Nicolas Pannetier, collectif d’artistes-architectes et cinéastes, Berlin)
« Border Speaking » : de la notion abstraite à l’espace de projet

7 juin : Table ronde – Transgresser la recherche sur les frontières

Quelles premières conclusions sur le possible renouvellement des analyses frontalières peut-on tracer à partir de cette première année de dialogues méthodologiques entre sciences, technologies représentations et art ?

The panelists will summarize and discuss the outcomes of the workshops that were previously held in the context of the ‘Borders in the 21st Century’ transdisciplinary project. These workshops address strategic issues such as the role of networks, technology and dynamics of materialization / dematerialization in the transformation and representation of borders in contemporary times. Altogether, the project shows that formal and experimental scientific and artistic theories, models and techniques provide useful conceptualization tools that can productively be intersected with social science analyses. These innovative conceptualizations were presented to people involved in the control and management of borders (customs authorities, government officials, security industrials or military representatives) and were recognized as useful tool to discuss the practical, social, political and ethical implications of the different forms of contemporary border transformations examined in the context of the project. They constitute important steps toward the publication of an Anti-Atlas of Borders at the Turn of the 21st Century, an initiative that will showcase the outcomes of the ‘Borders in the 21st Century’ transdisciplinary project through an innovative art/science platform, including a book, an interactive website and an exhibition.

Résumés / Abstracts

Nicola Mai (Anthropologist, IMéRA/London Metropolitan University)
Emborders : problématiser l’humanitarisme sexuel par le cinéma expérimental

L’augmentation et la diversification contemporaines des flux migratoires à l’échelle mondiale coïncident avec l’apparition de formes de gouvernance humanitaire. Celles-ci gèrent des groupes de migrants «indésirables», qui sont stratégiquement construits comme vulnérables. Parce que des politiques plus restrictives encadrent les migrations mondiales, l’octroi de l’asile et la protection sociale des groupes de migrants vulnérables sont devenus de nouvelles frontières corporelles entre l’Occident et le reste du monde. Des droits fondamentaux sont attribués sur la base de la performance dans le répertoire de ‘vraie victime’, dans lequel la mise en scène du corps souffrant du migrant devient un outil stratégique pour susciter la compassion et la solidarité. Dans la gouvernance humanitaire globalisée des migrations, le genre et la sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques. A travers ces répertoires, les hiérarchies entre les origines ethniques et les classes sociales, ainsi que les barrières à la momobilité qui y sont associées, se trouvent renforcées. « L’humanitarisme sexuel » peut se définir comme l’accent mis sur la dimension sexuelle pour construire comme vulnérables et contrôler des groupes spécifiques de migrants par des interventions humanitaires.

L’augmentation et la diversification contemporaines des flux migratoires à l’échelle mondiale coïncident avec l’apparition de formes de gouvernance humanitaire. Celles-ci gèrent des groupes de migrants «indésirables», qui sont stratégiquement construits comme vulnérables. Parce que des politiques plus restrictives encadrent les migrations mondiales, l’octroi de l’asile et la protection sociale des groupes de migrants vulnérables sont devenus de nouvelles frontières corporelles entre l’Occident et le reste du monde. Des droits fondamentaux sont attribués sur la base de la performance dans le répertoire de ‘vraie victime’, dans lequel la mise en scène du corps souffrant du migrant devient un outil stratégique pour susciter la compassion et la solidarité. Dans la gouvernance humanitaire globalisée des migrations, le genre et la sexualité sont devenus des répertoires narratifs stratégiques. A travers ces répertoires, les hiérarchies entre les origines ethniques et les classes sociales, ainsi que les barrières à la mobilité qui y sont associées, se trouvent renforcées. « L’humanitarisme sexuel » peut se définir comme l’accent mis sur la dimension sexuelle pour construire comme vulnérables et contrôler des groupes spécifiques de migrants par des interventions humanitaires.

Le film et projet de recherche Emborders problématise l’efficacité et les finalités de l’humanitarisme sexuel en comparant les expériences de deux groupes de migrants: ceux qui travaillent dans l’industrie du sexe et ceux qui appartiennent à des minorités sexuelles. Les deux groupes sont respectivement ciblés par l’humanitarisme sexuel comme victimes potentielles de traite et comme réfugiés sexuels. Emborders assemble les récits de victimisation et d’émancipation que les migrants des deux groupes produisent dans le cadre des interviews de recherche. Le projet présente de vraies histories de vie et de vraies personnes, qui seront jouées par des acteurs pour protéger l’identité des interviewés et pour reproduire la dimension performative qui caractérise leur auto-représentation dans le contexte des interviews. Emborders est une mise en scène scientifique des histoires de vie des migrants ciblés par l’humanitarisme sexuel. Il est également une réflexion artistique sur la nature intrinsèquement fictionnelle de toute narration de soi. En utilisant des acteurs pour mettre en scène de vraies personnes et de vraies histoires de vie, le projet problématise ce qui constitue une réalité crédible et acceptable en termes scientifiques, filmiques et humanitaire.

Heath Bunting
Atelier de construction d’une identité nouvelle

Heath Bunting présentera tout d’abord le projet Status, initié en 2004, et qui propose un système numérique de production d’identités. Il se compose d’une base de données contenant plus de 5.000 entrées sur les différents éléments d’identification d’une personne. Ce système est disponible sur le site irational.org. A partir de l’interconnexion de toutes ces données, il produit des cartes représentant des réseaux et permettant de générer un statut social. L’ensemble de nos actes et déplacements sont tracés. Pour prendre un abonnement à la bibliothèque, une carte de transport ou encore faire des achats en ligne, nous remplissons en permanence des formulaires où nous laissons de manière anodine des données nous concernant: nom, adresse, numéro de carte bancaire, téléphone… En combinant l’ensemble des données disponibles sur une personne, il est alors possible de lui attribuer un statut social. Status révèle comment de telles constructions influencent ensuite notre mobilité au sein de l’espace social en ligne ou hors ligne. Ensuite, l’artiste organisera un atelier de réflexion avec le public pour tester les multiples possibilités de jeu et de production de nouvelles identités.

Olivier Denert (Secrétaire Général de la Mission Opérationnelle Transfrontalière)
Cartographie des régions transfrontalières, présentation de l’Atlas de la MOT : Contexte, méthode, conséquences et usages

La MOT a publié sa première carte transfrontalière en 1999, qui donnait pour la première à voir les flux de travailleurs frontaliers entre la France et ses pays voisins. Un atlas comportant une centaine de planches a été publié en 2001 puis augmenté et réédité en 2007, ses cartes sont depuis lors régulièrement remises à jour. Il s’agit de montrer la portée novatrice, tant sur le plan technique que politique d’une telle démarche, les nombreuses difficultés techniques auxquelles est confronté tout producteur et concepteur de données transfrontalières dans leur dimension tant statistique et cartographique, la voie ouverte par ce type de document dont l’approche est restée jusqu’à présent sans équivalent en France ni dans les différents pays européens, et les différents usages et impacts d’un tel outil sur la connaissance transfrontalière.

Aurélie Arnaud & Michel Chiappero (Institut d’Urbanisme et d’Aménagement Régional, AMU, laboratoire LIEU, Marseille)
Cartographie d’objets complexes : la frontière

La production cartographique a considérablement évolué ces dernières années, notamment avec l’avènement de la géovisualisation. Cependant, la carte statique reste un moyen de communication encore très prisé pour représenter les phénomènes de transfrontaliarités : par exemple les Atlas du Monde et les atlas de l’atelier de cartographie de SciencePo Paris. Hélas, ces derniers témoignent d’un manque de réflexion sur la représentation cartographique de l’objet « frontière » qui contient à la fois une dimension temporelle, incertaine, de nombreux attributs thématiques à représenter simultanément, etc. Bien que le langage cartographique édicté par Bertin en 1967 reste valide, un vide sémiologie limite sa représentation. En tenant compte des recherches sur l’organisation de l’information et la représentation cartographique des phénomènes de transfrontaliarités entamées par le projet Hypercarte (Grasland et alii, 2005), nous proposons une étude des représentations cartographiques des transfrontaliarités. Quels thématiques/objets sont traités sur les cartes ? Quelles représentations graphiques sont attribuées à ces objets ? Quels types de légendes sont affectés à ces cartes ? Afin de répondre à notre questionnement nous tenterons dans un premier temps de construire des diagrammes objets/classes génériques à deux territoires transfrontaliers distincts par leur culture, géolocalisation, politique et environnement naturel, mais comportant des similitudes. En effet, dans les deux cas il s’agit d’une échelle internationale terrestre et maritime : les Andes (Chili-Pérou-Bolivie-Argentine) et la Méditerranée. Cette échelle est encore peu étudiée dans ce domaine. La perspective de ces diagrammes est leur utilisation par les cartographes et géomaticiens réalisant des applications sur des zones transfrontalières. Dans un second temps, nous réaliserons un état de l’art critique des représentations des objets frontaliers à travers des références conceptuelles connues en utilisant des grilles de sémiologie graphique (Bertin, 1967 et la grille de Béguin et Pumain, 2000) et une grille chorématique (Brunet, 1986). La perspective de ce travail est d’orienter des choix de représentations intégrables aux diagrammes. L’objectif final de cette recherche est d’entamer une réflexion sur une méthode universelle de cartographie des transfrontaliarités.

Ron Terrada (Artiste, Canada)
Voir l’autre côté du signe

En tant qu’artiste visuel, mon premier matériau est le langage et le texte. Ceux que j’utilise dans mon travail sont considéré comme familiers et peut-être négligés ; je traite la langue comme un ready-made culturel. Partant de propositions soulevées par le pop-art et l’art conceptuel, mon travail a évolué de la peinture sur impression, à la diffusion de musique pop et diverses formes de signalisation – tant au sein de galeries que dans le cadre d’interventions dans la sphère publique. Ce travail n’opère pas uniquement au sein du champ de la consommation et de la circulation spécifique au monde de l’art, mais aussi au sein de champs politiques et sociaux larges et complexes. Pour Ré-imaginer ou ré-imaginer les frontières, ma discussion se concentrera sur la signalisation, et plus spécifiquement sur deux travaux clefs liés aux frontières : Entering City of Vancouver (2002) et You Have Left American Sector (2005). Les deux sont des panneaux de signalisation de type autoroutiers qui cherchent à mettre l’accent sur l’idée de frontière et suggèrent un changement symbolique au sein d’un paysage.

Anne-Laure Amilhat Szary (PACTE, Université Joseph Fournier, Grenoble)
Incorporer la frontière : une approche non représentationnelle des frontières

Au-delà de la critique du regard qu’ont engagée les géographes féministes, c’est l’irruption du corps dans l’analyse du paysage qui est en jeu. C’est l’ensemble du corps humain qui ressent et vit son environnement, et fait le paysage. Certains spécialistes du paysage ont de plus en plus intégré leur parcours et les sensations provoquées par ces itinérances : « Quand je regarde, je vois avec le paysage. »[1] (Wylie 2007). On pourrait aller jusqu’à accorder au paysage une nature performative plus complexe que celle qui consiste à affirmer que le paysage impose le pouvoir. Cette approche, travaillée depuis une dizaine d’années, a récemment été qualifiée d’« approche relationnelle du paysage » (Crouch 2010). Ce terme a l’avantage de mettre en avant l’interaction entre les composantes matérielles et sensorielles de l’environnement, tout en contournant le problème de leur représentation, critiquée pour la distance qu’elle impose. Si ces travaux s’appuient sur la phénoménologie, c’est pour en critiquer un aspect important, la notion même de représentation, mettant en avant le fait que la construction d’un concept à partir de la perception n’a pas forcément besoin de la médiation d’une représentation.
Le paysage illustre cette difficulté : à la fois signifiant et signifié, on ne peut le saisir qu’en dépassant l’analyse sémiologique. Le travail que je mène sur le lien que construisent les artistes visuels contemporains avec les espaces frontaliers s’inscrit dans une démarche que Nigel Thrift (Thrift 2008) a caractérisée sous le terme de « théorie non-représentationnelle ». Une telle démarche de mise en valeur de la valeur pratique du paysage pouvait néanmoins avoir l’inconvénient de gommer presque totalement l’éventuelle finalité esthétique du paysage. Une approche par l’œuvre d’art permet d’accompagner la compréhension du paysage d’une analyse de l’image, sans réduire l’une à l’autre. Je propose ainsi de travailler sur l’image que construit le tracé des frontières-murs ainsi que sur sa transformation par des artistes visuels. Les recherches sur la production culturelle sur les espaces frontaliers permettent ainsi de travailler le statut de l’image-icône-simulacre dans les relations entre espace et pouvoir.

édric Parizot (IMéRA/CNRS-IREMAM) et Ariel Handel (Tel Aviv University)
Indexer des espaces incertains : les Palestiniens de Cisjordanie confrontés aux systèmes de contrôle israéliens (2005-2010)

Depuis le déclenchement de la seconde Intifada (2000), les autorités israéliennes ont introduit un grand degré d’incertitude dans les déplacements quotidiens des Palestiniens. Entre 2000 et 2005, la multiplication et le caractère aléatoire des contrôles déployés par Israël en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, empêchent les Palestiniens de prévoir le temps et l’orientation de leurs trajectoires. Il leur est impossible de se projeter dans une réalité cartographiable. Ces contrôles apparaissent d’autant plus aléatoires que leurs agents ne sont pas toujours visibles. Les tours de guets et systèmes de caméras produisent un effet panoptique. Enfin, le droit de se déplacer n’est jamais acquis. La multiplication des régulations et des autorités chargées de leur application donnent lieu à des injonctions contradictoires fréquentes renforçant le sentiment d’arbitraire. Si les années post-Intifada (2005-2010) connaissent un relâchement relatif de ces systèmes de contrôle, les trajectoires des Palestiniens restent encore marquées par un certain degré d’incertitude.

Les recherches qui ont tenté d’évaluer l’effet ces systèmes de contrôle israéliens sur le rapport à l’espace des Palestiniens sont nombreuses. Si certaines se contentent de postuler l’effet de tel ou tel dispositif (tel que l’effet panoptique), d’autres évaluent cet impact à travers des récits d’expériences extrêmement riches. Cependant, en insistant sur les effets de ces dispositifs plus que sur les réactions et les ajustements des Palestiniens, ces recherches se limitent à une sociologie du pouvoir. En nous concentrant au contraire sur des exemples d’adaptations et de contournement de ces mécanismes de contrôle, nous proposons d’analyser la manière dont les Palestiniens développent des formes alternatives d’indexation de l’espace et de leurs trajectoires. Il ne s’agit pas de négliger l’effet perturbateur des dispositifs de contrôle israéliens sur la vie quotidienne des Palestiniens, mais d’envisager comment des acteurs confrontés à des espaces incertains peuvent réintroduire un degré de certitude et recouvrir une maîtrise relative de leur trajectoire.

Jérôme Epsztein (INMED-INSERM U901)
Des réseaux neuronaux pour représenter l’espace et ses frontières

La façon dont nous nous représentons l’espace ainsi que notre position dans cet espace est un objet de réflexion épistémologique depuis des siècles. Récemment, avec le développement de la psychologie expérimentale et des neurosciences, nous avons commencé à aborder cette question d’un point de vue expérimental. Les travaux réalisés au cours des trente dernières années ont permis de révéler un certain nombre de régions du cerveau et de réseaux de neurones impliqués dans le codage et la mémorisation de l’information spatiale. Les « cellules de lieu » sont des neurones de l’hippocampe, une région située dans le lobe temporal du cerveau, qui sont actifs uniquement lorsqu’un animal se trouve dans un endroit donné de son environnement. Au contraire, l’activité des « cellules de grille» du cortex entorhinal, une autre région du lobe temporal, est modulée de façon périodique selon une matrice de triangles équilatéraux qui couvre tout l’environnement. Les « cellules de direction de la tête » sont actives lorsqu’un animal est orienté dans une direction donnée alors que d’autres neurones sont activés spécifiquement par des frontières géométriques présentes dans l’environnement. L’activité de cet ensemble de cellule pourrait déterminer la façon dont nous nous représentons et mémorisons notre position dans l’espace.

Patrick Bernier et Olive Martin (Artistes, France)
À travers champs: une certaine façon de faire l’école buissonnière

En partant de notre expérience personnelle d’artistes motivés par l’exploration transdisciplinaire et la présentation de plusieurs de nos projets, nous essaierons de partager et d’interroger ce désir de frottement, de métissage de notre champ d’activité, celui de l’art contemporain, avec d’autres, soit proches, comme le cinéma (Manmuswak, film, 16′, 2005), soit plus lointains, comme le droit (Plaidoirie pour une jurisprudence, performance, 45′, 2007)

Norma Iglesias Prieto (San Diego State University)
‘Transborderism’ and Social Imaginary in the U.S.-Mexican Border from antiAtlas of Borders

Mon point de départ est que la frontière – à la fois dans sa dimension géopolitique et symbolique – marque la vie et l’expérience des sujets et que cette condition affecte, à son tour, la manière dont nous représentons la frontière. L’imaginaire social est construit à partir d’une série de représentations sociales qui répondent à différentes conditions de frontière. Mon travail analyse les degrés de transfrontiérisme (transborderism) et leur relation aux niveaux de complexité des représentations sociales à la frontière américano-mexicaine, en particulier dans la région de Tijuana-San Diego. Dans ma présentation, je parlerai tout d’abord de l’énoncé théorique qui fonde la notion de frontière et de transfrontiérisme ; ensuite, j’analyserai différentes expressions culturelles (art visuel, récits oraux, animations cinématographiques) qui montrent différent niveaux de complexité des représentations sociales sur cette frontière particulière.

Atelier LIMO (Simon Brunel & Nicolas Pannetier, collectif d’artistes-architectes et cinéastes, Berlin)
« Border Speaking » : de la notion abstraite à l’espace de projet

Nous proposons dans cette intervention de présenter la méthodologie que nous avons développée pour appréhender l’objet frontière en décortiquant les différentes phases de notre projet « Border Speaking » sur lequel nous avons travaillé de 2006 à 2009. Du parcours initiatique à l’organisation d’événements culturels dans les lieux symboliques de la frontière en passant par le relevé photographique de plus de 200 postes de contrôles, cette présentation pourra s’articuler de la manière suivante:
– appréhender un concept par le parcours > 3 mois de voyage
– représenter en construisant des points de repères > 238 points de frontière
– visible et invisible : la frontière et sa mémoire > le film
– la frontière, espace de projet > ré-interprétation des lieux frontaliers
Ces quatre points seront illustrés par une présentation de la base de données database.atelier-limo.eu, un extrait du film documentaire « La frontière intérieure » et une vidéo de trois minutes présentant le projet « Border Speaking ».

Partenariats

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS

Photographie : Myriam Boyer, 2012

Atelier 3 : Frontières et technologies

19-20 avril 2012
Maison des Astronomes, IMéRA,
2 place Le Verrier
13004 Marseille

Organisation: Cédric Parizot (IMéRA/CNRS-IREMAM), Amaël Cattaruzza (CREC, Saint Cyr-Coëtquidan), Nicola Maï (London Metropolitan University, IMéRA), Gabriel Popescu (Indiana University, South Bend)

L’utilisation de technologies de plus en plus perfectionnées pour contrôler les flux de personnes et de marchandises traversant les frontières est un phénomène largement répandu. Il suffit ainsi de mentionner le lancement du projet Frontières intelligentes ou Barrière virtuelle aux Etats Unis, la centralisation des systèmes de renseignement dans l’espace Schengen, les patrouilles de robots et les barrières de « high-tech » en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés, les robots sentinelles tueurs en Corée du Sud et, enfin, l’adoption internationale des standards du passeport électronique pour avoir quelques exemples du phénomène. Sa mise en place repose sur l’idée largement partagée que ces techniques fournissent des outils plus efficaces pour identifier et stopper les personnes indésirables et suspectes au sein des flux globaux. Le déploiement de ces technologies soulève des questions fondamentales dans la mesure où il contribue aux transformations de la nature et des formes des frontières, des espaces, et des territorialités.

« Frontières intelligentes”: état de l’art

Amaël Cattaruzza (géographe, maître de conférences, École Saint Cyr Coëtquidan)
Contrôle des frontières : la tentation technologique

Mariya Polner (political scientist, research analyst, WCO Research and Strategies Unit)
Technologies de contrôle aux frontières: tendances et formes de développement

Philippe Bonditti (politologue, professeur assistant, IRI/PUC-Rio, Rio de Janeiro, Brésil et chercheur associé au CERI-Sciences Po Paris, France)
Flux et frontières, « Technologisation » des contrôles et traçabilité

Robots and border control / Robots et contrôle frontalier

Sylviane Pascal (Security & Europe Defence Business Development Manager ONERA – The French Aerospace Lab)
Le programme Talos : enjeux et perspective de l’usage de robots terrestres aux frontières

Noel Sharkey (artificial intelligence and robotics, professor, University of Sheffield)
À la limite du ridicule: contrôler nos mouvements à partir du ciel

When things bite back / Quand les choses mordent

Daniel Kopecky (lieutenant-colonel, chef du département relations internationales aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan)
Technologies aux frontières : les limites du système. Retour d’expérience de mission d’expertise en Asie du sud-est

Thomas Cantens (administrateur à l’Unité Recherche et Stratégies de l’OMD et membre du Centre Norbert Elias EHESS-Marseille)
Apprivoiser ou s’approprier : l’effet des transformations des techniques de contrôle douaniers sur le fonctionnement des administrations et la nature des frontières

Contrôle « sans fil » : mise en œuvre, effets et réappropriation

Gabriel Popescu (geographer, assistant professor, Indiana University South Bend, USA)
Technologies de contrôle à distance et production d’espaces frontaliers topologiques

Dana Diminescu (sociologue, EC Telecom Paristech, directeur scientifique du programme TIC Migrations FMSH Paris)
Migrants connectés: « K29? » dans la sociologie des migrations

Christophe Bruno (artiste, commissaire d’exposition) & Samuel Tronçon (philosophe, Résurgences, Marseille)
ArtWar(e) – vers une application Facebook pour détecter les formes artistiques

Résumés

Amaël Cattaruzza (géographe, maître de conférences, École Saint Cyr Coëtquidan)
Contrôle des frontières : la tentation technologique

En octobre 2006 était votée au Congrès américain la Secure Fence Act qui prévoyait la construction d’une barrière d’environ 1 100 km pour séparer les Etats-Unis du Mexique. Son but était de lutter contre l’immigration clandestine, le trafic de drogue et le terrorisme, en mettant en place une « surveillance systématique des frontières internationales terrestres et maritimes des Etats-Unis par l’usage plus efficace des personnels et de technologies, telles que les drones, senseurs sismiques, satellites, radars et caméras » (Secure Fence Act, Section 2). L’usage de technologies de surveillance apparaît donc ici comme l’un des éléments clefs du dispositif sécuritaire, car il permettrait une surveillance systématique et totale de la zone concernée, et semblerait donc apporter une réponse adaptée à l’incertitude et à l’imprévisibilité des flux illégaux. Quelques années auparavant la mise en place de smart borders avait permis l’adoption de technologies d’identifications des marchandises (usage de puces électroniques) et des personnes (contrôle biométriques, usage de cartes à puce contenant des données personnelles, etc.). L’exemple américain est loin d’être exceptionnel et l’usage des nouvelles technologies dans le domaine de la surveillance et du contrôle des flux aux frontières se généralise de nos jours. De tels procédés se retrouvent entre autres aux frontières de l’Espace Schengen. Cette intervention propose donc de dresser un état des lieux de l’usage des technologies pour le contrôle des frontières et de s’interroger sur la manière dont cet usage modifie la nature du phénomène frontalier. A travers l’outil technologique, ne voyons nous pas apparaître cet « ubiquituous border », frontière omniprésente, que décrit Stephen Graham, pour lequel le territoire urbain devient en lui-même un des multiples lieu de contrôle de la frontière ?

Mariya Polner (political scientist, research analyst, WCO Research and Strategies Unit)
Technologies de contrôle aux frontières: tendances et formes de développement

In a globalised world where interconnectedness and integration are key dynamics influencing economic growth and social development, policymakers are increasingly realizing the need for accelerated border management regulatory reform to reduce unnecessary barriers and burdens on trade. However, the fruits of globalization are used not only by legal businesses, but also by illegal traders. Therefore, border agencies face a serious challenge of balancing security and trade facilitation. The World Customs Organization (WCO) has developed a set of instruments in order to assist Customs Administrations in promoting the balance between the two, and technology plays a pivotal role striving for this objective. Deployment of technology, however, has never been and will never be a “silver bullet” to solve all public policy objectives.  This presentation will start with discussing the changing environment in which border agencies operate, with a focus on the notion of ‘border’ and its changing meaning over time. After the overview of WCO instruments we will look into different kinds of technologies that are currently in use, as well as those that are now being developed. We will also discuss issues pertaining to the operationalisation of technologies, as they become vital for any agency that considers using them. Finally, we will discuss critical aspects of technology development which would allow it to remain an indispensable tool in the hands of Customs.

Philippe Bonditti (politologue, professeur assistant, IRI/PUC-Rio, Rio de Janeiro, Brésil et chercheur associé au CERI-Sciences Po Paris, France)
Flux et frontières, « Technologisation » des contrôles et traçabilité

Voilà près de 20 ans que la lutte contre le « terrorisme » et autres phénomènes transnationaux a replacé la sécurité des frontières au cœur des problématiques dites de sécurité et de défense. Un peu partout dans le monde, les programmes de développement de smart borders se multiplient. Pourtant, loin de renforcer les frontières, leur technologisation contribue à brouiller l’image du monde géopolitique, nous rappelant que le renforcement du contrôle aux frontières ne vise pas tant les frontières en elles-mêmes que les flux susceptibles de les traverser. Ces contrôles – que l’on dit communément « aux frontières » – sont  en fait réalisés en des points bien spécifiques (checkpoints) qui ne correspondent que très rarement à ceux qui forment ces lignes aux moyens desquelles nous représentons la frontière sur les cartes du monde géopolitique. Ils sont en outre réalisés bien en amont de « l’entrée en mobilité » au moyen d’un régime déterritorialisé de contrôle des flux que nous nous proposons d’explorer plus avant dans cette présentation en nous appuyant plus spécifiquement sur le cas des Etats-Unis, et plus marginalement de l’Europe. Il s’agira de mettre en évidence la logique de mise en réseau des appareils de sécurité, la manière dont elle influe sur les pratiques contemporaines de frontiérisation, et l’avènement de la traçabilité comme technique majeure de la gouvernementalité contemporaine.

Sylviane Pascal (Security & Europe Defence Business Development Manager ONERA – The French Aerospace Lab)
Le programme Talos : enjeux et perspective de l’usage de robots terrestres aux frontières

Le projet TALOS (Transportable and Autonomous Land bOrder Surveillance system – www.talos-border.eu) est un projet financé par la Commission européenne (7ème Programme Cadre, thème Sécurité 2008 – 2012) dont l’objectif est de valider le concept d’un système de surveillance des frontières terrestres européennes qui fait largement appel à des équipements robotisés (robots terrestres, drones et tours d’observation) contrôlés depuis un centre de commandement transportable. TALOS doit permettre de traiter le problème de la surveillance de vastes zones frontalières, reconnu par la Commission Européenne comme étant un point crucial de la mission de sécurité des frontières. Le but de TALOS est d’aider à la détection, la poursuite et l’appréhension des personnes essayant de traverser la frontière hors des points de passage autorisés. Pour répondre aux besoins variés liés à la grande diversité des zones frontalières de l’Union européenne, le système de surveillance doit être adaptable à la configuration de terrain, transportable et d’un coût acceptable.

Noel Sharkey (artificial intelligence and robotics, professor, University of Sheffield)
À la limite du ridicule: contrôler nos mouvements à partir du ciel

Plans to automate killing by robot have been a prominent feature of most US forces’ roadmaps since 2004. The idea is to have a staged move from man-in-the-loop to man-on-the-loop to full autonomy. While this may create considerable military advantages it raises ethical concerns with regard to potential breaches of International Humanitarian Law. Moreover, we are already seeing these new technologies being deployed at borders in countries such as US, Latin, America, South Korea and Israel. Drone technology alone has proliferated to more than 51 countries and police forces are beginning to use it routinely. The talk will discuss the development of the technology into the near future as it becomes more autonomous and explore the ethical dimensions.

Daniel Kopecky (lieutenant-colonel, chef du département relations internationales aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan)
Technologies aux frontières : les limites du système. Retour d’expérience de mission d’expertise en Asie du sud-est

Fondé sur un retour d’expérience de mission d’expertise auprès de l’Armée Royale Thaïe et de dossiers techniques d’étude réalisés au profit d’industriels français, l’intervenant concentrera son exposé sur deux zones spécifiques en Asie du sud-est : la frontière nord de la Thaïlande (Birmanie) et la frontière sud de la Malaisie (île de Bornéo). Après un descriptif des enjeux spécifiques de la zone, l’exposé présentera ensuite les divers systèmes et moyens techniques envisagés pour assurer la sécurité frontalière des pays concernés par le développement des capacités technologiques en soulignant les contraintes et les enjeux notamment humains.

Thomas Cantens (administrateur à l’Unité Recherche et Stratégies de l’OMD et membre du Centre Norbert Elias EHESS-Marseille)
Apprivoiser ou s’approprier : l’effet des transformations des techniques de contrôle douaniers sur le fonctionnement des administrations et la nature des frontières

A partir de quelques exemples de technologies introduites dans les douanes en Afrique sub-saharienne et d’une enquête ethnographique menée dans une douane africaine en réforme pendant plus de 4 années, la communication développera trois idées principales. Tout d’abord, terrains de réforme influencées par l’extérieur, les administrations douanières africaines utilisent des technologies aussi avancées, parfois plus innovants que les douanes d’autres continents. Ensuite, ces technologies sont « apprivoisées » : bousculant les ordres elles génèrent de nouveaux rapports d’autorité et de pouvoir dans les administrations et les professions dites partenaires. Enfin, ces technologies sont des vecteurs politiques qui transforment les rapports entre Etats sans toujours avoir les effets attendus.

Gabriel Popescu (geographer, assistant professor, Indiana University South Bend, USA)
Technologies de contrôle à distance et production d’espaces frontaliers topologiques

Mobility imperatives under globalization are profoundly altering borders’ relationship to space. Risk management strategies associated with the quest to securitize transnational mobility have triggered a technological race to embed borders into all kinds of flows in order for the border to be able to travel with the flow and be ready to be performed whenever circumstances require. With the help of technologies such as Radio Frequency Identification (RFID) borders are disembedded from their local contexts, projected at distance, and then re-embedded anywhere in the state territory. Such articulation of borders changes the way movement through space is organized and how people and places come into contact. This “portal-like” logic of border geography brings people and places together by connecting them directly across space, unlike modern border territoriality that connects them via contiguous state territories. This situation opens up the entire space of the globe to bordering processes, thus accelerating the proliferation of borders and multiplying the actors involved in their establishment. The implications for society of such novel border spatiality are paramount. It is vital to understand how is democratic participation to be spatially reorganized to assure border governance remains in the public domain.

Dana Diminescu (sociologue, EC Telecom Paristech, directeur scientifique du programme TIC Migrations FMSH Paris)
Migrants connectés: « K29? » dans la sociologie des migrations

According to the Algerian sociologist Abdelmalek Sayad, the process of migration is marked by a double absence, as migrants are uprooted from their ‘home’ societies and they fail to ‘integrate’ in their countries of emigration. In this perspective, the migrant experience is characterized by a permanent break with the places that link the individual with his or her native environment as well as by the confrontation with a world that thinks and lives differently. Current understandings of the experience of migration, whether they refer to issues of cultural identity of integration, refer to and focus on a series of breaks and oppositions. These are constructed as inherent to migrants’ fate and are constantly used in theoretical reflections on populations on the move. For instance, migrants are described according to binary oppositions such as: mobile/immobile, neither there nor here, absent/present, central/peripheral, and so forth. This understanding of people’s movements is an historical and sociological simplification and does account for the way the world was transformed by the onset of generalized mobility and by the spread unprecedentedly complex means of communication. Today, the definition of the migrant based on different forms of rupture considered to be fundamental and radical is in trouble. Alternative organizing principles emerge, as mobility and connectivity mark the experiences of contemporary migrants. In this talk, my aim is to analyse the different and interlinked forms of rootedness, displacement and connectedness that are experienced by contemporary migrants. Contemporary sociological studies of migration must focus on issues of connectedness and of presence. These days it is increasingly rare to see migration as a movement between two distinct communities, belonging to separated places that are characterized by independent  systems of social relations. On the contrary, it is more and more common for migrants to maintain distant relations that are similar to relations of proximity and to be able to activate them remotely on adaily basis. This mediated bond — via telephone, email, or Skype- — makes it easier than before to stay close to one’s family, to others,  to what is happening at home or elsewhere. The development of communication practices —from simple ‘conversational’ methods where communication compensates for absence, to ‘connected’ modes where the services maintain a form of continuous presence in spite of the distance — has produced the most important change in migrants’ lives. Migratory practices (in particular the activation of networks, remote organization, and the monitoring of movements), the way  mobility is experienced and implicitly the construction of new  “home  territories” have been thoroughly transformed.

Christophe Bruno (artiste, commissaire d’exposition) & Samuel Tronçon (philosophe, Résurgences, Marseille)
ArtWar(e) – vers une application Facebook pour détecter les formes artistiques

ArtWar(e) est une plate-forme de «gestion des risques artistiques » et de « curating assisté par ordinateur ». Un de ses principaux objectifs est de visualiser dans les réseaux sociaux, des vagues d’émergence, d’obsolescence, et des phénomènes d’import-export de concepts artistiques, comme de repérer des formats. Contrairement à l’histoire de l’art qui nomme les formes une fois qu’elles sont devenues identifiables et formatées, ArtWar(e) cherche à détecter ces tendances au moment de leur émergence, alors qu’elles n’ont encore aucun nom et qu’elles n’ont pas reçu le label d’art. Il s’agit ici à la fois de construire, mais également de mettre en question un dispositif quelque peu kafkaïen. En effet, ArtWar(e) utilise les outils de surveillance les plus puissants jamais développés, comme Facebook, afin de détecter d’infimes soubresauts de la vie sociale des formes. Nous présenterons la méthodologie ainsi que les principes de l’application Facebook en cours de développement.

Partenariats

IMéRA (Aix-Marseille Université), Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, Laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Institut de Recherche et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman (IREMAM, CNRS-AMU), Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (LAMES, CNRS-AMU), Aix-Marseille Université, Réseau Français des Instituts d’Etudes Avancées (RFIEA), Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, CNRS